Les nouveaux romanciers chrétiens
185 pages
Français

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Les nouveaux romanciers chrétiens , livre ebook

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Description

Dans la production littéraire du XXe siècle, un mouvement de renouvellement de la conscience lié aux transformations de la société réelle s'est développé. Cette évolution est perceptible dans le roman laïc et garde la même prégnance dans la littérature romanesque produite par les écrivains chrétiens. Les nouveaux romanciers chrétiens ont apporté une contribution remarquable à l'approfondissement de la conscience en littérature. Ainsi, en explorant les univers romanesques créés par Luc Estang et Paul-André Lesort, ce livre révèle-t-il une extraordinaire richesse, tant du point de vue de la complexification du personnage que des techniques narratives.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2010
Nombre de lectures 15
EAN13 9782296432932
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les nouveaux romanciers chrétiens
Code biblique et code de l’écrivain
Birahim THIOUNE


Les nouveaux romanciers chrétiens

Code biblique et code de l’écrivain


L’H ARMATTAN
© L’H ARMATTAN , 2010
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-10277-4
EAN : 9782296102774

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Les romanciers chrétiens ont cherché à illuminer des itinéraires, par la peinture d’un univers livré au déchaînement de puissances infernales. Ils ont tenté de montrer les pièges de Satan et la pression du siècle, dans le déroulement des événements du salut. Mais on peut voir que les romans inspirés par la chrétienté s’orientent dans des directions variées. Chez les écrivains de la fin du XIX e siècle (Léon Bloy et Joris-Karl Huysmans), il y a souvent une complaisance dans la peinture des héroïsmes de la foi et dans la représentation des tourments des saints en Dieu. La fiction romanesque se situe, alors, dans le prolongement de la louange du christianisme par Chateaubriand ; et la peinture du monde pieux révèle un univers où l’ordre apporté par le Christ est porté au pinacle. René Bazin ( Le Oberlé , 1901) Paul Bourget ( Le Démon de Midi, 1914, Le sens de la Mort , 1916), Henry Bordeaux ( La Neige sur pas , 1912), mais également Maurice Barrès ( La colline inspirée , 1913) continueront de défendre les principes du christianisme. Avec la génération de George Bernanos, François Mauriac, Julien Green, il s’agira moins de défendre la morale et les principes chrétiens, que de peindre les âmes en proie à la tentation. Leurs épigones feront l’expérience transgressive des réalités de la foi. En effet, Luc Estang, Gilbert Cesbron, Paul-André Lesort, Roger Bésus, principaux témoins d’une nouvelle vague d’écrivains, étiquetés romanciers chrétiens, prendront honorablement la relève. Cependant, ils incarneront l’idéologie libertaire dans des fictions où se joue une aventure des limites de l’écriture. Car il s’agit de dire, dans un acte de transgression consciente du tabou, ce qui dans le monde bien pensant est réputé devoir être gardé sous silence. Ils se placent donc à l’opposé de ceux qui pratiquent l’apologie de la morale et des institutions de l’Église {1} .
Cette expérience de la transgression peut être expliqué, par ailleurs, en rapport avec la littérature dite interdite qui remonte à Dante, aux écrits de Sade, puis plus prés de nous à Mallarmé et à Genet {2} . Celui-ci a d’ailleurs créé une véritable « légende du Mal ». Coupable à tous égards, il a choisi d’être le seul témoin de sa culpabilité. Il a eu une influence considérable sur les représentations de ses contemporains. On est là en présence d’une littérature de désacralisation consciente qui heurte la conscience « installée ».
On peut, également, invoquer l’affaissement de la culture devenue le lieu privilégié où se joue le drame d’un dépassement des limites morales. En fait, la production des épigones se déploie sur un terrain esthétique et philosophique marqué par des auteurs d’envergure européenne et mondiale (Kierkegaard, Nietzsche, Husserl, Sartre). Cela se traduit en littérature par l’émergence, dans le roman de l’époque, d’une sensibilité laïque ou athée qui dénote un franchissement des normes de bienséance jusque-là admises.
Il faut convenir que l’appellation d’, d’écrivain chrétien ou catholique est une catégorie créée pour satisfaire la manie classificatoire du discours critique. Car les auteurs ainsi nommés peuvent, dans certains cas, avoir exprimé des visions qu’ils ont seulement adoptées comme postulats. Ainsi, le vent de discrédit qui a soufflé sur le monde pieux n’a pas toujours été le fait de vrais chrétiens selon l’Église.
Les nouveaux romanciers, héritiers de la génération de Bernanos, ont été tous marqués par le naturalisme du siècle passé {3} . Mais leur référence commune demeure la Bible et l’ordre ecclésiastique. Et le choix de tenir un discours ouvert à toute interprétation, à partir du référentiel biblique qui est un message éternel, installe le soupçon dans ce qui, par essence, introduit un problème important de légitimité d’une expression finie des vérités éternelles.
Le roman de spiritualité chrétienne véhicule un système implicite de valeurs authentiques incarnées par les personnages eux-mêmes, mais qui ne correspondent pas toujours à celles de l’écrivain. Il permet, par ce biais, de percevoir les représentations qui se constituent à partir de l’articulation descriptive d’un univers du monde réel.
