Azimut et scorbut
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Description

Azimut et scorbut

AbiGaël
Pulp de 238 000 caractères
1519. Une petite souris s’est glissée dans la besace d’un jeune andalou, enrôlé de force par les sbires de Magellan. Elle sera témoin de tout ce que n’a pas dit Pigafetta, le jeune lieutenant génois, rapporteur du premier tour du Monde de l’histoire. Ils partent vers l’ouest, toutes voiles dehors, le cœur plein d’espoir et les cales pleines comme leurs burnes. Whaaah... elles sont gratinées, les amours des marins, restés pendant trois ans en manque de femmes ! Mais que d’épreuves...
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Publié par
Nombre de lectures 14
EAN13 9782363075048
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0019€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Azimut et scorbut AbiGaël Plantons le décor : Nous sommes en 1519. Nous embarquons, transformés en petite souris, en tant que témoins d’une des plus grandes aventures humaines de l’ère historique : nous allons refaire le premier tour du monde avec Magellan. La petite souris cherche à lire entre les lignes des manuscrits de son rapporteur principal, Antonio Pigafetta, (l’un des seuls dix-huit membres d’équipage qui sont revenus à Séville), ainsi que des autres chroniqueurs de l’aventure. Si l’Inquisition rigoureuse fait régner à cette époque une morale de plomb sur l’occident – et plus encore sur la très catholique Espagne – on sait bien que tous les marins du monde savent se libérer de leurs pulsions et s’amuser… Voici – en sus de l’épopée officielle - ce que n’ont pas osé consigner, ni la plume pudibonde du jeune lieutenant italien dans son livre de bord quotidien, ni celles des autres témoins rapporteurs de l’épopée. Ami lecteur, si tu veux suivre le voyage sur les cartes du monde, rappelle-toi que « Gogol » est ton ami. En quelques clics de souris sur son excellent moteur de recherche cartographique, tu pourras suivre les pérégrinations de l’armada magellane et de notre petite souris. Les noms d’îles et de lieux sont donnés lors de la première occurrence dans leur graphie d’époque. Nous les transposons ensuite dans les toponymes modernes.
À Calicut Rappelons qu’à l’époque le Portugal est un grand pays de navigateurs et de découvreurs. Les Portugais sont établis en Inde depuis 1498, date où Vasco de Gama débarquait à Calicut, dans le Kerala, après avoir planté des comptoirs sur le pourtour de l’Afrique. Puis vint la conquête des environs de cette ville et celle de Goa, plus au nord, devenue capitale de l’Inde portugaise sous Alfonso de Albuquerque. Le conquistador gagna ensuite Malacca la capitale malaise de l’époque, puis les Moluques, objet de toutes les convoitises, en 1512. Les Moluques, nous y voilà ! Ces îles ne sont plus aujourd’hui que des cailloux de faible importance, perdus en plein milieu de l’équateur, au sud de l’archipel indonésien et à l'ouest de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Que représentent donc les Moluques à cette époque ? Peu de temps après les premières grandes découvertes, ce petit archipel est devenu le premier pays producteur d’épices au monde et particulièrement la cannelle et le clou de girofle. À l’époque, ces denrées sont très recherchées par les gens fortunés. Elles masquent en effet les odeurs des viandes faisandées que l’on ne sait pas conserver et contribuent à stériliser quelque peu les mets des tables aristocratiques européennes : le poivre, la cannelle, le girofle et bien d’autres, dont la précieuse vanille. Fernao de Magalhaes, fils d’un nobliau portugais, est plus connu sous le nom de Magellan. Il devint marin dans l’expédition de Francisco de Alméida, premier vice-roi portugais de l’Inde, puis il navigua ensuite pendant 7 ans entre Malacca (Singapour) et Calicut, aux Indes, avec son cousin et ami Francisco Serrao. Celui-ci deviendra le premier gouverneur des Moluques : ces îles qu’il avait atteintes par l’Orient et que Magellan rêve à son tour d’atteindre par l’Occident, en prouvant que la terre est ronde !... Notre propos n’est pas de faire l’hagiographie du navigateur. Rappelons seulement qu’il fut l’ami du cosmographe Ruy Faleiro et qu’ils s’intéressaient tous deux à cette rotondité de la terre. Ils veulent arriver aux Indes par l’ouest, en cherchant une nouvelle route pour les épices. Pour cela, il faut contourner le continent américain, récemment découvert, en cherchant un passage, subodoré dès 1513 par Vasco Nunez de Balboa, le découvreur du Panama. Partir vers l’Ouest pour les Moluques auxquelles on accède si facilement par l’Orient ? – er C’est une fanfaronnade – pense-le roi Manuel I de Portugal ! D’autant plus que ces îles aux épices sont déjà connues et gérées par les Portugais. Le souverain lusitanien refuse donc tout net le projet du navigateur et le congédie en mai 1514. er Alors, Magellan se tourne vers l’Espagne et son jeune roi Carlos I (qui sera élu empereur du Saint-Empire quelques mois plus tard, sous le nom de Charles-Quint). Il lui propose son idée. Outre la quête des épices et la conversion des indigènes, l’autre but du voyage est aussi d’établir une cartographie exacte permettant de délimiter les extensions territoriales au-delà des mers, entre l’Espagne et le Portugal, qui sont définies par le Traité de Tordésillas (1494). Cela séduit Charles-Quint. Le 10 août 1519, donc, cinq caravelles offertes par la couronne espagnole quittent Séville vers l’océan, sur le Guadalquivir. Le pavillon de Magellan, avec les titres d’Adelantado
