Montmartre avant et depuis le déluge
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Montmartre avant et depuis le déluge , livre ebook

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Description

Extrait : "Les Parisiens donnent généreusement le nom des montagnes aux collines gypseuses qui dominent au nord et au midi le bassin de la Seine ; dans la direction du nord, celle de Montmartre s'élève comme la reine de ces Cordilières liliputiennes, c'est le Chimboraço de l'Île de France. De son sommet, couronné par un télégraphe et un moulin à vent, la vue se perd de toutes parts sur un horizon nuageux..." À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN : Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants : Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin. Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Publié par
Nombre de lectures 16
EAN13 9782335078176
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

EAN : 9782335078176

 
©Ligaran 2015

Note de l’éditeur

Paris, ou le Livre des cent-et-un publié en quinze volumes chez Ladvocat de 1831 à 1834, constitue une des premières initiatives éditoriales majeures de la « littérature panoramique », selon l’expression du philosophe Walter Benjamin, très en vogue au XIX e  siècle. Cent un contributeurs, célèbres pour certains, moins connus pour d’autres, appartenant tous au paysage littéraire et mondain de l’époque ont offert ces textes pour venir en aide à leur éditeur… Cette fresque offre un Paris kaléidoscopique.
Le présent ouvrage a été sélectionné parmi les textes publiés dans Paris ou le Livre des cent-et-un . De nombreux autres titres rassemblés dans nos collections d’ebooks, extraits de ces volumes sont également disponibles sur les librairies en ligne.
Montmartre avant et depuis le déluge

