Flux - Nous sommes demain
229 pages
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Description

Blue, jeune fille de la rue, et Sandro son ami, tous deux atteints du syndrome de Joans, parcourent le pays en espérant trouver un refuge. Blue fait montre d'étranges talents dans le Flux, aussi extraordinaires qu'effrayants. Quel est donc son pouvoir ?


Lili et ses amis, eux, sont toujours coupés du monde. Leur exploir n'a pas suffi à les sortir du centre dans lequel ils sont retenus. Plus que jamais déterminés à s'enfuit, leur route croisera-t-elle celle de Blue ?

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 16
EAN13 9791097570439
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0049€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

À mon zhom, parce que j’ai d’audace autant qu’il me donne en amour,
de liberté autant qu’il me porte.
Parce qu’il est dans tous mes horizons.
 
Pour mon petit homme qui m’offre toujours les voyages de ma vie.
Celui-là, il est pour toi.
CHAPITRE 1
 
Au petit jour, le calme était revenu dans le squat. Sa population vivait surtout la nuit, se nourrissant d’alcool, de substances illicites, de récits, déformés par des mois ou des années d’errance. Les logements abandonnés ne manquaient pas depuis la grande épidémie. Le marché de l’immobilier se portait mal pour les investisseurs, quoique plutôt bien pour les quelques exclus qui, par choix ou par nécessité, se retrouvaient jetés sur le pavé, à la recherche d’un abri et d’un peu de chaleur humaine. Tous avaient une histoire, du genre de celle qu’ils ne rechignaient pas à raconter pour peu que le public soit accommodant avec la vérité. Certains avaient laissé derrière eux un passé tellement révolu qu’il n’était plus qu’un rêve. D’autres ressassaient encore et encore les mêmes souvenirs jusqu’à l’usure, jusqu’à ce qu’ils ne soient plus qu’un voile sur leur regard nostalgique. Il fallait bien, quand surgissait le crépuscule, oublier les regrets, l’angoisse ou la peur du lendemain. Alors, au lever du soleil, les corps meurtris prenaient un repos mérité qui ressemblait plus à un coma qu’à un sommeil réparateur.
Blue ouvrit un œil rond et brun sur le plafond délabré de leur chambre . Le matelas ne puait plus depuis quelques jours. Elle avait même constaté une nette amélioration de l’état de sa peau. Les puces et autres parasites qui lui avaient mordu l’épiderme tout l’été se faisaient la malle, fuyant les frimas de l’automne comme des rats quittent le navire qui sombre. Les nuits étaient froides en ce mois d’octobre. Ils n’avaient pas eu de chance, les grandes chaleurs ne s’étaient pas attardées. Pas d’été indien cette année. L’hiver était dans les starting-blocks, déjà impatient de faire sa moisson.  
Le visage enserré dans le sac de couchage douillet dont elle avait fait l’acquisition l’année dernière – cadeau d’une association d’aide aux sans-abris – elle défit d’un doigt agile le lien qui préservait la température de son corps. Blue se tordit dans tous les sens pour se libérer : d’abord la tête, puis les épaules, les bras et enfin le buste.
À ses côtés, Sandro grogna, sans faire mine de bouger. Il ne dormait plus, elle le savait. Il faisait semblant, comme tous les jours, pensant peut-être échapper à son attention. Elle sourit. Elle aimait leurs petits rituels qui entretenaient leur connivence. De là à parler d’amitié… D’un autre côté, elle n’avait pas eu d’amis avant lui.
Redressée sur leur lit, elle souffla doucement devant son nez pour se faire une idée de la température ambiante. En dessous de dix degrés, un léger nuage de buée se formait qui, à cet instant, s’étirait en volutes de ses lèvres pour se déliter dans l’atmosphère. Elle décida d’ôter tout de même son bonnet miteux. Ses cheveux noirs et bouclés, héritage de ses ancêtres africains du côté de son père, ne tombèrent pas sur ses épaules. Ils auréolèrent sa tête d’une multitude de petits ressorts ébène. Métisse, sa mère polonaise lui avait légué des traits fins, typiques caucasiens, et quelques reflets roux dans cette chevelure abondante. Elle était svelte avec de grandes jambes qui lui permettaient de courir vite et devait être belle si elle en jugeait par les regards concupiscents des hommes. Sandro, lui, ne l’avait jamais regardée comme ça. Il n’avait eu aucun geste ou parole qui aurait pu laisser entendre qu’il ait d’autres intentions à son égard que cette espèce de contrat tacite qui les liait leur assurant subsistance et protection mutuelle. De même, elle ne le voyait pas autrement qu’un grand frère un peu encombrant, pénible parfois, néanmoins attachant.
