140
pages
Français
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2018
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Ebook
2018
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Publié par
Date de parution
19 janvier 2018
Nombre de lectures
0
EAN13
9782312057316
Langue
Français
Publié par
Date de parution
19 janvier 2018
Nombre de lectures
0
EAN13
9782312057316
Langue
Français
L’Envoyée spéciale
Jean - Louis Maskali
L’Envoyée spéciale
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2018
ISBN : 978-2-312-05731-6
A mes parents,
Qui ont attendu si longtemps avant de lire ce texte…
Certes , ma vie n’a de sens que par ce qui est folie au reste du monde.
Lucie .
Avant - propos
Personne ne croira cette histoire, personne. Sans doute cela vaut-il mieux.
Avant de la publier, l’éditeur et moi, nous avons pourtant longtemps hésité. Nous ne voulions pas être responsables de faits de société, de mouvements de foule, de scènes de panique ou que sais-je encore. Toutes choses difficilement prévisibles, impossibles à contrôler, que le remord d’avoir été à l’origine nous aurait tenaillés jusqu’à nos derniers jours. Nous avons hésité longtemps et mûrement réfléchi parce que nous savions, nous autres, que tout cela était vrai. Et puis au final, nous en sommes revenus à cette évidence, toute de bon sens, que l’homme moderne, quand il n’est ni sous l’influence aliénante de certains médias, ni la proie d’une autosuggestion de masse (ce qui est souvent la même chose), est bien l’espèce animale la plus incrédule qui soit. La preuve : combien, parmi nous, sont convaincus que le Petit Prince a vraiment existé ? Que Cyrano de Bergerac s’est réellement battu à un contre cent ? Que le vieux docteur Faust habitait bien Leipzig et vendit « pour de vrai », comme disent les enfants, son âme au diable ?
Même après un tel préambule, personne, nous en sommes persuadés, n’ajoutera donc foi au mystère qui va suivre. Ou pour être plus exact, personne du grand public. Car en vérité, je suis bien placé, moi, pour savoir combien, dans certaines très hautes sphères gouvernementales et scientifiques, l’on se passionne pour cette affaire. Mais j’ai répondu de la façon la plus honnête qui soit aux questions que l’on m’a faites. J’ai dit tout ce que je savais et l’on a fini par me laisser tranquille.
Oui , personne ne croira cette histoire et sans doute est-ce mieux ainsi. Venant d’un journaliste, entendre cela peut surprendre. Mais je le dis d’autant plus volontiers qu’il m’importe malgré tout de préciser ceci : je n’ai rien inventé de tout ce qui va suivre.
Jacques Lenoir .
Paris , octobre 2008.
En manière de prologue
Ça m’est tombé dessus en fin de soirée, à Jérusalem, tandis que je venais de rentrer dans ma chambre de l’hôtel Ramat Rachel.
Je ne me doutais de rien, bien sûr. Comment aurais-je pu ? Même en cherchant à deviner quel cataclysme allait s’abattre sur moi, jamais je n’aurais imaginé celui-ci. Un phénomène extraordinaire qui d’un seul coup, par un simple concours de circonstances, a quitté le domaine de la fiction romanesque pour entrer dans le champ du possible et submerger ma vie.
Dans l’instant même, je n’ai pas compris ce qui se passait ; mes sens me fournissaient des informations contradictoires. Mais au bout d’une minute, quand il m’apparut évident que le fantastique, venant de quitter le lit normal de l’imagination, était en train de se répandre en ras de marée dans ma réalité quotidienne, ma tête s’est mise à tourner. J’ai senti les résonances profondes et étouffées de mon esprit qui perdait pied. C’était comme si je m’étais trouvé au sommet d’un arbre en pleine bourrasque, au sommet d’un arbre dont les racines se rompaient les unes après les autres avec des bruits sourds de torons qui cèdent : je percevais en moi les fibres de la raison qui claquaient une à une. Lâchons le mot : je me suis vu devenir fou. Du moins, c’est ce que je croyais.
