La Tragédie du Korosko
102 pages
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La Tragédie du Korosko , livre ebook

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Description

Un groupe cosmopolite de touristes, parti du Caire à bord du Korosko pour une croisière sur le Nil, est enlevé par une troupe de derviches musulmans fanatiques qui tentent de les emmener à Karthoum pour y être vendus comme esclaves. Suivent maintes péripéties, «pimentées» de considérations politiques tenues par des anglais, des français et des américains sur la présence militaire anglaise en Égypte et en Afrique en cette fin du XIXe siècle.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 août 2011
Nombre de lectures 194
EAN13 9782820604323
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0011€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La Trag die du Korosko
Arthur Conan Doyle
Collection « Les classiques YouScribe »
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ISBN 978-2-8206-0432-3
CHAPITRE PREMIER
Le public se demandera peut-être pourquoi les journaux n’ont jamais raconté l’histoire des passagers du Korosko. À une époque comme la nôtre, où les agences de presse scrutent tout l’univers à la recherche du sensationnel, il paraît incroyable que le secret ait protégé si longtemps un incident international d’une telle importance. Bornons-nous à dire que cette discrétion reposait sur des motifs fort valables, à la fois politiques et d’ordre privé. D’ailleurs, un certain nombre de personnes étaient au courant des faits ; une version de ceux-ci parut même dans un journal de province, qui s’attira aussitôt un démenti. Les voici maintenant transcrits sous la forme d’un récit. Leur exactitude est garantie par les dépositions faites sous la foi du serment par le colonel Cochrane Cochrane, du club de l’Armée et de la Marine, par les lettres de Mademoiselle Adams, de Boston, Mass., ainsi que par le témoignage recueilli au cours de l’enquête secrète menée au Caire par le Gouvernement auprès du capitaine Archer, des méharistes égyptiens. Monsieur James Stephens a refusé de nous communiquer par écrit sa version de l’affaire ; mais comme les épreuves de ce livre lui ont été soumises, comme il n’y a apporté ni corrections ni suppressions, nous sommes en droit de supposer qu’il n’a relevé aucune inexactitude matérielle, et que ses objections à notre publication se fondaient surtout sur des scrupules personnels.
Le Korosko avait une carène en carapace de tortue, l’étrave renflée, la poupe arrondie, un tirant de quatre-vingt centimètres et le profil d’un fer à repasser. Le 13 février 1895 il appareilla de Shellal, près de la première cataracte, à destination de Ouadi-Halfa. Je possède la liste des passagers de cette croisière ; la voici :
Colonel Cochrane Cochrane Londres.
M. Cecil Brown Londres.
John H. Headingly Boston, U.S.A.
M lle Adams Boston, U.S.A.
Miss S. Adams Worcester, Mass. U.S.A.
M. Fardet Paris.
M. et M me Belmont Dublin.
James Stephens Manchester.
Rev. John Stuart Birmingham.
M me Shlesinger, la nurse
et un enfant Florence.
Voilà quels étaient les touristes qui partirent de Shellal, avec l’intention de remonter les trois cent trente kilomètres du Nil nubien qui séparent la première cataracte de la deuxième.
