LES GRANDES FIGURES HISTORIQUES ET LEURS FICTIONS entre Orient et Occident

Jouda Sellami, Samir Marzouki

Description

Les onze contributions de ce volume analysent les modalités de l'inscription de grandes figures historiques ou pseudo-historiques dans l'œuvre littéraire. Issus de la grande histoire du Moyen Âge et du XVIe siècle, ces hauts personnages, d'Orient et d'Occident, font l'objet de représentations diverses, largement tributaires des contextes sociopolitique, littéraire et idéologique qui les mettent en récit, du Moyen Âge à nos jours. La conception du personnage historique de haut rang, son évolution et son transfert d'une œuvre à une autre peuvent passer ainsi à travers les multiples prismes fictionnel, panégyrique ou légendaire de la représentation littéraire à la construction mythique.

Sujets

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• Civilisation
• Moyen Age
• Littérature

Informations

• Publié par: Editions Déméter
• Date de parution: 01 novembre 2023
• Nombre de lectures: 2
• EAN13: 9789973706652
• Langue: Français

Extrait

Les grandes figures historiques et leurs fictions entre Orient et Occident e (Moyen Âge–XVI siècle)

Des mêmes auteurs Pubîcatîons reatîves au Moyen Âge et au XVIe sîèce Samr Marzouk,Lîttérature médîévae, eRoman de Renart(brances I, Ia et Ib), Etudes de ttrature, angue et csaton, o. ïïï, Pubcatons de ’ENS, Tuns, 18. Samr Marzouk,Etude comparée de ’Enerde Dante et de ’Eptre du Pardond’Abu-- ‘Aâ a-Ma’arrï,Centre de pubcaton unerstare, Tuns, 1, 2e dton, 2017.

Jouda Seam,Espace nature, espace urbaîn, espace sacré. Ecrîture et perceptîon de ’espace orîenta dans e texte épîque aux XIIe et XIIIe sîèces (e Sge de Barbastre, a Prse de Cordres et de Sebe, a Canson d’Antoce et a Canson de Jrusaem), Tuns, Pubcatons de a Facut des ettres, des Arts et des Humants de a Manouba, 2015.

D’une rîve à ’autre.Actes du cooque nternatona (13 et 14 ar 2006) organs à a Facut des ettres de a Manouba par e Groupe d’ètude sur e Moyen Âge et e Sezme (GèMAS) et e Centre d’ètude et de Recerce èdter-ïnterprter (CèRèDï, Unerst de Rouen), tudes runes par Kdja Ajroud et Jouda Seam, Tuns, Pubcatons de a Facut des ettres, des Arts et des Humants de a Manouba, 2011.

La courtoîsîe dans a îttérature au Moyen Âge et au XVIe sîèce (Journe d’tude, ar 2011), tudes runes par Kdja Baec-Ajroud et Jouda Seam, Pubcatons de a Facut des ettres, des Arts et des Humants de a Manouba, 2017.

Vîeîesse, maadîe et mort dans a îttérature du Moyen Âge et de a Renaîssance(Journe scentîque de ’UR « ttrature mdae, moderne et contemporane et ddactque du ranças », dcembre 2014), tudes runes par Samr Marzouk et Jouda Seam, Pubcatons de a Facut des ettres, des Arts et des Humants de a Manouba, 2018.

Premîer tîrage

© Déméter 2023

ïSBN : 73-706-65-2

ètudes runes par Samr Marzouk et Jouda Seam

LES GRANDES FïGURES HïSTORïQUES ET LEURS FïCTïONS entre Orîent et Occîdent (Moyen Âge-XVïe s.)

aboratore de recerce “Anayse Tetuee, Traducton, Communcaton” Unerst de a Manouba Dmter

ïntroducton La grande Igure hîstorîque : entre Ictîonnalîsatîon et mythîIcatîon

Jouda Sellamî Unerst de a Manouba (ATTC-R18ES12)

