Parmi peintres et poètes
384 pages
Français

Parmi peintres et poètes , livre ebook

-

384 pages
Français

Description

Ce récit nous offre un éclairage intimiste de différents peintres et de certains écrivains de la seconde moitié du XX° siècle. Forézien, Richard Chambon a fréquenté de nombreux peintres et poètes. Il a vécu plusieurs années en Afrique et fut le directeur des Cahiers Henri Pichette (éditions Granit). L'auteur entend témoigner. Il se plaît à chanter une oeuvre à travers l'amitié qu'il ne manque jamais d'accorder aux peintres et aux poètes lorsqu'ils portent en eux l'immensité, ainsi que cet esprit d'enfance qui lui est si cher.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2010
Nombre de lectures 181
EAN13 9782296263949
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

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X15,R&C12, N"LL%&#<X./2,57 CM./321R3.I61Jecœur à l’allégresseetl’esprit accaparé parles Souvenirs d’unLmarchand de tableaux d’Ambroise Vollard, je gravis par sa
face sud la butte Montmartre. Quelque vingt ans plustard, gants
beurrefrais et croix de polystyrène surl’épaule, Son Éminence
l’archevêque de Paris allait emprunter cette même voie pour
commémorerla Passion devant les caméras venuess’ébaubir des
1acrobaties et des facéties d’un prélat décidément fort cabotin, qui
démontrerait une fois de plus ce jour-là que les voies du Seigneur
ne sont pas moinsimpénétrables à travers lacomplicité
malveillantedesmédias. Jedécouvrais la Ville lumière. Je n’étais
pas venu à Paris avec l’ambition de conquérirle monde à l’instar
d’un Rastignac, mais avec ledésir de me laisser séduire parle
charmede la capitale. J’avais l’impression d’êtrehabité parla
peinture au point que ses couleurs avaient colonisé le réseau de
mes veines etque,à moninsu, la réalitédevenait une pâle imitation
de la peinture; c’est bien connu, la vie imite la peinture des
maîtres,etla nature se trouve transfigurée lorsqu’elle se met à lui
ressembler. J’avais dix-sept ans, l’âge que l’on prétend peu sérieux
mais qui n’est pas forcément moinssage que les autres, l’âgeen
tout casoù,fort d’un certain nombre de certitudesque rien n’a
encoreécornées, on s’estimecapabled’allerjusqu’au bout de ses
rêves. J’aspirais déjàà une vie fort différentedecelledes autres
gens. Je cherchais ma voieetle moyen d’échapper à la quête
insatiablede la soupe et dessous. Je n’avais pas la moindre
ambitionsocialeetneconvoitais nullement la richesse, j’estimais
que l’accomplissement d’une vie ne se mesure pas à lafortune le
plussouvent mal acquiseetj’escomptais bien le prouver. Pour
espérer avoir unechance d’êtreheureux, je pressentais qu’il me
faudrait essayer de répondre à mes aspirations et à ce besoin de
liberté incarné parl’appel de l’ailleurs. Ilmefaudrait ajouter à la
beauté en créant,et àdéfautinventer au moins laformede ma vie .Quelques années auparavant,grâceà mes bien-aimésparents ,
j’avais découvert lesmerveilles de la peinture italienneà Florence
et à Venise, ainsi que le pouvoir de lacouleurpure à traversles
mosaïques de la Ravennebyzantine. Je pressentais d’instinctque la
couleur déposerait bientôt en moileferment de mes futurs
émerveillements, mais aussiqu’elle m’accompagnerait lorsque
j’irais à la rencontred’une utopique liberté. La peinture m’était
devenuecomme l’océanpour sesriverains : un appelincessant vers
un ailleurs de liberté où je pourrais bientôtmigrer, où la navigation
irait plus bleue tout en convertissant mon cœur aux couleurs. À la
fin des annéessoixante, j’avais aperçu Picasso etserré la main de
Salvador Dali. Lehasard m’avait mis en présence de Nino
Giuffrida et de Raymond Guerrier. Plus tard, lors d’uneexcursion
familiale à Saint-Tropez, j’avaissalué Ginette Cachin-Signac, fille
et unique enfant de Paul Signac, dans la villa La Hune acquise par
sonpère en1897. Ce dernier fut l’un dessept fidèles à avoir
accompagné ladépouille mortelledu Douanier Rousseau jusqu’au