Mais on a beau dire, l’être humain est une bestiole coriace. Un drôle d’animal, en tout cas, imprévisible et zébré de paradoxes. Il s’effondre parfois pour de petits riens ou bien résiste comme un insecte dans l’adversité la plus cruelle. La faculté d’adaptation dont l’a doté la nature semble tantôt frôler le zéro absolu, tantôt défier l’entendement. Ainsi , bien que ne parvenant que plusieurs jours après à me faire à l’idée du prodige, j’eus néanmoins ce soir-là, face à l’irrationnel, et malgré une raison tétanisée par le spectacle sidérant dressé devant moi, le réflexe singulier de vouloir exercer mon métier : je demandai un entretien.
Certainement ne savais-je pas ce que je faisais. Était-ce de l’inconscience ? De l’aveuglement ? Fallait-il mettre cela au compte de l’audace désespérée d’un homme qui n’a plus rien à perdre ? Ou bien s’agissait-il d’un simple tic nerveux ? Une sorte de réflexe post mortem d’un cerveau déjà vide mais palpitant encore ? Je ne sais. Toujours est-il que le culot stupéfiant dont je fis preuve sur le moment n’a pas fini de m’étonner. Solliciter un entretien ! Voyez-vous ça ! Mais au fait, à qui donc ?
– A Lucie. Cette incroyable inconnue par qui tout arriva.
Mais avant de laisser à Lucie la place qui lui revient (c’est à dire la première), sans doute le lecteur souhaitera-t-il connaître le contexte ainsi que les conditions, plus ou moins fortuites, qui ont suscité notre rencontre et ont permis – chance unique dans les annales de l’histoire – de pouvoir écouter directement la parole, non pas seulement d’une femme, mais de ce que je qualifierais volontiers de spécimen mythologique vivant . Car Lucie nous parlera elle-même de « l’incroyable détail », cette chose qui lui est arrivée et qui a fait d’elle cette créature incertaine mais terriblement obstinée errant à mi-chemin entre la bête et le dieu. Cet ange, ce démon, cet être humain donc, nous retracera son ahurissante épopée – expérience étrange et fort troublante qui pourrait en perturber plus d’un. C’est pourquoi je tiens à prévenir dès maintenant : que celui ou celle qui, se sachant d’un mental fragile ou, traversant simplement une passe difficile, craindrait de perdre toute tranquillité d’esprit, que celui-ci ou celle-là referme ce livre tant qu’il en est encore temps. Pour les autres, voici :
Mon nom est Jacques Lenoir. J’ai quarante-deux ans, suis célibataire, sans enfant, et gagne ma vie comme reporteur pour un grand quotidien français. Analyste politique, spécialiste de la question israélo-palestinienne – telle est mon étiquette – quand tout a commencé, voici quelques mois, je me trouvais à Jérusalem depuis cinq jours. On se souvient sans doute du plan Steinberg, du nom de ce diplomate onusien à l’origine de la conférence internationale qui se tint dans la ville à cette époque. La reprise des négociations du processus de paix avait de nouveau polarisé l’attention mondiale. Mais pour la première fois depuis fort longtemps, tous les signaux étaient verts (comme on dit dans le jargon), et les espoirs d’assister enfin à l’éclosion de la paix en Palestine étaient réels. Autant dire que pour couvrir l’événement je n’étais pas le seul journaliste à séjourner dans la ville des trois religions. Je fus cependant le seul à jouer de malchance… Car bien des confrères auraient pu découvrir Lucie ; il a fallu que cela tombe sur moi. Dans mon esprit, cet événement personnel relégua aussitôt les pourparlers internationaux à la rubrique des chiens écrasés. Il y a parfois, dans l’existence, des journées qui semblent ainsi faire comme une bascule ; des journées en forme d’équinoxe ; de ces instants obliques et glissants où tout à coup, les parts d’ombre et de lumière paraissent subitement s’inverser. On n’oublie pas ces moments-là, on en reste marqué, on y songera souvent.
Plusieurs mois ont passé, oui. Mais cette fameuse soirée où Lucie m’est apparue, il me semble que c’était hier. Enfin, quand je dis « apparue », bien sûr, c’est façon de parler.
La journée avait été brûlante. Je l’avais passée à tuer le temps entre la salle de presse du Palais des Congrès – où se tenait la conférence – et le bar du Café des Oliviers, situé juste en face, où nous avions déjà pris l’habitude, avec d’autres confrères, de partager nos points de vue autour d’un verre.
Pour la troisième journée consécutive, les laborieuses discussions du plan de paix n’en finissaient pas. Ce jour-là, les séances ont été suspendues vers 19 heures et les principaux participants se sont éclipsés