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Tendre sexes
9 nouvelles de Pédro Torres
Une police bien montée
L'esclave grec
Un Croate peut-il aimer un Serbe ?
Baise crade dans la ZUP
Confidence par correspondance
Sauvetage princier
Le "Gay Ride On"
Mmmmronronronronron
Le jeune homme au taureau
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Tendres sexes
Pédro Torres
Une police bien montée
Les pieds de l’homme s’enfoncent profondément. Les pas sont hésitants, souvent chancelants ; les mouvements sont mécaniques, mais le rythme rapide. Lorsque le genou, mal assuré, s’effondre dans la neige et entraîne le corps dans sa chute, l’homme se relève aussitôt et reprend sa pénible marche.
»Une volonté nouvelle pousse cet homme torturé de faim et de fatigue. L’arrivée est proche ; il vient de reconnaître en la foulant la rivière Apachapak. Elle est gelée et recouverte de neige. Dans cette vallée, elle disparaît au regard, mais les tourbillons créés par l’eau dans son chemin fait d’obstacles se sont gelés en de multiples dômes de glace sur lesquels les pieds se heurtent et glissent continuellement. L’homme a retrouvé le méandre que sa carte indique. Il s’est perdu en préférant couper court plutôt que de suivre ce cours d’eau aventureux. La prochaine habitation n’est plus loin et c’est là qu’il se rend.
Derrière un bosquet d’immenses sapins de Kellermann, il voit de la fumée, puis en contrebas d’un talus une petite baraque de rondins de bois. Juste à ce moment, une tempête de neige commence. Ses derniers cent pas se font contre le blizzard et l’homme bénit le ciel qu’il n’ait pas soufflé plus tôt, car il aurait pu signifier sa perte.
Arrivé à la porte, l’homme dépose sur le seuil la couverture qui l’enveloppe, retend en tirant dessus sa vareuse rouge et redresse son chapeau de feutre qu’il a enfoncé. Il frappe à la porte au même rythme que son cœur qui vient subitement de s’emballer. Ne sachant pas si ses coups se sont perdus dans les hurlements du vent, il décide d’ouvrir la porte. La pièce qu’elle découvre est sombre ; il ne voit rien à l’intérieur et cela le décontenance.
— John Hawkins, vous êtes là ? finit-il par dire sans franchir la porte.
— Je suis John Hawkins, répond une voix.
L’homme à la vareuse rouge attend quelques instants pour voir si la voix va continuer afin qu’il puisse mieux en apprécier les intonations, mais l’homme à l’intérieur se tait.
— Je suis ici pour vous arrêter !
— Vous êtes seul ? interroge la voix.
L’homme, dont la vareuse rouge indique clairement qu’il appartient à la Police montée canadienne, prend soudain peur, ne répond pas mais sort l’arme qu’il tient contre sa hanche gauche.
— Calmez-vous, je me rends.
Le ton tranquille rassure à moitié le policier. Il s’avance vers le milieu de la pièce et voit un homme attablé qui lui fait face. Le policier contourne la table, sort une paire de menottes et les passe rapidement aux poignets de celui qui s’est déclaré être John Hawkins.
Lorsque le policier se réveille, il est allongé près du feu entre deux couvertures faites de peaux de caribou. La chaleur est agréable et avant même d’ouvrir les yeux, il étire son corps de façon que chaque pouce de sa peau puisse profiter de cette douceur qui lui a tant manqué ces derniers jours.
— Vingt-cinq heures de sommeil, bravo, vous deviez être épuisé ? lui demande John Hawkins.
Le policier se redresse brusquement, rejette les couvertures, se lève et demande :
— Qu’est-ce que je fais là ?
— Je n’en sais rien. Vous vouliez m’arrêter, mais j’attendais quelques explications.
— Je veux dire : qu’est-ce que je fais là, nu, entre deux couvertures ?
— Vous vous êtes évanoui, je n’allais pas vous laisser dans vos vêtements trempés, répond John Hawkins sur un ton légèrement moqueur.
Les deux hommes profitent de ces quelques échanges pour s’étudier.
John Hawkins dévisage le policier de haut en bas et le trouve très jeune, à peine vingt-deux ans. Les muscles saillants de son corps montrent un entraînement intensif récent. Il voit que le jeune homme vient de terminer une école de la police dans le sud du Canada, et certainement dans une métropole. Il n’a pas encore acquis la force de caractère de ceux qui doivent quotidiennement lutter avec la nature pour vivre d’elle. Toutefois, il apprécie ce corps large, bien dessiné, aux muscles ronds que surmonte une tête aux traits fins et aux courts cheveux blonds. Les yeux, bleus comme il se doit, pétillent de candeur juvénile. John pense que la vie a épargné à ces yeux certains spectacles qui marquent la vie d’un homme. En continuant à dévisager le jeune homme, son regard s’arrête sur son sexe. Deux belles grosses boules bien rondes et solidement accrochées sont surplombées d’un sexe en forme de bouton de rose. Le sexe n’est pas long, mais sa tendre couleur montre qu’il est frais, en parfaite santé et qu’il doit avoir très peu servi.
John Hawkins, lui, doit avoir une trentaine d’années. Son visage souriant paraît sympathique au jeune policier, mais celui-ci se demande quel degré de confiance on peut avoir en un homme qu’on vient arrêter. La supériorité de John est évidente ; il a vécu toute sa vie dans ces régions. Sa musculature, bien que légèrement relâchée, indique que ce garçon brun est physiquement plus fort.
