La lecture à portée de main
232
pages
Français
Ebooks
Écrit par
Thomas Mayne Reid
traduit par
Emma Allouard
Publié par
La Gibecière à Mots
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
232
pages
Français
Ebook
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Thomas Mayne-Reid (1818-1883)
"Le squire Trevaniow, gentilhomme de la Cornouailles, mourut, il y a quelque vingt-cinq ans, laissant le domaine de ses pères, et son manoir même, aux mains des étrangers ; ses deux fils, Richard et Ralph, restaient sans héritage et sans abri. Le solicitor, qui avait arrangé les affaires du défunt, profita de l’occasion pour lui succéder dans une propriété dont le revenu était considérable, tandis que les deux héritiers recevaient chacun pour leur part mille livres sterling environ, échappées au naufrage de la fortune patrimoniale.
Malgré la prétendue belle conduite du solicitor, quelques personnes le soupçonnèrent d’indélicatesse, et, parmi ces personnes, les jeunes Trevaniow eux-mêmes.
L’homme de loi leur avait imposé comme condition de vivre n’importe où, excepté en Cornouailles.
Ne connaissant rien aux affaires, enserrés dans les filets de la chicane, ils durent céder et abandonner une demeure où avaient dormi leurs ancêtres depuis peut-être l’établissement des Phéniciens dans le pays.
Résolus à tirer le meilleur parti possible de leur situation, les deux frères songèrent à chercher la fortune, n’importe où elle se montrerait disposée à leur sourire."
Ralph Trevaniow a décidé de rejoindre son frère Richard, au Pérou, en navigant sur l'Amazone. Il est accompagné de ses deux enfants et du fils de Richard ainsi qu'un Irlandais et un Africain. Leur guide est un vieil Indien... Mais Tipperary Tom, l'irlandais, fait une malencontreuse erreur de navigation, pendant la nuit... Retrouveront-ils leur route à travers les dangers de la forêt ?
Le désert d'eau dans la forêt
Thomas Mayne-Reid
Traduit de l'anglais par Emma Allouard
Avril 2021
Stéphane le Mat
La Gibecière à Mots
ISBN : 978-2-37463-896-6
Couverture : pastel de STEPH'
lagibeciereamots@sfr.fr
N° 895
I
Les Trevaniow. – Les frères à l’étranger.
Le squire Trevaniow, gentilhomme de la Cornouailles, mourut, il y a quelque vingt-cinq ans, laissant le domaine de ses pères, et son manoir même, aux mains des étrangers ; ses deux fils, Richard et Ralph, restaient sans héritage et sans abri. Le solicitor, qui avait arrangé les affaires du défunt, profita de l’occasion pour lui succéder dans une propriété dont le revenu était considérable, tandis que les deux héritiers recevaient chacun pour leur part mille livres sterling environ, échappées au naufrage de la fortune patrimoniale.
Malgré la prétendue belle conduite du solicitor, quelques personnes le soupçonnèrent d’indélicatesse, et, parmi ces personnes, les jeunes Trevaniow eux-mêmes.
L’homme de loi leur avait imposé comme condition de vivre n’importe où, excepté en Cornouailles.
Ne connaissant rien aux affaires, enserrés dans les filets de la chicane, ils durent céder et abandonner une demeure où avaient dormi leurs ancêtres depuis peut-être l’établissement des Phéniciens dans le pays.
Résolus à tirer le meilleur parti possible de leur situation, les deux frères songèrent à chercher la fortune, n’importe où elle se montrerait disposée à leur sourire.
Ralph touchait à ses vingt ans. Richard était son cadet d’une couple d’années. Une bonne éducation les rendait tous les deux également propres aux travaux de l’intelligence et aux fatigues physiques. Ils pouvaient donc batailler rudement et avec succès soit dans le monde intelligent, soit dans le monde matériel, et c’est à quoi tous deux étaient bien décidés.
Pendant quelque temps ils restèrent indécis sur ce qu’ils devaient faire. L’armée et la marine les tentèrent tour à tour. Avec les protections qu’ils pouvaient obtenir par le secours des anciens amis de leur père, il leur était permis d’espérer une commission dans l’une ou l’autre de ces carrières. Mais ce parti ne souriait à aucun des deux frères, et ils s’avouèrent bientôt qu’ils préféraient des emplois moins nobles, mais plus sûrs, pour arriver à recouvrer la fortune perdue. Ils travailleraient (de leurs mains s’il le fallait) jusqu’à ce qu’ils eussent acquis les moyens de reprendre les terres de leurs ancêtres aux usurpateurs qui venaient de s’y établir. Jeunes, forts et courageux, ils ne doutaient pas d’arriver au but.
« Où irons-nous ? demanda Richard, le plus jeune des deux.
– En Amérique, répondit l’aîné.
– Dans quelle partie ?
– Dans le Sud, le Pérou, reprit Richard ; nous pourrons parcourir la Sierra des Andes, du Chili à l’isthme de Panama. Comme natifs de la Cornouailles, nous adopterions la spécialité de notre pays et nous deviendrions mineurs. Les montagnes des Andes nous en fourniront l’occasion ; au lieu d’étain gris, là nous pouvons chercher l’or. Que dites-vous du sud de l’Amérique ?
