Nouvelles d hier
214 pages
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Nouvelles d'hier , livre ebook

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Description

Un patchwork de nouvelles, cousu au fil d'une vie. Histoires où se mêlent imaginaire et réalité. Un hier toujours présent dans l'aujourd'hui, creusant les sillons du demain. Des touches d'un moi, des briques fondatrices d'un homme en devenir. Un homme désormais aux portes de la vieillesse.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 janvier 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782334071628
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-334-07160-4

© Edilivre, 2015
Photo du film : L’éternel retour. Au château de Pesteil.
Et mon tout est un homme.
G. Simenon.
Et cela est mon tout.
Moi .
Crânajour
Un village accroché à flanc de coteaux, blottit au fond d’une vallée. C’est là où naquit Pierre Roche. Élevé par son père, sa mère était morte en lui donnant le jour. Il n’eut pas une enfance heureuse. Ses seules joies tenaient en des batailles de cailloux entre les gamins de son village et ceux de celui perché sur l’autre versant. C’est au cours de l’une d’elles qu’il reçut un silex qui lui fendit le crâne et abîma un bout de son cerveau. Quand il revint de l’hôpital, il n’était plus Pierre Roche mais désormais Crânajour. L’opération le laissa un peu simplet, depuis il portait un chapeau à large bord vissé sur la tête. Je dis bien vissé car même l’abbé Berthier, vieux curé du village, l’autorisait à le porter pendant l’office, ce qui ne manquait pas de faire grincer les dents des grenouilles de bénitier. A la mort de son père, le maire de la commune Ernest Fayet prit soin de lui. Il n’aimait pas le voir traîner dans les rues parlant tout seul, suivi d’une bande de gamins qui se moquaient de lui. Un matin, le maire le fit venir dans son bureau.
– Pierre, j’ai un bon travail pour toi. Tu connais ma ferme sur la crête ?
– Sûr, m’ssieur Ernest.
– Bien, mon troupeau de vaches à besoin d’un berger, le dernier m’a quitté hier soir. Qu’en dis-tu ?
– Ben… J’sais pas si j’saurais.
– Mais si, voyons, mon vacher t’expliquera le travail.
– Si vous le dites M’ssieur Ernest, alors c’est oui !
Le mois suivant notre Crânajour accomplissait sa tâche avec ardeur. Il sortait le troupeau le matin après la traite et le ramenait pour celle du soir. On le voyait au pré portant barbe et sacoche, s’adressant aux bêtes comme à des amis. Il les appelait par leurs noms : La Pâquerette, La Gentiane, La frisée… Même le Titan, le taureau semblait avec lui tendre comme un agneau. Un après-midi de forte chaleur alors qu’il avait avalé son casse-croûte et sifflé son demi litre de vin, il s’endormit sous l’ombre fraîche d’un chêne, bercé par le tintement des cloches du troupeau. Une main étrangère posée sur son épaule vint le tirer de sa torpeur.
– Hé, toi, c’est t’y tes vaches que je vois là ? Lui demanda un gros homme rougeaud.
Crânajour se frotta les yeux et la bouche avant de répondre :
– Ben… Oui. Pour sûr que c’est mes bêtes.
Le gros homme, le regarda souriant, secouant la tête.
– Écoutes, mon gars, Je t’en achète une, une de tes vaches.
– Mais… Mais…
– Tiens, celle là, là-bas sur le côté. Je t’en donne 40 sous.
– La Frisée, elle en vaut plus !
– T’es dur en affaire, bon, j’irai jusqu’à 45. Allez tope là !
Dans la tête tourmentée du berger, les idées s’entrechoquaient, il balbutia sans trop se rendre compte en tendant sa main.
– Tope là.
Le gros homme satisfait, posa l’argent sur la sacoche de Crânajour puis alla chercher la Frisée qu’il amena aussitôt avec lui, laissant le berger éberlué, sans réaction. Sa cicatrice sous le chapeau se mit à le démanger. Il pensa :
– Bon sang, j’crois que j’viens de faire une connerie !
Le soir, au retour du troupeau, le vacher Gabriel, s’aperçut de la disparition de la Frisée, il en fit aussitôt part à Ernest qui accourut voir Crânajour. Celui-ci était en train d’aspirer une soupe épaisse quand il vit débouler son patron.
– Qu’as-tu fait de la Frisée ? Je te le demande ! Cria le maire les deux mains sur les hanches.
La cuillère dégoulinante entre les doigts, Crânajour, ne put que répondre :
– Ch’ai pas moi… Elle s’est perdue.
– Ne te fiches pas de moi ! Que s’est-il passé, nom de nom, tu sais combien ça peut valoir une telle bête ? C’est elle qui donnait le plus de lait.
– J’va la retrouver, m’ssieur Ernest, j’va la retrouver.
– J’y compte bien, bon sang de bonsoir et sans tarder, tu m’entends !
Crânajour se mit en route, allant de ferme en ferme, mais sans succès. Il en sortit fin saoul. Il cuva au fond d’une grange qu’il trouva sur sa route. Un coup de fourche dans la cuisse lui remit l’esprit à l’endroit. Debout devant lui se tenait une femme imposante : Marinette Verbiguié, une veuve qui s’occupait seule de ses terres et de sa ferme.
– Mais j’te connais toi ! T’es le Crânajour, Hein ? Qu’est-ce que tu fous chez moi ?
– J’cherche la Frisée, ma vache, balbutia-t-il tout en se débarrassant du foin qui collait à ses vêtements.
– Et tu crois qu’elle est chez moi ?
– Non, m’dame, mais…
Crânajour se mit à raconter son histoire devant une Marinette d’abord surprise, puis hilare.