Nu, le policier se sent désarmé. Il est choqué et mal à l’aise, cette situation n’étant pas très réglementaire pour l’arrestation d’un bandit.
— Où sont mes vêtements ?
Il cherche des yeux les insignes de sa dignité, et les trouve sur une chaise non loin de lui, près de la cheminée.
— Ils ne sont pas secs, je les ai lavés, venez plutôt déjeuner, je viens de faire du bon café.
— De quel droit avez-vous lavé mes vêtements ? demande le jeune garçon dans un effort pour obtenir un ton autoritaire.
— Du droit que je suis ici chez moi, que vos vêtements sentaient particulièrement fort et que ma maison n’est pas très grande. Je vous ai même lavé et rasé si cette information peut avoir un quelconque intérêt pour vous.
La voix est calme, mais assurée. Le policier grogne ; après sa dignité, sa pudeur vient de subir un rude coup. Comment cet inconnu peut-il l’avoir lavé comme un enfant ? On lui a enseigné qu’il lui fallait toujours dominer son adversaire. Il se sent moralement affaibli, et il aura du mal maintenant à imposer sa loi au bandit qui lui fait face. Ne sachant quel comportement adopter, il se décide pour une mesure neutre d’attente, en s’asseyant à la table pour y avaler son bol de café. Sa faim vient brutalement de se réveiller et de douloureuses crampes réapparaissent à la vue d’énormes tranches de lard frit.
— Quel est votre nom ? demande John Hawkins.
— Je suis le sergent Bill Ward de la police montée, répond le policier occupé à inspecter tout ce qui peut se manger sur la table.
— C’est votre première arrestation.
Le ton est plus affirmatif qu’interrogatif.
— À quoi le voyez-vous ? réussit à articuler Bill Ward entre deux bouchées de lard gras.
— Vous avez perdu vos chiens et un policier qui se respecte ne perd pas ses chiens.
Bill Ward grimace ; cette histoire de chiens allait lui attirer des ennuis.
— Ils se sont sauvés il y a quatre jours. Je les avais nourris quand l’un d’entre eux s’est mis à pleurer, puis à hurler. Il est mort en quelques minutes. Les autres ont cherché à se venger ; ils se sont mis à grogner et à vouloir m’attaquer. Je voulais les disperser, j’ai réussi, ils se sont tous sauvés, impossible de les faire revenir.
— Les huskies ne doivent jamais être trop nourris, ils n’y sont pas habitués. Ça leur retourne le ventre et ça les tue en un quart d’heure. Ces chiens ne sont pas faits pour être ni trop aimés, ni trop gâtés. Vous n’avez pas réussi à vous imposer à eux, ils vous en ont voulu, puis ont décidé de vous laisser tomber. Ce sont des chiens idiots. Ils ne retourneront vers l’homme que la faim au ventre, mais ils ont plus de chance de finir dans la gueule d’un loup auparavant. Vous ne les retrouverez pas. Ça vous coûtera quelques mois de solde, mais c’est le métier qui rentre.
Bill Ward grimace de nouveau. Le Grand Nord ne fait décidément pas de pitié à ceux qui n’en connaissent pas toutes les règles. Il ne lui reste qu’à s’accrocher.
— Vous vous laisserez faire ? demande-t-il naïvement, soucieux d’éviter de nouveaux ennuis.
John Hawkins regarde Bill pendant toute la discussion ; le torse est peu poilu et ses poils blonds laissent voir une peau douce et sans défaut. C’est de plus en plus troublé qu’il répond :
— Ce n’est pas une question d’actualité, il va neiger encore une semaine. Cette baraque sera bientôt recouverte jusqu’au toit, il sera alors pratiquement impossible de sortir.
John semble particulièrement heureux d’avoir à dire ces mots. Il va avoir de la compagnie et quelle compagnie.
— Ça durera combien de temps ? demande Bill avec inquiétude.
— Trois semaines environ, le temps que la neige se tasse.
Le temps s’arrête net pour Bill ; il considère l’éternité qu’il aura à partager avec son prisonnier, dans une pièce aussi grande qu’une cellule. Les deux hommes se regardent droit dans les yeux.
Bill s’imagine vivre un long bras de fer où, jour après jour, il devra réaffirmer une supériorité que seule la certitude de son bon droit lui donne actuellement. Il se jure d’utiliser ces longues semaines pour ramener John Hawkins dans le droit chemin. À défaut de force physique, il utilisera la psychologie. Il a appris de longs discours évidents sur les règles fondamentales de la vie en société. Il saura les reprendre avec une fervente conviction. S’il échoue, il jouera de la seule vue de son uniforme ou en dernier recours de la force de son arme. Celle-ci, aujourd’hui complètement inutile, est restée à son ceinturon. John n’a même pas cru bon de vider la cartouchière de ses balles. Bill ne se sent pas pris au sérieux.
Pendant que son air se fait de plus en plus sévère et que ses yeux virent au gris, John Hawkins dans le silence de ce face à face laisse, lui aussi, ses pensées s’envoler. Il rêve de voir Bill dans la forêt abattre du bois de coupe à la hache. Il oublie la tempête qui les entoure et l’imagine, à la belle saison, le torse nu faisant travailler ses muscles avec une attention soutenue. La sueur de son front se perdrait dans ses sourcils, coulerait en minces rigoles sur ses tempes et de là s’ét