La séparation à l oeuvre
283 pages
Français

La séparation à l'oeuvre , livre ebook

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283 pages
Français

Description

La chute de l'Homme et la descente aux enfers - pour rester dans le contexte mythique d'Orphée et Eurydice - fait jaillir le mystère du déchirement et de la séparation dans tous ses états. Que faut-il entendre par "séparation" ? Si le champ que ce terme désigne est relativement aisé à percevoir, il est beaucoup moins simple d'en déterminer les limites. D'un auteur à l'autre, d'une pensée à l'autre, celles-ci subissent de notables déplacements. En étudiant la place que la séparation tient dans la littérature et l'importance qui lui est accordée au regard d'une variété de figures et d'expressions, ce livre se propose de saisir les raisons et les enjeux de ces déplacements.

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Informations

Publié par
Date de parution 02 juillet 2010
Nombre de lectures 263
EAN13 9782296262201
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

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Extrait

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© L’Harmattan, 2010 57, rue de l’EcolePolytechnique, 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 9782296124585 EAN : 9782296124585
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LiminairesL’objectif du colloqueLa Séparation, organisé par le Département de français de l’Institut Supérieur des Langues de Gabès, les 5, 6 et 7 mars 2009 était de faire le point sur une question appartenant à différents domaines cognitifs et discursifs (littéraires, historiques, scientifiques…), et plus largement philosophiques : celui de la représentation de la séparation à diverses périodes de notre histoire. L’idée et la réalisation de ce colloque sont le fruit d’une collaboration entre enseignants-chercheurs en littérature de l’Université de Gabès et de l’Université de Sfax, qui ont ainsi permis la tenue et le bon déroulement de ces rencontres scientifiques Nous tenons à remercier, en particulier, Christophe Schaeffer qui a accepté d’assurer l’ouverture du colloque et qui a réussi, malgré la difficulté de l’entreprise, à faire la synthèse des communications présentées. Nos remerciements s’adressent également à tous ceux qui ont contribué à la réussite de ce colloque, principalement tous les orateurs et ceux qui, nombreux, sont venus les écouter et les applaudir. Il nous faut également mentionner Nicolas Lombart, Maya Boutaghou, Didier Coste et Mohamed Khlifi, que leurs différents engagements avaient malheureusement retenus loin de nous au moment du colloque, mais qui avaient participé activement à l’élaboration de l’argumentaire et du programme définitif, nous assurant constamment leurs soutiens, et nous aidant à maintes reprises, par leurs conseils. Que tous soient ici remerciés. En me confiant le soin d’organiser ce colloque que l’on souhaitait interdisciplinaire, notre intention n’était évidemment pas de faire un panorama des diverses approches critiques, encore moins d’établir un quelconque bilan, mais, plus modestement, de nous interroger sur la place à accorder à la notion de « séparation ». Les organisateurs ont choisi d’ouvrir largement ce colloque à des communications portant sur diverses périodes, afin de voir en quoi la représentation de la séparation qui en est proposée dans les arts, la littérature, l’Histoire…, se trouve généralement sous-tendue par une visée idéologique, ou, tout au moins, par une vision qui contribue à faire émerger telle ou telle image privilégiée de la séparation. Les vingt communications qui constituent la matière de ce livre, n’ont pas la prétention de couvrir l’immensité et la complexité de la notion parcourue par plusieurs spécialistes qui entrent dans le jeu de conceptualisations, des théorisations et des problématiques, soit au sein d’une discipline aux contours bien dessinés, soit par le moyen de méthodologies parallèles de plusieurs disciplines. Elles n’en constituent pas moins d’utiles échantillons de réflexions, qui prennent comme support les plus belles pages de la littérature, couvrant une e période allant du Moyen-Age au XX siècle. Notre réflexion ne prétend pas à
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l’exhaustivité, et nous avons conscience de n’avoir déchiffré qu’une petite parcelle de cette notion dont les littéraires ont massivement occupé les contours. Pour conclure cette brève introduction, il semble important de souligner la convergence de ces études, par-delà la diversité des domaines de recherche. Cette diversité des communications proposées a permis d’interroger différents usages de cette notion, principalement en littérature, et d’en extraire les spécificités.  Le coordinateur du colloque  KarimBEN KHAMSA