Il était allongé sur le flanc, et elle se prit à observer ses cheveux bruns en bataille qui avaient réussi à s’extirper de son propre sac de couchage. Avaient-ils déjà vu un peigne une fois   ? Elle était certaine qu’il était espagnol. Elle lui avait posé des questions sur l’origine de son prénom un jour. Quelques semaines plus tard, au détour d’une conversation anodine, il lui avait avoué être Colombien. Depuis un mois, il était Argentin. Elle supposait que d’ici Noël il serait Péruvien ou Cubain. En vérité, elle ne connaissait quasiment rien de lui.  
Ils s’étaient fait pincer tous les deux dans un supermarché, il y a un peu plus d’un an, tandis qu’ils piquaient de quoi manger, ayant décidé par le plus pur hasard d’exécuter leur délit au même endroit, au même moment, à deux rayons d’intervalle : elle dans les étals de gâteaux, lui dans celui des chips. Sucré, salé, toute l’histoire de leur relation. Assis face aux deux vigiles qui les retenaient dans leur bureau en attendant l’intervention des flics, Blue n’avait pas manqué de détailler ce curieux garçon dégingandé, âgé d’une vingtaine d’années, visiblement plus vieux qu’elle en tout cas, frappée par l’éclat de ses prunelles émeraude qui contrastaient avec sa peau basanée et ses cheveux sombres. Il n’était pas beau, pas au sens strict du terme. De son visage anguleux, dont le nez s’allongeait comme un ponton au-dessus des vagues de ses lèvres, se dégageait un charme exotique, un je-ne-sais-quoi intriguant qui avait capté toute son attention. Il s’était irrité de cette observation inquisitrice, même s’il n’avait rien dit pour la remettre à sa place. Elle apprendrait plus tard que c’était exceptionnel. Depuis, il ne manquait aucune occasion de la rabrouer chaque fois qu’elle l’agaçait, ce qui arrivait à peu près tous les jours, voire toutes les heures.
Elle décida d’ailleurs de commencer.
– Debout la belle au bois dormant   ! C’est l’heure, feignasse   !  
Elle le secoua comme un prunier, le visage fendu d’un sourire railleur. Sandro protesta avec des grognements d’ours. Son carcan de tissus l’empêcha de lancer les mains pour chasser l’importune. Blue en profita et reprit de plus belle, dégageant ses jambes pour le pousser avec les pieds cette fois.
– Faut qu’on bouge   ! C’est le premier jour du reste de ta vie, clodo   !  
Il marmonna des mots incompréhensibles, étouffés par le duvet qui lui enserrait aussi le visage.
– Quoi   ?  
Sandro s’ébroua et se releva comme un diable saute de sa boîte pour mieux la fusiller du regard. Il défit avec difficulté le lien afin de libérer sa bouche.
– Clodo toi-même, poufiasse   ! Je t’ai jamais demandé de me réveiller, je suis assez grand pour le faire tout seul   !  
Blue sourit de toutes ses magnifiques dents blanches.
– Oui, mais je préfère quand c’est moi, c’est plus drôle   !  
– Connasse   !  
– Tu peux dire bonjour aussi le matin, c’est mieux.  
– Je t’emmerde.
– C’est pas la politesse qui t’étouffe ! Ce que t’es rageux quand même   ! Regarde, dit-elle en pointant le doigt vers l’une des fenêtres de la pièce, crasseuse, quoiqu’encore entière. Il va faire beau, c’est chouette !  
Il se rallongea en lui tournant ostensiblement le dos dans un ranafout’ qu’elle n’eut aucun mal à comprendre cette fois, et qui eut pour seul effet de la faire rire. En aucun cas elle ne se vexait de ses insultes. Ce n’était que des mots après tout, puisqu’il était là, chaque matin, chaque soir, à ses côtés, à l’emmener en voyage dans cet autre monde merveilleux de lumière, le seul endroit sur cette planète où elle se sentait bien. Si elle devait compter sur quelqu’un pour l’aider à se tirer des mauvais pas dans lesquels elle ne manquait pas de se fourrer, c’était bien lui   !  
Blue s’étira comme un chat avant d’accomplir son second rituel matinal : observer ses jambes ou ses bras avec minutie à la recherche de piqûres d’insectes en tout genre. Un unique petit bouton la démangeait juste sous le genou. Cela suffit à sa satisfaction. D&

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