Mercedes et les bourreaux
348 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Mercedes et les bourreaux , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
348 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Que feriez-vous si vous étiez capable de lire au fond des êtres comme dans un livre ouvert ? Ce don ne deviendrait-il pas un peu encombrant ? Ne vous ferait-il pas un peu peur ?
Mercedes est une jeune femme très belle, mariée à Nicolas dont elle est amoureuse depuis le lycée. Privilégiée, elle file des jours heureux. Elle n'a jamais voulu de ce don qu'elle juge inutile, elle l'a alors mis de côté depuis bien longtemps.
Un enfant de son entourage disparaît et soudain tout bascule. Cette capacité va reprendre tout son sens lorsqu'il faudra venger sa perte. Petit à petit, les choses vont se mettre en place. Mercedes va se faire repérer puis enrôler par le ténébreux Marcus dans un combat contre "les bourreaux" qui la dépassera et qui peu à peu la conduira à sa perte.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 février 2014
Nombre de lectures 1
EAN13 9782332566904
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0090€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-56688-1

© Edilivre, 2014
Citation

« Je n’aime pas la vie mais la justice qui est au-dessus de la vie. »
Albert Camus, Les Justes
Ils sont fous, les gens, vous savez. La plupart du temps ils ne savent pas qu’ils vous aiment ni comment vous aimer.
Mercedes et les bourreaux
 
 
– Je bande beaucoup pour toi, tu sais.
Il me dit cela nonchalamment comme s’il venait de me faire remarquer que j’ai une tâche d’encre sur la joue et, bizarrement, il n’a pas été vulgaire en me lançant ces mots. Cela sonne plutôt bien cette phrase inattendue en ce lieu fade et triste, en cette grise journée.
J’esquisse un très léger sourire presque amusé. J’ai toujours eu du respect, malgré moi, pour les hommes qui osent, qui se lancent et viennent au-devant de moi. J’ai toujours préféré l’audace sans scrupule à la niaiserie des timides, des introvertis, des ambivalents. J’ai souvent trouvé de la beauté, une forme de poésie peut-être aussi, dans la crudité de certains mots expressément sexuels.
– C’est intéressant ce que vous venez de me dire.
Je n’ai pas changé de ton, j’ai gardé le même depuis le début de la discussion. Je garde toujours ce ton doucereux, net, clair, limpide. Nous sommes assis face à face, une petite table en pin nous sépare. Deux ou trois gardiens discutent entre eux, à voix basse, au fond de la salle trop éclairée par les néons. Mes yeux ne s’habitueront jamais à cette lumière triste et agressive. C’est dimanche après-midi et l’heure des visites familiales vient de commencer. D’habitude nous nous retrouvons dans un local dédié mais, il m’a été indiqué à l’accueil qu’on y effectuait des petits travaux et que, exceptionnellement, nous nous retrouverions là aujourd’hui.
Les premières épouses, mères, maîtresses s’installent aux petites places qui parsèment cette grande salle. De l’espace a été laissé entre elles comme pour créer un peu d’intimité entres les visiteurs et les détenus. Je n’ai qu’à effleurer leur regard une fraction de seconde et je sais laquelle est là parce qu’elle a peur, laquelle est venue pour parler des enfants, laquelle a déjà un amant qui occupe toute sa tête, laquelle donnerait n’importe quoi pour être ailleurs et ne plus aimer l’homme qu’elle est venue visiter, qu’elle visite depuis trop longtemps.
Il ne dit plus rien, il n’a pas levé les yeux du journal qu’il fixait quand il m’a dit qu’il bandait pour moi. Il n’attend rien, je pense, il avait juste envie de me mettre au courant de cela au beau milieu de sa lecture de l’article phare du Monde de ce matin. C’est moi qui reviens vers lui.
– Est-ce à dire que vous bandez là pour moi tout de suite ou qu’il vous arrive simplement de bander lorsque vous pensez à moi ?
Moi aussi, j’ai le même ton détaché que le sien, c’est un peu comme s’il m’avait demandé l’heure au beau milieu d’une rue passante et que je la lui ai donnée et, qu’au passage, j’en ai profité pour lui demander ma route.
Il lève enfin la tête et me fixe. Il me sourit de son sourire éclatant de millionnaire, il se penche un peu vers l’avant en croisant légèrement ses grandes mains sèches aux ongles nacrés, parfaitement polis et soignés.
Il n’essaie pas vraiment de me jauger ou de cerner un quelconque début de réponse sur mon visage qu’il scrute à peine, convaincu qu’il est de me connaître un peu.
C’est la première fois qu’il quitte le vouvoiement poli, presque obséquieux, qu’il quitte son ton plat et monotone. Il porte une chemise blanche au col amidonné. C’est tout ce que je distingue de lui derrière cette table. Quand je suis arrivée, accompagnée des gardes, il était déjà assis là, il était derrière son journal et il m’attendait sans paraître m’attendre.
Quel âge a-t-il déjà ? 54, 55 ans ? Je ne sais plus. Ses yeux noirs encadrés de sourcils épais plus noirs encore que sa pupille sont encore braqués sur moi. Je me rappelle que j’ai toujours aimé les beaux yeux sombres, les regards d’ébène et que j’ai toujours aimé qu’ils se posent sur moi et qu’ils y restent le plus longtemps possible.
Je ne baisse pas les yeux, je le fixe aussi, imperturbable. De toute façon, il ne me perturbe pas quoi qu’il fasse ou dise. Nous ne parlons plus, tels deux chiens de faïence, nous restons là et aucune émotion ne passe.
– Je vous prie de bien vouloir m’excuser mais j’ai très peu de temps pour vous aujourd’hui… J’ai eu une longue journée et l’aiguille de l’horloge tourne si vite.
Je lui souris gentiment en ponctuant ma phrase. Il ne sourcille pas, ne bouge pas un cil. J’écarte la chaise de la table et je décroise mes jambes en retenant d’une main ma jupe plissée. Mes collants de soie crissent maintenant sous la table. Agile, il a discrètement passé une de ses mains sous la table et, d’un doigt léger, il caresse mon genou droit. Je m’écarte sans chercher à le repousser, je m’écarte tout simplement en terminant le mouvement opéré pour me lever de ma chaise.
Il me fixe toujours de la même manière.
– Je bande pour toi tout le temps.
Et il replonge ses yeux dans le journal qu’il empoigne maintenant des deux mains.
Nous ne nous saluons pas, ni l’un ni l’autre. Je lui tourne déjà le dos en me dirigeant vers la porte.
L’un des gardiens qui m’a vue plusieurs fois tente de nouer le dialogue en me raccompagnant et me parle des intempéries dans la région ces derniers jours. Je lui laisse comprendre en augmentant la vitesse de mes pas que je suis très pressée. Un peu déçu, il déverrouille et entrouvre la lourde porte et me laisse emprunter le dédale de couloirs et de portes qui me ramèneront vers l’accueil puis, enfin, la sortie.
Je suis déjà dans ma voiture, j’ai traversé sans les voir tous les sas de sécurité de la prison, longé sans les regarder tous les couloirs et je n’ai même pas réalisé que j’étais à l’air libre en traversant le parking des visiteurs.
Comme d’habitude, j’ai oublié où était la voiture mais aujourd’hui, j’ai eu de la chance, mal garée, j’ai pu apercevoir du premier coup d’œil le capot noir et mat de ma vieille SAAB cabriolet.
Je réalise que je n’ai pas dû marcher mais cavaler, voler jusqu’à ma voiture. Quelque chose m’a irritée, mais quoi ? Le fait que l’autre raclure de bidet me désire et me le balance au visage ? Non, pour son désir, je le savais déjà. Le fait qu’il se soit autorisé à me tutoyer, à installer cette intimité sans que je lui en ai donné l’autorisation, sans que je l’ai contrôlé ou voulu ? Non plus… Ou si, peut-être. Peut-être que je n’ai pas supporté de n’avoir anticipé ce qu’il allait me dire…
Et puis, je m’en fous, je n’ai qu’une hâte : c’est appuyer sur le champignon et rentrer vite chez moi retirer ce sinistre tailleur et plonger dans un bain bien chaud.
Le tonnerre se met soudain à gronder… Merde, il pleut ! Encore une heure de route à tuer sous la pluie et mon autoradio de Satan qui ne fonctionne plus. Agacée, je balance avec violence mon sac façon Bernadette Chirac du côté passager. Re-merde ! Mon putain de sac a glissé sur le sol et la moitié de son contenu se déverse par terre. Il était ouvert… Ouvert, bien sûr, depuis qu’on l’a fouillé.
Je fais ça aussi : je ne referme jamais mes sacs à main après leur fouille. Je perds toujours ma voiture dans les parkings et je ne ferme jamais mon sac.
Le gros moteur de ma belle suédoise est lancé, je peux déclencher les essuie-glaces et rentrer.
Lorsque j’arrive enfin, Héraklion, mon bull-terrier, jappe derrière la porte de l’appartement. Je pousse la porte et hop, il est déjà sur moi avec ses grosses pattes, coinçant déjà son gros museau sous ma jupe en guise de bonjour.
Je prends sa grosse tête entre mes mains et la caresse. Héraklion cligne ses yeux minuscules sous mes caresses et daigne enfin s’écarter pour me laisser refermer la porte derrière moi. Je n’ai même pas la patience d’atteindre la chambre, je me déshabille déjà dans l’entrée, arrache un à un ces vêtements que j’exècre et les jette un peu partout en me dirigeant vers la salle de bains. Il est près de 18 heures, je suis nue, j’ai quitté mon accoutrement. Héraklion me fixe, assis sur l’arrière-train, de ses petits yeux amusés. On dirait qu’il sait que ça ne se fait pas de se déshabiller sauvagement toute seule dans un couloir et de traverser un appartement à poil quand on n’a pas pris soin de tirer les rideaux pour se cacher du voisinage.
– Ben quoi ? T’as jamais vu une femme nue, toi ?
 