a reprsentaton du personnage storque dans ’œure ttrare s’nscrt dans a rLeon, depus ongtemps entame, sur a daectque de ’store et de a îcton. a permabt et ’nterrence entre tete et store ne peuent qu’engendrer un rct ayant un potente nature 1 de cangement : « produt,  produt à son tour. » ï est dent que e deenr d’un personnage storque au sen d’un tete est une ecture, une appropraton, une son subjecte de cette îgure, modue, remoue, paros transîgure par e regard de ceu qu en at e centre d’une craton ttrare par e bas d’une constructon progresse. D’où a surprenante aIrmaton d’Aeandre Dumas dans sesMémoîres : « es storens oquent seuement de smpes antômes, tands que es romancers crent 2 des personnes en car et en os. » e personnage sort de’Hîstoîre et ntgrantune îstoîreserat aors une matre erge, « une orme de que 3 ennent rempr dfrents prdcats » comme e dînt Pppe Hamon, ou putôt une orme de, un rceptace, et par a sute un prtete pus ou mons pertnent par e at d’un orzon d’attente somme toute brou car 1 Pau Zumtor,Essaî de poétîque médîévae(172), Ponts, « Essas », p. 44. 2 Ct par Umberto Eco dans « Queques commentares sur es personnages de îcton »,SocîoogîeS, consut en gne. Dossers, ms en gne e 01 jun 2010, consut e 03 noembre 2022. UR : ttp://journas.openedton.org/ 3 «Pour un statut smoogque du personnage»,Poétîque du récît, Pars, Seu, 177, p. 126. 5

epctement rrente. ’mage qu en ressort est en efet capabe de se dcner à ’nîn au gr de ders dessens renoyant en tout tat de cause, comme par efet de mror, à a rat soco-doogque qu a suscte. De auts personnages, qu par eur acton ont pu nLuencer e cours de ’store, ont amen es crans de derses poques à es ressuscter dans eurs crts contrbuant ans à une epcaton du monde tantôt regeuse et mytque, tantôt ratonaste. a manpuaton du matrau orgne « nobe », pus dans un onds storque ou pseudo-storque, assure non seuement e passage de ’store à a îcton mas auss, a pupart du temps, de ’store-îcton au myte. Dans sesMytoogîes, Roand Bartes dînt ce pnomne en termes d’emprunt et de resttuton : « e myte est une paroe oe et rendue. Seuement a paroe que ’on rapporte n’est 4 pus tout à at cee que ’on a drobe. » ï sembe que pus e genre ttrare qu abrte dsormas a îgure 5 storque est strotyp, pus e personnage perd en storct et en caractrstques propres. ï ncarne de pus en pus un type, tantôt aors, tantôt rabass. ï perd ans peu à peu son « dentt » pour s’ntgrer au î des poques et des genres dans une (d)constructon mytco-gendare compee. e processus peut crer es îatons es pus nrasembabes au îgures es pus nres, menant paros à de rtabes « nersons de a mmore » : à Goderoy de Bouon, Aou du Sant Spucre, qu a troqu sa couronne d’or contre une couronne d’pnes comme Jsus, est nent e gnage du Cygne dans e deume cyce pque de a crosade ; e sutan ayyoubde Saadn, dsormas rattac à a ame de Ponteu, est dot, dans un cyce pco-romanesque, d’une grand-mre crtenne et de toutes 6 es quats du ceaer courtos ; n’a-t-on pas gaement conert e ro mssonnare Sant ous à ’ïsam en ’dentîant au nrabe marabout 7 Sd Bou Sad ? Au Moyen Âge, c’est à partr de a cronque et de ’pope, souent

4 Pars, Seu, 157, p. 211. 5 Comme e prcse encore Pau Zumtor, « storct ne sgnîe pont ract. ’storct est e caractre de ce qu eut être cru : de ce que eut crore a communaut qu reçot e tete »,op. cît., p. 43. 6 Dans e cyce romanesque de Jean d’Aesnes (Xïïïe s.) 7 par eempe ’tude de Yann Potn, « Sant ous ’Arcan. Hstore d’une mmore Vor nerse »,Arîque et Hîstoîre, 2003/1, o. 1, Verder, p. 23-74. 6

ondes sur une structure bograpque, que nassent es îgures storco- gendares es pus popuares. Benot de Sante-Maure crt, à a sute de Wace qu’ rempace, sonHîstoîre des Ducs de Normandîepour rpondre à une commande d’Henr ïï Pantagenêt. Cette store oIcee, on d’être spontane, crte à a gore du tenant de a brante cour de ondres, porte son ot de contre-rts transormant es ducs de Normande en de goreu ros. De son côt, Caremagne deent e personnage centra d’une geste rançase naugure par aCanson deRoand. Pus tard, Ronsard cbrera Francus et sa descendance royae dans e même stye pque. Ans, une dramatsaton de ’store de grandes natons 8 passe essenteement par a conocaton des personnages carsmatques qu ’ont açonne comme e montre gaement a dramaturge du XVïe s. mas encore, pus systmatquement, cee du XVïïe sce, mettant ’accent  sur une son du monde qu se dgage des eçons de ’store . e prsent ourage, runssant es tudes de onze cerceurs, mdstes et sezmstes, se eut une rLeon synttque autour du type partcuer du personnage storque ustre. Qu’est-ce qu dstngue ce derner du personnage proprement îctonne ? Ne deent- pas personnage de îcton ds qu’ t domce dans une œure ttrare ? Son caractre ntabement dynamque ne ’ecut- pas dîntement de a spre storque ? a probmatque a t aborde dans a ttrature du Moyen Âge et de a Renassance et dans a ttrature et ’art contemporans mdastes. Ee s’est orente ers tros prncpau aes de rLeon : e passage de a cronque à a îcton, es modats des transerts ntertetues et ntergnrques et a rcepton entre projecton, dentîcaton et efet catartque. ’tude qu oure e recue est un a-et-ent entre ’poque mdae et a modernt accomp par eu Zneabdne Benassa qu nous a rems