– Ce pays me plaît parfaitement, mais je dois avouer, frère, que je n’ai aucune sympathie pour votre autre projet. Je préférerais être marchand plutôt que mineur.
– Que cette préférence ne vous empêche pas de choisir le Pérou. Beaucoup d’Anglais ont fait fortune dans le commerce péruvien : adoptons des occupations différentes, sans cependant nous éloigner l’un de l’autre. Nos mille livres nous donneront à chacun le moyen de commencer, vous comme marchand, moi comme mineur. Le Pérou convient également aux deux genres d’affaires. Décidez, Dick. Partons-nous pour le pays rendu célèbre par Sizacre ?
– Si vous le voulez.
– C’est convenu. »
Un mois après cette conversation, on aurait pu voir les deux Trevaniow à bord d’un vaisseau s’éloignant de Sand’s End vers le sud-ouest ; six mois après, tous deux débarquaient sur le rivage de Callao ; en route d’abord pour Lima, ensuite pour les montagnes aux blancs et stériles sommets, couronnés de neige, qui s’élèvent au-dessus des trésors du Cerro Pasco , fièrement gardés dans leur enceinte de rocs inattaquables.
Ce livre n’a point pour but l’histoire des frères Ralph et Richard Trevaniow. S’il en était ainsi, un espace de quinze années, à partir de leur arrivée à Cerro Pasco, serait à remplir ici.
Il suffira de dire que Richard, le plus jeune, bientôt fatigué de la vie de mineur, traversa avec son frère les Cordillères, et pénétra dans la grande forêt Amazone, la Montana, comme elle est appelée par les habitants espagnols des Andes. Alors, en compagnie de plusieurs marchands portugais, il descendit la rivière Amazone, en trafiquant le long de ses rives, aussi bien qu’en suivant plusieurs rivières secondaires. Finalement, il s’établit marchand à son embouchure, dans la florissante ville de Gran Para .
Richard devint bientôt le mari d’une femme aux cheveux blonds, fille d’un compatriote, qui, comme lui, avait établi des relations commerciales à Para. Au bout de peu d’années, il était père de plusieurs charmants enfants ; deux seulement restèrent pour lui donner ce doux nom.
Quinze ans après avoir quitté le Sand’s End, Richard Trevaniow, bien que n’ayant pas encore trente-cinq ans, était veuf avec deux enfants, respecté, aimé, estimé, dans une position prospère, assez riche pour retourner dans sa patrie et passer le reste de ses jours dans l’état si envié par le poète romain : otium cum dignitate .
Se rappelait-il le vœu prononcé autrefois par lui et son frère, de rentrer en Cornouailles aussitôt leurs fortunes faites, et de reprendre possession des terres de leurs ancêtres ? Oui, il avait écrit à Ralph à ce sujet et n’attendait que sa réponse. Il ne doutait point que les désirs de son frère ne fussent d’accord avec les siens et qu’il ne se joignît bientôt à lui pour retourner au pays natal.
La vie du frère aîné pendant cette période de quinze années avait été moins aventureuse et moins couronnée de succès. Il était cependant, sinon riche, du moins indépendant. Comme Richard, il s’était marié de bonne heure, mais à une femme du pays, Péruvienne de la plus grande beauté. Elle était partie aussi pour un monde meilleur, en laissant deux enfants, un garçon et une fille. Le plus jeune des deux était la fille. Elle avait douze ans, le fils touchait à sa quatorzième année.
L’épître de Richard trouva Ralph prêt à accomplir le projet des anciens jours. Ce n’était pas la première fois qu’il en était question dans les lettres que s’écrivaient les deux frères aussi souvent que les communications, peu faciles, le leur permettaient.
Richard proposait à Ralph de le rejoindre à Para ; de cette façon, au lieu de tourner le cap Horn ou de traverser l’isthme par Savanca, il descendrait la rivière Amazone, dont la traversée l’emmènerait longitudinalement à travers le continent presque sur la ligne de l’équateur.
Richard avait deux raisons pour proposer cette route ; d’abord il désirait que son frère vît la grande rivière Orellana, ensuite il voulait la faire connaître à son propre fils.
Le fils de Richard Trevaniow était alors avec son oncle aux mines de Cerro Pasca. Le jeune homme s’était rendu au Pérou l’année précédente sur l’un des navires de son père, d’abord pour voir le grand Océan, ensuite les grandes Andes, puis le pays des Incas, et enfin pour faire connaissance avec son oncle et ses deux cousins dont l’aîné avait le même âge que lui. Il était allé au Pacifique par mer. Son père désirait qu’il revint dans l’Atlantique par terre, ou pour parler correctement, par les rivières.
Les désirs du marchand devaient être satisfaits. Ils s’accordaient parfaitement avec ceux du mineur. Ralph Trevaniow avait un esprit aussi aventureux que celui de son frère, et que quatorze années passées au travail des mines dans les froides montagnes de Cerro Pasco n’avaient ni endurci, ni refroidi. La pensée de retourner dans sa patrie lR