Ouvrir les yeux
145 pages
Français

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Ouvrir les yeux , livre ebook

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Description

Après avoir brûlé la chandelle par les deux bouts, Paul a décidé de reprendre sa vie en main. Aujourd'hui de retour dans sa ville natale, il jongle entre une formation d'instituteur, un stage et des heures de ménage dans des bureaux. Tout aurait été pour le mieux s'il n'avait pas la fâcheuse habitude de réarranger la décoration des employés.


Mais voilà que l'un d'entre eux remarque son petit manège et laisse un message à son intention. Commence alors une étrange correspondance entre Paul et le mystérieux comptable.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 octobre 2017
Nombre de lectures 4
EAN13 9782375744055
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Marc GARDNER
OUVRIR LES YEUX


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MxM Bookmark © 2017, Tous droits réservés
Illustration de couverture © Miesis
Relecture et correction © Marc Philipps & Emmanuelle Lefray.

ISBN : 9782375744055
Dédicace


À Damien.
Chapitre 1
Ma vie n’est pas compliquée, elle est juste éreintante.
Je me l’imagine comme un long couloir bordé de portes fermées. Chaque décision revient à pousser l’une d’entre elles pour me mener dans un nouveau corridor. Et parfois, je peux choisir d’en fermer une sans même la passer.
Aujourd’hui fait partie de l’un de ces moments. Une porte va s’entrebâiller alors que je longe ce tunnel interminable. Reste à savoir si j’y passerai la tête pour découvrir ce qui se cache de l’autre côté.
Pour ce qui est de l’aspect fatigant de ma vie, j’y reviendrai bien assez tôt. Pour le moment, je suis sur mon scooter, à quelques dizaines de mètres de mon boulot quand mon téléphone se met à vibrer dans ma poche. Par miracle, à cette heure de forte affluence, il n’y a pas le moindre véhicule sur ma route. J’en profite pour donner un petit coup d’accélérateur. Deuxième sonnerie, j’arrive sur le parking réservé au personnel – même si je ne fais pas vraiment partie du personnel, mais passons. Troisième sonnerie, je coupe le moteur et déploie la béquille. Quatrième sonnerie. Je pioche mon mobile au fond de la poche de mon jean, juste avant que mon interlocuteur n’atterrisse sur la messagerie, et prends une demi-seconde pour vérifier son nom à l’écran.
— Salut, Hicham ! Un instant, faut que j’enlève mon casque.
Je m’exécute sans lui laisser le temps de répondre et pose mon équipement à mes pieds, sur le plateau du scooter.
— Je suis à toi, lui annoncé-je tout en remettant de l’ordre dans mes cheveux de ma main libre.
— Encore sur ton engin de malheur, Paul ? ricane-t-il.
— Eh oui, pas le choix. Comment tu vas ? Ça fait un moment que je n’ai pas eu de tes nouvelles.
Hicham vit à Paris, c’était mon cas aussi jusqu’à l’an dernier. Nous ne nous sommes pas beaucoup revus depuis mon départ de la capitale, mais nous gardons le contact et échangeons des messages régulièrement.
— Tout baigne, c’est plutôt pour avoir de tes nouvelles que j’appelle, dit-il en mettant l’accent sur « tes ». J’ai essayé de te joindre plusieurs fois depuis la semaine dernière, mais je tombe tout le temps sur ton répondeur.
— Ouais, désolé. Depuis la rentrée, j’ai un peu de mal à sortir la tête de l’eau. Rappelle-moi déjà pourquoi j’ai décidé de tout plaquer pour faire cette formation.
— D’une, tu n’as pas « plaqué » grand-chose.
Je devine qu’il esquisse des guillemets avec ses mains ; il est comme ça, Hicham.
— Et de deux, poursuit-il, c’est justement parce que tu n’avais rien à « plaquer » – et il recommence, le salaud ! – que tu as décidé de devenir instituteur.
— Dire que je te considérais comme mon meilleur ami.
Je fais la moue et espère que cela transparaît jusqu’à l’autre bout du fil.
— Oh, ne te mets pas à bouder, hein ! C’est justement parce que nous sommes amis que je n’ai pas besoin de te mentir.
— Gnagnagna ! Tu n’en as pas marre d’avoir tout le temps raison comme ça ? Je me demande comment Greg fait pour te supporter.
Ouais, parfois je ne vaux pas mieux que mes élèves, répartie fracassante et coups bas.
— Grégoire me supporte sans aucun mal, je te signale. Et arrête d’essayer de changer de sujet !
Mon Dieu, mon meilleur ami est insupportable ! Et cela me fait sourire comme un benêt rien que d’y penser. Je dois être un peu maso dans le fond. Ou alors c’est juste qu’il me manque.
— Oui, oui, ça va bien, maman.
Je l’entends faire « tss-tss-tss » et continue sans lui prêter attention :
— C’est un peu dur en ce moment, entre l’école, le stage et le boulot, le seul temps libre que j’ai, je le passe à préparer mes cours.
— Ou à dormir.
— Ouais, un peu aussi. Désolé de ne pas avoir rappelé, je me suis laissé déborder.
— Ce n’est pas grave, je suis bien placé pour comprendre, dit-il d’un ton compatissant.
Voilà pourquoi Hicham est mon meilleur ami, il me fait la morale quand j’ai besoin qu’on me remonte les bretelles, et il joue les supporters lorsque j’ai besoin de soutien.
Je sens une pression que je connais bien derrière mes yeux. Merde, je dois être plus crevé que je ne le pensais. Je me frotte les paupières de ma main libre et tente de ravaler la boule qui m’obstrue la gorge avant de répondre.
— Je m’en doute. D’ailleurs, dis-je en reprenant mes esprits après un coup d’œil à ma montre, ça m’embête de devoir couper court, mais je suis censé commencer dans trois minutes.
— Pas de souci, on se rappelle plus tard si tu veux.
— Ce serait super.
Pendant que nous convenons d’un moment plus propice à la discussion, j’aperçois un peu plus loin deux employés sortir du bâtiment. J’ai déjà repéré le plus grand il y a quelque temps. Sa silhouette élancée et ses épaules imposantes m’ont tapé dans l’œil dès que je l’ai vu. Un bon mètre quatre-vingt-cinq, un buste de nageur olympique et un joli cul bien moulé dans un jean ajusté. Bref, tout à fait mon style. Il salue son collègue et se dirige vers le parking à vélos en sanglant son casque.
Il y a déjà quelques secondes qu’Hicham a raccroché, mais je garde mon téléphone à l’oreille, histoire de paraître occupé pendant que je l’observe enfourcher son vélo de course. Il se penche en avant pour saisir le guidon puis donne un coup de pédale énergique. Mon Dieu, ces fesses !