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Les enjeux de la séparation 1 ChristopheSCHAEFFER Réfléchir à laséparationau paradoxe du mène lienengendre. La qu’elle séparation relie, crée un « nous » au sens d’un collectif, d’un pluralisme vivant. Ce colloque en représente à la fois la possibilité et le témoignage : réunir sur le sujet autant de pensées et de vies est une manière, en littérature comme ailleurs, de considérer que la séparation ne sépare pas ou, en tout cas, qu’elle sépare moins qu’elle ne réunit. Ce constat, naïf au premier abord, pourrait en réalité cacher une vérité métaphysique profonde, à savoir que la séparation serait une illusion. En Occident, telle est la position de Parménide qui, sans doute le premier dans l’Histoire des idées, refuse la séparation ontologique puisque, pour ce philosophe, seul l’Être est, par opposition au Non-Être qui n’est pas (fragment II). La Déesse révèle en effet au philosophe que le chemin par lequel il est parvenu jusqu’à elle se trouve au-delà de tous les chemins des Hommes chez qui ne se trouve aucune conviction vraie. Ce chemin est le chemin de la Vérité qui est celui de l’Être. Tout ce qui s’en écarte est errance pure, illusion trompeuse qui mène sur le chemin du Non-Être. Nous n’entrerons pas ici dans une discussion avec ce qui dans la pensée parménidienne entrerait en résonance avec une philosophie bouddhiste, car il nous faudrait développer trop longuement un sujet qui ne concerne pas directement les perspectives de ce colloque, mais gardons tout de même à l’esprit que, du côté de l’Orient (pour schématiser ainsi et sans doute de façon trop simpliste), la séparation entre l’Être et le Non-Être n’a pas davantage de légitimité. Il s’agit là encore d’une erreur de jugement produite notamment par une perception dualiste de la Réalité (sujet/objet). La nature véritable de ce qui « est » serait à rechercher du côté de la vacuité qui, en terme de non-séparation, pourrait se traduire en ces termes :« Vous ne pouvez pas séparer une zone de 2 lumière d’une zone d’ombre, elles sont trop proches l’une de l’autre ».Si l’on revient maintenant à Parménide et à cette philosophie qui refuserait la séparation ontologique, quelle serait celle qui l’accepterait ou plus exactement qui lui donnerait sens ? 1 Philosophe. Cette présentation s’inspire de l’émission « Philosophie » surARTEoù il fut l’invité en novembre 2009. Voir l’émission :http://www.arte.tv/fr/2235124.htmlSa thèse en doctorat porte sur la notion en question :Recherches sur la séparation onto-chrono-cosmologique, Lille, ANRT, 2008. En tant que spécialiste, il a écrit plusieurs articles et livres sur le sujet. Voir notammentDe la séparation, Paris, l’Harmattan, 2007. 2  Tulkou Ogyen Rinpotché cité par Yongey Mingyour Rinpotché, inBonheur de la méditation, Paris, Fayard, 2007, p. 169.
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La réponse à cette question dépend de la différence que l’on peut faire, non pas entre l’Être et le Non-Être, mais entre l’Être et l’Existence. Car, si du point de vue de la pensée pure, analytique, il est peut-être légitime de refuser la séparation ontologique au nom d’une opération logico-discursive, intellectuelle et réfléchissante (l’Être s’oppose au Non-Être logiquement, par voie de contradiction), il en est autrement dès que l’on prend en compte l’Existence. La raison tient à ceci : le termeexistencese rapporte d’emblée à la séparation – le verbeex(s)isto,ex(s)isteresortir de, étymologiquement « naître de, signifie provenir de ». Si, au figuré,ex(s)isterese manifester, peut être traduit par « paraître », dans tous les cas, le préfixe est pris dans le sens d’une sortie, d’un au-dehors qui marque l’origine, la provenance externe de ce qui est. Autrement dit, l’idée de séparation est déjà présente dans le simple fait de vivre… Du point de vue de l’Existence et non de l’Être conceptuel, la séparation prend alors une tout autre dimension à partir de ce questionnement sur l’origine, sur cette idée de provenance. La séparation qui signifie « mettre à part, distinguer », composé dese-préfixe marquant précisément la séparation et de pararedans signifiant « préparer, arranger », vient interroger ce qui, l’Existence, se rapporte au commencement et à la fin de la vie. La séparation prend donc forme au cœur d’un récit qui, fondamentalement, raconte l’histoire de l’origine et du devenir de l’Existence entraînée dans la temporalité. Commençons donc par le commencement de ce récit. Séparation et origine Au commencement était la séparation… Condition de vie au sens d’un processus primordial, la séparation se trouve à l’origine de la totalité du vivant, de son évolution, de son développement à des niveaux complexes et supérieurs d’organisation : de la biologie à la cosmologie en passant par l’Homme, tout n’est qu’une histoire positive et nécessaire de séparation. Cette séparation a non seulement permis à l’être humain d’« exister » comme individu, né physiquement d’une mère et conçu par deux êtres – on peut d’ailleurs rappeler ici l’étymologie du motséparationavec cette racineparare, à partir de quoi s’est forgé le motparent, qui signifie « engendrer, faire naître, procréer » –, mais elle a également créé les conditions de son individuation au sens moderne du terme, c’est-à-dire sa conscience. Cette individuation – je suis un et différent de tout autre par l’acte même où je prends conscience que je suis – est en quelque sorte l’expérience d’un sevrage (lesede-paration a d’ailleurs connu une évolution phonétique qui a e abouti àsevrer,au sens de privation, à partir du XIV siècle). Ce sevrage n’est pas seulement rupture de l’enfant avec l’alimentation par le sein maternel mais, plus symboliquement, l’acquisition d’une conscience d’un soi et d’une
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