 
Je m’appelle Mercedes, j’aurai 36 ans demain. Je suis cette belle femme brune toute fine aux longs cheveux noirs, tirés soigneusement en arrière pour dégager le parfait ovale de son visage et dont le portrait circule depuis de longues semaines à la une des journaux télévisés. Dire de soi que l’on est belle, c’est vaniteux et suffisant mais je suis indéniablement « jolie » depuis ma plus tendre enfance avec mon charme latin, mes traits droits, ma peau que l’on devine veloutée à distance, mes lèvres écarlates en forme de cœur pulpeux et mon regard ténébreux. Croyez-moi, souvent je me serais passée de cette beauté, si j’avais eu le choix, je serais passée inaperçue pour échapper à certains regards. Parfois, un peu, j’aurais voulu qu’on ne me remarque pas.
Cette beauté, c’est mon héritage, ma mère me l’a léguée avec tout le reste de notre patrimoine.
Je suis assise sur le banc des accusés et j’attends le verdict, mon verdict. Ce verdict qui conclura une histoire qui ne m’appartient plus.
Ma vie se résume désormais à ce long récit qui a été raconté, altéré, reconstruit, sublimé, sali, fantasmé, rêvé, déprécié… Dans tous les cas, une vie ne peut pas être contée sans être un peu imaginée par celui qui la raconte, sans qu’il y mette un peu de soi, quand bien même il mettrait toute sa vol

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents