LOUIS, le garçon qui jappait
224 pages
Français

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LOUIS, le garçon qui jappait , livre ebook

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Description

1956. À 18 ans, Rose met au monde un garçon « illégitime ». Cinq ans plus tard, Louis, lourdement handicapé, n'a plus de maman et vit chez ses grands-parents. Gustave et Henriette consacreront leur existence à protéger cet enfant fragile. Puisque le gamin adore la musique, ils tenteront de lui offrir un avenir d'accordéoniste. Les chausse-trappes, facilitées par la naïveté des adultes, seront nombreuses. Les fermiers des Trois Croix affronteront des situations qui transformeront leur quotidien en cauchemar. Les rebondissements ne permettront pas à Gustave de se libérer du lourd secret qui hante ses nuits. Les prières d'Henriette seront-elles entendues ? Les Boulloc accepteront-ils les mutations générées par les événements de mai 1968 ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 04 août 2017
Nombre de lectures 1
EAN13 9782414107308
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-10728-5

© Edilivre, 2017
Du même auteur
Du même auteur :
Le Grain de Sable (2004)
éditions EDILIVRE
Chocs anormaux (2009)
éditions EDILIVRE
La Gardeuse de Chèvres (2010)
éditions EDILIVRE
Le Secret de Madeleine (2012)
éditions EDILIVRE
La Maison du Bois Joly (2014)
Prologue
Vers le milieu du siècle dernier, la procréation hors du mariage était souvent jugée inacceptable. Certaines régions, agricoles et catholiques du sud du Massif Central, faisaient de cet interdit un véritable tabou. L’Eglise condamnait le péché de chair, et de nombreux citoyens voyaient là une atteinte à la morale. Les accusateurs les plus tolérants notaient en riant que certains « procédaient aux vendanges avant les moissons »
Lorsqu’une femme se trouvait enceinte dans de telles circonstances, l’entourage se positionnait là aussi en fonction de ses convictions. Les laïcs, après avoir testé en vain des remèdes de rebouteux, appelaient à leur secours les faiseuses d’anges. Ces sages-femmes occasionnelles, souvent qualifiées de matrones, parvenaient à effacer la tache honteuse. Leurs méthodes archaïques et l’utilisation d’accessoires rudimentaires provoquaient des accidents dramatiques… D’autres s’empressaient d’unir les deux imprudents qui ne s’étonnaient pas, plus tard, de l’arrivée prématurée de leur progéniture. Enfin, ceux qui ne souhaitaient pas affronter les foudres du curé et exposer leur enfant à un danger potentiel, enfermaient leur secret sous une chape de silence.
De tout cela Rose était informée et pourtant, à dix huit ans, elle devait faire face à cette position tant redoutée. La catastrophe s’abattait sur la ferme des Trois Croix. Les parents se trouvaient, à leur tour, confrontés à une situation douloureuse. Henriette, la mère, priait et implorait plus que jamais son Dieu qui la sauverait. Elle aiderait sa fille, la soutiendrait, mais la mesure finale appartenait à Gustave le père. Et la sentence tomba : « Personne ne doit savoir ! » Voilà quelle était sa décision : protéger l’enfant, mais dans la discrétion la plus absolue. Comment imposer le silence dans un milieu paysan où tout le monde se connaît ! Gustave Boulloc était un homme apprécié, certes, mais qui avait la réputation de ne pas faire les choses à moitié. Les mesures qu’il ordonna terrifièrent les deux femmes qui durent toutefois se soumettre.
Le secret fut bien gardé pendant plusieurs années au prix de sacrifices souvent cruels. Un malheur n’arrive jamais seul, dit-on. Les grands-parents pouvaient témoigner de la véracité de ce dicton. A cinq ans, le garçon qui vivait chez eux n’avait plus de maman et il souffrait d’un douloureux handicap. Henriette acceptait cette pénitence que le Seigneur lui infligeait, et Gustave regrettait que le gamin n’ait pas les capacités pour être son successeur. Alors, les braves gens s’évertuèrent à trouver un chemin à Louis, leur protégé et leur rayon de soleil. Cette volonté de bien faire, mais aussi leur naïveté provoqueront des erreurs encore une fois lourdes de conséquences…
L’admiration que le dévouement des septuagénaires suscitait et peut-être aussi les prières d’Henriette finirent par surmonter presque tous les obstacles. La société avait évolué aussi. La révolte de la jeunesse puis des ouvriers en mai 1968 fut une rupture avec ce passé à la morale stricte et à l’omniprésence de la religion. Un vent de liberté soufflait pendant que le modernisme entrait dans les foyers. Gustave pouvait alors affronter le regard des autres et dévoiler cet autre secret que personne ne connut ou ne voulut découvrir.
1
Ce 11 juillet 1955 était une journée radieuse. Une journée comme on n’en rencontre que très peu dans une année. Le soleil brillait de tout son éclat dans un ciel d’un bleu sans tache. La ferme, ordinairement calme et silencieuse, bourdonnait de bruits multiples et s’animait des gestes des hommes et des femmes qui besognaient. Le gerbier, construit depuis quelques jours avec beaucoup de patience et d’efforts, était rongé par l’activité. Des fourches lui lacéraient les entrailles et le vidaient de sa substance. Sur son flanc, un monstre affamé et bruyant appelait sans relâche de la nourriture pour satisfaire son appétit gargantuesque. C’était la journée de battage, ce jour unique qui vient récompenser les longs mois de labeur, de craintes et d’espoir.