8 Mounra Capoutot-Remad, « ’nddu d’ecepton dans e monde musuman Vor mdterranen à a în du Moyen Âge »,Méanges au Proesseur Domînîque Cevaîer, Acadme Tunsenne des Scences, des ettres et des Arts, Bet a-Hkma, 2006, p. 55-75.  e montre, par eempe, Hamd Hemad dans « De Comme La Mort d’Asdrubaa à Mort d’Annîba ou Z.J. MontLeury et h. Cornee, ecteurs de ’store de Cartage », dansL’Arîque au XVIIe sîèce. Mytes et réaîtés, dr. Aa Baccar, Bbo 17-14, Tübngen, Gunter Narr Verag, 2003, p. 271-282. 7

ce tete deu mos aant son dpart. ï y epose e en trot entre e sant ro etTunesoù  est mort et, seon a gende, serat enterr. a Tunse qu a mmortas e nom Sant ous en son terrtore, par a symboque cesson d’un terran pour ’dîcaton d’une catdrae majestueuse qu u est dde, est auss assoce à a mmore du ro capten dans a ttrature. Rutebeu, trs crtque à son gard, oque a terre sauage et sa « mae gent reno » ers aquee est part Sant ous.

Au orgnes de a ttrature rançase, aCanson de Roand cbre ’empereur carongen Caremagne. Samr Marzouk reent sur a queston souent dbattue par a crtque, « Canson de Roand ou canson de Caremagne ? ». ï tude e patent processus de mytîcaton de a îgure du ros qu ’nsttue comme une îgure de premer pan, auss mrtante et carsmatque que cee du personnage ponyme. A côt de ses attrbuts roques, Caremagne consere une dmenson umane asant de u un personnage sensbe et toucant. ’auteur anayse auss e substrat storque, subert par a îcton et ra par e myte, et montre que e personnage se at ’ncarnaton d’une dooge propre à ’poque des crosades, asant de a utte contre e ma son credo.

Cette ene pque se tradut d’une manre anaogue dans un corpus storque, cette os, que Mce Guret-aert eamne en se ocasant sur une autre îgure marquante de a Normande des conqurants qu s’y prête partcurement, e redoutabe Robert Guscard. ’auteure engage une subte anayse des mots pques, comme e panorama pque ou e gab, nsrs dans des œures dates de a même poque que es premres cansons de geste, et rsere une tude dtae au rcts de combats qu conîrment une nspraton pque pus ou mons prgnante, seon es œures. Dans un te cadre, Robert Guscard prend natureement es trats d’un aut personnage, empruntant es caractrstques des ros des grandes gestes du Xïïe sce.

aurence Matey-Mae anayse a constructon mytque d’un autre Normand cbre, Guaume e Conqurant, dans eRoman de Roude Wace (în Xïïe s.). Ee appque mtodquement e scma de a bogrape roque, conçu par Joann Georg on Han, à cette cronque. ’tude montre que es quatre pases de a e de Guaume, correspondant au myte ttrare, sent à gorîer e personnage qu se rapproce en cea

