Les perles de granite
84 pages
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Les perles de granite , livre ebook

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Description

Un air de tristesse plane sur Bou Barrane : le hameau n’existe plus !
Sabrina est née sur les hauteurs de Sedjerara, dans la willaya de Mascara. Elle est issue d’une famille de « Hamdaouis », adeptes de la magie. Son père, Si Ben, tient une épicerie et pratique divers métiers.
Mais un hélicoptère tournoie au dessus de la maison. Cet « oiseau de malheur » annonce la guerre. Son père prend le maquis mais il est finalement arrêté, puis sa mère et sa sœur Gharbia, sont battues. Condamné à mort, Si Ben s’échappe et s’enfuit à Oran.
Oran tremble sous les coups de mortiers ; c’est la bataille des rues et des barricades. Comme leur mère est répudiée, les enfants errent et retrouvent une tante, qui les envoie à la campagne rejoindre leur père. Mais bientôt, ils rencontrent leur jeune belle-mère. C’est la misère, la maladie et les décès. Son oncle marie Sabrina de force. Elle découvre son cousin et époux pour sa nuit de noce. Plus tard, elle le rejoint en France.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 décembre 2013
Nombre de lectures 1
EAN13 9782332601193
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright














Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-60117-9

© Edilivre, 2014
Les perles de granite
Le retour aux sources ou les illusions d’une enfance perdue
Dès le lendemain de son arrivée au pays, très tôt dans la matinée, Sabrina commande un taxi. Elle est pressée de se rendre au cimetière du village de « Sidi Hamadouche » où son père est enterré.
Au bout de quelques minutes d’attente, un taxi se gare en face de la porte d’entrée. Le chauffeur s’impatiente déjà et klaxonne sans arrêt.
Sabrina se hâte, enfile ses babouches et réajuste son foulard sur sa tête. Son fils Yanis se précipite hors de l’appartement. Heureux, il descend les marches d’escalier quatre à quatre et court comme un fou dans l’allée. Sa mère, ses deux cousines et sa tante Nina lui emboîtent le pas. La grand-mère, Méma, les accompagne du regard. Avec un broc, elle jette un peu d’eau derrière les voyageurs en guise de porte bonheur. Sabrina et toute sa famille traversent la chaussée : ils s’installent dans le taxi.
Le chauffeur démarre, quitte la rue René Bazin et le quartier surpeuplé de Saint-Pierre ; la Cité Perret grouille de centaines de gens. Sabrina baisse la vitre de la portière afin de laisser entrer la fraîcheur ; la brise marine souffle sur la « Bahia 1 ». Le conducteur accélère. L’auto passe devant la « wilaya 2 » puis vire vers le front de mer. Santa-Cruz domine sur les hauteurs et « Sid el Houari » veille sur la ville d’Oran.
Le taxi roule et s’éloigne à vive allure de la ville côtière. Le voyage dure à peine une heure. Le mausolée de « Sidi Hamadouche » se situe dans la commune de Sedjerara. Le chauffeur s’arrête à l’entrée du douar. Sabrina descend la première, ôte ses babouches et marche pieds nus sur le sol brûlant. Arrivée sur la tombe de son père, elle s’agenouille et embrasse la terre. Sabrina se confie aux pierres et parle de ses cauchemars…
Son garçon s’approche d’elle, l’air interrogateur. Sa mère s’effondre en larmes et lui répond : « Une petite fille pleure depuis longtemps dans mon cœur ! Bou Barrane, me manque et les souvenirs me reviennent souvent ! »
