L’école des oubliées
330 pages
Français

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L’école des oubliées , livre ebook

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Description

Pendant que tous les yeux sont fixés sur une grosse tension politique qui va plonger la Côte d'Ivoire dans une crise qui s’installe, à Djolilié, un village à l'intérieur du pays, se consument des abus qui portent atteinte à la dignité de ses écolières. Deux vies parallèles nous sont présentées : celle d’Ortensia et de Rosalie. Mais à travers leurs vies, ce sont celles de beaucoup d’autres qui sont aussi racontées.

Histoire « amusante » d'une mentalité villageoise qui subit l'influence de l'Occident. Un chassé-croisé de frasques sentimentales, religieuses, familiales avec la crise de nos traditions. Mais surtout, histoire de deux années scolaires dans le contexte politique actuel.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 23 juin 2014
Nombre de lectures 1
EAN13 9782332713025
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-71300-1

© Edilivre, 2014
Le nom des personnages est fruit de l’imagination de l’auteur et que les sociétés utilisées servent à embellir l’histoire.


J’ai voulu dire une chose que tout le monde sait pour que personne n’oublie.
Je ne savais pas que cela m’aurait coûté autant de lignes…
Première partie
I
Rosalie s’était réveillée en sursaut dans cet espace des ténèbres où le silence et la peur se disputaient le chant du coq. Elle ne reconnut point le néant qui l’embrassait. Elle crut ses yeux encore fermés. Avec ses doigts, elle essayait de donner à son esprit une idée de l’endroit où elle se trouvait. Heureusement, une lueur ressortait de ces murs mal bâtis. C’était un désert de chambre envoûtée. Elle se crut alors au jour de l’enlèvement : seule et abandonnée parce que tous partirent sans elle ; comme le prêchait souvent le pasteur de l’église évangélique du village.
Une chambre qu’elle partageait avec ses quatre sœurs : trois plus grandes et la dernière Adèle qui avait dépassé depuis peu les cinq ans.
Son corps avait consommé les caprices du froid matinal. Elle tira vers elle son pagne, une couverture qui avait perdu sa disposition initiale, sûrement à cause des roulades nocturnes qu’elle exerçait inconsciemment dans l’espoir d’une place un peu plus fraîche dans cette chaleur sèche des environs.
Sa main toucha une légère humidité qui lui balança l’odeur de ses entrailles. Elle commença à sentir un mal qui lui remontait de son appareil génital. Elle prit un coup incommensurable. Son cœur se déchira avec le flash qui lui survint. Elle éclata en sanglots. Elle avait les mains entre ses jambes, se tâtait pour situer l’origine d’une douleur insurmontable. Une douleur dont elle ignorait l’existence. C’était une plaie qui respirait dans un endroit secret de son corps. Une chaleur brûlante qui consumait ce qu’elle gardait entre ses jambes.
Qu’avait-elle fait ? Ou pire encore, qu’est-ce qu’il lui avait fait ?
Elle revoyait encore cette main féroce et inattendue sur sa bouche. Cette voix légère qui la menaçait de ne pas crier. Elle sentait encore ce poids sur son petit corps de femme. Cette odeur monstrueuse qui errait sur son corps. Que voulait-il ? Pourquoi était-il sur elle dans cette obscurité mystérieuse ?
Elle n’en savait rien. Elle ne pouvait se dégager, il était physiquement plus fort qu’elle. C’était une violence qu’elle n’avait jamais subie quelle que soit la colère des siens.
Elle sentait sa main qui écartait avec force son intimité déjà fragile et altérée. Son esprit mourait d’angoisse dans ce noir propice à l’imagination. Elle sentait quelque chose forcer la porte de ses entrailles. C’était douloureux. Elle criait. Sa voix engloutie par une main trop large qu’elle était fatiguée de mordre favorisait l’émission d’un sifflement que l’on pouvait assimiler à un ronflement post-fatigue ou un cauchemar d’enfant gâté.
C’était un spasme qui était dans cette porte qu’elle conservait secrètement depuis sa naissance. Des larmes invisibles ruisselaient sur son visage. Elle geignait de toutes ses forces. Il la déchira. Ensuite, à bouche ouverte, il se perdit sur le chemin de l’étreinte. Rosalie s’était raidie, inerte ; elle arrêta de résister. Écarta les jambes pour amollir la contraction de ses muscles internes qui saignaient. Cependant, cette odeur, cette sueur méconnue et dégoûtante l’envahissait. Elle ne supportait plus. Son corps de jeune enfant subissait ce qu’elle voyait par occasion à la télé que les plus âgés accomplissaient. Elle ne pouvait le soulever, elle le grattait des ongles : c’étaient des actions vaines. Elle ne voyait rien. Une personne avait éteint la lampe. Elle était noyée dans l’horreur de cet inconnu près de qui elle ne pouvait se justifier. À un certain moment, il devint encore plus méchant, plus violent, il ne s’arrêtait plus, il ne se contrôlait plus. La rapidité de ses mouvements la détruisait. Il la tuait. Elle pleurait avec une respiration difficile, mais il ne l’entendait pas, il ne la voyait pas, son corps vivait dans l’extase.
Il s’arrêta d’un coup, elle croyait que c’était fini car elle n’en pouvait plus. Toutefois, il ne se leva point sur elle. Elle sentit quelque chose en elle, une présence froide : il l’avait mouillée.
Après une pause, il continua. Toujours dans la même position, son bras sur la bouche de sa victime, des menaces dans son oreille…