cimetièrede Bagneux. Il avaittransformé la villaen unedemeure
patricienneavec allée d’eucalyptus dans le parc, vaste terrasseet
ateliers;il y avait abrité sa prestigieusecollection de tableaux
impressionnistes,etnotamment la nature morte offerte par Van
Gogh le 23 mars1889, jouroù Signac lui avait renduvisiteà Arles.
Dès le lendemain, Vincent écrivait à Théo: « Je lui ai donnéen
souvenir une nature morte qui avait exaspéré les bons gendarmes
de la villed’Arles, parce que cela représentait deux harengs fumés ,
qu’onnommegendarmes comme tu le sais. »
Rien dans mon univers familial ne me prédisposait à orienter
monregard vers la peinture sinon l’inclination de ma mère pour les
tableaux figuratifs,et cegrand-père maternel qui mourut
malheureusement bien avantma naissance et dontonm’a rapporté
qu’il affectionnaitla peinture;mais sesmoyensne luipermettant
guèredecollectionner lesœuvresoriginales, il avait dû se rabattre
sur lefac-similéd’une toiled’Émile-Othon Friesz que la piété
filiale aconservé. Un jour, mes parentss’offrirent une grande
2marined’Édouard Mandon. De 1927 à 1946, cet artiste peintre
avaitpossédé une galerieatelier à proximitédu quartieroù mon
père etma mère vécurent leur enfance,etmesparents y avaient
aperçu maintes foisle peintredevantson chevalet,coifféd’un
panama. Au cours desmoisquisuivirent cetteacquisition, nous
10entreprîmes une sortede pèlerinageà Toulon afin d’y rencontrer
Mandon alors plusqu’octogénaire, mais qui n’en continuait pas
moins à peindre. J’étais adolescent, mais je vois encore la petite
maison de la rue Santa-Lucia où l’artiste vivait une gentille retraite
au pied du Faron,et,dans la pièce où ilnous reçut, je me souviens
des grandespeintures au couteau qui cachaientlabanalité du
papierpeint desmurs; c’étaient desœuvres à la manièredu peintre
cannois Louis Pastour. Chez Mandon, monpère etma mère
renouèrent avec les images de leurjeunesse. Exhumant avec
bonheur, auprès duvieux peintre, des émotions qu’ils avaient cru
perdues, ilsluipassèrent commande de plusieurs tableaux. Lors de
monpassageau Puy-en-Velay deux décennies plustard, je me
trouveraisàdîner chez sa petite-fille Éliane, née Mandon.
J’entraînaimesparents à Parigny dans les environs de Roanne,
où nous rendîmes visiteau peintre Nicolas Cizeronque nous
avions plusieurs fois croisé lorsqu’il était encoreantiquairedans le
Forez, au nordde Feurs, l’antique Forum Segusianorum. Il nous
reçut dans sa petite prévôtédatant du temps des églises cathédrales
et des hommes bardés de fer. Je nous revois, mesparents etmoi ,
appliqués à grimper par unlourd escalier à vis assez étroit; le
rayonnement d’une pietàen bois venait atténuerl’austérité presque
millénairedesmurs. Je voulais voir unegouache de Jean Dufy
remontant à sa période cubiste, dans les vert et brun avec
seulement un pan de bleu pour leciel, qui figurait une vue
plongeante surle parcd’une bâtisse depuis une terrassedont on
apercevait seulement quelques balustres deciment. Pour cinquante
millefrancs de l’époque– l’antiquaire traitait encoreen anciens
francs,aussil’artiste nous parla-t-il de "cinqmillions" – Nicolas
Cizeronse proposait de nousobtenir un Picasso auprès du maître
suprême en personne. L’homme était d’un commerce plutôt
agréable; il prononçait NéveYork au lieu de dire New York à la
emanière des Anglo-Saxons. Nicolas Cizeron aura traversé le XX
siècle, puisque, néà Saint-Étienne au début de l’année 1902, il
s’est éteintà Balbigny enjanvier de l’an degrâce 1998 .
Encoreétudiant, j’étais entréenrelation épistolaireavec Kiejstut
Bereznicki après avoir apprécié, au muséedes Beaux-Arts de
Lyon, l’exposition d’un groupe d’artistesoriginaires despays de
l’Est. Aucun des exposantsn’ayant étéautoriséà franchir le rideau
de fer, Bereznicki n’avaitpu participer à l’accrochage ni venir au
11vernissage. Néen1935 dans la villede Poznan, l̵

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