Le Cycle Domanial, tome 3 , livre ebook

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Clio Tarbe, la timonière du caboteur la Rebuffeuse, va aider le tabellion Eutrope Tarbe à résoudre le mystère historique ayant la plus grande importance émotionnelle pour tous les citoyens et citoyennes de la République Domaniale. La quatrième dame de compagnie de la Reinette Dulciane, la baronnette Cordula d’Arc, est une héroïne révolutionnaire révérée dont, pourtant, la trajectoire effective de vie reste obscure et mal documentée.
Pour des raisons qui se révèleront peu reluisantes, la Firme de Diffusion des Traditions Historiques Domaniales donne Cordula d’Arc comme morte sans progéniture, lors des premières journées de la Révolution. Pourtant, une des actrices ayant joué dans les deux films historiques intitulés Le Thaumaturge et la Chronique d’Edith se nomme justement… Cordula d’Arc. Il est indubitable, pour le tabellion Tarbe, que cette actrice cinématographique est la dernière descendante de l’héroïne révolutionnaire dont la propagande privée a fait une icône inféconde.
En retraçant le fatal brelan des descendant(e)s de la baronnette d’Arc, les historiens de la Rebuffeuse feront remonter à la surface les secrets historiques les plus émotionnellement chargés et les plus subversifs de toute l’histoire domaniale. C’est une chose que de dire l’histoire des hommes et des femmes, c’est une autre chose que de mieux comprendre qu’il n’y a pas que des hommes et des femmes dans l’Histoire…
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Date de parution