[gouverneur doté de pouvoir judiciaire, représentant l’autorité royale] et de Capitaine-Général [ce qui lui donne rang d’amiral], orne le Trinidad ; Le San Antonio est sous les ordres de Juan de Cartagena, la Concepcion sous ceux de Gaspard de Quesada, la Victoria sous ceux de Luis de Mendoza et le Santiago, plus petit, est confié à Joâo Serrao. Direction : Sa-Lucar-de-Barrameda, sur la côte andalouse, pour les approvisionnements et vérifications d’avant le grand voyage.
Les brutes recrutent Embouchure du Rio Guadalquivir ; port-arsenal de San-Lucar-de-Barrameda. Il faut recruter les équipages pour les cinq bateaux, soit près de 250 marins. Comme souvent à l’époque, les sbires recruteurs commencent par rafler tout ce que peuvent contenir les prisons comme bagnards libérables, puis tout ce que les bouges et tavernes peuvent offrir comme baroudeurs et aventuriers de tous poils. Il y a toujours des hommes rudes et sans toit, prêts à tout quitter pour contempler des voiles blanches sur un horizon bleu. On rassemble donc là d’anciens bagnards, quelques vrais marins en mal de recrutements, des crève-la-faim provenant des villages environnants, et surtout des durs à cuire plus habitués à arpenter les pontons de navires, les salles basses de tavernes et les paillasses de catins que les douceurs d’éventuels foyers. La plupart sont espagnols, mais l’on recrute aussi 41 Portugais, 21 Italiens, 19 Français, des Flamands, des Allemands, deux Grecs, des Maures, sans compter les deux esclaves malais personnels de Magellan, ramenés d’un précédent voyage. Ça ne suffit pas. Il faut également quelques jeunes mousses, notamment pour remplacer les marins portugais, initialement prévus, qui sont récusés par les Espagnols en raison des antagonismes nationaux. Il y a aussi une autre raison, impérieuse, à la nécessité d’avoir de jeunes mousses à bord. Pigafetta ne dit pas explicitement pourquoi. La petite souris s’en doute un peu… pas vous ? Juan est assis dans la taverne de la Belle-Alanguie et sirote sa dernière pinte de Malacca. Il va devoir remonter vers son village d’Almirante pour aller vaquer à ses occupations de paysan traîne-misère. Contre son gré, il a descendu au port de San-Lucar, avec âne et charrette, la contribution de lentilles et de haricots réquisitionnée par l’Alcalde des arsenaux de Séville. Il faut assurer les réserves des marins qui vont s’embarquer vers le pays des Épices. Juan s’en fout bien des épices. Il ne sait même pas ce que c’est. Ce qu’il a compris, c’est que la contribution de sa famille ne sera payée, au mieux, que dans de nombreux mois, à supposer qu’elle soit payée un jour par la Municipad de San-Lucar ! Son père ne décolère pas. Juanito, comme il l’appelle, va devoir affronter de nouveau son humeur massacrante et trimer encore plus, aux champs, sous le cagnard, derrière la rosse qui traîne la charrue. Il pense aux marins qui vont partir et se dit qu’eux, au moins, ils mangeront tous les jours à leur faim ; ils verront du pays. Parfois, il se dit qu’il devrait se faire marin, lui aussi… Ses seize ans révolus et sa vie au grand air lui donnent une fort belle mine, en dépit de son air gracile, même si sa tignasse noire comme l’encre ne rencontre pas souvent la contrainte du peigne. Guider la charrue, couper le méteil à la faux ou charger et hâler les charrettes derrière l’âne, lui ont façonné au fil des ans et des activités pastorales une superbe musculature. L’officier de l’Alcalde ne s’y trompe pas lorsqu’il passe la tête par l’entrebâillement de la porte de la taverne, à la recherche de recrues supplétives pour les caravelles de son maître. Le voilà bientôt attablé auprès du jeune Juan, qu’il impressionne avec son bel uniforme et son épée luisante. Comme si de rien n’était, le militaire se met à parler d’horizons lointains, de contrées riantes et prospères, de villes et de ports grouillants de filles plus jolies les unes que les autres. Le jeune homme l’écoute bouche bée et rêve. Juan connaît-il les filles ? Non. Juanito n’a encore aucune expérience de ce côté-là. Son père lui tient beaucoup trop la bride courte pour le laisser musarder du côté des jolis minois.
