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Habillé d’un tatouage
Andrej Koymasky
Roman de 220 000 car.
Yamaguchi Kazunari avait suivi chacun de ses mouvements depuis le solarium privé situé sur le toit de l’établissement balnéaire. Cependant le regard lascif n’avait pas échappé à Soda, le jeune aide de Kazunari.
— Tu le veux, chef ? demanda ce dernier avec un sourire malicieux.
— Imbécile ! Tu ne comprendras jamais ce que je veux, jamais, répondit le jeune homme d’un ton sec.
— Allez, chef, j’ai bien vu comment tu le mates. Et puis regarde entre tes jambes. Un regard de plus et le slip de bain explose ! dit Soda avec un air rigolard.
Kazunari lui tapa sur la tête avec un magazine roulé. Soda continua imperturbablement,
— Si tu le veux, tu n’as qu’à me le dire. Et alors, ce soir, tu peux l’avoir sans le fundoshi, comme un bon garçon, prêt dans le lit. T’ai-je déjà déçu, chef ?
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Habillé d’un tatouage
(Le Yakuza)
Andrej Koymasky
Traduit par Christophe
Chapitre 1 : La rencontre
Il sortit lentement de la mer, son habituel sourire lumineux éclairant sa figure. Il se dressa, et les rayons dorés du soleil se reflétèrent sur chacune des gouttes d’eau qui coulaient le long de son corps délicatement bronzé, son torse mince et athlétique mis en valeur par un fundoshi rouge vif magnifiquement rempli. Il était parfaitement inconscient de la beauté sensuelle qui émanait de lui et attirait les regards envieux des hommes ainsi que le désir à peine dissimulé des femmes.
Inconscient comme seuls peuvent l’être les vierges. Vierge ni par nécessité ni par choix, mais simplement parce que la vie ne lui avait pas, jusque là, offert l’occasion d’éveiller ses sens.
Ça n’était pas que Takeda Jun ne connaisse rien du sexe. Depuis sa puberté, il s’était soulagé lui-même à la main. Mais personne n’avait jusque là éveillé ses désirs ou ses phantasmes. Parfois, il songeait qu’un jour, il se marierait et aurait des enfants mais ne s’attardait pas sur le sujet, de la même façon qu’on peut penser qu’un jour, il faudra mourir mais, surtout quand on est jeune, ça n’est pas une réalité urgente dont il faille se préoccuper.
Et donc, inconscient, il s’étira, satisfait du bain rafraîchissant qu’il venait de prendre, de la douce brise et du chaud soleil qui caressait sa peau comme les regards de nombreux baigneurs. Et puis, avec une voluptueuse indolence totalement involontaire, il marcha vers sa serviette et se coucha pour sécher au soleil.
Inconscient également du regard d’approbation appuyé avec lequel Yamaguchi Kazunari avait suivi chacun de ses mouvements depuis le solarium privé situé sur le toit de l’établissement balnéaire. Cependant le regard lascif n’avait pas échappé à Soda, le jeune aide de Kazunari.
— Tu le veux, chef ? demanda ce dernier avec un sourire malicieux.
— Imbécile ! Tu ne comprendras jamais ce que je veux, jamais, répondit le jeune homme d’un ton sec.
— Allez, chef, j’ai bien vu comment tu le mates. Et puis regarde entre tes jambes. Un regard de plus et le slip de bain explose ! dit Soda avec un air rigolard.
Kazunari lui tapa sur la tête avec un magazine roulé. Soda continua imperturbablement,
— Si tu le veux, tu n’as qu’à me le dire. Et alors, ce soir, tu peux l’avoir sans le fundoshi, comme un bon garçon, prêt dans le lit. T’ai-je déjà déçu, chef ?
— Les autres étaient des professionnels, celui là est différent. Tout le monde peut mettre un gigolo dans mon lit, surtout après s’être fait tailler une pipe, comme tu fais.