I
Les Parisiens donnent généreusement le nom de montagnes aux collines gypseuses qui dominent au nord et au midi le bassin de la Seine ; dans la direction du nord, celle de Montmartre s’élève comme la reine de ces Cordilières liliputiennes, c’est le Chimboraço de l’Ile-de-France. De son sommet, couronné par un télégraphe et un moulin à vent, la vue se perd de toutes parts sur un horizon nuageux, après avoir parcouru d’immenses plaines, dont quelques buttes peu élevées rompent çà et là l’uniformité monotone. Ces accidents de terrain semblent déposer en faveur des appréciations de la science, et conserver ainsi l’empreinte des vagues capricieuses de la mer, qui a longtemps roulé sombre et solitaire sur ces champs aujourd’hui verdoyants et sur le sol qu’occupe cette grande cité maintenant si populeuse et si fière !
Si, par une belle journée d’été, suivant au hasard cette foule rieuse qui s’échappe dès l’aurore des jours fériés du sein de Paris, vous avez gravi la chaussée des Martyrs, et si vous êtes parvenu sur le sommet de Montmartre, vous n’avez pu sans doute vous défendre d’un sentiment d’admiration en voyant briller à vos pieds les hardies coupoles de Sainte-Geneviève et des Invalides ; vous avez dû être frappé surtout de l’aspect triste et mélancolique de cette ville immense dont les bruits ne parviennent pas jusqu’à vous ; ils ont expiré à mi-côte. C’est ainsi que du haut d’un promontoire on voit la Vague se briser contre les récifs qui en bordent la base. Ces blanches façades et ces toitures rougeâtres qui vous apparaissent comme des masses confuses, ressemblent dans cet éloignement à de vastes ruines : c’est l’avenir peut-être qui vous révèle une page de son histoire.
Mais tandis que votre imagination rêveuse plane sur ce tableau, comme un grand oiseau aime à déployer ses larges ailes sur le site qu’il a choisi pour sa patrie, les sombres cavernes, dont l’entrée déchire les flancs de la colline, viennent vous appeler à de graves méditations. Les sons discordants mais joyeux des instruments qui animent les jeux et les danses de la foule insouciante, les rondes gracieuses des jeunes filles sous les ombrages voisins, les cris de joie des jeunes écoliers dont le cerf-volant se perd dans les nuages, tout cela disparaît devant la pensée mystérieuse que fait surgir en vous l’aspect de ces cryptes. Ces abîmes ouverts par l’industrie de l’homme conservent en effet les traditions de plusieurs mondes, sur les débris desquels la main du Créateur a récemment jeté le nôtre !
N’est-ce pas qu’il y a en nous un sentiment secret, mais énergique et exigeant, un désir triste qui tient à la fois du vague instinct de la curiosité et de la mélancolie d’une idée religieuse, qui nous transporte dans le passé et nous fait chercher avec inquiétude les traces de notre berceau ? C’est que l’homme n’est pas une œuvre du hasard, qu’il a de grandes destinées à accomplir sur cette terre où il est étranger et voyageur. C’est que ce pressentiment l’agite dans toutes les conditions comme dans tous les instants de sa vie, et que sa raison prophétique dément les illusions de ses sens et lutte sans cesse contre les erreurs de son orgueil. Suivez-moi donc dans les cryptes de Montmartre, dont je vous ferai l’histoire moderne quand j’aurai satisfait à cette austère pensée et que j’aurai dévoilé devant vous le secret de ses traditions antédiluviennes.
Il n’y a pas plus d’un demi-siècle qu’une philosophie railleuse, sur le point d’accomplir sa mission funeste et de livrer la société à la législation de ses théories insensées, proclamait avec l’audace de l’ignorance l’antiquité presque immémoriale de l’homme, dans le seul but de convaincre de mensonge son histoire religieuse. Les Français, doués d’une vive intelligence, mais dépourvus de toute aptitude pour les travaux sérieux de la raison ; les Français, spirituels, mais légers, enthousiastes, corrompus par les mœurs adultères d’une monarchie mourante de désordres et d’abus, accueillirent avec empressement un système qui refaisait le passé et l’avenir de l’homme, d’après des principes nouveaux en harmonie avec leur caractère frondeur. Le patriarche de cette école qui a jeté parmi nous de si profondes racines, Voltaire fit servir son prodigieux talent au but essentiel qu’elle se proposait, l’anéantissement du sentiment religieux. Alors cet homme, dont l’esprit ne peut excuser la mauvaise foi ni la légèreté inconcevable avec laquelle il a traité la philosophie de l’histoire, se rua sur la Genèse comme sur une proie facile à dévorer, et interpréta de la manière la plus ridicule et la plus extravagante les faits et la chronologie conservés dans ce vénérable document des âges anciens. Quelle est la folie qui ne réussirait pas en France ? Celle de Voltaire et des encyclopédistes eut un succès qui devait même dépasser leurs tristes espérances !
M. de Voltaire s’est agréablement moqué du physicien de la Genèse qui s’est permis de faire la lumière indépendante du soleil ; le déluge et le pauvre Noé avec son arche n’ont pas été mieux traités. Mais ce qui vraiment est impardonnable et vaut bien d’exciter la bile du grand philosophe , c’est de faire dater le monde de six mille ans, c’est-à-dire d’hier ! Pour le coup l’auteur de la Genèse n’a jamais su même compter sur ses doigts, et l’ère des Babyloniens et celle des Égyptiens, des Indiens, des Chinois, nations antiques pour qui le déluge universel n’a probablement été qu’un accident sans importance, puisqu’elles ont tenu registre, jour par jour, de quarante mille ans durant lesquels elles ont eu des villes de marbre, des rois, des prêtres et même des philosophes ? Cette période de quarante mille ans (on voulait bien nous faire grâce des périodes précédentes dont les journaux s’étaient égarés) la Genèse avait voulu brutalement nous en priver, nous qui ne savons pas bien le nom de nos ancêtres !… On conçoit combien était absurde une religion qui s’appuyait sur un pareil document, une religion qui ne faisait pas remonter à plus de six mille ans la venue de l’homme sur la terre ! Aussi la religion succomba-t-elle : les quarante mille ans des Babyloniens, des Égyptiens, des Indiens, des Chinois, éclaircirent tous les doutes, M. de Voltaire fut proclamé un grand homme et un savant, et l’auteur de la Genèse ne fut plus qu’un misérable Juif, qui avait peut-être vendu de vieux habits dans quelque carrefour de la grande Babylone.
Encore une réflexion à ce sujet, je vous prie, et nous commencerons aussitôt notre voyage antédiluvien. La philosophie du dix-huitième siècle, qui est encore, à peu de modifications près, celle de la France au dix-neuvième, avait rejeté l’intervention de la raison dans l’explication des problèmes qu’elle posait, elle n’avait admis que l’expérience et le témoignage des sens à faire la preuve de ses spéculations. Mais telle est la puissance et l’unité divine de la vérité qu’elle devait triompher de cette philosophie avec l’emploi de ses propres armes et rendre leur caractère de certitude aux traditions religieuses, en se servant des analyses d’une science toute de faits. Ainsi les progrès de la géologie ont ruiné sans ressource le système de l’antiquité de l’homme, et il est à craindre que la chronologie de la Genèse ne soit aussi exacte que sa physique.
Depuis longtemp

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