Juan s’intéresse-t-il aux jolis minois ? L’officier le regarde droit dans les yeux. Juan se trouble et bégaie. Non, il ne peut pas avouer que les chipies des alentours le laissent complètement indifférent. Le recruteur lui remplit sa chope de nouveau, pour la cinquième ou sixième fois depuis qu’il s’est installé à ses côtés. L’esprit de Juan est ailleurs… Non, pour dire le vrai, Juan est maintenant complètement saoul et s’affale sur sa table. Bien sûr, l’officier se propose à la cantonade pour le ramener avec la propre charrette du jeune homme. Tous les clients du bouge rigolent ! Comme la petite souris, ils ont compris dès le début que la Marine espagnole venait en chasse et qu’elle emportait une nouvelle et bien involontaire recrue. L’âne et la charrette ne seront assurément pas perdus non plus pour l’Amirauté… *** Juan s’ébroue en tombant de son hamac. Il est malade comme jamais et s’affale en glissant dans une mare de déjections avinées. De bien curieux bruits lui résonnent aux oreilles. Clapot de l’eau, claquement de cordages, ordres jappés à l’étage au-dessus. Il s’avance dans le clair-obscur de l’entrepont vers le tillac [pont du navire entre les gaillards d’avant et d’arrière, c'est-à-dire le pont supérieur] et son escalier rugueux en haut duquel il soulève une trappe. C’est une écoutille, mais il ne sait pas encore ce que c’est. L’horizon est bleu de tout côté. Le sol tangue sous ses pieds. Juan est en pleine mer et ne comprend rien à ce qui lui arrive ! Un maître de pont se rue sur lui et l’oblige à rouler un énorme cordage dans lequel il vient de se prendre les pieds. Juan n’a pas l’habitude de marcher sur un pont de bateau qui tangue et encore moins de se faire commander ; il proteste vigoureusement. Le fouet s’abat sur ses reins avant qu’il n’ait eu le temps d’y prendre garde. Il hurle sa colère avec rage, ne réussissant qu’à recevoir une deuxième bordée de coups de lanière. Que fait-il là ? Que lui veut-on ? Pourquoi le traite-t’on comme ça ? L’officier éclate d’un gros rire gras devant sa mine paniquée et s’emporte à nouveau : — Ah, tu as signé, mon garçon. Tu ne vas pas commencer à faire ta mijaurée, maintenant. Tu as intérêt à t’amariner, et très vite, sans quoi je vais m’occuper de toi ! Et si ce n’est pas moi, ce seront les requins qui s’occuperont de toi ! Compris ? — J’ai rien signé, moi !... L’homme disparaît dans le château arrière en ricanant pendant que Juan vomit une nouvelle fois en essayant de le faire par-dessus le bastingage. Il se sent mal à mourir, à la fois parce qu’il finit à peine de décuver et surtout parce qu’il est pris d’une éprouvante crise de mal de mer. Le marin revient en lui brandissant sous le nez un parchemin déroulé à la diable : — Juan, c’est ton nom, n'est-ce pas ? Et ça, c’est quoi, sinon ton engagement pour cinq ans dans la marine ? T’as signé, c’est ta marque, là ! Bien sûr que non, Juan n’a pas signé. Il en serait bien incapable puisqu’il ne sait ni lire ni écrire. Mais l’homme lui indique la grosse croix noire malhabile tracée au bas du document. Un autre à fait une marque à sa place, c’est sûr… Mais qu’y faire ? Juan ne comprend pas vraiment ce qui lui arrive. Il essaie de se rappeler le bel officier rencontré la veille au soir. Il comprend surtout qu’il s’est fait emporter par les Royaux comme son cousin Ramon, l’an passé, qui a disparu lui aussi sans crier gare… Il n’a plus qu’à obéir. C’est hélas le destin de bien des jeunes garçons, dans les villes portuaires pourvues d’un arsenal.
