Comprendre le Mvet
111 pages
Français

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Comprendre le Mvet , livre ebook

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Description

Homme politique gabonais, Paul Mba Abessole a lu, avec la méthode linguistique, un récit d'un des grands du "Mvet" du Gabon, Zwè Nguema. Par cette porte, il veut nous en faire découvrir les richesses. Il inaugure, avec cet essai, une approche du Mvet, en partant d'une analyse typologique d'un texte. Il ouvre ainsi des perspectives pour nos analyses comparatistes parfois hâtives et sans assises scientifiques. Il veut éviter le concordisme uniformisant de la pensée de nos conteurs, afin de découvrir la spécificité de chacun de ceux-ci.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2011
Nombre de lectures 155
EAN13 9782296716322
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0474€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

COMPRENDRE LE MVET
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris


http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-13880-3
EAN : 9782296138803

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Paul MBA ABESSOLE


COMPRENDRE LE MVET

À PARTIR DU RECIT DE ZONG MIDZI MI’OBAME
À mes enfants
Aux hommes de culture
I. INTRODUCTION AU MVET
Comprendre un récit du Mvet n’est pas évident. Il faut maîtriser un certain nombre de données linguistiques, historiques, sociales et culturelles. Il va de soi qu’une connaissance profonde de la langue fang est nécessaire pour entrer véritablement dans ce monde multidimensionnel. Depuis une vingtaine d’années, le Mvet est sorti de son milieu d’origine et a enthousiasmé bien des chercheurs extérieurs ; il est l’objet, aujourd’hui, de nombreuses études. Malheureusement, la plupart des chercheurs, dans ce domaine, ne disent pas à quels maîtres ils se réfèrent. Ils citent les noms des conteurs sans marquer leur originalité. Car il ne faut pas oublier que Zwè Nguema, du village d’Anguia, dans le département du Woleu, n’est pas Akue Obiang du village d’Awoua, dans le département du Ntem, pas plus que ce dernier n’est pas Joseph Abessole Nkoghe du village Mvimvie, dans le département du Como Kango. Les trois sont malheureusement morts. Mais il faut retenir que chacun deux avait son style, son genre dont il faut tenir compte, si l’on veut réaliser un travail objectif et pertinent sur l’épopée fang.
Pour comprendre un récit du Mvet, il ne suffit pas seulement de suivre le dénouement de l’histoire racontée, il faut encore en reconnaître les étages, projeter les emboîtements horizontaux du fil narratif sur un axe implicitement vertical ; il n’est pas non plus suffisant de passer d’un mot à un autre, d’un épisode à un autre ; une méthode d’écoute scientifique est donc nécessaire.
Nous pensons que n’importe qui, même membre de la communauté culturelle fang, ne peut se croire habilité à écrire sur le Mvet avant d’avoir lu, écouté, étudié attentivement l’un des grands maîtres de cet art. Nous pouvons avoir accès à certains d’entre eux, soit par des cassettes enregistrées – c’est le cas d’Akue Obiang et d’Abessole Nkoghe, soit par un texte transcrit –, c’est le cas de Zwè Nguema. Une démarche vraiment scientifique exige qu’on travaille sur les textes originaux pour avoir tous les renseignements culturels que cet art contient.
Mon essai est arrimé à Zwè Nguema que j’ai connu de son vivant. J’ai eu le privilège d’avoir un long entretien avec lui, dans son village d’Anguia. Je me suis abreuvé de son savoir, de sa philosophie et de sa vision du monde. Devant lui, je me suis senti tout petit, ignorant face à l’étendue de ses connaissances sur la culture fang, manifestement il voulait me sortir de mon état d’ignorant ou d’aliéné culturel par sa maïeutique « ə́ k ū l ə́ m ə́ l ɔ̄ , m ĭ s, òsìm ə̀ zá y’anu = ouvrir les oreilles, les yeux, l’intelligence et la bouche ». Après notre entretien, j’ai compris qu’une philosophie orgueilleuse ne peut en être une véritablement. Le vrai philosophe est modeste, respectueux de l’autre, des autres dont il sait qu’il a beaucoup à apprendre. Notre philosophie traditionnelle met toujours l’être humain en situation d’apprenant. Quelle que soit la fonction sociale qu’on occupe, face à un ancien toujours supposé dépositaire des savoirs, on doit prendre l’attitude d’un étudiant.
