François, un étrange poète à roulettes
114 pages
Français

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François, un étrange poète à roulettes , livre ebook

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Description

« Piaillements de vie, cris de victoire étouffés par le temps et devenus murmures, voix plaintives des erreurs commises, constituant imperceptiblement, presque insidieusement, le bruit de fond de l'humanité, voix lustrales et cristallines des existences créatives et généreuses. D'innombrables voix, anonymes ou augustes, n'en faisant qu'une, fleuve puissant au bourdonnement grave et incessant coulant en chacun de nous. Un chœur, une forêt de voix, arbres vibrant d'une énergie puisée dans une terre chaude et humide d'âmes compostées... »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 août 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342010640
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

François, un étrange poète à roulettes
Martine Martin
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
François, un étrange poète à roulettes
 
 
 
À Elena Vasilescu, Jacek et Dagmara Hazuca, Michel et Fabrice, Olivier, Vincent, Sylvie, Sébastien et Val, Jean-Marc et Dominique, Claude et Valérie, à sa famille et ses amis qui ont tous contribué à son bonheur
 
 
 
 
Avant-propos
 
 
 
Malade depuis toujours mais tellement plus en vie que bon nombre de ses contemporains, François écrivait ses joies et ses peines, ses impressions face à la peinture. La poésie comme viatique. Après la mort de son fils, Martine a pris la décision d’éditer les œuvres complètes de François. Mais la maladie l’a rattrapée avant d’arriver au but qu’avec acharnement elle s’était fixée. Néanmoins, François, cet étrange poète à roulettes, cet obstiné de vie, dans un ultime pied de nez à la mort, réussit à nous livrer in extenso son regard sur un monde qu’il nous a laissé en friches.
Benoît Chérel
 
 
 
Mon témoignage de mère
 
 
 
Je suis la maman de François décédé il y a presque 2 ans d’une myopathie Duchenne de Boulogne à l’âge de 41 ans. Mon mari est décédé 6 mois avant. Je veux rendre hommage à François avec qui j’ai vécu 41 ans : une vie parfois compliquée mais remplie d’amour. Je me suis battue pour qu’on le considère comme un être à part entière, heureux et intelligent. J’étais fière d’avoir un fils myopathe.
L’image du titre me revient sans cesse : un petit bonhomme de 3 ans qui essaye de courir sur la plage ; il tombe et se relève avec le sourire. On devine tout de suite sans connaitre encore la maladie que c’est tout simplement un enfant heureux. Notre philosophie de vie s’est fondée à cet instant : son père et moi continuerons à le rendre heureux ! C’était notre cadeau de vie !
Toujours debout pour fêter Noël nous lui offrons une petite voiture à pédales qu’il n’a jamais réussi à faire fonctionner. Un peu de déception au fond de ses yeux vite réprimée par notre réaction : « Ne t’en fais pas ce n’est peut-être pas le cadeau idéal pour un enfant de ton âge ; ton père trafiquera un peu le système ! ».
Cette scène nous a posé beaucoup de questions et une rencontre avec un spécialiste s’imposait. Nous sommes reçus par un éminent chercheur de l’époque qui diagnostique une maladie bizarre qui n’était pas encore vulgarisée : la myopathie. Pour les parents toute maladie évolue systématiquement vers un remède. On nous a parlé de kinésithérapie, de bains chauds à 40° C… j’étais presque soulagée ! Puis le professeur a soutenu le regard de mon mari et lui dit : « Vous avez compris ? ». Cette réflexion me fit réagir et évoquer le pire. Le père et la mère sont enfin prêts (si l’on peut dire) à affronter la vérité : « Votre fils est atteint d’une myopathie Duchenne de Boulogne-sur-Mer à évolution rapide ». Nous habitions près de Boulogne-sur-Mer et le nom du Dr Duchenne n’évoquait rien pour nous : c’est ce médecin qui posa le diagnostic sur des patients qui souffraient de déformations à cause de muscles qui se rétractaient. La litanie des symptômes était longue : tous les muscles vont fondre et déformer les membres inférieurs, supérieurs, la colonne vertébrale jusqu’au coeur ; une évolution qui devait se terminer à 20 ans.
Ce diagnostic nous laissait abasourdis. Le retour en voiture s’est révélé terrible ; nous n’arrivions pas à retenir nos larmes et François chantait à tue-tête. Dès cet instant on a décidé que la maladie n’aurait pas le dessus et ne l’empêcherait pas de vivre heureux mais elle faisait partie de nous et il fallait vivre avec au jour le jour. Un chemin d’embûches s’ouvrait devant nous.
 