L’enfant compatit à la tristesse de sa mère. Aussitôt, il accourt vers le chauffeur et lui demande cette faveur : « Bou Barrane n’est plus qu’à quelques kilomètres. Pouvez-vous nous y emmener ? »
Le chauffeur marque un temps d’hésitation, et avant qu’il ne réponde, le jeune homme insiste et réitère sa demande : « Emmenez-nous ! Emmenez-nous ! S’il vous plaît. »
Le chauffeur hésite encore un peu puis cède, mais moyennant finance.
L’auto se lance en direction de l’Atlas tellien, monte vers le djebel. La route serpente. Le taxi roule, zigzague et rebondit. Les montagnes se chevauchent et s’étendent à perte de vue.
Le chauffeur coupe le moteur et gare son véhicule en contrebas de la colline aux deux « walis 3 » : le dôme de « Sidi A. Benziène » et de « Sidi M. Ben Ali ».
La gardienne des lieux Saints veille, nous ne partirons pas sans payer. Elle dévale le versant et court pour venir chercher son dû. Chacun met la main à la poche et lui tend quelques pièces de monnaie. Sabrina en profite pour la questionner :
– « Savez-vous où se trouve « Bou Barrane ? »
– La servante secoue la tête pour dire non.
– Y a-t-il des habitations par ici ?
– Elle pointe son doigt vers un lointain buisson.
– Sabrina lui adresse des remerciements, l’abandonne à ses occupations et repart dans le sens indiqué.
Personne à l’horizon, pas un homme, pas une bête ni même un insecte volant ; rien que de vieux arbres rabougris, rien que des montagnes arides, des crevasses béantes et des oueds profonds.
Le chemin est court mais le trajet leur parait long. Sabrina peine pour atteindre sa destination…
– M’man ! M’man ! « Y a un pâté de maison ! » dit Yanis.
Bouzaïda, la petite bourgade aux murs badigeonnés de chaux éclate de blancheur sous un soleil brûlant. À l’entrée du douar, sous le vieil olivier, deux personnes se reposent tranquillement.
Les visiteurs s’arrêtent près des deux hommes qui ne bougent pas. Ils manifestent leur présence, se présentent un par un et selon l’ordre de préséance : les hommes d’abord, les femmes ensuite :
– « Assalamou Alaykoum » ? « Ana Bilal », dit le chauffeur de taxi.
– Wa alykoum Salem ! répondent les hommes aux visages cachés par de grands chapeaux : de beaux « Mdals » tressés en feuilles de « doums 4 » et surmontés de gros pompons.
– Salem ! Labès !
– Labès ! Hamdou’Allah !
Sabrina interrompt les salutations :
– Pouvez-vous nous indiquer le chemin de Bou Barrane ?
Surpris par le comportement « osé » de la femme, les deux frères se redressent, retirent leur couvre-chef et la regardent fixement.
Sabrina comprend vite le message et baisse d’un ton. Elle s’excuse d’avoir écourté leur sieste et redemande gentiment : « pouvez-vous me montrer la route de Bou Barrane ? »
Les deux hommes se montrent méfiants.
Elle décline son identité par le détail afin de faciliter la conversation.
Ils changent alors d’attitude et lui demandent :
– Vous êtes donc les enfants de Si Ben ? que Dieu ait son âme !
– Votre mère, méma ! est-elle toujours en vie ? Et Gharbia la gentille, qu’est-elle devenue ?
– Maman va bien ! quand à ma sœur, Gharbia ! elle est décédée !
– Allah ! dit l’un.
– Qu’Allah la bénisse et lui accorde son pardon ! reprend l’autre peiné.
Sabrina laisse passer le flot d’émotions, puis pose à nouveau la même question :
– Pouvez-vous me montrer le chemin qui mène à Bou Barrane ?
Les deux hommes, M. Bouzaïda et son frère braquent leur matraque en direction de la colline voisine.

