Entre tes mains
200 pages
Français

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Entre tes mains , livre ebook

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Description

Elle est d'origine modeste. Il appartient au monde des privilégiés. Leur union peut-elle s'affranchir des barrières sociales, dans une société forgée de dogmes cloi-sonnée et qui abhorre les transfuges ?Il est bien difficile de laisser libre cours à ses pas-sions, mais le renoncement coûte un prix, parfois trop lourd à payer.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2015
Nombre de lectures 21
EAN13 9789954213889
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Entre tes mains
Roman
Editions
Entre tes mains.indd 1 17/02/2015 11:52Du même auteur
• Amours inachevées, Horizons méditerranéens, Casablanca, 1994.
• Dorhan, L'Harmattan, Paris, 1999.
• Sur tes pas, Paris, 2001.
• Plus que tout au monde, Afrique Orient, Casablanca, 2005.
• La vie volée, Marsam, Rabat, 2005.
• La brume des jours, Marsam, Rabat, 2007.
• Une journée pas comme les autres, Afrique Orient, Casablanca, 2008.
• La pénombre des masures, Afrique Orient, Casablanca, 2009.
• Vies de brouillard, Afrique Orient, Casablanca, 2010.
• L'épreuve de la passion, Afrique Orient, Casablanca, 2013.
• Entre tes mains, Marsam, Rabat, 2015.
© Editions Marsam - 2015
15, avenue des Nations Unies - Rabat
Tél : 05 37 67 40 28 - Fax : 05 37 67 40 22
e-mail : marsamquadrichromie@yahoo.fr
Compogravure flashage
Quadrichromie
Impression
Imprimerie Bouregreg
Dépôt légal : 2015 MO 0374
I.S.B.N. : 978-9954-21-388-9
Entre tes mains.indd 2 17/02/2015 11:52Mamoun Lahbabi
Entre tes mains
Roman
Editions
Entre tes mains.indd 3 17/02/2015 11:52Couverture :
Œuvre de Mohamed Nabili
Technique sur toile
Collection Marsam
Entre tes mains.indd 4 17/02/2015 11:52Chapitre 1
Rares étaient les après-midi où Yassir ne s'installait
pas à son balcon. De ce promontoire abrité, il observait
la rue par temps de pluie comme par beau temps. C'était
une de ses façons de fréquenter la ville, de côtoyer les
gens, de capter leur regard, de frôler leurs épaules. Dans
ces contacts virtuels qui le plongeaient dans la foule
sans l'immerger dedans, il conservait une distance qui se
rétrécissait au fil de son imagination. Pour chaque
passant il inventait une histoire, tantôt heureuse, tantôt
malheureuse. A sa guise, il partait en voyage en escortant
les pas qu'ils fussent pressés ou ralentis au rythme
alangui d'une promenade improvisée. Singulièrement, Yassir
n'était jamais en rupture de stock d'imagination pour
façonner à l'un ou à l'autre une existence spécifique. Il
en avait pour tout le monde, les vieux et les jeunes, les
beaux et les laids, les bavards et les muets. Sans
transition, il se transportait d'un inconnu l'autre en
déclenchant, à chaque fois, une histoire inédite. Et à l'angle de
la rue, en disparaissant, ces anonymes gommaient de sa
mémoire la page écrite le temps de leur passage. Sans
raccordement, il se déportait alors sur un autre inconnu
en déclenchant, une autre fois, une histoire originale. Il
ne lui arrivait jamais de se souvenir d'un visage et de ce
qu'il avait inventé pour lui. Les inconnus restaient
inconnus. Son imagination était exempte de mémoire et
s'estompait pour se régénérer en nouveauté. Bizarrement,
cette amnésie jouait exclusivement pour la première
rencontre. A la seconde, quand le passant réapparaissait
Entre tes mains.indd 5 17/02/2015 11:526 Entre tes mains
dans la rue, il s'en détournait et ne lui accordait plus
aucune parcelle d'attention. Paradoxalement, la
fréquentation répétée, même une seule fois, inhibait sa curiosité
et le détachait définitivement du promeneur. Il ne
s'intéressait qu'aux nouveaux venus, ces étrangers
furtifs qui sèment sous leurs pas, dans leurs regards, sur
leurs lèvres et dans leurs gestes, la substance nourricière
de ses départs oniriques.
Au fil des jours et des mois, Yassir s'était accoutumé
à cette observation animée. Ce moment emplissait une
belle part de ses longs après-midi. Il se réjouissait à
chaque fois de ces rencontres fortuites, menées sans
entrave, à l'abri de toutes réactions de ses interlocuteurs.
Dans ces relations confidentielles, il demeurait le maître
d'orchestre et cela le grisait, lui apportant l'étrange et
factice sentiment de disposer de la vie des autres. Et aux
sorties dans le quartier, il préférait souvent son balcon.
Pourtant, il appréciait les déambulations dans les rues
étroites ou sur les grandes avenues filant vers le bord de
mer. Il n'était jamais avare de temps pour entamer une
longue marche dont il ne préméditait pas le parcours.
Dans ces errances au milieu des gens, curieusement, il
se sentait seul. Immensément seul. Aucun passant ne
l'interpelait. Même le contact d'une épaule le laissait
indifférent. Il ne sentait personne, ne croisait aucun
regard et les paroles à son oreille se brouillaient en sons
inaudibles. Cette absence dans la rue, il ne la devait pas
à un quelconque désintérêt des choses alentour, mais à
une incommensurable capacité à s'extraire de son
environnement. Il s'évadait complètement, projetant son
esprit dans des espaces toujours inconnus, là où son
imagination pouvait librement gamberger. Dans une
imperceptible métamorphose, les rues se vidaient, les