*

J’en suis encore à envisager de me mettre aussi au vélo quand je passe mon badge devant la borne pour accéder aux bureaux. J’abandonne rapidement cette idée qui m’enthousiasme beaucoup moins lorsque je me souviens que nous sommes déjà fin septembre. Pédaler sous la pluie et dans le froid, très peu pour moi. D’ailleurs, il faudrait que je songe à m’acheter une voiture parce que je ne suis pas beaucoup mieux loti avec mon scooter. Si seulement j’en avais les moyens.
Sur cette pensée peu réjouissante, je me dirige vers le local du personnel d’entretien. Voilà à quoi vont se résumer les trois prochaines heures de la vie trépidante qui est la mienne : vider les poubelles, épousseter les bureaux à coups de chiffon, passer l’aspirateur, récurer les toilettes, changer les rouleaux de papier W.C., remplir les distributeurs à savon, et j’en passe. Tout un programme !
L’an dernier, quand il m’est apparu que je perdais mon temps à Paris et que ma vie partait à vau-l’eau, j’ai décidé de devenir homme de ménage. Oui enfin, ce n’est pas tout à fait ça. Disons plutôt que je me suis demandé ce que j’aimerais faire. J’ai immédiatement pensé à l’enseignement. Alors j’ai passé les concours d’entrée à l’école du professorat et j’ai été reçu. Pour pimenter le tout, j’ai eu la bonne idée de reprendre ma vie là où je l’avais abandonnée quelques années auparavant : en province, dans la ville où j’ai grandi et où vit encore ma famille. Tout cela, sachant que je ne m’entends pas franchement avec elle et qu’il ne reste plus grand monde de mes années de fac ici. Du coup, à vingt-cinq ans, je me suis retrouvé seul dans une ville où j’ai autant de bons que de mauvais souvenirs, à devoir reprendre mes études et à chercher un logement quasiment sans le sou. Ouais, je n’étais pas du genre fourmi quand je jouais les Parisiens. De fait, pas le choix, il fallait que je me trouve un petit boulot compatible avec mes horaires de cours. Alors que je commençais à tirer la tronche en voyant mes alternatives se réduire à serveur dans un fast-food ou caissier dans la supérette du coin, je suis tombé sur l’annonce d’une société d’entretien. Elle recherchait un technicien de surface pour faire le ménage dans des bureaux. Ce n’est pas l’extase, mais au moins, je n’ai pas affaire à des ados en manque de graisses saturées et de sucre ou à des clients mal embouchés qui rechignent à dégainer leur carte bleue. Même si incarner Monsieur Propre dans une société d’expertise comptable ne paraît pas plus sexy, derrière mon chariot d’entretien, je ne croise personne. Et, Dieu merci, je ne suis pas chauve.

*

Cela ne fait que quelques mois que je suis chargé de l’entretien de ces bureaux, mais j’ai déjà pris mes habitudes. Mon tout premier jour de travail, durant lequel j’ai pu démontrer toute mon incompétence en matière de ménage, n’est plus qu’un lointain souvenir. Désormais, j’ai mes marques et j’arrive à m’organiser pour m’acquitter de toutes mes tâches dans les temps. À tel point que je parviens parfois à faire une pause dans mon travail ou à flâner un peu. Il m’arrive d’apporter un bouquin, alors j’en profite pour lire. Mais ce qui me plaît le plus, c’est de traîner dans les bureaux. Moi qui suis d’un naturel curieux, pour ne pas dire fouineur, je me suis découvert avec ce job une passion pour l’observation. OK, ce n’est pas l’occupation du siècle, mais il faut dire que les possibilités sont plutôt maigres.
Ce que j’aime, c’est jeter un œil dans les armoires, dénicher le placard à fournitures, m’extasier devant les stylos, les cahiers, les surligneurs et autres classeurs neufs et rutilants. J’adore faire le tour des bureaux, regarder comment ils sont décorés ou personnalisés. Par exemple, dans cet open space, il y en a un sur lequel tout est impeccablement rangé. Pas une feuille, pas un stylo, pas le moindre post-it ne traîne dessus. La personne qui l’occupe doit être un sacré maniaque. Face au sien se trouve un bureau qui est tout l’inverse. Papiers gras et emballages alimentaires le jonchent en permanence. Des dossiers sont éparpillés en tas anarchiques, les crayons, grignotés pour moitié, sont partout sauf dans leur pot, et les fameuses notes jaunes sont collées au petit bonheur la chance – jusque sur une bouteille d’eau vide qui a perdu son étiquette. Autour de l’écran d’ordinateur, des jouets Kinder côtoient des gobelets en carton dans lesquels croupit un fond de café. Et ça, ce n’est que pour le de

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