Une saison en Sologne
134 pages
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Une saison en Sologne , livre ebook

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Description

« Les jours s'égrenaient avec cette infernale et désespérante régularité qui caractérise le temps qui passe. Chacun d'entre eux me rapprochait un peu plus des heures sombres qui viendraient inexorablement marquer d'une pierre noire la fin de mon rêve éveillé. » Le personnage principal se remémore avec nostalgie des souvenirs vieux de trente ans. Suite à une grave maladie, le jeune homme avait été envoyé en convalescence à Saint-Aubin en Sologne. La fille aînée du médecin qui l'hébergeait ne l'avait pas laissé indifférent. Son monotone quotidien parmi la petite communauté des villageois avait alors trouvé son sens. Mais réveiller le passé enfoui ne se fait pas sans douleur et ses rêveries ont la saveur amère des regrets.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 octobre 2019
Nombre de lectures 2
EAN13 9782342168099
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Une saison en Sologne
Alain Roué
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Une saison en Sologne

Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
Retrouvez l’auteur sur son site Internet
alain-roue.societedesecrivains.com
 
Chapitre 1 Les hasards de la route
Afin de détourner le cours de nos existences, le hasard est capable de revêtir bien des apparences. Par cette journée ensoleillée de septembre, il avait étrangement opté pour celle d’un banal panneau indicateur.
Celui-ci ne se contenta plus, dès lors, de m’indiquer la direction qu’il convenait d’emprunter, m’incitant sournoisement à m’accorder un détour, vers un lieu autrefois témoin d’une page de ma désormais lointaine adolescence.
Lorsque sur le fond émaillé couleur jaune paille de ce panneau indicateur, je vis s’inscrire en lettres bleues, le nom de « Saint-Aubin », je sentis mon cœur se serrer. Ma mémoire alertée tenta alors, aussitôt, de faire revivre des heures enfouies dans les profondeurs d’un passé, à présent vieux de plusieurs décennies.
Plus de trente longues années, au cours desquelles je m’étais interdit un tel voyage dans le temps. Il m’était bien arrivé, depuis, de traverser cette région, mais jamais je n’avais laissé ma route approcher cette bourgade, cadre de l’une des belles pages de ma lointaine jeunesse. Elle était devenue un point sur une carte, que j’étais jusqu’alors toujours parvenu à éviter. Un point qui semblait pourtant aujourd’hui bien décidé à faire sauter le verrou, que j’avais installé sur la porte de ma mémoire.
Les années s’étaient succédé, et elles n’avaient finalement laissé subsister que bien peu de souvenirs de cet été lointain, réduit à un trop court chapitre d’une existence d’homme, devenu avec le temps rien de plus qu’un insignifiant paragraphe racontant une histoire, somme toute bien banale, qui n’avait pas survécu au-delà d’une unique saison.
Un seul été, mais un été de lumière dont le souvenir brûlant était longtemps resté présent en moi. Deux petits mois, qui avaient laissé une empreinte, que je crus longtemps indélébile. Le temps avait ensuite fait son œuvre, progressivement les images avaient fini par perdre de leur consistance, pour finalement s’estomper, au point de presque disparaître de ma mémoire.
La pommade du temps ne cicatrise-t-elle pas toutes les blessures ? Cicatrisation pourtant parfois trop superficielle, pour éviter la résurgence d’anciennes plaies, générant le retour de cette lancinante douleur dont on avait presque oublié la cruauté.
La route nationale avait entrepris de renouveler son manteau d’asphalte, me proposant une sorte de chemin des écoliers, pour rejoindre le ciel gris perlé de ma ville dite lumière. Chemin fait de routes secondaires clairsemées de panneaux jaunes onglés de noir, destinés à m’aider, à ne pas m’égarer dans la verte campagne solognote.
Ce fut à une intersection, que se dressa provocateur devant le capot de ma voiture, un panneau insolent qui venait me glisser à l’oreille que la commune de Saint-Aubin se trouvait à moins de cinq kilomètres. Il tournait le dos à la direction que j’étais censé suivre et semblait malicieusement vouloir m’inciter à pratiquer une remontée dans le temps. Déployant, pour parvenir à ses fins, une force de persuasion si peu commune, qu’elle fit naître en moi l’étrange désir de revoir une bourgade, que j’avais de longue date chassée de ma mémoire et dans laquelle je n’avais, de surcroît, strictement rien à faire. Son nom s’était soudainement mis à jouer en moi une petite musique nostalgique, qui se proposait de me faire revivre l’un des plus beaux moments de ma lointaine jeunesse.
Ma raison se contentait d’opposer une résistance de pure bonne forme, parfaitement symbolique, et par avance totalement démissionnaire face à ce désir naissant. Que m’importait, en effet, qu’un tel pèlerinage dans les profondeurs du temps puisse paraître ridicule, un tel argument n’était pas de nature à me faire renoncer au plaisir de revivre, un moment, les émois d’une jeunesse à jamais disparue.
