La lecture à portée de main
140
pages
Français
Ebooks
2011
Écrit par
Lina Savignac
Publié par
Éditions la Caboche
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
140
pages
Français
Ebook
2011
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Publié par
Date de parution
01 novembre 2011
Nombre de lectures
6
EAN13
9782923447575
Langue
Français
Publié par
Date de parution
01 novembre 2011
Nombre de lectures
6
EAN13
9782923447575
Langue
Français
Couverture une idée originale de
Raymond Gallant
Révision
Pierre Bélanger
Nicolas Gallant
Mise en pages
Pyxis
Photo
Pierre R. Chapleau, Prac Photo
Catalogage avant publication de
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
et Bibliothèque et Archives Canada
Lina Savignac, 1949 -
L’Irlandais... : Roman
Sommaire: t. 1. Elwin
ISBN 978-2-923447-55-1 (v. 1)
ISBN EPUB 978-2-923447-57-5
ISBN PDF 978-2-923447-56-8
I. Titre. II. Titre: Elwin.
PS8637.A87I74 2011 C843’.6 C2011-942073-2
PS9637.A87I74 2011
Dépôt légal
Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2011
Bibliothèque nationale du Canada, 2011
Éditions la Caboche
Téléphones : 450 714-4037
1-888-714-4037
Courriel : info@editionslacaboche.qc.ca
www.editionslacaboche.qc.ca
Vous pouvez communiquer avec l’auteur par courriel :
lina.savignac@gmail.com
Toute ressemblance avec les événements ou les personnages
ne pourrait être que fortuite.
Toute reproduction d’un extrait quelconque de ce livre par quelque procédé que ce soit est strictement interdite sans l’autorisation écrite de l’éditeur.
Avis au lecteur
L’auteure tient à souligner le caractère spécifique de ce roman d’époque. Basé sur des faits réels et véridiques. Cette histoire a exigé beaucoup de recherches. Par contre, je me suis octroyé le droit de romancer certains faits et quelques lieux. Des personnages imaginaires ont pris d’assaut les pages de ce livre, calquant leur vie à mon privilège de romancière.
À Raymond pour
son indéfectible soutien
tout au long de ma vie.
1
1864
C e matin-là, François Cartier rentra chez lui à moitié découragé. Il venait de déneiger une grande partie de la devanture de son magasin général, situé sur la rue Richelieu, et avant de s’attaquer à la façade qui faisait angle avec Saint-Jean-Baptiste, il s’imposa un petit arrêt bien mérité. Enlevant ses mitaines de peau de caribou, il passa une main sur son front mouillé par l’effort. Sous son épaisse tuque de laine, on voyait poindre une frange de cheveux bruns largement humides. D’un geste brusque, il ouvrit la porte arrière du commerce qu’il tenait de sa femme Lucie. Dès qu’il eut vent de leurs fréquentations, le père de François s’était réjoui de cette alliance, espérant secrètement que l’amour et le négoce attacheraient son fils à la région et modéreraient ses ardeurs de coureur des bois. Mais le vieil homme avait sous-évalué la puissante attirance que la chasse et la pêche exerçaient sur son cadet.
Lucie Cartier, née Dubois, avait reçu en cadeau de noces le fonds de commerce que détenait encore son paternel.
Depuis deux générations, le Marché Dubois avait pignon sur rue et l’ancien propriétaire, Rosaire Dubois, jouissait d’une solide réputation auprès des gens de Belœil et des localités environnantes. Du fait que son commerce était situé sur le bord de la rivière Richelieu facilitait le négoce. De plus, le vieux Rosaire avait tâté de la politique municipale, allant jusqu’à être élu maire. Ainsi, en cédant le commerce à sa fille, le père pensait la protéger des mauvais coups du sort. François avait subi avec succès le questionnaire dirigé par son futur beau-père et c’était avec un nœud dans la gorge que le marchand était passé devant Augustin Hoffman, notaire de profession. Cependant, le légataire avait introduit dans le contrat une close plus qu’astreignante pour le couple de jeunes mariés. Les tourtereaux avaient l’obligation d’élire domicile dans la maison ancestrale, sise au-dessus du magasin général, et prendre soin du testateur jusqu’à ce que la mort le délivre de la vieillesse. Par contre, ce dernier s’octroyait le droit de travailler à l’entreprise portée à bout de bras durant plus de quarante ans, et ce, selon son goût et ses capacités.