03 mars 2013

Nombre de lectures

13

EAN13

9782923916590

Langue

Français

LE BRELAN D’ARC (Le cycle domanial 3)
PAUL LAURENDEAU
© ÉLP éditeur, 2013 www.elpediteur.com elpediteur@yahoo.ca
ISBN978-2-923916-59-0
Conception de la couverture : Allan E. Berger, par reprise d’un travail d’Honoré Daumier :crispin et Scapin, ca. 1864. Révision du manuscrit : Aline Jeannet
Polices libres de droit utilisées pour la composition : Linux Libertine et Libération Sans
ÉLP éditeur, le service d’éditions d’écouter lire penser, un site dédié à la culture Web francophone depuis 2005, vous rappelle que ce fichier est un objet unique destiné à votre usage personnel.
Si deux individus, s’étant mis d’accord, unissent leurs forces, la puissance et par conséquent le droit, dont tous deux jouissent ensemble activement au sein de la nature, dépassent la puissance et le droit de chacun pris isolément. Plus les individus qui s’unissent d’une telle alliance sont nombreux, et plus le droit dont ils jouissent ensemble sera considérable.
Baruch de Spinoza,Traité de l’autorité politique, Paris : Gallimard, Idées, 1954, p. 104.
1.Unfulguranttraitdamour
Grain en Mer Latérale.
Ses voiles intimement carguées, ses turbines tournant au ralenti, le chaland à voile et à vapeur La Rebuffeuse tangue amplement en affrontant l’innommable coup de chien, avec son flegme habituel de lourde mécanique bien rodée et fidèlement entretenue. Des lames monstrueuses, mousseuses, saumâtres, et glaciales aspergent le pied du misaine, « descendent » le pont, fouettent l’artimon, et viennent mourir de mort violente contre la paroi de la timonerie, dans un fracas de tambour de charge. Clio Tarbe, ma fougueuse amoureuse, timonière en titre du susdit voile-et-vapeur, vêtue d’un ample ciré bleu saphir, qui fait scintiller sauvagement ses yeux d’une couleur identique à celle de sa luisante tenue, se lance gaillardement sur le pont battu par la tempête. Moi, Eutrope Tarbe, Quartier-Maître en Second et Tabellion de bord attitré, je suis loin d’avoir le
pied aussi marin que mon admirable partenaire. Mais je la suis fidèlement, en ciré jaune, la tête rentrée dans les épaules, en luttant pour maintenir mon équilibre sous la furie des éléments. Nous passons par-dessus bord. Chambard, le costaud second du chaland, nous reçoit, en ciré noir, dans une longue et frêle baleinière qui ballotte en tous sens sur l’eau vert olive, et à laquelle nous accédons par l’inévitable échelle de cordages dansante et claquante. Clio et moi nous enfermons aussitôt dans une cage habitacle aux épais barreaux située en poupe de l’esquif, tandis que Chambard, en proue, mouille la torpille de halage, qui ronronne déjà. Tiré par cet étrange instrument, dont Chambard guide la trajectoire à l’aide d’une perche crochetée, nous prenons hâtivement une saine distance de notre bon navire, dont l’étrave nous est désormais une inévitable menace. Des vagues immenses s’élèvent autour de nous, comme d’épais rideaux de rêves, cherchant à s’écarter sur quelque cataclysmique épouvante, sous le ciel vif-argent du tout petit matin. Je me blottis contre Clio qui vient de solidement verrouiller notre cage habitacle et de s’asseoir près de moi. Elle m’enlace tendrement de ses bras protecteurs. Nos deux cirés chuintent l’un contre l’autre, et je marmotte en grelottant :
« Bien dites donc, ça flanque vachement les jetons.
Paul Laurendeau –Le brelan d’Arc/ 5
— Je suis désolée de t’imposer ça, mon tout beau. Mais notre emploi du temps et celui du Chrysostome Tarbe n’autorise aucun délai.
— Ah là là. Ces Tarbe... »
Il a y en effet beaucoup de Tarbe dans cette histoire. Clio Tarbe qui est arabesquoise, et moi même, Eutrope Tarbe, qui suis périphérite, portons le même nom pour des raisons parfai-tement fortuites, sans qu’aucune connexion clanique, autre qu’un amour passionnel sans mélange, ne nous unisse. Quand à Chrysostome Tarbe, il s’agit d’un personnage historique centenaire, héros de la Révolution domaniale, qui, à ma connaissance, n’a aucun lien de parenté ni avec Clio ni avec moi, et dont le nom fut donné, en armement légitime, à un solide cargo brise-lames vers lequel j’espère bien que nous nous dirigeons en ce moment même, quoique je ne distingue rien de rien dans toute cette houle chaloupeuse et tous ces embruns délirants. Connaissant bien le déplaisir profond que me suscitent les grains, Clio cherche à me rassurer : « Le Chrysostome Tarbe devrait nous envoyer la salve très bientôt. Ludger n’est pas marsouin à nous laisser tanguer ainsi bien longtemps. »
Paul Laurendeau –Le brelan d’Arc/ 6