Un choix tout à la fois simple et déchirant, entre deux directions. L’une espiègle, me faisant un clin d’œil pour m’attirer vers le passé. Tandis que l’autre, sage et raisonnable, s’employait à me persuader de m’en tenir au temps présent. L’indécision aurait sans doute été interminable si un avertisseur sonore, actionné de façon intempestive par l’automobiliste installé au volant du véhicule qui suivait le mien, n’avait mis brusquement fin à mes atermoiements.
Un coup de klaxon opportun qui, en coupant court à mes réflexions, m’autorisait à me soustraire aux arguments dépourvus d’originalité de ma raison, pour mieux me laisser séduire par cet étrange clin d’œil que me faisait le passé. Renonçant au raisonnable, j’abandonnais alors la route départementale, pour lui préférer une modeste voie au revêtement de bitume des plus incertain. À mon retour immédiat vers la capitale, je venais de préférer les chemins piètrement goudronnés d’un souvenir qui portait le nom de « Saint-Aubin ».
À compter de cet instant, seul me préoccupa le bain de nostalgie dans lequel je m’apprêtais à m’immerger. Je profitais pleinement du spectacle de ce paysage bucolique, me déplaçant dans une symphonie de verdure, sans qu’aucun lieu ne retienne mon attention. La campagne solognote me procurait une désespérante impression de jamais vu.
La première vision de Saint-Aubin, qu’il me fut donné d’apercevoir, me confirma l’impression d’inconnu que m’avait laissée la verte ceinture qui entourait la bourgade.
Au fil de la trentaine d’années écoulée, l’agglomération avait repoussé ses limites et grignoté une partie de la campagne environnante. Des habitations presque toutes semblables les unes aux autres, regroupées en zone pavillonnaire, avaient remplacé la végétation.
En avançant vers le centre-ville, j’avais enfin retrouvé les maisons de caractère, qui peuplaient mes souvenirs. Semblables à ce qu’elles étaient autrefois, certaines d’entre elles semblaient même avoir conservé, suspendus aux appuis de leurs fenêtres, les géraniums qui éclaboussaient leurs façades de tâches écarlates.
Une route plus large croisa la mienne, et je décidai de la suivre dans l’espoir de la voir me conduire au pied du clocher de la vieille église, qui dormait au fond de la place principale.
Des rues adjacentes s’en éloignaient de temps à autre, et certaines d’entre elles plongeaient à flanc de colline, offrant à mon regard quelques échappées sur des maisons et des jardinets, situés en contrebas.
Ce fut ainsi que je reconnus, posée au fond du vallon, cette usine autrefois propriété d’une famille Deboissec, dont le patronyme me revint curieusement instantanément à l’esprit. Des souvenirs liés à ce lieu ne tardèrent pas à afficher, devant mes yeux, de lointaines images, tout à la fois douces et cruelles, qui m’incitèrent à stationner mon véhicule sur l’accotement.
Je pouvais ainsi contempler ce triste vaisseau de briques noircies par le temps, et constater qu’il était bien conforme au souvenir que j’avais conservé de lui.
Un parking, qui n’existait pas autrefois, avait été aménagé dans les cours intérieures, et les nombreuses automobiles qui s’y trouvaient stationnées m’incitaient à penser que l’usine poursuivait encore, sous une forme ou sous une autre, une quelconque acti-vité.
En savoir davantage sur cette fabrique ne constituait pas, pour l’heure, l’une de mes priorités. Contrairement au fait d’atteindre le centre-ville, et de me retrouver au pied de ce clocher, dont je voyais à présent la flèche dépasser au-dessus des toits des habitations qui me séparaient encore de lui.
Il me restait deux cents, peut-être trois cents mètres à faire ! Une distance que je parcourais à allure réduite, pour mieux me réapproprier le cadre d’un passé qui progressivement se réveillait en moi.
Après avoir gravi une dernière côte, je débouchais à l’extrémité d’une grande place qui, dès le premier coup d’œil, ne me parut pas si différente de ce qu’elle était autrefois. Certaines échoppes avaient été remplacées par des boutiques davantage dans l’air du temps, mais d’autres, malgré leur aspect suranné, avaient subsisté aux décennies écoulées.
Le « Bistrot du marché » avait ainsi traversé le temps, semblable à lui-même, et il alignait toujours, sur son mouchoir de trottoir, quelques chaises, entourant deux ou trois de ses guéridons constitués d’un plateau circulaire en marbre, posé sur un pied central en fonte noire. Des tables typiques de bistrot qui ressemblaient étrangement à de grands champignons surdimensionnés qui, pour s’épanouir, préféreraient les pavés et le bitume des villes à la chlorophylle des grands espaces.
Tout au fond se dressait la vieille église Notre-Dame. Bien que de dimensions plus modestes que son homonyme parisienne, elle affichait déjà une taille fort respectable et devait, de ce fait, certainement éprouver bien des difficultés à peupler ses travées, l’heure de la messe dominicale venue. L’imposante bâtisse, qui avait laissé les siècles glisser sur son échine de pierres, sans en avoir trop souffert, n’en était visiblement plus à quelques décennies près, et était restée telle que je l’avais connue. Le poids des années qui s’étaient additionnées sur ce bâtiment, destiné à abriter les croyances des hommes, semblait avoir été d’une bien étrange légèreté, comparé à ce

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