Dix heures dix
98 pages
Français

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Dix heures dix , livre ebook

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Description

La plume vit de l’air du temps. Elle est libre d’être ce qu’elle veut. Au hasard des caprices et du chaos, elle s’emballe, tourbillonne ou se pâme. Elle est la comète des ciels de moisson, le guide Vénus, fidèle dans sa robe virginale. C’est elle qui plonge dans les abysses où règne seul le poète qu’elle enveloppe, qu’elle caresse et à qui elle enseigne avec patience la légèreté, parfois la grâce, jour après jour.

Ce recueil est une cascade de mots écrits aux lumières matinales, quand l'aube est au passé et que la journée s'impose.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 octobre 2014
Nombre de lectures 2
EAN13 9782332798251
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-57832-7

© Edilivre, 2014
Citation


Les mots qui vont surgir savent de nous des choses que nous ignorons d’eux.
René Char
Comme Icare, je
Le sommet. Prochain arrêt.
Je marcherai sur la montagne, sur son corps de difformité. Sous l’effort, mes traits seront ceux d’un autre, caché en moi, mes souffles seront courts, deux inspirations, une expiration, par le nez.
Je marcherai, visage baissé.
Je gravirai les cols. Tous les cols.
Je trébucherai, un nombre de fois.
Je fixerai le faîte improbable, loin derrière la forêt.
Je marcherai.
Je garderai le regard vers la cime, déesse pyramidale, à l’oxygène purifié.
Je parviendrai au sommet, à la grande roche.
Je la toucherai.
Je la humerai.
Je dresserai sur elle muscles, chairs et os, en vainqueur de l’épreuve non classée, inconnue du grand cirque.
Je saluerai pour remercier.
Je contemplerai les vallées où s’agitent les miens. Trois respirations. Profondes.
Je déploierai mes ailes. Trois respirations de plus.
Je prendrai mon envol.
Je battrai l’air, cette masse me portera.
Je volerai, je volerai, je volerai.
Je sentirai un second visage naître sur ma nuque. Il regardera la grande pierre se noyer dans le végétal du massif, havre désormais inutile.
Je lirai de mes doigts mon visage premier, resté face au vent.
J’y lirai de la nouveauté. Mon regard sera aiguisé, mes cheveux pousseront, battront mes joues, mes vêtements se déchireront sur ma nudité primale, mes pieds seront joints, mes bras en réserve.
Je volerai, je volerai vers le bleu plus haut, sans ménager ma force.
Je volerai.
Le soleil. Prochain arrêt.
Femme au violoncelle
J’ai longtemps imaginé cela.
Je suis au concert, Borodine, un quatuor à cordes.
Il y a parmi les quatre virtuoses, une brune aux cheveux longs, elle est très belle vue de mon fauteuil. Je renonce à utiliser mes jumelles pour conserver intacte ma vision imparfaite. Je me garde des distances. Son regard ne fixe que moi dans le vide.
Vêtue par le noir de sa robe, son corps n’est que blanches et croches. Son violoncelle, captif de ses cuisses à l’angle aigu, semble né par elle,
Comme un prolongement de son existence,
Comme une phrase qui la complète,
Comme un destin parallèle en cours.
Je la sens entière à son art et je me sens entier à elle. Je m’égare, agenouillé devant elle, dans le rayonnement entravé de son sexe, cet endroit à jamais inaccessible défendu par le bois qu’elle domine de ses doigts. Elle est l’amante véritable, celle qui accueille l’homme seul pour qu’il goûte le flot des notes dirigées. Une volupté en tout cas qui se voit.
Cette femme est à moi et je ne la partagerai qu’avec elle.
Ces territoires d’ouragans bleus
L’automne a conquis nos âmes, déjà s’empourpre l’orient de saveurs multicolorées.
De la plus haute tour, nous posons nos regards sur les forêts du royaume. Par nos yeux que le vent assèche, apparaissent des mélanges aux teintes étrangères à nos terres. Nous dérivons vous et moi, l’âme chargée des extravagances de la saison.