Jusqu’ici, soit depuis trois ans, les opérations commerciales tournaient rondement et la clientèle se montrait satisfaite des services offerts par le jeune couple jugé novateur. Toutes sortes de marchandises importées d’Angleterre gar nissaient maintenant les tablettes, à des prix plus que raisonnables. Les Cartier avaient repoussé le département de la ferronnerie dans l’arrière-boutique de même que tout l’attirail horticole qu’on n’utiliserait que dans quelques mois. Dans le nouvel espace créé, on retrouvait des bagatelles plaisant aux femmes ainsi que des tissus fins pour les dames riches. De l’avis général, François Cartier pratiquait un commerce honnête.
Il faut pourtant dire que le jeune détaillant préférait, et de loin, courir les bois à la manière des Indiens, débusquer le gibier ou tendre des collets aux lièvres déjà blancs. L’été, à chaque jour que le Bon Dieu apportait, il dévalait la pente en face du magasin et jetait sa ligne à l’eau, juste pour le plaisir de voir le brochet ou le doré avaler son appât.
Du temps de son paternel et, en fait, dès l’instant où elle était sortie du couvent, Lucie se tenait derrière la caisse et gérait les affaires. Au-delà de son comptoir vitré, elle gou vernait. Malheur à celui qui aurait voulu prendre sa place. Son mari avait essuyé plus d’une rebuffade en essayant de fourrer son nez dans les minuscules tiroirs coulissants garnissant le mur en arrière d’elle. Il faut dire que lorsqu’elle était jeune fille, son père lui avait enseigné l’art du commerce et depuis qu’elle était devenue la patronne, elle redoublait d’intérêt et d’ambition. Talonné de près par son épouse, François Cartier avait rapidement acquis du galon dans le domaine de la vente au détail et se montrait à l’aise avec la clientèle. Ainsi, les gens du village s’attardaient, car ils aimaient échanger avec lui. Justifiant ses sorties en forêt, François gâtait les acheteurs et leur offrait de magnifiques peaux de renard, de martre ou de lièvre. Souvent, au printemps et jusqu’à tard à l’automne, le marchand agrémentait l’ordinaire des consommateurs en leur proposant un étal rempli de poissons frais.
Ramassant son châle qui glissait constamment, Lucie le rabattit sur ses épaules et l’enserra autour de ses bras. Son imposante chevelure auburn lui donnait parfois l’air d’une tenancière de bar et si quelqu’un voulait la faire enrager, il n’avait qu’à philosopher sur sa tignasse flamboyante. Mais un bruit provenant de l’entrepôt attira son attention.
— Est-ce toi, François ? demanda une voix haut perchée.
— Tu as l’oreille fine. Pas moyen de te surprendre, ma belle perdrix. Juste quelques minutes pour reprendre mon souffle et je repars tout de suite, dit-il en se frottant les mains au-dessus de la truie chauffée à blanc. Ce n’est pas croyable toute la neige tombée cette nuit. Penses-y, on vient à peine de tourner la page du calendrier et d’enterrer décembre que déjà les bancs de neige nous empêchent de voir clairement dans le détour. Imagines-tu comment ce sera au printemps ? On n’apercevra que les toits.
— Et il faudra composer avec les inondations, conclut rapidement Lucie. Mais en attendant…
— ...en attendant, je vais continuer, car personne ne fera mon ouvrage.
Le temps de le dire, François avait enfilé sa paire de mitaines et passait la porte. Derrière lui, la bourrasque de neige s’engouffra et refroidit toute la pièce. Lucie serra un peu plus son châle contre sa généreuse poitrine et croisa les bras. Il est vrai que son mari détestait nettoyer les rues, mais comme tout le monde dans le patelin, il se devait d’entretenir son bout de chemin. Les autorités de la municipalité avaient été claires là-dessus. En tant que commerçant, il se devait de respecter le règlement, d’autant plus qu’on en devait l’initiative à son père. À peine la jeune femme avait-elle le dos tourné, que la clochette de la porte retentit à nouveau. Immédiatement, selon une habitude acquise depuis longtemps, Lucie redressa le buste et passa la main dans son chignon afin de vérifier si une couette malveillante n’avait pas glissé hors de son peigne. En peu de temps, elle regagna sa place derrière le comptoir et se mit à l’entière disposition de la cliente. Madame Dandonneau, demeurant sur la rue Choquette à la limite ouest du village, fit quelques pas en tapant du pied, de manière à déloger la neige collée à ses bottines, puis secoua le bas de son manteau pour déglacer l’ourlet.
— Les chemins ne sont pas encore déblayés, déclara d’un trait Élise Dandonneau. Il m’a fallu beaucoup de volonté pour venir jusqu’ici. Je dois tout de même avouer qu’une fois chez vous, ça marche un peu mieux. Votre mari a eu le sou