Les mystères de Londres
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Les mystères de Londres , livre ebook

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Description

Paul Féval (1816-1887)



"En 1840, Sydney comptait à peine trente mille habitants, soit environ le sixième de la population composée d’Anglais libérés ou de soldats, et le reste de convicts des Trois-Royaumes, libérés ou subissant leur peine(1).Ceci ne veut pas dire toutefois que les Anglais libres n’eussent pas été bien à leur place parmi les condamnés, car il n’en était guère, jusques et y compris le gouverneur, qui n’eût un ou plusieurs crimes sur la conscience. Toute la différence consistait en ce que les uns commettaient leurs crimes sous le couvert et à l’abri des lois, quand les autres étaient les victimes de ces mêmes lois. Cette légère nuance a bien son prix quand il s’agit d’une colonie de la Grande-Bretagne.


Or, les 5.000 Anglais cités plus haut professaient à l’égard des 25.000 convicts, bushrangers ou indigènes, un peu moins d’attachement qu’ils n’en avaient pour leurs propres chiens, et, de leur côté, les relégués n’attendaient qu’une bonne occasion, puisqu’on les traitait en chiens, de dévorer les mollets de leurs maîtres, voire même de leur sauter à la gorge et de les étrangler. Rapports peu cordiaux en somme, mais largement motivés par la cruauté des uns et les antécédents des autres.


Si donc le léopard britannique flottant au-dessus du palais du gouverneur avait les griffes très acérées, la langue sanglante et les dents longues, il n’en effrayait guère plus pour cela les chacals qui rôdaient entre Paramatta et Botany-Bay, dans cette vallée semi-circulaire qu’entouraient les gradins ouest des montagnes Bleues. Le lord gouverneur, on le disait du moins, avait aussi les dents fort longues et la meilleure preuve en était dans la rapidité avec laquelle il se constituait une respectable fortune."



Tome III


Nous poursuivons, de l'Australie à l'Irlande, les aventures du marquis de Rio-Santo, de son vrai nom : Fergus O'Breane, dans sa folle et impitoyable guerre contre l'Angleterre, pour une Irlande libre.


Ce troisième tome a été écrit par Paul Féval fils.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9782374637563
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0019€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les mystères de Londres
 
Tome III
 
 
Paul Féval
 
 
Août 2020
Stéphane le Mat
La Gibecière à Mots
ISBN : 978-2-37463-756-3
Couverture : pastel de STEPH'
lagibeciereamots@sfr.fr
N° 756
CINQUIÈME PARTIE
Guerre à l’Angleterre
 