— Chef ! Tu sais bien que je ne me tape que des filles, non ?
— Ferme-là ! C’est eux qui me l’on dit.
— Bon… ben c’était juste pour être sûr qu’ils étaient capables de bien faire, crois-moi. C’est tout juste s’ils étaient capables de me faire bander, vraiment ! répondit le jeune homme d’une voix maussade.
Kazunari avait été frappé non seulement par la beauté physique que portait sans affectation le garçon, comme un vêtement de tous les jours, mais aussi par son aspect frais, net. Son sourire doux et lumineux et cet incongru fundoshi rouge vif le faisait ressembler à un porteur de mikoshi dans une procession. Bien sûr, il désirait ce garçon splendide, mais pas pour une ou deux nuits de baise, pour s’amuser de son corps. Pour la première fois, il ressentait du désir pour quelqu’un d’une manière différente, nouvelle… quelqu’un avec qui il aurait voulu faire l’amour, quelqu’un à aimer. C’est pourquoi la remarque de Soda l’avait énervé.
Jun se leva et secoua sa serviette pour en retirer le sable et après l’avoir pliée, il se dirigea vers les douches. Kazunari le suivit des yeux. De derrière, la carrure en Y du corps du garçon était encore plus évidente. Il avait de larges épaules, une taille fine et des petites fesses qui étaient largement et plaisamment exposées par le fundoshi. Ses jambes étaient droites et musclées. Un corps viril et délicieux, bien taillé, adulte, mais avec une merveilleuse touche d’adolescence. Kazunari sentit un désir intense qui lui fit presque honte. Il l’observa qui disparaissait dans l’établissement de bain et un murmure sortit de son cœur : « Adieu, vision de rêve ! »
Pourquoi n’était-il pas descendu pour le retrouver ? Pourquoi ne trouvait-il pas de prétexte pour le rencontrer, le draguer ? Pourquoi était-il resté cloué sur sa chaise-longue sur la terrasse avec Soda et ses gardes du corps discrètement répartis autour de lui ? Pourquoi ? Probablement parce que, trop habitué à traiter les garçons qu’il désirait comme des objets, Kazunari avait bien compris que ce garçon était plus qu’un objet ! Il devait être conquis, courtisé, aimé. Il ne devait pas être pris, utilisé et jeté. Kazunari l’avait compris tout de suite.
Il aurait peut-être été préférable de l’oublier, pensa Kazunari avec regret. Celui-là n’était pas pour lui. Il avait probablement une petite amie et n’avait pas la plus petite idée de la possibilité de faire l’amour avec un homme… Oui, il était préférable de ne plus y penser. Et puis, au fond, les garçons qu’il trouvait dans les bars gays et qui cherchaient seulement un client ou une aventure lui suffisaient. Au moins, ceux-là savaient y faire et ne présentaient pas de complications inutiles.
— Allons-y, Soda ! dit-il à l’improviste, sèchement
— Déjà ? Bon, bon. Comme tu veux. Ne fais pas cette tête là ! Mais tu avais dit que tu voulais attendre Hiroshi.
— Je ne sais même pas s’il va vraiment venir. Il est avec sa nouvelle copine aujourd’hui. Si tu crois qu’il pense encore à moi… Allons-y !
Soda fit un signe aux autres et ils descendirent à l’étage inférieur de l’établissement où les Yamaguchi avaient leur salon particulier. Kazunari se doucha, mit un complet crème, monta dans sa décapotable et retourna chez lui. À part les serviteurs, aucun autre membre de la famille n’était là. Il alla dans sa chambre et ouvrit le shoji donnant sur le jardin. Il alluma la télé mais ne la regarda pas. Desserrant sa cravate, il s’assit sous la véranda et alluma une cigarette.
