Entre chien et loup
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Entre chien et loup , livre ebook

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Description

Entre chien et loup
Jesse Devereau
Roman de 196 500 caractères, 34 300 mots. 130 pages équivalent papier (moyenne des pages livres Textes Gais).
Jordan, top model à qui la vie semble sourire, a été kidnappé par un homme aussi séduisant que sévère. Au fil des semaines, il dresse Jordan pour lui obéir tel le ferait un chien.
Quelle idée son « maître » a-t-il derrière la tête ?
Lors d’une sortie, Alexandre remarque Jordan et le délivre. Le coup de foudre est immédiat entre les deux garçons. Alexandre travaille dans le cinéma et offre à Jordan le rôle qu'il attendait, celui d’un jeune homme amoureux enfin bien dans sa peau. Il passe de l’obscurité d’une cave à la lumière des spotlights.
Mais, le « maître » rode, tel un loup furieux, avec la ferme intention de récupérer sa proie.
Après Un amour explosif, Jesse Devereau se penche à nouveau sur les ambiguïtés de la séduction. Entre attirance et répulsion, où se trouve la frontière entre l’amour et la haine ?
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Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 février 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9791029401886
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Entre chien et loup
 
 
 
Jesse Devereau
 
 
 
 
romance gay
 
 
 
 
Chapitre 1
 
 
Les contours se faisaient de plus en plus flous autour de moi. La pièce était comme nimbée d’un voile opaque. Oui, je me sentais embrumé. Pourtant, il n’y avait d’autre fumée que celle des cigarettes électroniques qui conféraient au lieu des airs de bar à chicha.
Après le travail, j’avais accepté de rejoindre des amis dans un établissement gay à la mode. Ce statut était confirmé par une foule nombreuse et bruyante qui s’entrelaçait autour du comptoir et sur la petite piste de danse prise d’assaut le week-end. Des assauts, j’en avais repoussé quelques-uns. Je m’étonnais toujours de la propension de certains garçons à oublier leur estime de soi en jouant leur va-tout dans des tentatives vouées à l’échec. Il ne faudrait pas me juger prétentieux ou par trop imbu de ma petite personne – encore que je ne m’estimais pas digne de ces lieux qui prenaient parfois des airs de supermarché du sexe –, seulement voilà les types qui me faisaient du rentre-dedans étaient souvent soit en âge d’être mon père, soit d’une inélégance frisant le parfait mauvais goût. Sans oublier ceux qui s’imaginaient être des tombeurs alors qu’ils avaient le charisme d’une huître.
J’avais engagé la conversation avec un jeune homme de mon âge, vingt-cinq ans, fort joli à regarder. Nous avons bu des mojitos, puis nous nous sommes embrassés. Puis j’ai oublié ce qu’il s’était passé par la suite tant j’étais imbibé d’alcool et assommé par la fatigue. D’habitude, je tenais mieux la cadence.
Peut-être n’aurais-je pas dû accepter l’invitation à finir la journée dans cet endroit. Sûrement eût-il été plus sage de m’en tenir à mon idée première : rentrer chez moi, commander des sushis et louer un film en VOD avant de filer au lit. J’avais travaillé dur ces jours-ci, et, si j’avais le droit à un week-end de repos, il fallait garder de l’énergie pour la suite des événements qui promettaient d’être énergivores.
Mais non, j’avais voulu jouer les fiers-à-bras. Et voilà que je me retrouvais dans un bar entouré de prédateurs, dans un état proche du coma éthylique, pauvre Cendrillon des temps modernes !
À un moment, mes yeux se sont fermés.
Étais-je encore dans le bar ? Étais-je dans mon lit… ou dans celui d’un charmeur plus habile que les autres ?
 
