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pages
Français
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2018
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Publié par
Date de parution
13 avril 2018
Nombre de lectures
1
EAN13
9791029402746
Langue
Français
Les Amants des Cavernes
BJ Valbornhe
Roman de 266 000 caractères, 43 700 mots, 221 pages en équivalent papier.
Yohi était encore un ado. Il avait passé les épreuves malgré la dureté de ce qui lui avait été sciemment infligé, il n’était pas aimé. Il était gracile, au visage fin à la peau foncée, aux longs cheveux blonds ondulés, aux yeux bleus très clairs alors que la tribu était brune, à la peau pâle et aux yeux de diverses nuances de vert. Il avait une quinzaine de cycles saisonniers ou un peu plus, on ne savait, car il avait été enlevé.
C’était un garçon habile et réfléchi plutôt qu’un paquet de muscles prêt à répondre au moindre défi lancé. On le traitait comme un bâtard et un sous-homme ; sans la protection du chaman qui l’avait pris comme apprenti malgré son tuteur, il ne serait sans doute plus en vie.
Très jeune il s’était rapproché de Naho, le grand Naho, solide, viril, entreprenant, mais généreux. Et lorsque les chasses ne l’éloignaient pas, Naho l’avait en sa protection.
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Publié par
Date de parution
13 avril 2018
Nombre de lectures
1
EAN13
9791029402746
Langue
Français
Les Amants des Cavernes
BJ Valbornhe
Bj-valbornhe@netcourrier.com
1. La fuite
2. Les félins
3. les falaises
4. Le feu à la plaine
5. Au bord du lac
6. La traversée
7 Le refuge
8. Leur défaite
9. Installation
10. Pause
11. Intrus
12. Un trio fugitif
13. Départ et arrivée
14. Zoï
15. Fin d’été amoureuse
16. Désarroi
17. exode
18. Femmes
19. Renouveau
1. La fuite
Le village était loin derrière, au-delà de la forêt qu’ils avaient traversée d’une traite dans la nuit.
Cette forêt qu’ils connaissaient bien pour y avoir leurs habitudes : celle de se retrouver dès qu’il faisait un peu doux, sur un petit espace d’herbe verte au bord d’une source, bien cachés au cœur de profonds taillis. Le premier arrivé se mettait nu puis attendait avec impatience. Le second bandait déjà bien avant d’atteindre les taillis rien que d’imaginer l’autre dressé, nu dans ce décor sur lequel son corps brun se détacherait délicieusement. À peine arrivé il se voyait arracher son pagne, sa courte chemise de végétal tissé et rouler au sol.
L’un sur ou sous l’autre, l’un dans l’autre ils se serraient, s’embrassaient, s’empoignaient, essayaient de ne pas gémir trop fort, se caressaient des deux mains, des lèvres, de la langue, de la queue sur le visage, se suçaient goulûment et très vite, trop vite ils explosaient en des orgasmes d’autant plus puissants qu’ils étaient dérobés à un temps compté. Puis ils se lavaient à la source, offrant aux forces de la nature qui les protégeaient le blanc fluide de leur plaisir. Ensuite, ils s’en retournaient chacun de son côté pour ne pas être vus ensemble en espérant que leurs absences ne soient pas remarquées tant dans le clan la pression sur eux, contre eux, était de plus en plus pressante, de plus en plus douloureuse à subir.
C’est cette pression qu’ils avaient décidé de laisser derrière eux, et cette marche était celle du non-retour.
Une marche harassante même si c’était par des chemins qu’ils connaissaient. Naho les avait explorés et très souvent empruntés lors d’expéditions de chasse aux chevrettes et aux antilopes qui pullulaient sur la plaine herbeuse après la forêt. Naho était un chasseur.