gens devenaient des ombres invisibles, et il avançait en
fendant ce vide ravivant ses partances de l'autre côté de
Entre tes mains.indd 6 17/02/2015 11:52Entre tes mains 7
la réalité. Au retour de ses promenades, Yassir émergeait
de nouveau comme s'il s'éveillait après un long sommeil
d'un seul rêve tissé. De l'extérieur, il ne rapportait rien,
ni les visages, ni les odeurs, ni les paroles entremêlées.
Il se restituait alors au temps en essayant vainement de
retenir quelques bribes des images grappillées dans son
exode fugace. Et pour se recoller à cette rue qu'il n'avait
pas vue, il envisageait déjà une pause prolongée, penché
à son balcon.
En ce milieu d'après-midi d'un mois de mai tiède,
Yassir rejoignit son observatoire. Le soleil inondait
l'atmosphère de ses rayons flamboyants. L'air fleurait un
parfum de printemps. Au loin, dans le ciel immaculé, un
vol d'oiseaux découpa le bleu azur. Yassir ne put
reconnaître les volatiles qui filaient en triangle vers le Sud.
D'un regard concupiscent, il parcourut la rue en quête
d'un personnage. Il opta pour un couple à la
cinquantaine probablement consommée. Il ne lui arrivait pas
souvent de porter son dévolu sur deux personnes en
même temps, mais cette fois, il fut aimanté par la
démarche paisible de cet homme élégant qui
harmonisait ses pas à ceux de sa compagne. Sa curiosité fut
captée par l'intérêt de l'homme aux paroles prononcées
par la femme qui parlait légèrement de biais. Emanait de
leur conversation une ardente complicité. Leurs bras
entrecroisés semblaient soudés pour éviter toute
immixtion pouvant les distraire. Yassir, un instant fulgurant,
supposa la cécité de l'homme. La femme le guidait. Tous
deux avaient eu un terrible accident de voiture. Elle s'en
était sortie indemne, il avait perdu la vue. Pour lui faire
supporter ce handicap, elle s'était juré de se substituer à
ses yeux. Elle lui raconterait la vie comme s'il la voyait.
Elle sera là, toujours et tout le temps. Il ne souffrira ni
d'obscurité, ni de solitude. Jamais, jamais, elle ne
permettra aux ténèbres d'atteindre son esprit. Pour lui, elle
Entre tes mains.indd 7 17/02/2015 11:528 Entre tes mains
sera le blanc et toutes les couleurs, le mouvement et
l'inertie. Le vent, aussi, elle le dira. Et avec lui, elle le
verra. Si les mots venaient à lui manquer, elle ira les
cueillir chez les poètes. Elle y puisera les nuances pour
raconter le déploiement des pétales d'une fleur, le
passage de l'aube au jour, le clair-obscur qui se répand
avant que la nuit ne prenne possession de la lumière. Si
les mots venaient à manquer pour dire la passion dans
le regard, la flamme qui brûle dans le cœur, elle les
inventera. Alors, de nouveau, dans ses yeux éteints,
l'éclat réapparaîtra pour partager les sentiments et la
fièvre d'un emballement. Si les mots venaient à
manquer… Yassir suspendit son voyage. Une dernière
seconde, il s'agrippa à ce couple encore éloigné du bout de
la rue et dont l'histoire, fatalement, pouvait se
prolonger. Malgré lui, son imagination se consuma. Elle fut
phagocytée puis happée par une apparition sur sa
gauche. Une jeune femme avançait en agitant
nonchalamment un foulard rouge. Yassir se figea sur elle.
Vingt-cinq ans peut-être, un peu plus ou un peu moins.
Difficile de donner un âge à ce corps ondulant comme
s'il exécutait une chorégraphie érotique. Elle marchait,
suspendue à l'air, et le mouvement de son corps
semblait la précéder. On aurait dit qu'elle volait en
effleurant la terre. Ses lèvres remuaient et ses yeux
vagabondaient tout autour comme si elle cherchait à
emmagasiner ce qui l'entourait. A la cadence de ses pas
souples, ses cheveux se soulevaient, et quand elle se
retournait, même légèrement, ils tournoyaient pour
accompagner la trajectoire de son regard. Etait-elle
belle ? Yassir n'aurait su se prononcer. Elle n'avait ni les
canons de beauté de l'industrie du prêt-à-porter, ni ceux
de l'Orient. Un mètre soixante, guère davantage. Ni
fine, ni ronde, mais les deux à la fois. Ses grands yeux
noirs auraient pu se passer de khôl. Ses lèvres charnues
Entre tes mains.indd 8 17/02/2015 11:52Entre tes mains 9
dessinaient un cœur, mais sans la pointe inférieure, un
cœur sans aspérité. A son passage, tous les regards se
collaient à elle, insistants. Indifférente à l'attrait
provoqué, elle renvoyait une mimique dédaigneuse ne laissant
place à aucune perspective. Un homme risqua un mot.
Elle lui affligea une réplique qui l'éloigna à pas pressés.
Yassir était fasciné, subjugué. La sensualité coulait
sur elle, comme une rivière. Ça lui sortait de la démarche,
du mouvement de son corps, de son déhanchement, de
ses mains autour de ce foulard rouge, de son port droit,
des mots susurrés pour elle-même. Tout en elle était
aphrodisiaque. Son odeur aussi, bien sûr. Certainement.
Yassir se pencha davantage pour humer quelques
effluves. Il convoqua son imagination pour mieux les
sentir. En vain. Son esprit restait rétif à tout départ. Cette
fois, le réel l'emportait sur le fictif. Il fut submergé d'une
irrépressible envie de la connaître, de la caresser, de
l'étreindre, de la prendre. Comment l'atteindre et la
séduire ? Aborder une inconnue dans la rue, ce n'était
pas son genre et il ne savait pas

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