Ce jardin était plein de souvenirs pour lui. Le shishi odoshi, le basculeur à eau en bambou qui battait implacablement les secondes depuis longtemps avant sa naissance. Ce son omniprésent faisait partie de tous ses souvenirs, même les plus reculés. Mais un souvenir en particulier revenait. C’était quand son père l’avait surpris, neuf ans auparavant, avec le fils du jardinier. Ils étaient tous deux complètement nus sur son futon et se suçaient mutuellement… Il avait seize ans et son compagnon quinze.
Il n’y avait personne à la maison et aucun des serviteurs n’aurait osé entrer dans sa chambre. Mais son père était revenu à l’improviste et ils ne l’avaient pas entendu arriver. Pour quelque étrange raison, il avait voulu parler à son fils et était entré. Il avait enlevé sa ceinture, et les avait fouettés avec un calme féroce, en cadence au rythme du shishi odoshi. Quand il fut fatigué, il dit au jardinier d’éloigner son fils. Il se moquait d’où il l’enverrait à condition de ne jamais le revoir dans sa maison. Et il essaya d’obtenir de son propre fils la promesse qu’une telle chose ne se reproduirait pas
Mais Kazunari avait découvert, au moins deux ans auparavant qu’il n’était attiré que par son propre sexe et le fils du jardinier n’était pas le premier avec lequel il couchait. Il n’avait aucune intention d’abandonner et le dit nettement à son père. La seule réponse de son père fut de donner l’ordre à deux de ses hommes de suivre son fils et de ne le laisser seul en aucune circonstance sauf quand il entrait à l’école. Pendant qu’il était à l’école, ils attendaient dans leur voiture pour être sûr que le garçon ne s’échappe pas.
Alors Kazunari avait cherché une paire de copains dans l’école. Il allait avec eux baiser dans les toilettes. Toujours deux, parce que, comme ça, pendant qu’il en baisait un dedans, l’autre faisait le guet dehors. Puis ils échangeaient leurs places. Une baise ne lui suffisait pas, au contraire, la première ne faisait que l’exciter.
— Mon pauvre père, tu pensais que tu serais plus fort et plus finaud que moi… dit-il à voix basse en écrasant la cigarette qu’il venait d’allumer dans le cendrier en cristal et en se levant.
Après la mort de son père, il avait conclu un arrangement avec sa mère. Tant qu’il ne ramenait pas ses conquêtes à la maison, il pouvait faire ce qu’il voulait, avec discrétion. Aussi, à dix-sept ans, il avait pris un studio dans le centre, petit mais élégant, meublé avec tout le confort… Soda lui ramenait un garçon qu’il avait choisi dans un des bars gays de la ville. La première fois que Soda était entré dans un bar gay, il avait eu honte à mourir. Après, ça l’avait amusé, et il était devenu copain avec tous les prostitués, même s’il était marié et n’aimait que les femmes. Et il ne dédaignait pas de se faire occasionnellement sucer par un des garçons qu’il ramenait dans sa voiture à Kazunari. Le même Soda qui attendait maintenant ses ordres dans la cuisine où il était sûrement en train de courtiser la nouvelle aide du cuisinier, une robuste fille de la campagne de vingt ans.
Il prit le téléphone et appela la cuisine. Soda répondit immédiatement.
— Après le dîner, on ira à l’Adon, dit Kazunari.
— D’accord, chef. T’as quelque chose de particulier en tête ou tu préfères quelque chose de nouveau ce soir ? demanda le sbire qui ne disait jamais « quelqu’un » mais toujours « quelque chose » en parlant des garçons des bars.
— S’il est là, j’aimerais Ken. Sinon, un nouveau. On verra.
— D’accord, chef. Veux-tu dîner dans ta chambre ?
— Non, je mangerai avec la famille s’il y a quelqu’un d’autre.
Choisissant soigneusement ses vêtements, Kazunari se changea en prévision de la sortie du soir. Même s’il s’agissait souvent de gigolos, il aimait être bien vêtu et, par-dessus tout, porter des sous-vêtements élégants. Selon sa philosophie, même une baise, devait être faite avec art et appréciée.