Nous avons choisi, pour mener cette étude, un texte de base, le récit de Zong Midzi de Zwè Nguema. Il est, à notre connaissance, le seul transcrit en fang, avec une traduction française. Ainsi est-on directement en contact avec tous les éléments culturels de l’épopée fang. Ce texte, bilingue, Fang-Français, est réparti en douze chants, eux-mêmes divisés en versets numérotés, ce qui en facilite la lecture. Ces chants, au nombre de quinze, sont entrecoupés par des interludes. Cette présentation doit, de notre point de vue, être généralisée à tous les textes collectés de notre patrimoine culturel.
Il ne s’agit pas d’un travail sur le Mvet en général, mais sur un récit du Mvet. Il ne s’agit pas non plus d’un exercice comparatiste, mais d’une analyse typologique. Nous nous proposons, par la méthode linguistique, de découper ce récit, d’en distinguer tous les éléments constitutifs et d’en montrer les connexions pour former un sens. Par l’analyse typologique, on décrit une langue, on montre ce qui fait qu’elle est elle-même et non pas une autre. Cette méthode a l’avantage de nous permettre, par la suite, à la fois d’établir non seulement le caractère particulier d’un récit de Zwè Nguema par rapport aux autres et la singularité de ce dernier parmi les conteurs du Mvet. Ainsi avons-nous choisi de faire abstraction le plus possible de ce que nous savons par ailleurs du genre du Mvet et de ses personnages.
Ce faisant, nous avons voulu sortir des visions simplistes de tout ce qui concerne l’Afrique, en matière littéraire et même technique. En réalité sur ce continent rien n’était spontané, tout était pensé. Et penser suppose l’existence des projets. Une observation attentive de nos objets d’art lors de notre passage au Ministère de la Culture nous a fait prendre conscience que, dans tous les arts en Afrique, il y a des écoles et des courants de pensée. Pour les percevoir, il faut recourir à la méthode de la description typologique linguistique. À partir de là, on verra que les personnages du Mvet ont toujours quelque chose de particulier chez chaque conteur, même s’ils jouent un rôle analogue. Analogue veut dire « semblable en partie et différent en partie ». Il nous paraît évident que Angone Endong décrit par Zwè Nguema n’est pas identique à celui décrit par Joseph Abessole-Nkoghe que j’ai suivi pendant toute mon enfance. C’est à partir des traits particuliers que l’on peut déterminer les écoles et les courants de pensée. Cela est nécessaire pour produire des études vraiment scientifiques. Le respect de la diversité, des contradictions produit une dynamique de progrès.
Nous sommes de ceux qui se tiennent à distance de l’uniformité qui fait que tout le monde dit la même chose. Et quand tout le monde dit la même chose, on ne dit plus rien. Or nous avons beaucoup de choses à dire au monde : le message de l’Afrique sur chaque sujet. Car aucun sujet dans les domaines scientifique, philosophique, littéraire, technique, médicinal, etc. n’est épuisé. Il y a encore du travail à réaliser. On peut emprunter, ici, la parole de l’Évangile qui dit : « la moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux (Mt 9,37) » !
Nous avons également évité de mentionner les témoignages oraux sur d’autres épopées gabonaises, notamment sur Marundu na Moukouambi, chez les Bapunu et sur Ollende, chez les Obamba.
Rappelons que Zong Midzi mi’Obame n’est pas le seul récit de Zwe Nguema. Il en a cinq autres, perpétués, aujourd’hui, par François Ndong Mbega, son héritier, natif du même village que lui, Anguia. Il s’agit de :
1. Nkoum Akok Ndong Bibang,
2. Andome Ella Mezang,
3. Kos Obame Ndong,
4. Ekiebeme Akok, et
5. Avire Anou.
Toutefois, il faut signaler que nous adoptons globalement la traduction française proposée, même si, à bien des égards, elle comporte des lacunes. Elle a le mérite d’exister. Et elle peut nous aider à en proposer ultérieurement une autre, plus fine. Voici trois exemples de traductions contestables :
p.22, 19 . à kŭr mfìn énda Bela
/il/frappa/le mur/dans la maison de Bela/
« il coucha avec Bela »

Notre traduction :
« il s’unit à Bela »

p. 27, 42.
à fùù nsùá bìεŋ
"il prépara une dot"

Notre traduction :
"Il rassembla une dot"

p. 43, 29.
Òkúkúr ó ntɔ̄ kúmá
/le pauvre/il/est/riche/
« Le pauvre est devenu riche »

Notre traduction :
« L’insensé est devenu riche »
Ce texte est fondamental. Il indique la méthode à suivre pour tous les

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