I
Chacals contre léopard
 
En 1840, Sydney comptait à peine trente mille habitants, soit environ le sixième de la population composée d’Anglais libérés ou de soldats, et le reste de convicts des Trois-Royaumes, libérés ou subissant leur peine (1) .Ceci ne veut pas dire toutefois que les Anglais libres n’eussent pas été bien à leur place parmi les condamnés, car il n’en était guère, jusques et y compris le gouverneur, qui n’eût un ou plusieurs crimes sur la conscience. Toute la différence consistait en ce que les uns commettaient leurs crimes sous le couvert et à l’abri des lois, quand les autres étaient les victimes de ces mêmes lois. Cette légère nuance a bien son prix quand il s’agit d’une colonie de la Grande-Bretagne.
Or, les 5.000 Anglais cités plus haut professaient à l’égard des 25.000 convicts, bushrangers ou indigènes, un peu moins d’attachement qu’ils n’en avaient pour leurs propres chiens, et, de leur côté, les relégués n’attendaient qu’une bonne occasion, puisqu’on les traitait en chiens, de dévorer les mollets de leurs maîtres, voire même de leur sauter à la gorge et de les étrangler. Rapports peu cordiaux en somme, mais largement motivés par la cruauté des uns et les antécédents des autres.
Si donc le léopard britannique flottant au-dessus du palais du gouverneur avait les griffes très acérées, la langue sanglante et les dents longues, il n’en effrayait guère plus pour cela les chacals qui rôdaient entre Paramatta et Botany-Bay, dans cette vallée semi-circulaire qu’entouraient les gradins ouest des montagnes Bleues. Le lord gouverneur, on le disait du moins, avait aussi les dents fort longues et la meilleure preuve en était dans la rapidité avec laquelle il se constituait une respectable fortune.
Son exemple, est-il besoin de le dire, était admirablement suivi, car plus on descendait l’échelle des subalternes, plus il y avait de griffes crochues qui s’aiguisaient dans la chair des condamnés. Ceux-ci, il est vrai, avaient pour consolation suprême certains airs funèbres dont les fusils de la garnison faisaient tous les frais.
Cependant, par un beau soir de ladite année, à cette heure crépusculaire où la nuit, dans ces parages, succède vite au jour, on eût dit que tout à coup les appétits avaient changé d’estomacs. Les chacals avaient pris envie de manger le léopard et celui-ci, griffes et dents rentrées, ne se montrait guère moins prudent qu’un chat vulgaire serrant la queue entre les jambes, comme s’il se fût attendu à être houspillé d’importance.
Une animation extraordinaire régnait dans tout Port-Jackson, depuis Pyrmont jusqu’à Rose-Bay, et dans les différents faubourgs de la ville. Là, si l’idiome londonien se faisait entendre de loin en loin, il était dominé par l’accent traînard de l’Écosse et plus encore par le rude langage de l’Irlande. Chose naturelle, à tout prendre, les Irlandais ayant toujours bénéficié dans la plus large mesure de la tyrannie de l’Angleterre, ce qui les mettait à même d’entrer pour les deux tiers dans le contingent des déportés à la Nouvelle-Galles du Sud. Pour l’autre tiers, il n’en était pas à des scrupules de nationalité, ayant rompu depuis longtemps avec les principes de respect dû à l’autorité de Sa Majesté Britannique. De sorte que le tout compact, agrémenté de quelques insulaires et de certains squatters mécontents de leur côté, avait envahi brusquement la ville avec des intentions ignorées de M. le gouverneur, et roulait à travers les rues depuis la tombée de la nuit.
Prévoir est une des conditions essentielles pour bien gouverner. Le gouverneur n’avait rien prévu ; il s’empressa de faire appel à la garnison et de mettre toutes les troupes sur pied. Cramoisi dans son col de crin qui lui serrait la gorge, traînant avec fracas son sabre sur les dalles, il avait beau pester et jurer, s’en prendre à tout le monde de ce que présentait d’insolite cette affluence de gredins envahissant Sydney au mépris de tous les règlements, le fait n’en était pas moins avéré et lui-même moins inquiet.
Des patrouilles se mirent à parcourir les rues, distribuant de-ci de-là des coups de crosse et prêtes à faire feu à la moindre alerte. Mais les gueux glissaient le long des murs, silencieux et sournois, ne proférant ni un cri ni une menace ; ils allaient paisiblement se concentrer sur divers points et ceux qu’on tenta d’interroger ne répondaient rien ou donnèrent de leur présence personnelle un motif évidemment déguisé. Ceci, d’ailleurs, ne les empêchait pas de se glisser, en se croisant, quelques mots à l’oreille.
Jamais on n’avait rien vu de semblable dans la colonie, et lord Randolph Humphray, le gouverneur, en enrageait au milieu de son conseil assemblé en toute hâte. Il en rendait responsables tous ceux qui étaient présents ; il en rendait aussi responsables les chefs de district et les propriétaires ayant charge de forçats employés par eux, les premiers comme les seconds ne devant sous aucun prétexte permettre aux condamnés de venir en ville sans autorisation supérieure. Dans sa colère, il menaçait de faire pendre tous ceux qui, par faiblesse ou trahison, auraient été cause des troubles ou fuiraient devant le danger.
La moitié de la population, il faut le dire à sa louange, avait déjà pris ce dernier parti.
Le commandant de la garnison, tout en faisant moins de bruit, avait peut-être un peu plus d’idées. Il jugea à propos de les faire connaître et prit la parole :
–  Nous avons des canons, dit-il, il faut les bourrer jusqu’à la gueule et s’en servir. Nous avons des soldats qui se rouillent dans l’inaction et ne demandent qu’à se distraire. Un navire de la marine royale, le Calédonien , est mouillé dans le port et nous prêtera main-forte. Le plan est donc très simple : pousser les rebelles vers la mer et les prendre entre deux feux. On tuera les hommes et on noiera les femmes, car il y a aussi des convicts femelles, mille diables !...
Il s’arrêta court : un coup de canon venait de faire trembler les vitres de la salle du conseil. Comme s’il eût servi de signal, on entendit une immense clameur faite de cris, de hurlements, de vociférations poussées par une multitude. Lord Humphray et ceux qui l’entouraient n’osèrent s’entre-regarder parce qu’ils se devinaient pâles. En même temps, des lueurs, projetées des quatre coins de Sydney, embrasèrent l’horizon ; les deux collines qui se font face et sur lesquelles s’étagent les maisons, pour la plupart alors construites en planches, se transformèrent instantanément en brasiers et l’on entendit, avec les sinistres craquements du bois sous la flamme, l’horrible ronflement du fléau qui gagnait de proche en proche. D’autres foyers d’incendie naissaient de tous côtés. Courant à travers les rues, des ombres fantastiques brandissaient une torche d’une main, un poignard de l’autre.
Bientôt la fusillade se mit de la partie, les cris et les imprécations redoublèrent, le chaos devint indescriptible ; et dans cette nuit des tropiques, où règne d’ordinaire un calme chaud et lourd, c’était un lugubre spectacle que celui de ce ciel rouge et de ces démons hurlant à la mort, tantôt violemment éclairés par les reflets de la fournaise, tantôt disparaissant dans un coin sombre, comme s’ils fussent rentrés sous terre.
Les personnages formant l’état-major du gouverneur s’étaient précipités au dehors, pour savoir d’où venait le mot d’ordre et pour tenter d’enrayer l’émeute. Lui seul demeurait là, livide.
C’était un gros homme apoplectique, sans aucune capacité. Il avait beaucoup intrigué pour obtenir le gouvernement de Sydney où l’on s’enrichit vite. Lady Nelly Humphray, une de ces rares beautés dont la race saxonne produit de moins en moins d’exemples, avait surtout intrigué pour lui ; on le prétendait tout au moins. On disait aussi que tous les actes du bonhomme étaient réglés par elle, que toute la politique de la colonie prenait naissance dans son boudoir. Toutes, sauf celles des sévices cependant, car la cruauté paraissait être od

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