Le crack : les cailloux de l enfer
149 pages
Français

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Le crack : les cailloux de l'enfer , livre ebook

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Description

«Toute ma vie se résumait dans ces deux valises noires, mais celle que je portais en moi était bien plus chargée. Elle renfermait toute ma honte, ma culpabilité, ma colère, ma haine, ma souffrance, ma peine et tout mon désespoir. Vingt et un ans de consommation, d'errance, d'échecs, d'une immense perte de temps, vingt et un ans d'irresponsabilité, de mensonge et de manipulation. [...]
J'avais de graves problèmes de santé. Je m'étais malmenée durant toutes ces années. Ma maigreur me rendait presque invisible et ma démence envahissait le peu d'espace que j'occupais. Je n'avais jamais eu autant de tics. Mes yeux étaient grands ouverts en permanence, même si je n'avais pas eu ma dose, et mon regard halluciné donnait froid dans le dos.»

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 octobre 2013
Nombre de lectures 28
EAN13 9782890926301
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Conception de la couverture : Christian Campana
Photographie de la couverture : Shutterstock
 
Tous droits réservés
©2013, BÉLIVEAU Éditeur
 
Dépôt légal : 3 e trimestre 2013
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque et Archives Canada
 
ISBN 978-2-89 092-576-2

www.beliveauediteur.com
admin@beliveauediteur.com
 
Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC –  www.sodec.gouv.qc.ca .
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.
Reproduire une partie quelconque de ce livre sans l’autorisation de la maison d’édition est illégal. Toute reproduction de cette publication, par quelque procédé que ce soit, sera considérée comme une violation du copyright.
 
À tous ceux
qui souffrent encore
 

N OTE  :
L’éditeur ne se tient aucunement responsable des propos tenus dans cet ouvrage. Seules les auteures en assument l’entière responsabilité. De plus, certains noms de personnes ont été changés afin d’en assurer la confidentialité.
Hommage
à une héroïne

Agnès, mon amie, que j’avais connue, le croyais-je, m’est revenue douze ans plus tard. Le hasard l’a ramenée dans ma viegrâce à un contact sur les médias sociaux. Voilà que je retrouvaiscette femme si intense, flamboyante, si chaleureuse et généreuse avec laquelle j’avais partagé des moments précieux.Comme la vie nous amène sur des voies différentes, nous nousétions perdues de vue.
Quelle joie de remettre les pendules à l’heure ! Au téléphone, les nouvelles se bousculent, avec la frénésie de tout direen quelques minutes, traduisant l’intérêt que nous portons l’unepour l’autre et la crainte que le lien ne se rompe une autre fois.Elle me parle, notamment, de son projet de livre. Et jem’empresse de lui demander si elle veut bien que je lise sonmanuscrit. Grâce à la magie d’Internet, à peine 24 heures plustard, j’ai tout lu, de la première à la dernière page, tellement jesuis happée par son histoire, sa propre histoire, relevant parfoisd’un film d’horreur, mais vraie, rédigée d’un seul jet, dansl’urgence de tout dire et de partager son expérience de toxicomane pour sauver d’autres humains en danger.
En rétrospective, je me rends compte que je savais si peu dechoses sur elle. Bien sûr, elle me parlait de son présent d’alors, vers 1998, quand nous nous étions rencontrées lors du vernissage d’un peintre haïtien. Elle m’avait parlé de ses expositionsdans une galerie de la Martinique, de ses enfants qui vivaient là-bas, de ses exploits artistiques. Elle avait pris part à plusieursévénements, avait fait du body-painting dans son ile et ici. Par lasuite, j’avais pu constater son talent indéniable qui s’exprimaiten toiles immenses sur les murs de son appartement.
C’est en lisant son manuscrit que j’ai découvert la vraie Agnès, celle qui avait éludé volontairement certains chapitres desa vie. Par respect et par discrétion, je n’avais pas posé de questions. Et là, au fil des pages du manuscrit qu’elle m’avait confié,je comprenais ce qui avait forgé cette femme follement amoureuse de la vie.
Chacun son métier. Elle est peintre, moi, comme journalisteet auteure, je travaille avec les mots et leurs nuances. Ce qui, audébut, s’est présenté comme un simple travail de correction s’esttransformé en un véritable travail d’écriture. Elle écrit commeelle peint. À grands coups de pinceaux, dans une palette crue decouleurs vives. Moi, j’interroge, je traduis, je peaufine, je précise, et j’ai été la première lectrice émue, bouleversée, fascinée.Par l’intégrité et la vérité de son témoignage, j’ai compris. J’aisaisi toutes ces zones d’ombre qui recelaient alors tant desecrets, qui occultaient tant de blessures, elle qui maitrise si bienle trompe-l’œil sur ses toiles.
J’admirais l’artiste, la femme suscite admiration par sa forcede caractère. Sans jamais vouloir dénaturer son langage direct,au contraire, j’ai voulu le respecter et le mettre en valeur,comme un joaillier en présence d’une pierre précieuse. C’estainsi que les dialogues qui émaillent certains chapitres dans lalangue créole sont transcrits intégralement, avec la traductionpour illustrer la réalité des épisodes douloureux… Dans notresociété multiculturelle, comme les livres traversent les frontières, chacun s’y reconnaitra, avec les particularités linguistiques, qu’elles soient québécoises, antillaises ou européennes.
J’ai parfois dit à ma fille que l’on n’envoie pas un petit soldattout seul à la guerre, quand je voulais l’assurer que j’étais à sescôtés pour l’aider à surmonter des épreuves. Pour moi, AgnèsReynaud est une héroïne qui a mené seule des combats et remporté des guerres auxquelles peu d’êtres humains ont été confrontés. Agnès est une battante, une survivante, et j’estime queje fais partie des privilégiés, car j’ai la chance de pouvoir collaborer à la révélation de cette femme, grandeur nature.
Lyne Rouillé
C HAPITRE  1
Maudit crack  !