Je ne suis quartier-maître en second sur La Rebuffeuse que depuis une petite année, et les conditions extraordinaires et inattendues dans lesquelles je le suis devenu, moi qui n’avais préalablement jamais pris la mer, font que je ne suis pas très familier avec la majorité des implicites maritimes domaniaux. Toujours blotti dans les bras de Clio, je renonce à lui demander ce que peut bien être cette salve salvatrice qu’elle attend. Je me contente de regarder avec tendresse les petites gouttes d’eau qui perlent au bout des jolies boucles frontales de cheveux noirs que son capuchon de ciré me laisse à voir. Ses yeux bleus, stoïques et durs, son visage calme au menton volontaire découpé, me rassurent comme d’instinct. Mon amoureuse, qui est une androgyne protérogyne, cumule en elle la tendresse féminine et la hardiesse masculine en une telle harmonie, que la confiance en ses superbes capacités naturelles de meneuse s’impose à moi comme de fait. Chambard tire subitement la torpille de halage hors de l’eau, la désactive, la jette au fond de la baleinière, s’étend contre elle, et crie, sur un ton d’appel puissant et calme : « Salve ! Salve ! »
Les bras de Clio se serrent un peu plus autour de moi. Elle me dit à l’oreille :
Paul Laurendeau –Le brelan d’Arc/ 7
« Tu devrais peut-être fermer les yeux maintenant, mon homme adoré. Ce qui va se passer maintenant est un peu terrifiant. »
Je n’obtempère pas. Je suis un froussard avéré certes, mais je suis aussi un curieux impénitent. Et là, je vais en avoir pour ma curiosité autant que pour ma frousse car, d’un point indéterminé de l’horizon liquide en bataille, jaillit soudain dans l’air un immense harpon noir. Se dirigeant franc sur nous, comme quelque titanesque oiseau de proie, le projectile métallique vole, et tire avec lui un épais câble d’amarre qui oscille dans la tourmente. J’ai tout le temps de bien écarquiller les yeux sur l’horreur de ce trait incompréhensible, de le voir devenir gigantesque, effrayant, et de craindre qu’il ne se plante au beau milieu de mon cœur. Puis, avec un sifflement croissant qui sonne bizarrement sec au sein de cette aqueuse cacophonie atmosphérique, la terrible arme volante percute la proue butée de notre baleinière et s’y enfonce dans une pétarade de planches rompues. Le nez monstrueux du harpon apparaît alors entre les pieds de Chambard, qui est toujours étendu au fond de l’esquif. Notre homme se dresse promptement, armé d’un lourd licou métallique au moyen duquel il verrouille l’encolure du puissant crochet contre la paroi interne de la proue de notre baleinière. La proue butée est ainsi traversée de part en part par le harpon, qui la pénètre
Paul Laurendeau –Le brelan d’Arc/ 8
parallèlement au fond de la quille et bien au dessus de la ligne de flottaison. Sans manifester la moindre nervosité, Clio dit :
« Le Chrysostome Tarbe vient de nous prendre en halage.
— Dans... le style le plus percutant qui soit...
— Oui, oui. C’est la procédure habituelle. Ces harponnages d’esquifs ont été inventés par des bateliers centriotes il y a près de quatre cents ans. La technique, simple, efficace et éprouvée, n’a presque pas changé depuis les Temps Splendides, malgré l’évolution des technologies.
— Ah bon. Et... que se serait-il passé si le harponneur avait tiré un peu trop au-dessus de sa cible ?
— Son harpon nous serait probablement toujours arrivé droit dessus. Mais il aurait heurté la cage où nous nous trouvons, et c’est toi et moi, bel amour, qui aurions dû le verrouiller contre ces solides barreaux. Mais la prise aurait été bien moins bonne alors. Tandis que, comme ça, c’est juste parfait. Le point de halage en perce de proue est idéal. Je ne suis pas du tout surprise de ce bon résultat. Les harponneurs de Ludger sont de fins mireurs. » Je hoche la tête, en tirant ma moue de gamin effarouché : « Fiche vraiment les jetons...
Paul Laurendeau –Le brelan d’Arc/ 9
— Crois-moi, Eutrope, c’est beaucoup moins dangereux que d’essayer de rapprocher la carène de nos deux navires à portée de cabestan, dans un grain pareil.
— Je n’ai aucun doute là dessus, Clio. Je comprends parfaitement la situation, ma douce aimée. Mais alors quand même, quelle trouille ! »
Clio sourit, et me mordille gentiment la joue. Je frissonne et serre ma main mouillée dans la sienne. Il y a un frémis-sement grinçant du lourd trait métallique verrouillé en proue, et la vélocité de la baleinière augmente subitement. La Rebuffeuse n’est bientôt plus visible. Nous sautillons de crête en crête. Se profile soudain, devant nous, l’ombre tutélaire du cargo brise-lames Chrysostome Tarbe, fier fleuron de la batellerie de gros en Mer Latérale. Il se présente à nous de profil et, à sa vue, une petite lueur joyeuse pétille dans les beaux yeux bleus de Clio.
Plus long et plus massif que La Rebuffeuse, le Chrysostome Tarbe ne tient pas la mer mieux que nous, certes, mais est quand même un peu avantagé, face aux coups de tabac, par sa simple masse inerte. Nous gagnons son bord par un raidillon métallique solide, mais glacial. La tempête semble un peu plus calme ici, mais c’est probablement un simple effet de perception dû à l’immensité
Paul Laurendeau –Le brelan d’Arc/ 10
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