Ma belle Polonaise
106 pages
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Ma belle Polonaise , livre ebook

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Description

Frania est une jeune Polonaise courageuse qui, après avoir perdu sa mère, a pris soin de ses cinq jeunes sœurs. Elle a connu le drame de la guerre, de l'occupation allemande avec tous ses dangers, et a dû encore faire un deuil, celui de son frère, mort lors d'une charge insensée de la cavalerie polonaise contre les blindés de la Wehrmacht. Ses malheurs continuèrent quand son père exigea qu'elle épouse un homme qu'il avait choisi. Frania prit alors la fuite, quitta la Pologne et arriva en France. Elle trouva un emploi de serveuse dans un café-restaurant. Mais sa beauté ne laissait pas de marbre certains clients irrespectueux, allant jusqu'à la violence d'une tentative de viol. Heureusement, Frania trouvera protection auprès de Jean, un Polonais naturalisé, qui deviendra son mari. Le jeune couple connaîtra le bonheur, auquel s'ajoutera la naissance de leur fille unique. Pourtant, la vie leur réservera encore son lot de surprises et, surtout, de schémas qui, étrangement, se reproduiront... De sa plume dentelée de douceurs, René Bard relate à merveille les allégresses de l'amour et de ses émotions. Avec talent, il nous susurre de ne pas oublier nos premiers émois amoureux, afin de ne pas interdire à nos enfants ce que nous avons aussi vécu passionnément à leurs âges...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 novembre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342168327
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Ma belle Polonaise
René Bard
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Ma belle Polonaise
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
I Panna Frania
Le dimanche matin, la famille Ostrowski prenait le petit déjeuner tardivement, vers sept heures. La mère, Frania, avait disposé sur la table tartines beurrées, café et lait plus une assiette de crudités. Même Lucie, leur fille unique, faisait l’effort de se lever aux environs de six heures trente quand son âge lui rendait difficile d’ouvrir les yeux d’aussi bonne heure. C’était plus aisé depuis qu’elle aidait le nouvel employé, Jacques Langlas. Lucie avait même exigé qu’il n’y ait plus de dimanche pour le travail. Le père, Jean avait seulement levé les yeux au ciel laissant, tant il adorait sa fille, le soin d’intervenir à son épouse, Frania. Si Lucie savait retourner son père, il ne lui servait à rien de contester les décisions ou les opinions de sa mère ; Frania avait élevé ses cinq sœurs, là-bas en Pologne ; elle avait alors acquis une expérience qui l’aidait à élever Lucie. Certes, il arrivait à Lucie de chicaner sa mère, mais elle ne gagnait jamais sauf si sa mère laissait aller volontairement :
« Ta fille m’épuise ! » disait-elle, amusée.
Jean poussait alors de hauts cris, menaçait sans autre résultat que d’obtenir un sourire radieux qui rendait les yeux de sa fille encore plus jolis.
Jean était d’origine polonaise ; à la fin de la guerre à laquelle il avait réchappé, il avait quitté la Pologne pour la France où, disait-on, il y avait du travail bien rémunéré. Le nord du pays dévasté par la guerre, était maintenant occupé par des entreprises de reconstruction. Il trouva de l’emploi dans la Compagnie des chemins de fer. Au bout de deux ans, au vu de ses services, il fut nommé conducteur-chef de train. Il conduisait essentiellement sur les grandes lignes et rentrait chez lui, dans le sud du pays, une fois par semaine. Les autres jours, il dormait dans une des chambres fournie par l’entreprise. Celle qu’il préférait se trouvait en gare ; il dînait et, après le repas, jouait aux cartes jusqu’à la fermeture quelquefois tardive. Comme la plupart des clients, Jean taquinait l’une ou l’autre des serveuses, des jeunes filles pour la plupart. C’était gentil. En eût-il été autrement, le patron de l’établissement serait intervenu, comme c’était arrivé parfois à l’encontre d’un consommateur un peu trop aviné.
Une nouvelle serveuse fut embauchée ; une jeune Polonaise avec un visage magnifique, aux cheveux blonds et aux yeux bleus. On ne pouvait qu’imaginer son corps caché sous un long tablier. Un client voulut, un soir, lui pincer les fesses. Elle se retourna, fixa le type et menaça :
« Recommence et je te casse une bouteille sur le crâne ! » L’autre ne supporta pas, l’insulta à haute voix puis se trouva face à Jean qui avait appuyé les deux mains sur la table et s’était penché vers l’homme :
« Continue comme ça et tu auras affaire à moi. »
L’homme tourna son regard vers le patron, comme pour chercher un appui, mais ce dernier approuva Jean :
« Il a raison, Frania travaille et donc, elle mérite le respect. »
L’individu quitta la salle en maugréant. Frania remercia Jean en utilisant la langue polonaise : «  Dziekuje, Panu  » (Merci, Monsieur). Dès ce jour, Jean devint le client favori de Frania. Elle trouvait le moyen, même en service, de consacrer quelques minutes de plus à Jean. Il lui avait demandé de cesser de parler en polonais :
« Nous sommes en France ! »
Un soir, lors de la journée de repos hebdomadaire, Frania, néanmoins présente, s’était assise à la table de Jean qui l’avait appelée. Il l’avait accueillie gentiment :
« Tu es superbe dans cette robe, elle te va à ravir. »
Frania avait rosi par timidité. Il l’invita à dîner dans un autre restaurant. Elle accepta. Durant le repas, elle s’ouvrit à lui avec de plus en plus de confiance, tant il était attentif. Quelques larmes coulèrent sur ses joues. Troublé, Jean lui offrit son mouchoir et proposa :
« Viens chez moi nous pourrons parler tranquillement. »
Les yeux égarés, sans manifester de crainte, elle lui donna la main, le suivit. La chambre de Jean était exigüe. Il la fit asseoir sur le bord du lit, prit la seule chaise de la pièce et dit :
« Vas-y, raconte. »
Il écouta sans interrompre Frania, son histoire pleine de malheurs. Son père était cordonnier ; elle avait un frère ainé et cinq sœurs plus jeunes qu’elle, mais pas de mère, disparue après la naissance de la dernière sœur. Elle vivait dans un gros bourg situé dans les environs de Katowice , Posada Larsynska , au sud de la Pologne. Elle avait connu la guerre, l’occupation allemande avec tous ses dangers ; son frère était mort lors de cette charge insensée de la cavalerie polonaise contre les blindés de la Wehrmacht . Son père avait beaucoup de travail et, sans qu’elle sût pourquoi, il la contraignit à aller vivre avec ses cinq sœurs dans une masure à l’écart de la bourgade.
Vers la fin de la guerre, des soldats russes, intrigués par les bruits provenant de l’intérieur de la masure, défoncèrent la porte, nous gâtèrent avec du lait, des gâteaux, des friandises, avant que mon père ne vienne nous chercher en compagnie d’une femme. « Votre nouvelle maman » avait-il dit.
Jean épongeait avec des mouchoirs en papier les joues mouillées de Frania, remettant à plus tard les questions qu’il aurait aimé lui poser.
Frania continua à raconter : cette maman, pas la sienne, en train de repasser, de repriser, de cuisiner ; son père, exigeant qu’elle épousât l’homme qu’il lui présentait ; elle avait refusé parce qu’elle était amoureuse d’un garçon habitant une maison voisine. Son père, de plus en plus insistant avait tenté de l’amadouer en lui donnant de l’argent : « Achète une jolie robe et tout ce dont tu as besoin pour bien paraître. » Elle avait alors décidé de s’enfuir, d’autant que son père persévérait dans sa volonté de la voir se marier. Elle s’était alors lancée dans l’aventure, un sac à l’épaule, rempli de vêtements et de la trousse de toilette. Les trains l’avaient transportée tout le long du sud de la Pologne, avaient traversé l’Allemagne et ses décombres pour parvenir en France, un pays de cocagne, croyait-elle. Son trésor était entamé par le prix du voyage, et celui des repas, bien qu’elle se fût restreinte en se contentant en général d’un sandwich et d’un fruit. Quand elle mangeait dans une salle d’attente, elle avait parfois à se défendre contre quelque noctambule. Toujours victorieusement, affirma-t-elle. Arrivée en France, il lui fallait trouver du travail : ce fut serveuse dans le café-restaurant, près de la gare où elle était descendue. Cet emploi lui permettait de vivre convenablement, sans problèmes, car elle était protégée par le patron de l’établissement et par toi aussi, avait-elle ajouté en tentant de sourire sous ses larmes. Comme si ce long discours en polonais l’avait épuisée, elle se laissa aller sur le matelas, un poing sur le front, l’autre main repoussant tant bien que mal la robe sur ses genoux. Jean s’était approché, avait saisi le poing :
« Calme-toi » répéta-t-il plusieurs fois. Il l’aida à se relever, la raccompagna vers sa chambre au-dessus du café. Devant la porte, il lui souhaita une bonne nuit.
« Je peux t’embrasser pour te remercier ? »
Il opina et lui rendit les baisers qu’elle avait posés sur ses joues.
 