– Couillon, tu as vendu une vache du maire ! C’est la meilleure celle-là ! Et tu le lui a dis ?
– Euh… Non, j’ai dis qu’elle s’était perdue. J’dois la retrouver, alors je cherche.
– Le gros bonhomme, ça me parle, c’est un drôle de fieffé celui-là, il a déjà essayé de m’avoir… Le gredin vit de l’autre côté de la vallée à la Tournière.
Crânajour ne perdit pas de temps, il se mit en chemin, laissant Marinette rire encore de l’aventure du bonhomme au chapeau.
Arrivé devant le bâtiment fort délabré de la Tournière, Crânajour hésita, il ne savait pas trop comment il allait s’y prendre. En contournant les murs aux vieilles pierres disloquées, il entendit un tintement de cloche. Il se retourna, dans le pré voisin, il vit quatre vaches qui broutaient. Parmi elles, il reconnut de suite sa Frisée. Il se rendit à la barrière, la poussa avec force et détermination.
– Viens la Frisée, on r’tourne à la maison.
Derrière lui s’avançait le gros homme rougeaud.
– Laisse donc cet animal, il est à moi, j’te l’ai payé, non !
Le berger ne répondit pas, il tira la bête par l’encolure.
Le gros se tenait derrière la vache en hurlant :
– Laisse là que j’te dis ou j’vais chercher le fusil !
Crânajour murmura quelques mots à l’oreille de la frisée. Celle-ci plissa des yeux et soudain rua des pattes arrières infligeant un coup entre les jambes du gros homme. Il s’effondra dans l’herbe criant de douleur. Crânajour en profita pour filer avec la Frisée.
Pendant ce temps, Ernest, le maire tenait conseil municipal. De nombreuses questions étaient à l’ordre du jour. La séance s’annonçait longue et houleuse. Arborant son écharpe tricolore, il n’avait pas l’intention de s’en laisser conter, face à ces habituels opposants. La dernière question mit le feu aux poudres, déclenchant un charivari pas possible. Il s’agissait de la réfection de la modeste tribune du non moins modeste stade de football. Ernest excédé sortit de ses gonds.
– Assez, je n’ai plus qu’une chose à dire…
– Meuhh… Beugla la Frisée, pénétrant dans la salle avec Crânajour, prolongeant ainsi la phrase du maire.
Un court silence précéda à un rire général si communicatif que Crânajour le partagea à gorge déployée.
Cette histoire fit bien vite le tour du canton et au-delà. Elle fut amendée par d’autres anecdotes nées et développées dans l’imaginaire des conteurs. D’autres versions virent le jour. Des années plus tard, alors que Pierre Roche, dit Crânajour, reposait en paix dans le cimetière communal, cet épisode ne manquait jamais de faire le succès des veillées d’un village accroché à flanc de coteaux blottit au fond d’une vallée.
Le don
Le pourpoint neuf, la perruque bien ajustée, Richard de Roquette fit venir son valet.
– Léandre, quand monsieur mon frère descendra, dites-lui de me rejoindre au petit salon.
– Bien, monsieur, dois-je lui préparer une collation ?
– N’en faites rien, nous verrons plus tard.
Une demi-heure s’écoula avant que Jean de Roquette se présente devant Richard.
Il ne put retenir une expression de répulsion en voyant devant lui un homme mal rasé, les cheveux hirsutes, l’habit élimé, les chausses fripées.
– Mon frère, avez-vous passé une bonne nuit ?
– Ma foi, oui et je tenais à vous remercier de m’avoir hébergé. J’avoue que hier soir en frappant à votre huis, je…
– Allons, ne sommes-nous pas de la même famille ?
– Certes oui, mais nous n’avons pas suivi la même route. Quand je regarde votre propriété en plein centre-ville.
– L’héritage de nôtre père, Jean, le droit d’aînesse que voulez-vous !
– Je ne vous reproche rien.
– Bien, jean, j’ai à vous parler. Notre père ne vous avait point oublié en vous offrant la possibilité d’étudier à la Sorbonne. Pourquoi donc l’avoir quitté si vite, sans diplôme aucun ?
– Je ne trouvais guère de goût pour toutes les matières enseignées. La philosophie m’ennuyait, je n’entendais rien aux langues, quant aux mathématiques et à la géométrie, Pythagore, Thalès et Euclide, ne furent jamais mes amis. En quittant cette université, je me tournais vers les arts. Hélas, je n’avais aucun talent pour la peinture, la sculpture ou l’écriture. Le plus mauvais chant d’un oiseau était bien meilleur que le mien. Je m’essayais sans plus de réussite au théâtre. Ah ! Mon frère, si vous m’aviez entendu dans cette tirade : « Belle marquise, vos yeux, d’amour, mourir me font » vous auriez fui en courant de la salle. J’ai essayé le commerce, tenté la politique, pour finir au guichet d’un cirque ambulant. J’ai parcouru le pays en tous sens dans l’espoir d’y trouver enfin ma voie, sans résultat, je le reconnais. C’est ainsi, Charles, que vous avez accueilli hier soir un homme les poches vides et surtout sans perspective.
– Mais enfin, de ma vie, je n’ai pas rencontré d’homme à l’absence totale de qualité. Il y a bien un domaine dans lequel…
– Oui, sans doute, peut-être… mais.
– Dites moi, Jean, je suis disposé à vous aider.
– Merci, mais ce serait impossible.
– Allons, bon. Pourquoi donc ?
– C’est délicat, voyez-vous.
– Parlez sans crainte, nous sommes frères, non ?
– Mon unique don c’

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