Précieux et précieuses
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Description

Extrait : "C'est en tremblant que j'aborde le nom respecté d'une femme qui domina son siècle de toute la hauteur d'une vertu sans tache, et de toute l'influence de la vénération qu'elle inspirait. Des plumes plus exercées que la mienne, et, tout récemment, un écrivain illustre, je veux dire M. Rœderer, M. Walckenaër, et enfin M. Cousin, dans la Jeunesse de madame de Longueville, ont rendu à la marquise de Rambouillet une éclatante justice..." À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN : Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants : Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin. Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Publié par
Nombre de lectures 20
EAN13 9782335076394
Langue Français

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Extrait

EAN : 9782335076394

 
©Ligaran 2015

Introduction

DE LA SOCIÉTÉ PRÉCIEUSE AU XVII e  SIÈCLE
Cette période féconde de notre histoire, qui commence avec Richelieu et finit avec Mazarin, n’est pas seulement importante par les résultats politiques obtenus : les grands soumis à la loi, la maison d’Autriche abaissée, le parti des protestants ruiné, l’équilibre européen établi, le traité des Pyrénées signé ; il s’y produisit des faits purement civils, indépendants de toute action émanée du pouvoir royal, qui amenèrent à la fois dans les mœurs et même dans la langue des réformes suffisantes pour faire, à elles seules, la gloire du XVII e  siècle. Sous l’influence d’une femme justement vénérée, la marquise de Rambouillet, les hommes commencèrent à rechercher la Société des femmes ; celles-ci à recevoir dans une égale intimité les gens de lettres et les gentilshommes ; si bien qu’avant 89 l’esprit avait déjà conquis sa noblesse. Le langage prit une décence rarement observée jusque-là et demanda en outre à l’Italie la délicatesse et la galanterie, à l’Espagne la gravité et la noblesse. Alors enfin naquit l’esprit de conversation.
Si plus tard les qualités cherchées et obtenues finirent par se corrompre ; si, par suite d’un raffinement exagéré, on en vint à substituer la pruderie à la pudeur, l’afféterie à l’élégance, un pédantisme prétentieux au charme d’un savoir modeste, qu’on n’en accuse pas les premières réunions, formées sur le modèle des assemblées de l’hôtel de Rambouillet, mais ces coteries impuissantes, ces cabales bourgeoises dont les livres de Somaize et les comédies de Molière nous ont tracé de piquants tableaux.
Nous nous proposons d’aborder, dans un résumé rapide, l’histoire de cette société, si intéressante dans son origine et son progrès, comme dans la décadence qui suivit. Mais nous devons dès à présent faire ressortir un caractère commun aux deux époques ; c’est que les habitués de madame de Rambouillet ou les familiers de mademoiselle de Scudéry ont pu sans doute, en particulier, être mécontents du pouvoir ; mais uniquement sensibles aux choses de l’esprit, soumis au souverain, ils restèrent toujours, dans leurs réunions, étrangers à la politique et ne se montrèrent jamais hostiles aux actes du gouvernement. Si donc on peut remarquer que les principes d’égalité proclamés par 89 furent préparés dès cette époque par l’élévation non plus isolée, mais générale, des gens de lettres, il serait faux d’avancer que l’esprit de soumission s’y soit perdu et que l’indépendance ou la révolte y aient pris naissance ou trouvé un appui.
Le caractère entièrement privé des réunions de la société polie au XVII e  siècle nous dispense d’entrer dans le détail des évènements politiques ou des grandes mesures administratives qui signalèrent les ministères de Richelieu et de Mazarin ; quelques traits sont nécessaires cependant pour faire connaître et les mœurs qui s’y réformèrent, et le langage qui s’y polit, et les circonstances qui auraient pu servir ou qui aidèrent réellement le développement de l’esprit nouveau.
Les mœurs, pour chacun et pour tous, résultent de la pratique habituelle, constante de certaines règles de conduite plutôt inspirées par les sentiments que dominées par la réflexion : pour le plus grand nombre, en effet, le proverbe dit vrai, le cœur emporte la tête, et c’est dans l’étude des penchants, des inclinations, des tendances ordinaires d’une époque que nous trouverons le plus facilement l’explication des mœurs générales.
Or, au moment de la mort de Henri IV, quelle était la situation du pays ? Par ce qui était nous verrons ce qui restait à faire, et à quelles aspirations vers un autre avenir donnait lieu l’état actuel de la société.