« Allume une cigarette pour faire la cendre, Agnès, je te prépare la pipe », me dit Yves, un Martiniquais que je venais à peine de rencontrer.
J’allume donc la Camel tout en surveillant chacun de ses gestes. Je transpire à grosses gouttes et je veux que ce rituel s’achève. Mon ventre me fait mal. Je n’ai pas fumé depuis quelques heures et le fait de voir le morceau de crack posé sur la table me met dans tous mes états. Je me fous pas mal de la personne avec qui je me trouve, pourquoi il m’offre cette taffe gratuitement et quelles sont ses intentions réelles. Ce qui compte en cet instant, c’est ce que je vais me mettre dans la tête dans cinq minutes interminables.
« T’en veux une petite ou une grosse ? me dit-il en souriant.
– Une très grosse…! »
Je sais qu’il joue avec mes nerfs. Il voit la sueur dégouliner sur mon visage. Alors il prend son temps… Exaspérée, j’ai envie de lui dire de me laisser préparer la pipe moi-même. Ce jeu, je le connais par cœur. Le pouvoir de celui qui a la dope et la soumission de celui qui doit attendre. Le temps qui s’arrête devient silence aeternam . Enfin il pose délicatement le gros morceau de crack sur la cendre et me tend la pipe. Mes yeux ne voient plus que ce caillou beige scintillant dans la pénombre de la pièce. D’un geste assuré, je saisis mon briquet et passe la flamme au- dessus pour le fondre légèrement. Il se mélange à la cendre et là, je sais qu’il ne risque plus de tomber. D’un coup, sans regarder Yves, je prends ma taffe, les yeux fermés, heureuse d’entendre le crépitement du crack qui se consume.
«  BOUDOUMMMMM  »… crié-je après avoir avalé la fumée.
Tout d’un coup, j’entends les sons en trois dimensions : les bruits de dehors envahissent la pièce, exacerbant tous mes sens. La chaleur dans ma tête prouve que ce que je viens de fumer est de bonne qualité et qu’il a bien fait le travail.
«  Aye bon Dié, fout taf la té bon!  » (Mon Dieu, que la taffe était bonne !)
Yves sourit et me reprend la pipe pour s’en faire une à son tour. Je trouve qu’il a été gentil de me laisser en prendre une en premier. En général, le jeu veut que celui qui a la drogue fume d’abord, histoire d’aiguiser l’excitation de l’autre. Yves plane depuis le réveil. Il a suffisamment de dope sur lui pour qu’on puisse passer plusieurs heures ensemble. Et moi, je suis toujours disponible pour fumer du crack à volonté. Même si je sais qu’il y aura probablement un prix à payer, je suis au neutre. Quand les problèmes surgiront avec lui, je saurai les régler comme j’ai toujours su le faire. Je ne suis plus une novice dans ce milieu et je n’ai peur de personne. Je sais me défendre, crier, me battre, courir, me cacher et me taire quand il le faut. Les taffes se succèdent et je perds encore une fois la notion du temps. Mon esprit embrumé s’enfonce lentement dans les ténèbres. Avec Yves, nous ne communiquons plus que par gestes.
Par moments, je me demande quand je serai capable d’arrêter ce train infernal en imaginant le bonheur que ce serait de vivre sans me défoncer. Ne plus dépendre de ce caillou et pouvoir être enfin dans la lumière, libre. Un jour j’y arriverai. D’ici là, je reprends la pipe et la mets à ma bouche pour la énième fois…

Une voix me sort de ma torpeur… Je me retrouve en deux secondes projetée dans un autre lieu, une autre vie. Je regarde autour de moi et je vois tous ces gens qui écoutent attentivement parler quelqu’un. Je r

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