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du ros gendare Artur, dont Wace a dessn es trats dans eRoman de Brut. a doube dîcaton mytque s’nscrt dans e projet de gorîer es Pantagenêt dont Guaume et Artur sont prsents comme es prestgeu ancêtres. a recerce de Jne Ameur condut ers ’uners saade à traers a comparason saante de a reprsentaton storque oIcee du ondateur er de a dynaste, Sā ïsmā’ī 1 , et ce qu’ aance u-même dans un recue potque argement autobograpque. Ee re e caractre roque du personnage, drgeant d’une secte sunnte à ’orgne, qu onde e premer tat cte d’ïran. e ro conqurant, qu a su se taer des terrtores ottomans mportants, a entam une carrre potque aprs sa date contre e redoutabe Sm ïer. Vaste entreprse d’« oge de so », ses ers rdgs en angue turque sont nettement marqus par un dsr compensatore de « se reprsenter sa e antreure dans a perspecte de sa e postreure ». Une autre grande îgure du monarque orenta est aborde par ïns Ben Zayed à traers es nouees du XVïe sce. Soman e Magnîque, rter de Sm ïer, est au centre d’une store tragque de Beeorest qu trate « de ’abomnabe, et tyrannque meurtre de Sutan Soman Roy des Turcs, perpetr sur son îz Mustapa ». on de gorîer Soman, ’auteur at œure de moraste en s’attaquant au Grand Turc. Veant à nscrre son rct dans un cadre storque document et tay,  dnonce ’atroct de ’acte îcde et met en garde, par e bas du rct eempare ampement dramats, es souerans crtens de tomber dans de tes abus. Dans un autre contete oueu, ceu des guerres de regon, Carne Roudre-Sbasten epore es œures ayant transorm en îgure roque e captane Roger de Sarreu que ren, dans ’store actuee, ne prdestnat à a ortune ttrare qu’ a connue. Aprs une rapde syntse des prncpau psodes guerrers auques e personnage a partcp d’aprs tros storograpes de rrence, ’tude centre ’ntrêt sur a reprsentaton de cette îgure storque de second pan au moment de ’psode partcuer du sge de Sancerre. a îctonnasaton du personnage s’accompagne d’une opraton d’rosaton qu, au XVïe sce, se troue entace à cause de a promoton de deu personnages purement ttrares, e bretteur Gascon et e Captan anaron. e oet mdaste de ’ourage montre a derst des reprsentatons 

actuees des personnages et mots mdau nscrant dans ’poque contemporaîne les mythes des hauts personnages médîévaux appartenant respectîvement à l’ère haFsîde, l’unîvers de laantasy, l’époque des troubadours et la matîère arthurîenne. Dans le domaîne de la lîttérature tunîsîenne d’expressîon Françaîse, Jouda Sellamî se penche sur la représentatîon des personnages Fémînîns hîstorîques et pseudo-hîstorîques de premîer plan représentés dans le roman de Alîa Mabrouk,L’émîr et es croîsés, sous-tîtréCronîque d’Irîqya. Des Femmes, ayant vécu sous le brîllant règne du sultan haFsîde Al-Mustancîr, agîssent dîféremment Face à un constat énoncé dès le début du roman comme une vérîté générale quî semble traverser Fatalement les âges : « la vîe des Femmes ne s’înscrît pas dans l’hîstoîre d’un peuple musulman. On les veut belles, anonymes et muettes. » La lutte des Femmes en réactîon à cette sîtuatîon prend aînsî racîne dans un loîntaîn passé médîéval quî renvoîe également à un présent désormaîs mîeux lîsîble. Des schémas narratîFs parallèles lîés aux destîns de Femmes îllustres, l’émîra haFsîde, AtF ; la poétesse syrîenne, Sara d’Alep et la saînte de Tunîs, Saïda Manoubîa, permettent de dégager des catégorîes de Femmes manîFestant, chacune à sa Façon, son aspîratîon à la lîberté. Dans le contexte partîculîer de lagrîtty antasy, Tasnîme Ayed explore les racînes hîstorîques de l’héroïne médîévalîste Daenerys Targaryen en înterrogeant la complexîté de son rapport au pouvoîr. L’întellîgence du pouvoîr polîtîque, le personnage Fémînîn réussît à l’acquérîr progressîvement dans la sagaGames o trones en s’eforçant de l’appréhender, de le comprendre, d’en prendre possessîon, le détournant aînsî des maîns des hommes quî en jouîssaîent înîtîalement. La nouvelle constructîon archétypale à laquelle donne naîssance la sérîe mêle savamment l’épîque au Fantastîque et crée un lîen înédît entre le médîéval et le contemporaîn. Ce lîen entre les topoï médîévaux et le monde d’aujourd’huî, Hajer Lahmar l’analyse à travers le transFert de l’« hîstoîre » à la ictîon des rares données bîographîques sur JauFré Rudel, « prînce de Blaye », l’un des plus grands troubadours du XIIe sîècle. Auteur du lîvret d’opéra,L’amour de oîn, Amîn MaalouF met en scène l’hîstoîre d’amour supposée entre le poète et la comtesse de Trîpolî en reconstîtuant le rapport complexe entre Orîent et Occîdent par l’întermédîaîre d’un déplacement permanent

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