Il pleut à Venise, Hamdullah !
368 pages
Français

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Il pleut à Venise, Hamdullah ! , livre ebook

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Description

Alyssa, veuve musulmane discrète de la bourgeoisie marocaine et Loomi, designer et artiste athée, échangent un regard intense pendant quelques secondes au cours d'un déjeuner avec des amis.
Très vite, ils découvrent et partagent une passion amoureuse improbable et inédite dans laquelle ils s'investissent chaque fois un peu plus, notamment lorsqu'ils se retrouvent pour de longs voyages. Mais Loomi ne tarde pas à réaliser que leur futur est compromis par les différences - subies ou souhaitées ? - qui existent entre leurs deux cultures, entretenues par cette partie de la caste marocaine qui se cherche une identité universelle entre l'Afrique et l'Occident.
Le poison létal de la dissimulation et du mensonge, ajouté aux dogmes contraignants de la religion d'Alyssa, va sournoisement s’instiller dans cette relation, plus virtuelle que réelle, qui semblait être un amour essentiel et pur découvert au seuil du troisième âge.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 août 2014
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332707451
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0120€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-70743-7

© Edilivre, 2014
Dédicace


Car rappelle-toi les amants,
comme le mensonge les surprend
à l’heure des confessions.
Rainer Maria Rilke (Les Cahiers de Malte Laurids Brigge)
À ma mère, in memoriam
À mes enfants, Clémence, Damien et Stéphane
À mon petit-fils Martin
À Jean-Claude, in memoriam
La première fois
La première fois, on ne sait jamais que ce sera la première fois, parce que pour le savoir, il faut avoir vécu la seconde. On imagine toujours, la première fois que l’on rencontre quelqu’un, que ce sera un moment unique qui disparaîtra bientôt. C’est comme une personne croisée au milieu de la foule : on échange un regard, on détourne les yeux, puis on oublie aussitôt et chacun retourne à sa propre vie. Quelques minutes après, on ne se souvient même plus de ce regard. Parfois, très rarement, il reste imprimé en vous comme une marque au fer rouge. On ne sait pas pourquoi, une ressemblance, un coup au cœur, une envie…
J’ai passé ma vie à rêver, à créer et à bosser en tirant des bords, avec des fortunes diverses, mais en allant toujours au bout de mes projets. Marié deux fois, enfants tous casés, brillants et heureux, je suis issu d’une famille discrète et peu envahissante. Une grand-mère maternelle que je n’ai jamais connue, Marie, enceintée par Aristide, mon grand-père maternel, avocat, séducteur notoire, empêtré plusieurs fois dans des scandales adultérins. Brillant homme politique de gauche, il fut deux fois président du Conseil et plus de vingt fois ministre. C’est à lui que la France doit la loi historique de séparation de l’Eglise et de l’Etat, votée en 1905. Il est mort en 1936 en ignorant l’existence de ma mère et c’est la raison pour laquelle elle ne l’a pas connu. Il m’inspire pourtant beaucoup de respect aujourd’hui.
Mon grand-père paternel s’appelait Louis. J’ai croisé une fois sa première femme, ma vraie grand-mère de sang, chez qui j’étais allé passer des vacances au cours de mon enfance. La troisième, celle que nous considérions tous comme la vraie, partageait depuis longtemps la vie de mon grand-père. Plus jeune et plus discret qu’Aristide, il fit une longue carrière au ministère des finances comme haut fonctionnaire. C’était après la guerre qu’il a passée en grande partie dans un maquis de Haute-Savoie en ignorant que son fils, mon père, faisait le coup de feu dans les mêmes collines… ils étaient très proches. Ce grand-père, je l’ai bien connu ; il adorait écrire et avait une collection de stylos à plumes qui me faisait rêver quand j’étais gosse. Quand je passais déjà des heures à dessiner sur son bureau. Malheureusement, je n’ai pas pu récupérer un seul Schaeffer et pas son magnifique Mont Blanc , quand il est mort.
Mes parents se sont rencontrés après l’Armistice. Ma mère, fille naturelle de Marie à vingt-six ans et d’Aristide qui en avait soixante à l’époque, a bien sûr été, tout de suite à sa naissance, éloignée de sa famille catholique très pratiquante, des marchands bourgeois de Nantes originaires de l’Alsace puritaine du dix-neuvième. Aristide avait rencontré sa jeune maîtresse chez mon arrière-grand-père dont il était l’un des fidèles amis. Dans leur milieu, il n’était pas question de reconnaître une enfant née des amours coupables d’une jeune femme de bonne famille avec un grand séducteur, athée de surcroît.
Après ce lâche abandon, ma mère a commencé sa vie chez les religieuses, à Passy dans le seizième arrondissement de Paris, avec une dote conséquente. L’argent résout bien des problèmes de conscience. Etudes, prières, piano et travaux ménagers la destinaient à devenir une parfaite épouse et mère, ce qu’elle a été durant toute sa vie, en abandonnant les prières, ce que personne n’a regretté, le piano ce que moi j’ai regretté longtemps et en travaillant comme le font aujourd’hui toutes les femmes libres dans le monde.
Mon Père était aviateur. Une carrière exemplaire. Jeune officier dans l’Armée de l’Air Française, il s’est heurté de plein fouet aux réalités dangereuses de la politique en 1962 au moment où l’Algérie, où nous vivions depuis six ans se libérait, dans le sang mélangé, du joug néfaste du méchant pays colonialiste que la France avait été durant plus d’un siècle. Cette présence leur avait pourtant permis de construire leur pays sur des bases solides, oubliées ou détruites depuis.