Débuts de culbutes Ils sont partis, donc, le 20 septembre 1519. Magellan est seul maître à bord de l’escadre avec rang d’amiral ; il à 39 ans. À bord, farine, haricots, lentilles, riz, 570 livres de porc salé, 200 tonneaux de sardines, 984 fromages, 450 cordons d’ail et d’oignon, 1512 livres de miel, 3200 livres de raisins secs, sans oublier le Xérès pour le moral des marins. En termes d’intendance, le voyage s’annonce bien. Cette traversée vers les Amériques n’est pas une première. Le continent américain est déjà connu depuis Colomb. On le nomme les Indes occidentales. Plusieurs colonies portugaises y sont déjà établies, notamment au Brésil, qui s’appelle Verzin à cette époque là. Juan est le plus jeune mousse du San Antonio, la plus grosse des cinq caravelles. Comme tous les mousses de la marine, il est traité comme un moins que rien par les plus anciens. Brimades et rebuffades étouffent sous les coups et les insultes ses jérémiades de marin non consentant. Dormir dans un hamac ? Juan n’y parvient pas, et ne trouve pas le sommeil, entortillé qu’il se trouve dans des mailles trop larges, qui lui entaillent les chairs de son dos anormalement arrondi. Les châlits sont réservés aux chefs de quarts. Lorsqu’il arrive enfin à s’assoupir, le voilà brutalement renversé à terre sous la risée des aînés, qui trouvent dans ces jeux idiots un dérivatif à leurs angoisses. Bref, Juanito devient vite le souffre-douleur… Comme tous les jeunes mousses, le soir venant, il fait aussi l’objet d’une attention particulière… C’est d’abord Gomez, son chef de quart, qui s’approche de lui dès le deuxième soir avec la braguette ouverte. L’air autoritaire, il sort son sexe puant sous le nez de Juan et attend. Il attend quoi ? Se demande Juan qui ne comprend pas. L’ancien s’énerve. — Alors, tu t’en occupes, oui ou merde ! Juan le regarde effaré. Il n’a jamais vu d’autres sexes d’homme que le sien et celui de son cousin. À la lueur de la mauvaise chandelle qui éclaire la sentine [la cale du navire, partie la plus basse où les eaux croupissent], la chose lui parait énorme, monstrueuse, bouffie et sale. Bien sûr, Juanito s’est déjà donné du plaisir tout seul. Bien sûr, il sait que son sexe, quand il le tripote habilement, peut cracher un liquide blanc qui n’est pas de l’urine et qui s’accompagne d’une sensation extraordinaire. Il n’y a pas si longtemps qu’il l’avait découvert avec Ramon, avant que celui-ci ne disparaisse soudain. Est-ce là ce que veut Gomez ? Il n’a pas le temps de se poser trop longtemps la question. Il se retrouve violemment par terre, mis à bas par une brutale rotation du hamac, accompagnée d’un tonitruant juron. Juan se fracasse le front et les genoux contre les rudes planches mal équarries du pont inférieur et se tord le poignet en hurlant. L’homme le retourne brutalement sur le dos et s’agenouille sur sa poitrine, en lui présentant son sexe maintenant durci : — Suce ! Suces, gamin, où tu passes par-dessus bord au prochain quart ! Le ton est arrogant, dominateur et sans réplique possible. Le sexe de l’homme caresse son nez. La nausée manque de faire encore vomir Juan, qui fait des efforts désespérés pour se retenir et ouvre la bouche avec dégoût. Le voilà bientôt encombré jusqu’aux larynx par un engin monstrueux et palpitant qui l’étouffe. Juan s’étrangle et serre les dents involontairement, à moitié asphyxié. L’homme hurle, se retire brutalement et lui assène une formidable gifle, qui manque de lui emporter la mâchoire. Les yeux de Juanito se révulsent de terreur… Il s’évanouit.
