Je reviendrai mourir en France
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Je reviendrai mourir en France , livre ebook

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Description

Qu’est-ce qui fait avancer Marcel à ce rythme, au point qu’il est impossible à le suivre? Pourquoi cet homme a-t-il toujours la bougeotte, fourmillant d’idées, croyant inlassablement à son étoile et aux opportunités semées par le destin? Est-ce la réussite qu’il recherche inlassablement? Simplement de quoi gagner assez pour les siens? Ou alors la conquête des femmes – car il faut dire que Marcel est aussi un séducteur? De la France à l’Amérique du Sud, retour sur le parcours méandreux d’un expatrié français pour qui l’existence est synonyme de bonds et rebonds, de coups du sort et de grandes espérances. Il y a certainement quelque chose de l’acrobate ou du chat qui retombe sur ses pattes dans la personnalité de Marcel, qui sillonna longtemps les Amériques et les Antilles. Et c’est peut-être ce trait de caractère, désarmant de spontanéité, qui est à l’origine de la sympathie que l’on ressent, amusé, pour cet homme à la trajectoire assurément extraordinaire, loin des sentiers balisés et des quotidiens routiniers.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 17 novembre 2011
Nombre de lectures 0
EAN13 9782748370836
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Je reviendrai mourir en France
Simon Antech
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Je reviendrai mourir en France

 
 
 
 
 
 