Revenu dans le civil, il créa une société qui construisait des centres commerciaux dans toute la France. Il nous fit visiter le pays du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest, sans parvenir à nous faire oublier la magie des dunes, des palmiers et des nuits étoilées du désert saharien, autour de Ouargla, la ville du sud algérien où nous avions habité avant. Souvent le dimanche, là-bas, nous faisions de longues balades dans le désert pour rencontrer les Touaregs avec qui il faisait des affaires pendant que nous cherchions des roses des sables avec leurs enfants. Le soir, revenus au cœur de notre oasis rafraîchie par la nuit, il nous lisait des passages du Petit Prince pour nous endormir. Je crois que c’est là que j’ai vraiment commencé à rêver, à aimer les avions, les contes, la poésie et les roses. Aujourd’hui, je rêve toujours ; j’ai encore la bougeotte et l’envie d’aventures, professionnelles essentiellement, après avoir bourlingué durant près de trente années de l’Afrique à l’Amérique du Nord en passant et repassant par l’Europe à chaque fois.
Je m’appelle Louis-Emile Gander. Ça fait un peu désuet et depuis longtemps on m’appelle Loomi. Avec deux « O », j’y tiens, je suis du signe des Gémeaux. À soixante ans, je suis un homme comme les autres. Un mètre quatre-vingt, quelques kilos en trop, les cheveux châtains mi-longs, avec une mèche qui tombe sur mon front, qui cache mes yeux bleus de temps à autre et que je remonte par un geste de la main droite qui semble devenu un tic. Je ne suis ni beau ni laid et d’ailleurs ce point m’importe peu. J’ai grossi, depuis ces dernières années et je frise les quatre-vingt-dix kilos. Cela me donne un visage un peu rond qui ne me ravit pas mais j’essaye de faire avec. J’ai un gros défaut, j’aime séduire. Mes clients, mes auditoires lorsque je faisais des conférences sur le design, mais aussi les femmes ; je dois être le digne petit-fils de mon grand-père. Cela m’a mis tout au long de ma vie, comme lui, dans des situations compliquées et parfois embarrassantes. Je cultivais l’art de la dissimulation et du mensonge pour tenter – en vain – de cacher mes écarts à ma femme Florence et à mes amis dans le bon périmètre des convenances sociales. Sans grand succès pour la première et dans la plus parfaite indifférence pour les seconds qui mettaient un point d’honneur à détourner l’attention… « Cela ne nous regarde pas ! »
Depuis quelques années, je ne trouve plus d’intérêt dans ma vie de couple. Il y a encore peu, je partais souvent en vol à vue, destination plaisirs tous azimuts sans me préoccuper de la traînée de souffrance que je laissais derrière moi. Plus maintenant, car j’ai l’impression d’avoir complètement perdu ma libido et cela m’a calmé. Côté couple, mes échanges avec ma femme, qui souffraient déjà d’une indigence sensuelle salvatrice – pour elle – sont devenus essentiellement d’ordre… social. Cela tombe bien, elle qui par le passé me traitait régulièrement d’obsédé sexuel n’a plus à souffrir de mes velléités de caresses et cela semble lui convenir. Nous n’avons jamais vraiment parlé le même langage du corps et elle a beaucoup de mal à oublier mes écarts de trajectoire, ce que je peux comprendre. J’aurais aimé qu’elle me pardonne, mais j’ai été trop loin et cela est devenu impossible. Trop de souffrances, trop de mensonges, même si je continuais à la considérer comme la femme d’une vie. Elle a été une épouse socialement exceptionnelle, une mère remarquable, mais une amante très éloignée de mes attentes et peut-être aussi de mes rêves. Je lui reproche également, certainement à tord, d’être à l’origine de ma défunte libido. Mais à sa décharge, je pense que ce sont surtout les médicaments que j’absorbe quotidiennement depuis mes deux opérations du cœur qui ont fortement contribué à dérégler la fragile machine à désir.
Aragon le disait, il n’y a pas d’amour heureux. Imprégné de cette certitude, j’ai fini par me décider, il y a plusieurs mois, à naviguer doucement sur un cap plus rectiligne – sourd au chant des sirènes –, celui d’un avenir tranquille qui semble me mener tout droit vers une sagesse de composition. Je n’ai plus envie de courir après ces illusions qui n’ont laissé que des blessures dans mon entourage et qui ne m’ont jamais permis de d’attraper des rêves d’amour qui étaient certainement surdimensionnés.
De leur côté, nos enfants volent de leurs propres ailes et, avec leur mère, nous avons terminé ce contrat familial, social et sentimental qui nous liait et nous guidait ensemble vers les mêmes buts. Nos amis sont, comme nous, occupés à changer, construire ou maintenir leur vie dans l’harmonie ou le rejet de leur couple et le bonheur de leur famille et même si l’on partage de bons moments ensemble, ils deviennent plus rares et sont moins spontanés que par le passé. Les petits-enfants y sont pour beaucoup. Une sorte de modus vivendi au début de la troisième vie, après l’enfance et la vie professionnelle, que chacun se plait à assumer par obligation ou par habitude. Et aussi parce qu’il semble que ce soit le seul chemin pour vivre tranquillement ce troisième âge, ce troisième tiers de la vie. Toujours cette trilogie, chère aux hindouistes, que je retrouve dans les étapes importantes de ma vie.
Je ne suis pas dans l’état d’esprit d’un retraité en puissance sur le chem

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