Le roman laïc, depuis Balzac, avait pour sa part mis l’accent sur les problèmes de l’individu. On voit pourtant apparaître, au début du siècle, un mouvement d’approfondissement de la conscience perceptible dans le roman d’idées, représenté par Anatole France, Bourget et Barrès. Ce progrès de la conscience se manifeste également dans les appels nationaliste s de Péguy, Psichari, Alain-Fournier, tous malheureusement fauchés par la guerre de 1914. Puis, au lendemain de la conflagration mondiale, on s’oriente résolument vers un réalisme des drames de conscience. L’histoire devient un terrain de prédilection (la guerre, la Révolution russe, l’avènement de l’avion, le fait atomique…) et un point d’ancrage de la conscience littéraire toujours à la recherche d’une nouvelle d, finition de l’homme.
Il faut attendre le tournant des années 1930 pour voir le personnage collectif prendre le devant de la scène et le sens communautaire se révéler comme la valeur dominante. Le progrès de la pensée s’exprime dès lors dans un humanisme concret, utilisant les ressources insondables qui gisent au fond de l’homme. La revendication patriotique d’avant la Première Guerre mondiale va se prolonger dans l’idée d’un nationalisme moins étriqué. Celui-ci épouse en effet les contours d’une classe sociale, chez Louis Aragon ( Les Beaux Quartiers , 1936) ou d’une communauté humaine fondée sur des valeurs partagées, chez André Malraux ( L’Espoir , 1937) ou Antoine de Saint-Exupéry ( Terre des hommes , 1939).
Ce mouvement de renouvellement s’épanouit dans les années 1940, avec l’émergence du courant existentialiste en France. L’idée d’une liberté sans fin de l’homme connaît alors une fortune particulière, sous l’impulsion de Sartre ( Les Chemins de la liberté , 1945-49) qui prône l’athéisme dont se prévaudra Roger Ikor ( Les Eaux mêlées , 1955).
À la suite de Sartre qui a exprimé au cours des années 40 une option philosophique d’essence athée, apparaît dans le roman des années 50 un souci manifeste d’incarner le refus de Dieu chez P-A. Lesort ( Le Vent souffle où il vent , 1954) et dans Les Eaux mêlées de R. Ikor. D’un autre côté, l’évocation d’un Dieu abstrait qui ne s’affirme pas vis-à-vis du croyant retient l’attention. En effet, chez l’écrivain L. Estang, l’agnosticisme est incarné par des personnages, numériquement insignifiants, mais qui sont présents tout de même dans beaucoup de romans ( Cherchant qui dévorer, 1951 ; L’Interrogatoire , 1957, etc.). Il est intéressant d’observer que l’athéisme et l’agnosticisme s’expriment, de façon récurrente, dans la veine féconde du roman de spiritualité de l’époque qui nous concerne. Sortant ainsi des préoccupations de strict salut chrétien de leurs devanciers, la nouvelle génération des écrivains catholiques s’efforcera d’explorer les questions du salut terrestre. Le réalisme dans la création de fictions littéraires, c’est également cet effort de prise en compte globale des aspects de la conscience humaine, s’exprimant dans des actes d’intellection fondés sur une éthique religieuse ou laïque.
On peut voir à cette occasion, suscitée ou non, la publication d’un grand nombre de romans, en particulier de spiritualité. Un intérêt grandissant et un élan créatif renouvelé vont aider à l’émergence d’un groupe de jeunes romanciers, continuant l’énorme tâche de création initiée par leurs prédécesseurs.
Le XX e siècle a intégré le ferment athée, peut-être à un degré jamais égalé, et de façon plus sournoise, c’est-à-dire moins affichée. Certes, l’athéisme est repérable dans la société hellénique du 4 e siècle, à travers des doctrines qui étaient réputées corrompre les jeunes, en distillant les preuves de l’inexistence d’un univers divin. D’ailleurs, Socrate a été accusé de nier les dieux et de détourner la jeunesse.
Le XVIII e siècle a attaché à l’athéisme des noms illustres comme d’Holback, Sade, Mirabeau, etc. On peut donc remarquer que le phénomène de déchristianisation n’est pas propre à la fin de la première moitié du XX e siècle. « Le Moyen Âge a connu les mêmes problèmes d’incroyance, de recul et de délaissement de la pratique religieuse. Les sociologues reconnaissent de plus en plus, aujourd’hui, le rôle décisif joué par la Révolution française dans la baisse du pourcentage des adeptes assidus {4} ».
L’effondrement de l’univers religieux manifesté, à la fois, à travers les comportements, la pratique des rites et dans l’esprit ambiant peut être observé en France, surtout au lendemain de la Révolution. Le signe le plus caractéristique de cette décadence apparaît sous la forme de l’abandon du culte. La vie de l’Église se trouve affectée par les comportements profanes qui attentent au sacré des lieux et des fonctions ecclésiastiques.
L’athéisme au XX e siècle s’impose, par la qualité et le nombre élevé de ceux qu’il a gagnés. Il ne doit pas être confondu avec l’agnosticisme postulé par P. Valery, G. Duhamel ou Luc Estang et qui s’appuie sur la critique des représentations, puisque le vrai Dieu est inaccessible par les concepts. L’athéisme véritable consiste dans le refus d’imaginer « quelqu’un » au-dessus de l’homme. M. Merleau Ponty, J-P. Sartre et G. Bataille comptent parmi ses représentants les plus en vue. Cette position radicale est vécue à travers une expérience personnelle, sous la forme du non-sens de l’existence exprimé fortem

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