Deux partis, plutôt politiques que religieux, bien qu’ils empruntassent leur nom des catholiques et des protestants, divisaient alors la France et essayaient à l’envi, ceux-là de conserver une supériorité laborieusement acquise, ceux-ci de ressaisir une influence vainement défendue. L’intrigue d’abord, les armes ensuite, avaient été appelées au service des deux causes ; l’habileté du feu roi avait su maintenir des deux côtés l’équilibre ; mais sa mort et les embarras d’une régence remettaient tout en question, relevaient le courage des ambitieux et prolongeaient en France, avec les discordes civiles, ces désordres qui atteignaient la population entière dans ses trois ordres : le clergé, la noblesse et le tiers état.
Le clergé supérieur n’avait pas alors cette haute moralité, et n’était point recruté avec ce choix intelligent et sévère qu’on admire aujourd’hui ; il était en grande partie composé de jeunes gens nobles, engagés dans les ordres ou par force ou par l’habitude du temps ; de faciles dispenses leur apportaient, avant même l’âge des plaisirs, les richesses des abbayes ou les revenus des évêchés et des canonicats ; vivant pour l’ordinaire hors de leur diocèse, ils en ignoraient les besoins et menaient une vie toute mondaine. À de rares exceptions près, leur influence morale était nulle, et ils n’avaient aucune action sur le clergé inférieur. Maîtres de l’éducation dans les campagnes, ils se déchargeaient de la surveillance et de la direction des petites écoles sur le chantre de leur église métropolitaine ; s’ils connaissaient les abus, c’était pour les punir plutôt que pour les prévenir ou les réformer.
À la cour, les gentilshommes les plus nombreux, ceux qui n’imitaient personne et qui dominaient avec une autorité incontestée sur les modes, le langage ou les mœurs, étaient les gens de guerre. Témoins des débordements d’un roi dont l’âge semblait augmenter plutôt qu’affaiblir les passions obstinées ; peu scrupuleux sur la morale que cinquante années de guerre civile leur avaient singulièrement fait oublier, ils se livraient à l’amour immodéré des plaisirs, et c’était là encore une flatterie plus ou moins directe à l’égard du souverain. Toutes les provinces du royaume y avaient des représentants, tous les patois s’y parlaient ; des prononciations diverses défiguraient diversement les mots, et ce serait une grave erreur de penser qu’il y eût alors à la cour un langage choisi, homogène, qui pût agir avec succès sur la littérature : la langue écrite ne ressemblait en rien à la langue parlée ; telle qu’elle était, c’était en quelque sorte un idiome savant que tous entendaient, mais qui n’avait pas cours dans les relations habituelles. Apprise sans règles et sans grammaire, la langue n’avait guère obéi jusque-là qu’à l’usage. Que l’on mette en regard des vers de Malherbe, ses lettres chargées de solécismes et de locutions patoises, on se fera une idée de la négligence avec laquelle la langue était traitée. Si la politesse du langage ne préoccupait aucunement les gens de cour, leurs habitudes guerrières et la vie de garnison les rendaient peu scrupuleux sur la décence des expressions ; le goût des histoires graveleuses, l’emploi des termes les plus libres, les usages les plus grossiers arrêtaient dans leur expansion tous les sentiments de pudeur, toute cette réserve, cette délicatesse exquise et fine qui réclame impérieusement une langue particulière. Nous ne donnerons point d’exemples de ce qu’était alors la liberté du langage : les contes de la reine de Navarre, les poésies et les comédies du temps ne le montrent que trop.
Il était donc urgent, après les améliorations successives introduites depuis, qu’une influence puissante vînt enfin consacrer, pour ainsi dire, ces progrès déjà obtenus, et fit adopter formellement, d’une manière continue et régulière, un langage nouveau pour des mœurs nouvelles.
Aux femmes fut réservée cette tâche ; elles seules purent obtenir des hommes des manières plus délicates et un langage épuré ; mais en même temps qu’elles durent se faire rechercher par le charme de leur conversation, elles eurent à faire désirer, en le rendant difficile, l’accès auprès d’elles, et à commander le respect par la pureté de leurs mœurs. Elles avaient donc elles-mêmes à se réformer. Il nous reste à chercher d’où partit la réforme.
Pour qui s’est rendu compte du nombre des couvents et aussi de la quantité de jeunes filles qui y étaient élevées et qui y vivaient jusqu’à leur mariage, il semble que l’influence des maisons religieuses devait être grande sur la société contemporaine ; si ce n’est pas de là que sortirent ces fe

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