1. La radieuse.
2. Préfecture.
3. Marabout (Lieu saint).
4. Palmier nain.
Bou Barrane
Sabrina lève les yeux, scrute les hauteurs, mais rien n’apparaît. Un air de tristesse plane sur Bou Barrane : son Hameau n’existe plus !
Elle décide malgré tout de se rendre sur les lieux.
Sa maison n’est plus qu’un tas de débris. Un inconnu se sert dans ses ruines. Sabrina l’interpelle et lui dit :
– Ceci est mon bien ! Que fais-tu ?
– Ne vois-tu pas que je ramasse des cailloux ?
– Tu pilles ! Tu voles les pierres de ma demeure avec lesquelles tu espère construire la tienne ! Tu n’as pas peur qu’elle te tombe dessus ?
L’homme n’éprouve aucune gêne. Il la dédaigne, sourit du coin des lèvres et lui réplique :
– Qui es-tu ?
Sabrina crie :
– Je suis Sabrina, la fille de Si Ben ! Je descends de la lignée de Sidi Ali Benziène ». Mon grand-père était un excellent « hamdaoui 5 ». Papa aussi était célèbre, il pratiquait l’exorcisme et tout le monde le craignait. Je suis une Ziyènia, une vraie Sedjeraria ! Le sais-tu ? »
L’individu hausse les épaules et ne lui porte que peu d’attention. Sabrina insiste. Elle veut une explication.
L’homme trouve vite la réponse et lui dit : « Ton douar a été abandonné depuis fort longtemps. Les maisons sont toutes tombées pour cause d’intempéries. Quant à tes pierres ! Je vais leur donner une nouvelle vie. »
Heurtée par son arrogance et son mépris, Sabrina se sent prise d’un mal être et s’isole pour méditer. Elle exprime ses pensées à voix haute, parle à « Mascara », ville chef-lieu de sa contrée :
« Mascara 6 ! » J’ai fait mes premiers pas sur tes vastes terres, j’y ai vécu mes quatre plus belles années. Je suis née à « Sedjerara », au hameau de Bou Barrane hélas ! Disparu.
Ô ! Cité de ma petite enfance, souviens-toi de moi, je t’en supplie ! Je t’ai quitté en pleine guerre, mes sentiments étaient amers et mes larmes coulaient. Loin de toi j’ai beaucoup souffert. J’ai enduré la faim et la misère. Les souvenirs restent à jamais gravés dans ma mémoire. J’ai tellement langui de te revoir durant toutes ces années. Le temps et les pilleurs ont effacé mes repères. Aujourd’hui, je me sens perdue. De ma superbe demeure, il ne reste que quelques pierres éparpillées au milieu d’un paysage triste et nu. Comprends-moi, je suis en colère ! Laisse-moi te dire tout ce que j’ai sur le cœur ! Permet-moi de te raconter la belle histoire de mes débuts et le déclin de mon enfance à jamais perdue.

5. Homme faisant parti d’une confrérie qui pratique la « hadra », le nom de Dieu et de nombreuses prières sont invoquées sans interruption jusqu'a s'emparer du corps puis de l'esprit des participants (internet)
6. Mascara est une ville de l’ouest de l’Algérie.
Notre maison
Troublé, Yanis prend sa mère par la main et lui dit : « Vas-y ! Parle ! Raconte-moi tout. »
Sabrina s’assied au milieu des ruines et retrace le chemin de sa vie. Elle égrène ses souvenirs et décrit son douar perdu :
« Sidi Ali Benziène et Sidi Mhamed Benali, les Saints « Marabouts », mes ancêtres, régnaient en maîtres sur la vallée. « Bou Barrane » était prospère ; ma famille vivait dans le calme et la sérénité. Papa était tailleur. Maman tissait des burnous et des djellabas avec dextérité.
Notre maison était belle, solide et bien bâtie. Elle se dressait là-haut sur la colline et s’élevait comme un minaret au dessus du sommet. De toute sa hauteur, mon havre de paix supplantait Bouzaïda, la « Haouita 7 » du grand-père et le grand olivier.
Notre maison était entourée de haies de figuiers de Barbarie. Le chemin en était difficile d’accès ; il serpentait entre les allées de plantations d’Agaves...

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