Tout autour, dans les hamacs qui se balancent lentement et sur les paillasses de pont, les rires et les sarcasmes des autres marins s’éteignent. Gomez n’y est-il pas allé un peu fort ? Beaucoup de poignets continuent cependant à s’agiter en cadence, suivis de gloussements plus ou moins étouffés…
Phallus en rut ! Le scénario se répète la nuit suivante, mais cette fois Gomez n’a pas attendu que le mousse soit étendu dans son hamac pour l’entreprendre. Autoritairement, il l’a envoyé à fond de cale, dans la réserve des fèves, au motif d’aller lui chercher un sac vide pour poser sa tête. Après l’y avoir suivi silencieusement, avec Hans-le-Tudesque, ils le coincent, et ils le maintiennent à deux sur les sacs de pois. Deux ignobles tuyaux de chair sombre, puant d’urine, sortis de leurs braies marines et empestant la sueur, cherchent à lui traverser le gosier. Que faire ? Son nez pincé l’empêche de respirer. Les coups de genou dans ses propres parties le ravagent de douleur ; Juan est bien obligé d’ouvrir la bouche et de baisser la langue. — Suce ! L’ordre claque une fois de plus. Juan a bien compris maintenant ce qu’il a à faire, cette fois. Il essaie d’utiliser cette langue, dont il se sert comme cela pour la première fois, afin d’enrouler le gros fruit violet que Gomez voudrait lui faire avaler. Cela semble plaire à la brute, alors il insiste. — C’est bien. Applique-toi. Fait comme si tu voulais qu’on te le fasse aussi ! Puis réfléchissant tout haut à l’incongruité de sa provocation : Ah… Ben non… F’rais beau voir que j’suce un moussaillon comme toi, crénom ! C’s’rait l’monde à l’envers… Hans-le-Tudesque est moins catégorique : — Hey, pourtant l’es mignon, ce môme. L’en a p’têt une fine et droite, qui s’rait meilleure sous la langue que ma chique, tient ! Faut voir, non ? Sitôt dit, sitôt fait. Voici Juan en chemise et cul nu, après s’être fait violemment arracher ses braies et son caleçon. Juan a cessé de se révolter. Rien ni personne ne peut plus venir à son secours, il le sait bien. Il a bien compris que tous les soudards qui l’environnent sont en rut plus ou moins permanent dès la tombée du jour, alors il vaut mieux subir les assauts passivement. — Ah ! Tu vois, fine et droite ! Comme j’t’avais dit ! Et ces petites fesses-là, regarde-moi ça si c’est pas mignon, ça ! Rien que du bonheur à prendre… Pendant que le Tudesque lui attrape le sexe pour le happer d’une bouche gourmande, Gomez lui malaxe le fondement, cherchant l’ouverture. Juan a soudain très peur. Il vient de comprendre qu’il va se faire déflorer par ces brutes qui empestent le Xérès. Il ne sait pas bien comment ils vont faire. Il n’a jamais encore vécu cela. Mais Ramon, son cousin, lui avait raconté sa première fois à lui, avec deux valets de ferme un peu plus âgés. Ils l’avaient pris dans le foin et l’avaient fait monter au ciel, après une brève descente aux enfers. Juan avait alors voulu connaître cela également, tant le récit semblait avantageux. Mais Ramon s’était fait kidnapper avant de pouvoir lui faire éprouver cette « sensation bonne-comme-la-rédemption mais offerte-par-le-diable » comme il disait. Et Juan sait aussi qu’il va avoir affreusement mal. Alors, il serre les fesses ! Eh bien non, justement non, il ne faudrait pas les serrer, ces fesses. Et cela d’autant plus qu’il y a maintenant un doigt qui s’agite furieusement au milieu. Mais il a aussi par devant sur son sexe une langue qui s’agite encore plus furieusement, et la sensation qu’il éprouve devient vite très intéressante. Non, voilà maintenant Juan carrément haletant sous le plaisir qui monte… Sauf que le Tudesque se retire d’un coup et que Gomez pousse maintenant
derrière, à la porte, avec son dard énorme qui cherche à le forer. Les deux hommes lui plient le torse en deux pour que Gomez puisse mieux le pénétrer. Juan hurle à la mort pour la première fois ! Bien sûr, la sodomie est formellement proscrite par la religion. Elle l’est surtout par le règlement qui a été lu cérémonieusement sur chaque navire par le capitaine ou par Magellan lui-même. Les marins savent tous qu’ils risquent la peine de mort… Mais quand ça démange dans le caleçon… Quand la main ou celle du voisin ne suffit plus… il faut de la chair fraîche ! Discrètement, donc, même si parfois l’action est collective. C’est pourquoi les deux grosses pognes du Tudesque serrent la bouche de Juanito à l’étouffer, pour que personne n’entende rien... C’est ainsi que Juan fait la découverte que, depuis les temps les plus reculés, les jeunes mousses servent de défouloirs sexuels aux marins. C’est la vie. Faudra qu’il s’y fasse !... La petite souris essuie une larme en frissonnant…
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