 
 
Chapitre 2
 
 
J’étais allongé, les yeux dans un ciel blanchi par quelques cirrocumulus, dans une forêt de blés encore verts. Oui, une forêt, car de là où je me trouvais, ce champ me paraissait immense. Mais peut-être était-ce moi qui n’étais pas très grand ? Qui donc m’avait plongé dans une version contemporaine de Jack et le haricot magique  ?
Il faisait doux, je sentais la tiédeur du soleil sur ma peau. C’était l’automne. Je profitais de cette douceur, du calme avec, pourtant, logé dans mon flanc, une irrépressible prémonition m’invitant à vivre pleinement l’instant présent. Une ombre fugace, comme une menace. J’observais l’ultime étreinte du vent et d’une feuille survivante sur un arbre dégarni. Mes paupières se sont abaissées.
Une secousse m’a extirpé de mon somme. Un tremblement de terre ? J’ai eu un doute sur la réalité de ce paysage. Et si j’étais dans un rêve !
Mais cela pouvait aussi être un résistant souvenir de ma vie passée.
Las, c’était plutôt un cauchemar. Un cauchemar les yeux ouverts !
Néanmoins, je devais me féliciter de ce réveil « en douceur » qui augurait un bon jour.
D’habitude, il me réveillait de manière plus violente, à coups de pied dans les jambes, parfois dans les côtes. Ces coups-là me faisaient hurler. Son visage radieux se dissolvait alors dans les larmes qui inondaient mes yeux.
Cela faisait des semaines que je n’avais pas mis le nez dehors. Peut-être des mois. Je n’avais plus aucune notion du temps. Bien sûr les quelques rayons lumineux qui sortaient du soupirail et venaient strier le béton du sol froid m’apprenaient qu’il faisait jour. Qu’il faisait beau. Avant, une ampoule sordide signalait son entrée, mais elle avait grillé, et il ne l’avait pas remplacée.
Je vivais dans la pénombre, entre chien et loup.
Oui, c’était plutôt un bon jour.
Il semblait de bonne humeur. J’ai entrouvert les yeux, lentement. Par habitude. La claque pouvait venir sans crier gare. Une lueur a perturbé ma rétine ; mon iris a tenté une mise au point, mais une petite flamme vacillante me brûlait, me faisait mal à l’œil.
— C’est ton anniversaire !
C’était donc une bougie. Mais de quel anniversaire voulait-il parler, celui de ma naissance ou celui de ma mort ? Ou, devrais-je dire, de ma mise en détention. Mais cela revenait au même.
— J’ai fait un petit effort. Ça se fête quand même, un anniversaire !
Un effort ? Mais c’était plus qu’un effort qu’il devait faire pour rendre mangeables ses infâmes mixtures ! De la viande hachée ou bouillie, viande bon marché et d’origine incertaine, soupe froide et morceau de pain sec, des plats souvent cuisinés en grande quantité et à peine réchauffés, voilà la pitance qui m’attendait matin et soir. Parfois seulement le matin. Quand l’obscurité remplissait chaque recoin de cette cave humide et constellée de salpêtre, je pouvais dire adieu à l’idée d’un second repas. Les grognements de mon ventre résonnaient alors dans cet espace aussi vide que lui. En ce cas, ce n’était plus la faim que je redoutais, mais ces gargouillis qui m’empêchaient de trouver le sommeil, et cela en dépit de l’épuisement.
Mes yeux ont fini par s’adapter à la fois à l’obscurité et à cette terrifiante lumière plantée de travers sur une sorte de pâté multicolore. Je ne voulais pas savoir ce dont il s’agissait. Je m’en suis approché, je l’ai reniflé. Rien, ça ne sentait rien. J’ai regardé mon geôlier, l’air interrogateur.
— Ben, vas-y, bouffe !
Il a fait un pas, un micro pas en ma direction, et de suite je me suis replié sur moi, comme une chenille apeurée. Il était aux anges, il jouissait de sa position, de l’autorité qu’il exerçait sur moi. Alors, il a fait demi-tour avant de s’arrêter quatre mètres plus loin, ainsi qu’il le faisait à chaque fois afin de me voir accroupi au-dessus de ma gamelle. Je pouvais commencer à manger.
— Tu pourrais me remercier !