Il avait pris part à maintes reprises à ces expéditions entre hommes (les femmes petit à petit en avaient été exclues, poussées à rester prendre soin des enfants, des quelques cultures, des volailles et à attendre…). Alors les hommes rentraient fiers, surchargés de viande, après s’être gavés des abats cuits sur des foyers à demi enterrés ou sur des pierres chauffées à blanc. Ils rapportaient au village des filets séchés, des rôtis fumés, des cuissots pré salés, des peaux à tanner, des cornes et des os utilisés pour fabriquer des ustensiles. Ils s’en attribuaient non seulement le mérite, mais de plus en plus de privilèges dont celui de ne plus faire grand-chose hors ces expéditions si ce n’est organiser seuls les offrandes rituelles de remerciements lors desquelles une nouvelle fois ils se gavaient.
Il en était de même lors d’autres longues sorties au loin dont ils rapportaient des fruits ou des poissons, du sel.
Les femmes, elles, désormais, grattaient la terre, sortaient les bêtes, coupaient les récoltes, s’occupaient des enfants et de la nourriture, nettoyaient, réparaient, engrangeaient. Ces labeurs faisaient pâle figure face aux plus ou moins hauts faits de chasse et de pêche plus ou moins enjolivés par les récits des conteurs. Elles n’étaient plus jugées dignes de participer aux ripailles rituelles, alors, en cachette elles faisaient des cérémonies de remerciement aux forces de la terre et de l’eau pour leurs laborieuses récoltes.
Elles enrageaient.
Ces expéditions avaient fait de Naho un excellent traqueur, car son endurance et sa vélocité l’avaient spécialisé à pister le gibier afin de le rabattre vers le gros de la troupe ou d’y mener celle-ci. Il était sec, sobre, endurant, âgé d’une vingtaine de cycles saisonniers, cela faisait de lui le chasseur hors pair qu’on respectait malgré l’hostilité du chef autoproclamé.
Dès son jeune âge il s’était montré apte à accompagner les chasseurs des jours et des nuits sans faiblir puis bientôt de tenir la longue course sur la piste d’un cervidé ce qui était tout un art : il fallait au pisteur une foulée unie, têtue, obstinée, sans trêve accrochée à la piste de la proie afin de la stresser progressivement puis de l’épuiser. L’animal s’essoufflait en alternant les courses folles lorsqu’il se sentait suivi, et les haltes inquiètes s’il se croyait débarrassé de son poursuivant avant de repartir plus affolé. Il finissait la traque asphyxié de stress et d’essoufflement, résolu à faire face, acculé dans un taillis, une gorge ou la rive trop pentue d’un ruisseau. Et Naho préservé par le rythme sans à coup de sa foulée comme la puissance de ses poumons entraînés à cette respiration, avec calme levait le couteau de pierre. Il murmurait à l’animal des paroles apaisantes d’au revoir avant de lui trancher l’artère carotide, il laissait le sang retourner à la terre mère puis se dressait victorieux. C’était comme si l’animal l’entendait et fermant les yeux dans un dernier soupir se laissait faire dans une ultime communion.
Naho savait tuer sans haine.
Il se montrait ainsi un connaisseur hors pair des secrets de la forêt. Il n’avait pas son pareil pour tracer sa route par des itinéraires qui n’appartenaient quasiment qu’à lui dans ce dédale de grands arbres, de clairières, de fondrières, de fossés à éviter, de trous d’eau et d’étangs qu’il fallait contourner, de taillis d’épineux si denses qu’une fois dedans on peinait à s’extraire.
C’est ainsi qu’il conduisait leur fuite à tous deux en brouillant leur piste par de ces passages solides ou liquides sur lesquels leurs pas ne laissaient pas d’empreintes.
Yohi suivait sans trop faiblir. Naho ralentissait le pas quand il l’entendait s’essouffler.
Yohi était encore un ado même si tout juste sorti de la période d’initiation qui l’avait consacré adulte. Il avait passé les épreuves malgré la dureté de ce qui lui avait été sciemment infligé, il n’était pas aimé. Il était gracile, au visage fin à la peau foncée, aux longs cheveux blonds ondulés, aux yeux bleus très clairs alors que la tribu était brune, à la peau pâle et aux yeux de diverses nuances de vert. Il avait une quinzaine de cycles saisonniers ou un peu plus, on ne savait, car il avait été enlevé.
