Pole dance philosophie
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Pole dance philosophie , livre ebook

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Description

La pole dance se situe entre les arts du cirque et l’effeuillage des bars à putes. Est-ce un sport, une alternative au fitness, une version aseptisée du strip-tease ou un art total et subversif ? C'est peut-être bien plus : un véritable phénomène de société.

La multiplication des studios de pole dance dans le monde occidental et les apparitions récurrentes des performeuses dans les médias annoncent un changement d’ampleur : l’avènement de nouvelles formes de féminisme, publiques ou silencieuses, moins ancrées dans la revendication politique que dans la jouissance de soi.

La femme du 21ème siècle se révèle enfin dans la pole dance. Au-delà des clichés, va-t-elle dépasser la binarité des genres ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 mars 2017
Nombre de lectures 3
EAN13 9782414031207
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-03118-4

© Edilivre, 2017
Introduction
1994. Une infraction vient d’être commise dans le monde de la nuit et des bars à striptease. Fawnia Mondey a produit le DVD Pole Work . Danseuse exotique canadienne, Fawnia a capturé le mode opératoire des gogos danseuses, lorsqu’elles ondulent autour d’une barre, pour l’inscrire dans une démarche pédagogique 1 . Destinataires ? Toutes les femmes. Ces « everyday girls » pourront s’appuyer sur un tutoriel de mouvements calibrés, pour reproduire un striptease ou une danse sensuelle. Chez elle. Le lap dance vient de sortir de son ghetto porno pour devenir la pole dance, une discipline artistique, sportive et glamour que les hommes eux-mêmes pourront pratiquer. Dans deux décennies tout au plus, elle fera fureur. Pour l’instant, pas de folies, pas de prouesses sportives. Elles viendront en leur temps.
Dans son DVD, tout comme dans ses cours à l’Exotic Dance school qu’elle vient d’ouvrir, Fawnia explique et montre la manière de danser autour d’une barre verticale. D’un coup, ce petit disque miroir démonte le mythe de sulfureuses gogos-pythies, à la fois vulgaires et inaccessibles, frappées par la grâce d’un érotisme réservé à Vegas. Bars tamisant les corps sublimes des professionnelles, ou lumières crues dégoulinant sur les stucs du Strip, strass et paillettes ondulantes qui mettent les hommes à genoux, ne sont plus une utopie de laquelle les femmes ordinaires seraient exclues. Jeunes femmes bien éduquées ou sportives fatiguées, femmes au foyer sans aucune base artistique ou employées surmenées : toutes peuvent désormais s’improviser danseuses de charme.
Une imposture ? Soit. Faire fantasmer les hommes alors que l’on n’est pas faite de la matière des performeuses, c’est possible. Cette matière se crée, l’illusion se travaille. La pole dance, c’est l’Eros qui devient accessible à toutes et transcende la chair. C’est le dieu de l’amour et de la séduction qui s’invite dans les foyers bourgeois, paré d’un revêtement technique. Objectivé, l’érotisme a sa recette. Il ne tombe pas au hasard sur les créatures humaines mais s’ouvre à qui le sonde. Et puis, il a son éthique : on danse autour de la barre pour gagner en force et en souplesse, comme l’expliquera plus tard Fawnia Mondey. Pour gagner en estime de soi également, découvrir que son corps est beau et désirable. Certaines iront jusqu’à pousser la porte de l’école de Fawnia Monday, puis de celles qui ouvriront dans la foulée. Mais pourquoi ? Pour goûter au miracle. La pole dance est ce miracle qui transforme le péché de chair et de séduction, en pratique saine, en rituel thérapeutique, en levier d’une métamorphose de soi. Du moins pour ceux qui comprennent la démarche. Car encore aujourd’hui, l’association entre la barre et le club de strip-tease continue de sévir.
Pratiquer la pole dance dans les années 1990 ? Sulfureux, un peu underground ; c’est comme franchir le rideau des « sex shops » : une sorte de fièvre honteuse s’empare des femmes lorsque, telles des petites filles, elles découvrent un jeu interdit et plein de promesses.
On dit de la pole dance qu’elle est progressivement sortie de son environnement érotique pendant les années 90, pour devenir un vrai sport. Et c’est vrai. Sur et autour de la barre, toutes les combinaisons sont possibles. La performance sportive peut prendre le pas sur la sensualité du geste et de la posture. On apprend vite à dépasser ses limites et réaliser des figures de cirque.
La pole dance devient progressivement quelque chose d’étrange, toujours marquée par ses gènes érotiques. Mais à côté de cela, elle offre le spectacle d’une discipline très sportive, entre le mât chinois du cirque, la gymnastique olympique et la danse moderne voire contemporaine. En fait, tout un ensemble d’embranchements coexistent, dont certains sont plus marqués que les autres, en fonction des circonstances, des pays, des écoles et des gens. Mais toujours demeure cet arrière-fond sexy. Des artistes poleuses russes surdouées qui n’hésitent à dévoiler leur jambes interminables, encore allongées par des talons de Drag queen, des chorégraphies sexy qui s’invitent dans les compétitions internationales, des stars qui revendiquent la différence entre pole et lap dance, mais osent pourtant se livrer à des poses suggestives sous l’objectif des photographes du monde entier : c’est aussi cela, la pole dance. Une tension permanente entre le sport de haut niveau et la sensualité des postures torrides.