Et il est parti d’un vorace éclat de rire. Il savait bien que je ne pouvais répondre. En effet, aucun son n’était sorti de ma gorge depuis des semaines, depuis des mois. C’était comme une paralysie.
Le salaud m’a regardé me pencher péniblement sur mon gâteau d’anniversaire pour attraper du bout des lèvres, du bout des dents l’horrible pitance arc-en-ciel. J’étais enchaîné. Nu et enchaîné.
Pourtant, vous me verriez, rien ne laisserait deviner ce traitement de choc qu’il me réserve. Je conservais intact, envers et contre tout, le panache, seul et superbe vestige de ma liberté perdue. Oui, la beauté de ma jeunesse n’avait pas été abîmée même si j’avais été maltraité, battu comme un moins que rien. Je ne dis pas « comme une bête », parce qu’on ne les bat plus de nos jours. Du moins pas avec la frénésie jubilatoire de mon geôlier.
Avant, j’étais admiré quand je montais sur les podiums. Une vraie star dans ma catégorie ! Et même dans la rue, on se retournait souvent sur mon passage. Ma tignasse ébène et soyeuse, mes grands yeux, ma peau fine et claire, mon port altier, la démarche fière, noble, mes traits fins et néanmoins mâles : tout concourrait à me rendre, aux yeux de toutes et de tous, désirable ou désiré.
Dans l’humidité de ce taudis, je frisottais légèrement. Mon épiderme avait pris la couleur des murs, et son odeur le rance des champignons aux murs. Globalement, malgré tout, je restais beau.
Mon geôlier était un homme d’une trentaine d’années qui jetait sur moi des prunelles effrayantes. Pourtant, on lui aurait donné le Bon Dieu avec son air de chérubin. Comme quoi, il ne faut jamais se fier aux apparences ! Les cheveux blond coupé très court, le regard bleu clair, un visage carré, le front perpétuellement plissé et des lèvres charnues. Voilà le portrait sans retouche de l’homme auquel j’appartiens.
Un ange au regard diabolique. Et dans ce regard, je sentais quelque chose qui ressemblait à de la fierté. Malgré ses exactions à mon égard, je savais qu’il tenait à moi. Je devais avoir une grande valeur pour lui, car il prenait soin de moi, de mon hygiène. Parfois, quand j’oubliais ce qu’était la vie dehors, je lui étais presque reconnaissant de s’occuper de moi, de me nourrir, quand bien même sa bouffe était immonde. Je l’observais alors avec un regard neuf et me disais qu’il était une bonne personne, qu’aucun être humain avant n’avait eu d’égales attentions à mon égard, moi, pauvre être écervelé, qui avait toujours misé sur le physique, négligeant les choses de l’âme. Que serais-je devenu avec tous ces trophées exposés sur les commodes et dans les vitrines de mon ancienne maison ? Je ne savais rien faire d’autre que marcher sur des tréteaux, rien d’autre que donner ma beauté en spectacle, une beauté que, pourtant, je ne devais à personne d’autre qu’à mes géniteurs, et pour laquelle, par conséquent, je n’aurais dû éprouver une telle fierté.
Oui, je l’observais. Lui non plus n’était pas mal dans son genre. Sa taille moyenne et ses épaules puissantes lui conféraient la puissance des chevaux de trait. Trop commun, pas assez typé, pas assez racé pour être un pur sang. Il n’aurait jamais pu figurer dans aucun palmarès. Sa beauté à lui, elle résidait dans l’assurance qu’il affichait quand il pénétrait dans la cave. Elle était dans son regard intense et pénétrant. Il me fixait comme un vampire assoiffé, un loup vorace, ou plutôt un loup-garou, un homme-animal dont on n’aurait gardé de l’un et de l’autre que les plus intenses spécificités : la conscience humaine et la brutalité sauvage.
Parfois, il débarquait avec cette bouteille qui empestait le savon trop odorant, je la sentais avant même qu’il n’ait passé la porte. Cela ressemblait à de la lavande. Mais c’était peut-être de la violette. Il me badigeonnait le liquide visqueux

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