L’énorme machine avalait les gerbes dans un vacarme assourdissant. A ses pieds, les hommes souffraient de la chaleur et de la poussière, mais ils travaillaient sans rechigner. Tout à coup, de cet enfer de bruit, de sueur et de fatigue, surgit un cri violent :
« Arrêtez, arrêtez tout ! »
Comme l’écho parcourt la vallée, cet appel zigzaguait, d’un individu à l’autre, sur l’aire de battage. Là-bas, sur l’avant du tracteur, s’étalait une tache bleue. Rose était affalée sur une des roues de l’engin. L’immense courroie qui ondulait près de sa tête soufflait un courant d’air dans ses cheveux ébouriffés. Ses affaires posées à terre indiquaient que la jeune fille avait ressenti le malaise qui s’emparait de son corps. Que s’était-il donc passé ? Quelques instants auparavant, Rosy comme on l’appelait ici, voletait d’un ouvrier à l’autre comme un papillon butinant les fleurs de l’été. Un panier accroché à son bras, elle proposait des boissons aux travailleurs au visage las et gris de poussière. Elle s’attardait auprès des plus jeunes et plaisantait avec les anciens. Pour tous, c’était un moment agréable et une pause bienfaisante. Cet arrêt momentané du travail, sous la canicule estivale, permettait à chacun d’éponger la sueur qui collait la chemise à la peau. Le passage de la jeune fille dessinait un sourire sur les frimousses et la reprise de l’activité s’en trouvait encouragée. Rosy terminait sa ronde par les situations les plus périlleuses. Grimpant aux échelles, elle rendait visite aux gaillards en équilibre sur le gerbier, puis au patron et à son acolyte penchés sur la gueule du monstre. Là, pendant que l’eau glougloutait dans les gosiers asséchés, elle ne quittait pas des yeux la bête qui se nourrissait de la récolte de l’été. Dans ses déplacements comme dans ses escalades, Rose se souciait peu des précautions pudiques élémentaires. Sa blouse largement dégrafée dévoilait la naissance de ses jeunes seins. En haut de l’échelle, sous son vêtement léger, ses longues jambes s’offraient aux regards. Et cela aussi participait à l’encouragement de ceux qui ne se gênaient pas pour savourer la magnificence du corps.
Alors, que lui arrivait-il ?
Le tracteur cracha un dernier panache de fumée, les courroies freinèrent les poulies et le vacarme cessa. Des hommes s’approchèrent de l’adolescente immobile et tentèrent de la maintenir debout. Quelqu’un tapota les joues, un autre versa un peu d’eau sur la figure et Gustave, le père, surgit en courant et en rouspétant.
« Elle n’écoute rien ! Je lui avais dit de mettre un chapeau, mais pour Mademoiselle cela faisait vieillot ! Amenez-la à la cuisine, les femmes s’en occuperont ! Et vous autres au boulot, la journée n’est pas finie ! »
L’entrée du cortège dans la maison provoqua un certain émoi. Henriette, la mère, se précipita. Trois autres femmes, les pommettes rougies par la chaleur du feu qui crépitait dans la cheminée, étouffèrent des cris de surprise. Rose, secouée, ballottée, retrouva peu à peu ses esprits.
« Messieurs, je vous remercie. Je vais prendre soin d’elle. »
Énergique, la maman saisit sa progéniture sous les bras et l’aida à franchir les marches de l’escalier qui conduisait à sa chambre. A peine allongée sur le lit, la jeune fille eut des haut-le-cœur. Henriette approcha une cuvette et, dans un gargouillement révélateur, la malade vomit. Dans son visage blême, des yeux pleins d’inquiétude s’écarquillaient. Le trouble qui envahissait alors les deux femmes ne laissait aucun doute sur leur pensée.
« Je sais ce qui t’arrive Rose ! Et ce n’est pas du beau ! Ton père va être furieux ! Repose-toi, nous en reparlerons plus tard »
Henriette avait serré les poings. Ses traits déformés trahissaient sa peine, ses craintes et ses interrogations. Sa fille était enceinte, cela elle le savait, mais quelles suites aurait cette invraisemblable catastrophe. Accrochée à la rampe de l’escalier qui la ramenait à ses marmites, elle ressentit toute l’énormité de la situation. Quand Gustave aura fini de hurler, de menacer, que se passera-t-il ?
« Alors comment va-t-elle ? Questionnèrent, en chœur, les cuisinières.
– Ça va, ça va… C’est un petit malaise dû à la chaleur, sans doute. De plus, elle ne mange rien… Mais vous, vous feriez bien de vous reposer un peu et de vous donner un coup de peigne, car vous ressemblez à des sorcières ! »
Les quatre amies se forcèrent à sourire, mais Ernestine, de sa langue de vipère, ne put s’empêcher de conclure :
« Dans certaines situations, les sorcières sont parfois utiles… »
On entendit les pas des hommes traîner sur les dalles de la cour. A la queue leu leu, ils entrèrent dans la pièce où une grande table avait été dressée. Ils avaient fait un brin de toilette au robinet de la citerne extérieure et la satisfaction d’une journée bien remplie se lisait sur leur mine fatiguée. Rose les attendait, récupérait leur couvre-chef et servait le vin du cru. Son sourire, un peu forcé, disait à tous que tout allait bien. Elle appliquait en cela les consignes de sa mère :
« Tu ne laisses rien paraître. Tu souris et tu travailles comme d’habitude. Personne ne doit soupçonner le moindre changement en toi. Si tu te remues un peu, la pâleur de tes joues rosira bien vite. »
Les dîneurs s’enquirent de la santé de la belle, le plus souvent avec courtoisie.

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