Au cours de notre chemin de ronde, nous évoquons en silence les arbres, les feuilles sur la terre, l’humus et les mousses. Nous sentons le désir de vivre qui monte en nous alors que les gants de nos mains se cherchent, se trouvent et se serrent.
Derrière nous, derrière les fenêtres de verre, le brasier de l’âtre s’active, il projette sur les murs au-dedans des ombres de galériens similaires aux reflets oxydés de l’automne. Nous savons le feu dans ses murmures de braises et ce savoir nous réchauffe. Nous sommes ravis que la chaleur nous attende.
Nous voici maintenant enlacés par nous et par l’horizon, alors que nos manteaux nous privent de nos peaux, de leur tiédeur. Nous pressons pourtant l’étoffe grossière pour y prendre les contours de nos corps abrités, distants, en prélude de l’heure à venir, quand la pierre à nouveau nous abritera de l’eau et du diable, que nos habits seront affranchis de nous et qu’ils s’étaleront, leur peine éteinte, sur les sièges de bois. Là, nous irons mon amie, vous et moi, nus, comme sous le pommier des origines, nous étendre au sol sur le cuir des bêtes, face à l’âtre témoin alors que les chiens nous regarderont, sommeillant.
Là encore, bénis par l’amour, nous nous enlacerons et nous embarquerons, moites de notre désir et chauds de la flamme, sur la nef des sentiments – ceux qui dépassent la raison des hommes – vers ces territoires d’ouragans bleus qui restent encore, qui resteront pour toujours à vaincre.
La marine verte
Hier matin, nous avons foulé la marine verte, nous avons volé ses parfums, nous les avons cachés sur nos mains, sur nos visages. Partout circulent nos regards. Entre l’émeraude des épines de l’hiver et le pastel des feuilles neuves, la bousculade est sans pareille. Le tableau est sidérant, c’est une tempête de nuances. Nous perdons des centimètres de nos tailles humaines à témoigner de cela.
La mécanique de nos jambes arpente le vallon, laissant nos souliers se vautrer dans l’herbe brossée, la marquer de nos pas ; elle accepte notre poids car bientôt nos traces s’effaceront.
Toujours nos traces s’effaceront.
Le vent est frais, il annonce la pluie de l’ouest, il vernit le tableau, oui, on dirait une marine au vert dominant, une marine, qui en chasserait une autre, au bleu trop profond.
La blancheur des fruitiers nous caresse, le rose nous rend meilleurs. Une beauté qui se répétera quand nos corps de bipèdes se faneront alors que les printemps oublieront les printemps.
Et ces vaches à la robe capricieuse, tantôt laiteuse, tantôt cacao, étalées, paissant… Elles nous toisent, nous qui ne sommes pour elles que des passants, des passagers sous les lueurs de leur monde sans faute.
Nous pensons à nos villes nourricières où s’exercent les grands du pays à d’éphémères pouvoirs, où le tonnerre s’étrangle dans sa rage. Ici la nature est résidente ; pour son art majeur, elle n’a pas d’urne à gaver ni de poils à brosser, elle se suffit à l’harmonie. Elle est l’équilibre. Elle nous dit :
« Vous les humains, en traçant vos routes dans ma chair vous avez refusé les chemins que je vous offrais et je vous ai perdus. »
Dessus le monde, vers l’île
L’oiseau coloré s’envole, nous sommes parmi ses entrailles et son air conditionné. Par ses ailes d’ara, il nous soustrait du sol et, des fentes alignées de son corps, nous voyons le tapis de notre civilisation s’éloigner. Les pattes se replient sous le fuseau de son ventre et son bec se donne du vent debout vers la mer du ciel. Nous déchirons le tulle des nuages pour gagner les strates de bleu qui masquent le sombre sidéral. Le sol apparaît rapiécé, il habille la terre d’un effet d’indigent, de laissé pour compte. Des forêts s’étalent en verdure, des toits étincellent, quatre réfrigérants fument d’une vapeur destinée aux dieux de l’énergie, un lac se fait miroir. Dans le ventre du volatile, nous sommes organisés comme Jonas dans sa...

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