II Quelques semaines plus tard
Frania effectuait son travail quotidien, à partir de six heures, en compagnie du patron. Elle servait les clients, nombreux d’aussi bonne heure, car ils allaient au travail ou à l’embauche. C’était le café et, pour la plupart, le verre de vin rouge ou blanc. Elle préférait ces services matinaux où la clientèle était moins pénible, moins lourde que parfois en soirée. Frania acceptait le badinage à son égard à condition qu’il ne dépassât une certaine limite ; dans le cas contraire, les hommes avaient droit à un haussement d’épaules et à un visage fermé. Les gestes osés étaient rares comme, en particulier ce matin ; un type avait glissé sa main sous la robe ; elle l’avait giflé. Il s’était levé dans l’intention visible de riposter. Outre que les clients voisins manifestaient leur désaccord, le patron était sorti de dernière le bar et, poliment mais fermement avait flanqué l’homme à la porte. En pleurs, Frania s’accrocha au comptoir en répétant : « Pardon, pardon ! » Le patron l’avait prise par les épaules :
« Ne pleure pas, tu n’as rien à te faire pardonner, le bonhomme n’a eu que ce qu’il méritait. »
Quand elle eut retrouvé la maîtrise d’elle-même, qu’elle eut chassé cette idée qui lui était venue en tête de s’enfuir de cet établissement, elle put reprendre son service. Dans l’ensemble, les clients l’approuvaient ; il y eut même une table où elle fut applaudie, même si certains auraient bien aimé mettre dans leur lit cette superbe fille aux longs cheveux clairs, les yeux bleus, une peau délicate comme celle d’un bébé.
Le lendemain, en fin de matinée, le patron lui apporta une lettre. « Pour moi ? » s’étonna Frania. Qui pouvait donc lui écrire ?  Elle décacheta l’enveloppe, en retira la lettre écrite en polonais, alla tout de suite à la signature : « Mille baisers, Jean ! » en français. Ce n’était pas une lettre d’amour mais elle aurait pu l’être tant Jean posait de questions sur son état de santé, sur son travail ; il lui

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