La Korrandine de Tevelune
255 pages
Français

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La Korrandine de Tevelune , livre ebook

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Description

Si l’on prend la peine de feuilleter un dictionnaire français-gaulois, on comprendra aisément que Tevelune signifie « Eaux calmes ». Il suffira de chercher encore un peu pour apprendre que le Korrandon est un nain de source, cousin lointain du Korrigan. Mais rien de tout cela ne nous aidera vraiment à savoir qui est la Korrandine, ce squelette de femme que Vincent a découvert dans la grotte derrière la fontaine de Tevelune.
Depuis le Moyen Âge jusqu’à l’occupation de Sourcarol par les Allemands, en passant par la fabrication des ponnes au XIXe en Charente, les Chinels de Wallonie et bien d’autres choses encore, Vincent part à la recherche de La Korrandine de Tevelune, sur des chemins qui le conduiront du réel à l’imaginaire, d’une Korrandine à une autre.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 septembre 2014
Nombre de lectures 519
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0041€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LA KORRANDINE DE TEVELUNE
Les mystères de l’Argentor


Sébastien Lepetit



© Éditions Hélène Jacob, 2013. Collection Mystère/Enquête . Tous droits réservés.
ISBN : 979-10-91325-35-6
Les mystères de l’Argentor


L’Argentor coule doucement quelque part entre la Charente, le Limousin et le Poitou. L’Or prend sa source au creux d’une fontaine résurgente nichée au fond d’un pré. L’Argent naît un peu plus loin, sur le flanc d’une colline. Les deux ruisseaux serpentent quelque temps entre les prés et les bois avant de s’épouser pour donner naissance à l’Argentor. La vallée se marque alors un peu plus. La petite rivière se faufile dans les forêts odorantes, glisse entre les prairies et les champs de blé, de betteraves ou de maïs, coule sous le viaduc d’une voie de chemin de fer oubliée, serpente au milieu des villages qui l’ont jadis ornée de ponts et de lavoirs puis là-bas, quitte la vallée pour aller se jeter dans la Charente.
Là, loin des autoroutes et des trains à grande vitesse, loin des villes et des aéroports, on pourrait presque dire loin du monde, dans cette vallée un peu à l’écart, des femmes et des hommes vivent. Ici, les pierres et les arbres content des histoires. Châteaux et fermes fortifiées rappellent que maints pouvoirs féodaux se disputèrent cette région. Églises indestructibles et abbayes ruinées portent en elles les terribles guerres qui se menèrent au nom de Dieu ou des hommes. Cimetières et monuments aux morts gardent les traces de ceux qui tombèrent au siècle dernier, tout près ou très loin, au nom de la liberté ou d’idéaux moins présentables. Même les chemins creux les plus isolés se souviennent des bruits de bottes, des embuscades, des traversées silencieuses la nuit tout au long d’une ligne imaginaire qui coupait la vallée en deux zones, l’une libre et l’autre non.
Et l’Argentor conte aussi l’autre histoire, la petite, l’histoire quotidienne des gens ordinaires. Là, une enseigne presque effacée peinte jadis au-dessus d’une grange, aujourd’hui fermée, rappelle que les bourgs regorgeaient encore d’artisans, il n’y a pas si longtemps, lorsque l’agriculture et l’élevage nourrissaient toute une population. Ici, la petite usine installée à la sortie du village montre que si la vie n’est plus la même, si beaucoup de jeunes ont choisi de partir chercher du travail en ville, certains sont encore là et construisent chaque jour à leur mesure la nouvelle réalité rurale. La supérette a remplacé les épiceries d’antan. Les écoles se sont regroupées pour survivre. Les ruraux d’aujourd’hui regardent à la télévision les banlieues s’enflammer et ne comprennent pas pourquoi là-haut on s’obstine à vouloir fermer les écoles dans les villages. Sans doute pour nourrir le mirage urbain, pour pousser un peu plus les gens à quitter la campagne et à aller s’entasser en banlieue, dans de grandes cages de béton, où ils vivoteront entre les murs tagués, le magasin hard discount et l’antenne locale de Pôle Emploi, recréant au bord de l’autoroute les jardins ouvriers, ersatz de campagne qui leur rappelleront les jardins de leurs ancêtres. Pendant ce temps, dans la vallée de l’Argentor, les gens vivent leurs petites histoires de tous les jours, loin des projecteurs et des caméras. Ils aiment, ils souffrent, ils vivent, ils meurent, ils vont travailler ou chercher un travail.
Ce sont ces petites histoires, ces tragédies de hameaux, ces comédies de villages et ces destins immenses de héros de canton que nous retrouvons dans Les Mystères de l’Argentor .
« L’auteur devrait mourir après avoir écrit.
Pour ne pas gêner le cheminement du texte. »

Umberto Eco
Apostille au Nom de la rose




« Un poète mort n’écrit plus.
D’où l’importance de rester vivant. »