C’était un garçon habile et réfléchi plutôt qu’un paquet de muscles prêt à répondre au moindre défi lancé. On le traitait comme un bâtard et un sous-homme ; sans la protection du chaman qui l’avait pris comme apprenti malgré son tuteur, il ne serait sans doute plus en vie.
Très jeune il s’était rapproché de Naho, le grand Naho, solide, viril, entreprenant, mais généreux. Et souvent lorsque les chasses ne l’éloignaient pas, Naho l’avait en sa protection quand les bandes de gosses le chahutaient. Mais cette attirance n’était pas la simple recherche d’un solide grand frère, elle était plus intime, plus passionnée, plus charnelle et Naho avait dû lui rappeler à plusieurs reprises qu’un garçon n’est libre de son corps qu’après l’initiation. Surtout lorsqu’il est la propriété d’un notable du clan. Alors dès qu’il avait pu, Yohi avait sollicité l’épreuve. L’épreuve l’avait laissé presque sans force, humilié, blessé même, mais libre.
C’est là, depuis peu, que tout s’était noué entre eux dans ce recoin des bois où ils se retrouvaient…
Le résultat ne s’était pas fait attendre, les jalousies qui n’osaient s’exprimer envers Naho, la détestation envers le frêle et beau Yohi s’étaient déchaînées, d’autant qu’on les soupçonnait d’une relation de moins en moins tolérée dans les tribus depuis que les hommes prenaient l’ascendant sur les femmes. C’est ainsi qu’ils avaient envisagé de fuir.
Grâce au chaman Yôo à qui ils s’étaient confiés, leur fuite avait un but, un refuge vers lequel ils allaient.
Comme ils l’avaient prévu, la pleine lune avait baigné la futaie, bienveillante veilleuse qui témoignait ainsi de la protection des éléments posée sur eux. La forêt à la profondeur hostile, si dense, si noire d’ordinaire, ainsi illuminée leur était doucement familière. Elle s’était comme ouverte à eux ; les arbres s’inclinaient sur leur passage, derrière eux resserraient un mur d’ombre, estompaient leurs silhouettes que la nuit s’empressait d’absorber. Les épaisses mousses étouffaient le son de leurs pas, les griffes des taillis les épargnaient, les pierres et les branchages paraissaient avoir été écartés de leur route par quelque faune diligent.
Tout les protégeait, sentaient-ils.
En fait Naho traçait sa route.
Ils couraient de cette même course cadencée du pisteur dont le cœur et le souffle battent en harmonie, transportés par une musculature sans à coup, et qui une fois réglée peut se poursuivre des heures voire un ou deux jours durant.
Ils passèrent une nuit magique poussés dans leur effort par l’exaltation d’être seuls ensemble, dopés par l’espoir fou d’une délivrance que la promesse du chaman rendait possible, et que la bienveillance des éléments stimulait. Ils en auraient fini avec les harcèlements et les brutalités lorsqu’ils auraient atteint ce refuge dans les montagnes, là où les chamans seuls savaient aller. Plus rien d’autre ne comptait.
De part et d’autre d’eux, leurs deux loups trottaient œil aux aguets et oreilles dressées. C’était deux loups immenses, bien plus grands que les loups normaux, qui s’étaient attachés à eux dès petits. Tout était calme, aucun signe inquiétant, une nuit faste, propice à leur fuite, les loups, attentifs aux mille et un signaux de l’espace et des vies, restaient placides. Autour de leurs quatre ombres en mouvement dans la complicité calme de la forêt, seul le bruissement des respirations flottait avec le froissement des herbes sur leur passage. Parfois un prédateur nocturne lançait un cri strident ou une victime sa plainte. Une galopade trouait la nuit, un vieil arbre craqu