C’était moins douloureux à présent, mais toujours insupportable.
Elle perdit connaissance au recommencement de son cauchemar. Il ne s’en rendit pas compte.
Il partit sans qu’elle ne sût exactement combien de temps son calvaire avait duré. Il avait fini de la détruire et il s’enfuit comme un voleur.
C’était à présent le plus dur qui s’annonçait : vivre avec l’incision de cette nuit dans la conscience et dans le cœur.
Cette fois-ci elle larmoyait plus fort. Une personne avait bafoué sa vie, sa dignité pour toujours. Une personne avait abusé d’elle. Une personne qu’elle ne connaissait pas ou qu’elle n’avait pas reconnue. Qui était-ce ? Qui accuser ? Qui inculper ? Qui indexer ?
La cour familiale était grande. Dans les environs, des maisons construites en terre battue concourraient avec celles construites en dur. La cour de M. Félix fut l’une des premières maisons en briques. Sa grande cour justifiait la présence d’un manguier, deux papayers, un cocotier, un avocatier et une chaîne de cannes à sucre noires. Sa propriété n’avait pas de clôture. Elle accueillait une grande partie du district à cause de la présence d’un puits qu’il fit creuser non loin de sa cuisine. Derrière les murs de cette demeure, une chaîne de fleurs sauvages servait de limitation. C’était une fin de propriété provisoire, car M. Félix élargissait chaque année un peu plus cette dernière.
Derrière la cuisine, une petite plantation servait de ravitaillement immédiat. De la tomate, du gombo, du taro, de l’aubergine, du manioc, du piment, un bananier dont il n’avait jamais bénéficié, du gnangnan, de l’oignon : une espèce de supermarché privé.
Sa maison s’inspirait médiocrement du style occidental. Un espace servait de garage. Des fleurs et encore des fleurs déguisaient sa cour. Le gazon disposé en pièces détachées ressemblait à travers une vue de grand angle à une tête teigneuse. Du village, pour arriver à la résidence de M. Félix, on parcourait une allée de fleurs. Celles qui servaient de clôtures entouraient en une forme de C cette invention dont il était le seul à disposer. Juste après la cuisine, la douche de ses femmes. Les enfants et les jeunes se lavaient dehors. Leur douche était un tiré de quatre bois où les rameaux de palmier secs servaient de mur et la propre serviette servait de porte. À son tour, cette douche pour jeunes et hôtes servait d’arrosoir pour la petite agriculture familiale.
Le contraste avec cette idée de souverain venait de la présence de leur ex-maison qu’il ne fit pas abattre et qu’il utilisait pour les enfants. Une maison de terre battue recouverte de ciment ; aujourd’hui, elle comportait pas mal de fissures et se situait sur la droite, en regardant la cour à partir de l’entrée principale du salon. La véranda : une avant-maison qui donnait un avant-goût de l’esprit créatif de l’artifice de cette production qui était considérée comme l’un des joyaux du village. Il utilisait l’ancienne habitation pour héberger provisoirement des hôtes du village qui n’avaient pas de toit ou qui avaient leur maison en construction, notamment les instituteurs mandatés par l’État. Vu qu’il était le chef de son village il était le premier responsable vis-à-vis des hautes autorités.
C’était en quelque sorte deux petites maisons jumelées. Il les avait faites ainsi parce qu’il avait deux femmes. Alors, chaque femme jouissait d’un appartement. Chacune avait son salon, leur chambre (quand il décidait de dormir chez elle), la chambre des enfants et la cuisine. Deux cuisines donc : elles préparaient les repas tour à tour.
Aujourd’hui, avec le passage du temps, elles ont appris à surmonter leurs différences : elles vivent sous le même toit. Cette fois-ci, chacune a simplement sa chambre, même si elles sont à présent trois.
L’ex-habitation est occupée par M. Min’dri, un instituteur akan, depuis plus d’une demi-année. Il a dû remplacer un instituteur décédé en pleine année scolaire. Ne voulant pas résider dans la même maison que son prédécesseur, le chef du village ordonna la construction de la sienne, non loin toutefois de l’école. Son achèvement était maintenant une question de semaines. Le dossier était entre les mains de l’équipe qui avait entrepris sa maison.
M. Min’dri vivait avec sa femme et son petit garçon de quatre ans. Son fils Romaric de dix-sept ans vivait chez sa sœur à Abidjan et venait toutes les pauses scolaires vivre en famille : dire qu’il adorait ce village plus que le sien…
La jumelle était occupée par les enfants de M. Félix : une chambre pour les filles et une autre pour les garçons. Les garçons, par éviction, avaient cédé la chambre au plus grand et sa femme qui avaient déjà une petite fille. Ils avaient opté pour le grand salon, chacun sous l’égide de son territoire.
M. Félix, maître des lieux des deux maisons jumelées, avait eu le génie de faire mettre une porte interne, ce qui évitait de devoir sortir d’une maison pour entrer dans une autre. Ensuite, il y avait la cuisine : la seule cuisine interne de ce village, puisque ses épouses cuisinaient sur du gaz. La cuisine occupait une place qui donnait sur un couloir, le couloir sur la chambre des enfants et enfin aux deux extrémités, les chambres conjugales pour éloigner tout soupçon lors de leur intimité. Le m

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