Michel Houellebecq
Rester vivant
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« La poésie crée le monde, car le monde ne devient visible qu’après avoir été nommé. C’est par l’intermédiaire de la langue qu’il se met à bouger, qu’il devient un processus auquel nous prenons part. La véritable poésie donne de nouvelles dimensions au monde. Elle est une invitation au voyage, tout comme elle nous invite à contempler calmement le continent mystérieux de ce qui est en nous, elle est avant tout – j’ai lu ça quelque part – une œuvre d’amour. »

Göran Tunström
Le buveur de lune

Décidément, je ne comprends rien au latin. Les quatre mots gravés au fronton de la petite église me laissent perplexe. En revanche, les sculptures sont superbes. Notre sentier commence un peu plus loin, derrière le cimetière.
Je ferme la voiture et j’embrasse la joue d’Aurélie. L’air frais lui fait rosir les pommettes. Nous n’en sommes qu’au début. Douze kilomètres et un dénivelé de six cents mètres. Déjà, je commence à peiner. Mais il y a son sourire, et pour le bonheur de la voir à côté de moi, je gravirais des montagnes.
Nous nous élevons au milieu d’une forêt de chênes et de hêtres, affirme Aurélie en levant les yeux du guide qu’elle glisse dans sa poche. Puis elle éclate de rire.
En plein hiver, difficile de faire la différence entre les espèces. Et puis je n’ai jamais été très doué en botanique. Autrefois, lorsque j’allais me promener derrière chez mes parents, je savais reconnaître à l’odeur les sous-bois où poussent les champignons. Maintenant, je crains d’être capable d’écraser un cèpe sans m’en apercevoir. Nous voilà arrivés sur la première crête. Ici, il ne faut pas nous tromper. Peu après le début de la descente, après deux lacets, nous devons laisser le chemin principal pour nous engager sur un petit sentier en direction du sud-est. Le paysage est vraiment beau. Au loin, vers La Malière, un curieux bâtiment émerge au milieu des arbres. Je me place derrière Aurélie et l’enlace en lui montrant les fines flèches gothiques dont les lignes parfaites tranchent singulièrement avec la roche brute qui surplombe la vallée. C’est un bâtiment privé, nous dit le guide, et il abrite la sépulture d’un religieux. Nous n’en saurons donc pas plus. Le sentier poursuit au milieu d’un bois de mimosas, puis d’une châtaigneraie, puis se faufile au milieu d’un maquis avant de s’accrocher en balcon à flanc de montagne.
Il est temps de souffler. La vue est magnifique. Aurélie s’assied à côté de moi sur un rocher entouré de figuiers de Barbarie et pose sa tête sur mon épaule. Je lui prends la main. Doucement, je pose mes lèvres sur les siennes et presse son cœur contre le mien. Le soleil fait briller ses rayons sur les hauts du plateau de Lambert. Tout à l’heure, nous allons y monter. Ce sera le clou de cette randonnée. Peut-être apercevrons-nous alors Notre-Dame-des-Anges ? Je voudrais rester des heures ainsi, à goûter la peau d’Aurélie, ma dame des anges.
L’ascension est ardue. Je souffle, je force, mais je résiste difficilement. Les muscles de mes jambes se tendent et se durcissent tandis que mes reins peinent à supporter le sac à dos. Aurélie a l’air d’être plus à l’aise. Elle grimpe comme une gazelle. À chaque lacet, je la vois disparaître derrière un arbre, et de longues secondes s’écoulent avant qu’à mon tour, je passe l’obstacle qui la voile à mes regards. Comment pourrais-je vivre sans la sentir là, devant moi, près de moi ? À chaque virage, elle a encore accru son avance.
Attends-moi !
Elle se retourne et sourit, avant de reprendre l’ascension.
Essaie de suivre !
Je pousse un peu plus sur mes jambes. Mes poumons me brûlent. Bon sang, je devrais moins fumer ! Et Aurélie continue à grimper, imperturbable.
Attends-moi, je n’en peux plus !
Le cri a jailli de ma bouche, presque suppliant, si fort qu’elle s’est arrêtée. Elle a les larmes aux yeux.
Je ne peux pas, Vincent ! Tu comprends ? Je voudrais tant, mais je ne peux pas.
Sa voix s’étrangle dans un sanglot et elle reprend son ascension. Je presse le pas, je cours presque, je glisse. Mes mains et mes genoux sont en sang à force de tomber, de me griffer contre les arbustes. Plus question de regarder dans le guide pour savoir de quelle espèce il s’agit. Je veux rejoindre Aurélie qui continue à monter devant moi, loin devant moi, de plus en plus vite. Elle semble s’envoler pour disparaître de plus en plus longtemps à chaque lacet.
Oh Aurélie ! Je t’en supplie, attends-moi !
Elle n’a pas entendu ou n’a pas voulu répondre. Elle s’est échappée là-bas, là-haut. J’ai beau aller du plus vite que je peux, je n’arrive plus à l’apercevoir. Je hurle, je l’appelle, mais je n’entends plus rien que l’écho. Aurélie, mon amour, mon bonheur, mes rêves. Aurélie ! Je suis en train de la perdre !
Je rampe sur ce sentier qui paraît ne jamais devoir finir. Les cailloux roulent sous mes pi

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