Je suis né dans un petit village sur les coteaux du Roussillon, quelques années avant la dernière guerre mondiale. Nous étions une famille très unie : nous vivions tous ensemble avec mes frères, mes parents et grands-parents nous étions heureux.
Mon père possédait une boucherie charcuterie. Le rationnement commençait à se faire sentir, mais avec de la viande, mon père se débrouillait pour avoir de l’huile, du sucre et des produits se faisant de plus en plus rares.
Nous avions un petit troupeau de brebis et les jours sans classe, le jeudi et bien sûr le dimanche, j’allais avec mon père faire paître les brebis au bord du petit ruisseau qui contournait le village.
— Que fais-tu, Papa ? demandais-je.
— Tu vas voir, Toto, me répondait-il.
Il m’appelait Toto, je n’aimais pas trop ce surnom mais tant pis j’acceptais… Il coupait avec son gros couteau quelques roseaux et fabriquait un joli petit moulin qui tournait et tournait.
—  Tourne gentil moulin par l’eau du ruisseau, tu as vu Toto ?
—  Bravo, bravo Papa !
Ainsi allait la vie… Malgré les problèmes de la guerre, ça allait plus au moins bien, mon père n’était pas à la guerre, Il avait été exempté du service à cause de ses jambes : il avait été pompier volontaire et lors d’un incendie avait eu les jambes brûlées.
À cette époque il n’y avait pas autant de voiture qu’aujourd’hui. Seuls les deux ou trois riches vignerons du village en possédaient, des Citroën Traction Avant ou bien les Renault Viva Grand Sport. On allait vendre la viande dans les villages alentours avec un cheval attelé : une trotteuse, il appelait cela une trotteuse parce qu’il faisait trotter le cheval. Pour nous ce n’était pas un cheval c’était une jument belle comme tout ; elle s’appelait Cocotte, mon père l’avait achetée toute petite, nous l’avions élevée au biberon. Quand elle avait faim, elle rentrait dans la cuisine. Nous avions une grande maison, la cuisine était spacieuse et équipée d’une cheminée massive, en hiver quand le vent du nord hurlant fort, nous étions bien près du feu, les flammes jouaient dans le foyer ; il n’y avait pas la télévision, mais nous étions bien quand même. Nous caressions les deux chats de la maison ; en été ils étaient bien blancs, en hiver ils devenaient noirs comme du charbon après s’être couchés sur la plaque du feu.
Un jour du début de l’année quarante, mon père reçut un ordre de l’État-major militaire de présenter la jument Cocotte à la caserne de la ville voisine. C’était la réquisition de tous les chevaux de France pour les envoyer au front lutter contre les panzers allemands. Comment est-il possible que les services d’espionnage français et anglais n’aient pas su qu’Hitler préparait une guerre, fabriquait des quantités d’avions, de tanks et de matériel de guerre ? Nous ne rentrerons pas dans la politique.
Voilà que Cocotte se bagarrait contre les panzers dans les Ardennes et un jour, on nous informe qu’elle avait été tuée. Nous avons pleuré et pleuré. Nous avions eu l’espoir qu’un jour elle reviendrait de la guerre. Comme nous n’avions plus la jument pour aller vendre dans les patelins voisins et que malgré la guerre mon père se modernisait : du trotteur nous sommes passés à l’automobile. Il revint un jour de la ville voisine, je ne sais pas où il avait déniché cette bagnole ! C’était une Renault ; elle était verte, un vert caca d’oie, le capot du moteur était pointu et le volant à droite, à l’anglaise. Elle ne trottait pas elle roulait, enfin pas toujours, parfois il fallait la pousser pour la faire démarrer ! Heureusement que c’était une synchronique. D’ailleurs à cette époque on ne parlait pas d’automatique, plusieurs fois on était restés en carafe à mi-chemin. Dans ces moments-là, Papa descendait en se lamentant un peu, bien qu’habitué aux caprices de Bébelle. Oui, ce n’était plus Cocotte c’était Bébelle. Il me regardait :
— Alors Toto que fais-tu ! Il faut pousser merde, on ne va pas rester là une éternité !
Et on poussait, poussait et quand Bébelle avait pris un peu d’élan, mon père grimpait : vroum vroum, ça repartait jusqu’à la prochaine panne.
À cette période de la guerre nous avions le rationnement pour l’alimentation et pour l’essence. Le gouvernement de Vichy, vous savez, France occupée, France libre : libre, il fallait le dire vite ! Le gouvernement délivrait donc une quantité limitée d’essence aux médecins, ambulances et commerçants. L’essence que recevait mon père pour faire ses ventes dans les patelins voisins n’était pas suffisante. Il fallait trouver une combine ! Un jour je le vis bricoler le moteur de Bébelle ; il ajusta un récipient type réservoir d’environ trois litres de capacité ; je lui demande :
— Que fabriques-tu, Papa ?
Il me répondit :
— T’occupe pas Toto, demain nous allons voir si ça marche ! (Je m’appelle Marcel mais il me disait toujours Toto). À cette époque, dans les années quarante, on était loin de penser aux biocombustibles ! Le Brésil qui aujourd’hui est le premier à faire rouler les voitures avec l’alcool de canne à sucre, était un pays presque inconnu, perdu dans l’immensité du poumon du monde : l’Amazonie.
Donc le lendemain matin je me réveille de bonne heure, préoccupé par le système qu’avait fabriqué mon père. Je prends un café, et rapidement je descends au garage.
— Ah te voilà ! Tu arrives Toto ! me dit mon père. Tu as bien dormi, tu as déjeuné, bon, nous allons voir si ce truc fonctionne.
Il ouvre le robinet du petit réservoir fixe sur le côté droit de Bébelle qui contenait de l’alcool de vin à 90 °. Elle démarre à la manivelle : vroum, vroum ! Comment avait-il pensé à faire marcher la voiture avec de l’alcool ! Mon père était astucieux, aimait beaucoup la mécanique  ; il avait lui-même réparé le moteur de Bébelle. À cette époque, il fallait se débrouiller avec les moyens que nous avions et ils étaient limités. Je parle beaucoup de mon père car c’était lui le maître à bord. Ma mère avait son travail à la maison : préparer les repas pour sept personnes, laver le linge pour tout ce monde ! À cette époque, il n’y avait pas de laveuse automatique ; les gens du village allaient à la rivière à deux kilomètres du village ! On manquait d’eau, elle était rationnée, une seule fontaine était ouverte quelques heures par jour. Je me souviens d’avoir fait la queue avec un seau dans chaque main car il ne pleuvait pas du tout l’été. Les gens du village disaient que c’était les bombardements qui dispersaient les nuages… je crois qu’ils avaient raison.
Mai 1945 : la guerre était terminée. J’étais en classe je me souviens qu’une personne est entrée en criant « La guerre est finie ! La guerre est finie ! » C’était le garde champêtre qui était venu nous annoncer la bonne nouvelle. « Vacances, vacances ! » nous cria ensuite l’institutrice d’une voie hystérique, et nous avons tous couru au clocher du village sonner les cloches… Ding dong, ding dong, la France était libre grâce aux soldats américains et anglais.
Le soir ; bal à la salle des fêtes, improvisé avec un vieil appareil qui gazouillait une musique chaotique mais qu’importe les couples dansaient, ils étaient heureux, quand à moi j’avais un peu plus de quatorze ans et je commençais à m’intéresser à la question, sur ce plan j’étais plus que précoce, chacun est comme il est.
Les années passèrent ; mes parents avaient en plus du commerce une petite propriété de vignoble ; on ne faisait pas partie des riches mais de la classe moyenne. Mon père me répétait souvent, surtout quand nous partions vendre dans les patelins avec Bébelle :
— Tu sais Toto, je vous ai fait une situation !
Je penserai toujours à ses paroles, je crois que chacun doit se faire son avenir et ne pas compter sur ce qui peut arriver. À quatorze ans, je passais le certificat d’études et mes parents me mettaient en pension dans un collège technique ; ça ne me plaisait pas du tout d’être « enfermé ». Moi, habitué à vadrouiller par-ci et par-là ! Je ne suis plus revenu au collège… Aux vacances de noël, j’abandonnais, mon père était fou
— Toto, me dit-il, tu seras un bourricot !
— Je m’en fous ! lui répondais-je et je continuais mon train-train, la boucherie et le travail aux vignobles.
J’aimais bien aider mon père à la boucherie. Il était à cette époque interdit d’abattre les bêtes chez soi, il fallait saigner les bœufs ou porc à l’abattoir de la ville voisine. Durant l’année 1945, les gens manquaient encore pas mal de nourriture, ils élevaient chez eux des cochons, et quand ils atteignaient 200 ou 250 kg, nous allions les abattre. La découpe de l’animal organisée le soir même, donnait lieu à une fête chez le propriétaire. Bien entendu, les histoires plus au moins salées ne manquaient pas et le vin mousseux coulait à flots. Écouter les histoires grivoises ne devait pas faire oublier de mettre du sel au jambon ! Comme Papa aimait beaucoup les histoires drôles, je lui rappelais :
— Au fait Papa, tu as mis du sel au jambon ?
— Bien sûr, Toto, voyons ! Tu sais j’aime plaisanter, mais je suis conscient de mon travail ; il était très jovial, aimait beaucoup plaisanter.
Et les années passent, quinze ans, seize ans ; je commence à vadrouiller dans les fêtes et m’intéresser aux jolies demoiselles. J’adore danser, j’ai le rythme dans la peau ; aussi les filles aiment bien danser avec moi. En été je fais tous les bals champêtres de la région à bicyclette.
Le bal commençait toujours

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