L’enfance fut une période assez facile, la maladie ne provoquait pas trop de dégâts : François a marché jusqu’à l’âge de 9 ans. Grâce à un grand-père gâteau qui savait inventer des jeux pour attirer les enfants qui jouaient avec lui, il eut une enfance que beaucoup lui auraient enviée
François a fréquenté l’école primaire sans problème jusqu’à l’âge de 9 ans où la marche est devenue difficile. Il savait se protéger des autres pendant les récréations alors qu’il aurait adoré jouer avec eux. Il avait compris qu’il ne fallait pas qu’il tombe car il ne pouvait se relever seul. Il allait spontanément vers ceux qui étaient isolés mais pas pour les mêmes raisons : un enfant manquant d’hygiène par exemple qui propageait des poux dans la classe. Cet isolement ne ressemblait pas à François et lorsque la maladie fut diagnostiquée nous avons compris son attitude et avons donc pris la décision d’en parler aux enfants. À partir de ce moment les copains et les copines l’ont pris en charge sans problème et l’ont intégré à leurs jeux en sachant qu’il fallait prendre un minimum de précautions. Le fauteuil a résolu beaucoup de problèmes : les enfants se chipotaient pour savoir qui allait pousser François. Et ce rythme s’est poursuivi de la 6e à la 3e. Pour François c’était la belle vie : il jouait beaucoup, j’invitais les enfants à la maison ; il travaillait très bien à l’école. Il mordait déjà la vie à belles dents.
L’arrivée au lycée fut une autre histoire car les lieux ne lui étaient pas accessibles. Il a fallu que je me batte contre des murs (tout en étant professeur dans l’établissement) mais avec l’aide des collègues nous avons réussi son insertion ce qui n’empêcha pas le proviseur en 2e année de lycée de faire la réflexion suivante en voyant un groupe d’élèves qui attendaient :
Le proviseur : « Mais qu’est-ce que vous attendez ? »
Les élèves : « Une classe, monsieur le proviseur, accessible pour François ! »
Le proviseur : « C’est la prérentrée, François peut être absent à cette journée. »
Les élèves : « Hors de question, monsieur le proviseur, nous resterons avec François en attendant une salle accessible. »
Le proviseur comprit tout de suite ce qu’il lui restait à faire. La prérentrée se fera dans une salle accessible. Des petites anecdotes comme celles-ci, j’en ai beaucoup à raconter mais il faut savoir les tourner en dérision sinon on n’avance guère. Il fallait que François exploite ses qualités intellectuelles pour compenser les difficultés physiques. Il a su aussi se faire aimer de tous et n’était pas le dernier à faire les bêtises aidé de ses camarades. Au début, la permission de manger dans la classe n’était autorisée que pour 2 élèves et à la fin de l’année ils étaient 10 ! Je ne vous raconte pas l’ambiance ! Tout cela a permis à François de vivre une belle adolescence avec des camarades extraordinaires qui ont d’ailleurs toujours gardé le contact avec François. Nous invitions à la maison les assistants étrangers du lycée pour lui créer une ambiance de Fac.
Le voilà avec un Bac A, mention Bien en poche et c’est l’entrée en Fac, la première qui existait à cette époque à Boulogne. Quelques camarades l’ont suivi, d’autres sont partis sur Lille. J’ai encore dû me battre pour faire installer une rampe d’accès sur le site de la Fac. Deux années de DEUG en langues étrangères appliquées. Encore deux années heureuses et puis une autre étape de la maladie fait son apparition. François est emmené en urgence à l’Hôpital, il est atteint d’une grave infection pulmonaire qui bloque sa respiration. Il fallait prendre une décision : celle de la trachéotomie qui lui permettrait à nouveau de respirer avec l’aide d’un respirateur relié à sa trachée. Nous étions toujours près de lui, même en réanimation. Il arrivait aux copains de dormir dans les couloirs de la réanimation, ce qui n’était pas du goût des médecins, ceux-là mêmes qui lui donnaient 8 jours à 2 mois de vie mais c’était mal connaître François ! L’envie de vivre le tenaillait si fort qu’il a supporté toutes les contraintes de la trachéotomie : infections pulmonaires à répétition, réapprendre à parler, à manger. Tout cela me paraissait insurmontable ! Après 2 mois d’hospitalisation et d’une vie quotidienne presque récupérée, la vie s’organisait autour de François : c’était une hospitalisation à domicile avec un infirmier qui passait 4 fois par jour. Les amis de toujours continuaient de l’accompagner dans sa nouvelle vie.
L’achat d’un ordinateur s’imposait mais les deux mois passés à l’hôpital lui avaient fait perdre l’usage des mains. Un obstacle qui l’a brisé, lui qui avait tellement envie de continuer à écrire ! Des solutions existaient déjà : casque à infrarouges tellement lourd à porter qu’il a fallu avoir recours au bricolage de son père qui lui a modelé une cuillère Tupperware avec un matériau qui empêchait de glisser sur les touches ; avec un clavier plus étroit et surélevé par des carrés de mousse il reprenait le goût de l’écriture. La cuillère serrée dans la bouche (on l’appelait cuillère magique) il tapait aussi vite que moi avec les dix doigts. Cela lui a permis de poursuivre une licence d’allemand par correspondance et la fac a accepté qu’il présente tout ...

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