Un sport féminin ? Il nous semble que oui, mais la réponse à la question est loin d’être évidente. Et si c’était la société qui avait fait de la « pole » un sport féminin, en l’associant au strip-tease, demande Nicolas Casanova, artiste, chorégraphe, performer, et champion de France de pole dance en 2015 ? Et si, contrairement aux idées reçues, cette discipline était au départ neutre et asexuée ? « Autrefois, les gymnastes s’entraînaient sur une barre verticale, l’équivalent rigide d’une corde à sauter, l’occasion de multiplier les exercices de souplesse, et de renforcement musculaire. » 2 , explique le poleur. Cette barre était un agrès pur et dur, ni masculin, ni féminin. L’ancêtre de la barre de pole dance. Un ancêtre parmi d’autre car la discipline peut s’enorgueillir de son arbre généalogique très fourni, et de son A.D.N composite, blessé de contradictions.
Mais ce que l’on peut dire de l’ancêtre-agrès, c’est qu’il tire la discipline sur un versant olympique, sportif et clinique. La pole dance se pratique aussi comme une extension du mât chinois, un appareil de cirque d’origine asiatique, constitué par un poteau vertical, plus large que la barre de pole dance et recouvert d’une gaine de néoprène ou de caoutchouc. On le grimpe habillé voire enveloppé dans des couches de vêtement pour éviter la brûlure, on s’y suspend et l’on s’y contorsionne. Rien de spécifiquement féminin là-dedans. Rien de sexuel non plus, on éviterait presque de souiller l’agrès de ses fluides corporels, comme si le sport transcendait le corps en exemptant l’organisme de fonctions biochimiques comme la sudation et ses odeurs. D’ailleurs, n’avons-nous pas souvent tendance à associer le féminin à l’érotisme, voire à la sexualité, considérant que ce qui est sportif et clinique serait plutôt masculin ? A travers cette composante strictement liée à la performance athlétique, le mât chinois et ses combinaisons de figures continuent d’inspirer les pratiquantes et pratiquants de pole dance, qui défient chaque jour un peu plus les lois de la pesanteur.
Ainsi, au fil des années, la pole dance s’est codifiée : les noms de figures se sont multipliés et de nouvelles combinaisons de mouvements, de plus en plus complexes, sont encore régulièrement crées. Des écoles se sont ouvertes et continuent de s’ouvrir, dans le monde entier 3 Shows, compétitions ou pratique occasionnelle et récréative : le monde de « la pole », comme on dit, regroupe différentes catégories de pratiquantes, et, dans une moindre mesure, de pratiquants. Faire de la pole dance, c’est prendre des cours ou, pour les adeptes les plus spécialisés, donner des cours. Il faut alors se produire en spectacle en ligne ou en live, courir de prestigieuses compétitions, et participer à des émissions de télévision. La discipline est rapidement devenue un phénomène de mode, un sport qui fait partie du paysage médiatique et se voit pratiqué par des personnalités sulfureuses ou au contraire réputées irréprochables, comme Kim Kardashian ou la princesse Kate d’Angleterre 4 . La pole dance, qui requiert de la souplesse et de la force physique, associe le glamour et le sport.
En effet, elle est d’abord un sport, quoi qu’en disent les mauvaises langues, tant et si bien que certaines compétitrices internationales militent pour son entrée aux jeux olympiques. Pour beaucoup, la dimension sportive, acrobatique et spectaculaire menant à des exploits renouvelés, prime sur le reste. La pole dance gagnerait-elle vraiment à n’être plus qu’un sport parmi tant d’autres ?
La barre de pole dance est un agrès difficile au revêtement glissant, à la giration piégeuse, un appareil de champions, certes. Mais elle est aussi danse, création de mouvements, jeux avec le corps, l’espace, l’image de soi. Elle est aussi art et, de par sa dimension transgressive, issue du lap dance, elle va encore au-delà. La pole dance est un rapport au monde, une pratique radicale permettant au corps de développer ses capacités, de se montrer, de s’imposer et d’imposer ses valeurs, mais elle est aussi un sport, oui. Elle sera toujours un sport et ne reniera pas ses influences circadiennes et gymniques. Elle ne serait plus pole dance sinon, mais du lap dance retourné à ses coulisses. Coupée de sa solide base athlétique, elle ne serait plus qu’un éphémère phénomène de mode. Elle cesserait d’être pole dance.
A l’opposé, devenant pure gymnastique, pratique olympique aseptisée, elle perdrait de sa sève et même de son intérêt, de sa capacité à faire vivre aux femmes et aux hommes aussi, une expérience de soi si particulière. Ce serait, selon la championne Doris Arnold, une négation de son essence, oblitérant l’érotisme qui en fait une pratique subversive, inventive, inclassable : un art 5 .
Et de toute façon, la barre de pole dance n’a pas du tout l’aspect massif et sérieux du mât chinois. Elle est brillante et glissante, à tel point que seul un corps dénudé peut y adhérer. Elle tourne et fait perdre la tête. Le corps qui s’y accroche est visible sous tous ses angles. De par son esthétique, la pole dance tient vraiment des barres de club à strip-tease, de par son histoire proche aussi. A quoi pensez-vous

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