Pays étrange, cette Nubie ! Sa largeur varie entre quelques kilomètres et quelques mètres, car son nom ne s’applique qu’à la bande étroite de terres cultivables. Verte, mince et bordée de palmiers, elle s’étend de chaque côté du large fleuve couleur de café. Au-delà, sur la rive libyenne, commence le désert sauvage qui se prolonge sur toute la largeur de l’Afrique. Sur l’autre rive, un paysage pareillement désolé s’étale jusqu’à la mer Rouge lointaine. Entre ces deux immensités arides, la Nubie s’étire le long du fleuve comme un ver de terre tout vert. Par endroits elle s’interrompt : le Nil coule alors entre des monts noirs et craquelés par le soleil ; des sables mouvants orange décorent leurs vallées. Partout on décèle des vestiges de races disparues et de civilisations submergées. Des tombeaux bizarres s’inscrivent sur le flanc des collines ou se découpent contre l’horizon : pyramides, tumuli, rocs servant de pierres tombales ; mais partout, des tombeaux. De-ci de-là, quand le bateau contourne une pointe rocheuse, on aperçoit sur la hauteur une ville abandonnée, des maisons, des murailles, des remparts ; le soleil passe à travers les fenêtres ou les créneaux carrés. On apprend que la ville a été édifiée par des Romains, ou par des Égyptiens ; à moins que son nom et son origine n’aient été irrémédiablement perdus. On reste stupéfait ; on se demande pourquoi une race humaine, quelle qu’elle ait été, a bâti dans une solitude aussi rude. On admet difficilement la théorie selon laquelle ces constructions n’ont eu d’autre but que de défendre l’accès de la plaine fertile contre les pillards et les sauvages du Sud. Mais en tout cas elles se dressent encore, ces cités silencieuses et rébarbatives ; et au sommet des monts, on peut voir les tombeaux où sont ensevelis leurs habitants ; de loin elles ressemblent aux sabords d’un cuirassé. Telle est la région mystérieuse et morte que traversent en fumant, bavardant, flirtant, les touristes qui remontent vers la frontière égyptienne.
Les passagers du Korosko s’entendaient bien entre eux ; ils avaient déjà fait presque tous ensemble le trajet du Caire à Assouan ; le Nil est capable de faire fondre toutes les glaces, y compris la plus résistante : l’anglo-saxonne. Ils avaient une chance inouïe : leur groupe était exempt de LA personne déplaisante qui, à bord d’un petit navire, suffit à gâcher l’agrément de tous. Sur un bateau à peine plus important qu’une grande vedette, un raseur, un cynique, un grognon tiennent à leur merci tous les passagers. Heureusement le Korosko n’avait rien embarqué qui ressemblait à un gêneur. Le colonel Cochrane Cochrane était l’un de ces officiers que le gouvernement britannique, conformément au règlement, déclare incapables de service actif à un certain âge, et qui démontrent la valeur du règlement en consacrant le reste de leur existence à explorer le Maroc ou à chasser le lion dans la Somalie. Brun, se tenant très droit, le colonel manifestait volontiers de la courtoisie déférente, mais son regard avait la froideur d’une commission d’enquête ; très soigné dans sa tenue vestimentaire, précis dans ses habitudes, il était gentleman jusqu’au bout des ongles. Pratiquant l’aversion des Anglo-Saxons pour les épanchements, il se cantonnait dans une réserve qui pouvait passer à première vue pour de l’antipathie ; mais il avait parfois du mal à dissimuler le bon cœur et les sentiments humains qui influençaient ses actes. À ses compagnons, de voyage il inspirait plus de respect que d’affection : tous avaient en effet l’impression qu’il n’était pas homme à laisser s’épanouir en amitié une relation de croisière ; pourtant, une fois accordée, cette amitié devenait partie intégrante de lui-même. Sa moustache était grisonnante, très militaire ; mais il avait gardé des cheveux extraordinairement noirs pour son âge. Dans la conversation il ne faisait jamais allusion aux nombreuses campagnes où il s’était distingué ; il expliquait cette discrétion en disant qu’elles remontaient au début de l’ère victorienne, et qu’il sacrifiait sa gloire militaire sur l’autel de sa jeunesse immortelle.
Monsieur Cecil Brown (je prends les noms dans l’ordre de la liste) était un jeune diplomate qui appartenait à une ambassade sur le continent ; n’ayant pas tout à fait rompu avec le style d’Oxford, il péchait un peu par excès de subtilité, mais sa conversation était fort intéressante et témoignait d’une culture certaine. Il avait un beau visage triste, une petite moustache qu’il cirait soigneusement aux extrémités, une voix grave, et une négligence d’attitude que compensait une charmante façon de sourire lorsqu’il se laissait aller à sa fantaisie. Il s’efforçait de contrôler par un scepticisme railleur ses enthousiasmes juvéniles bien naturels ; dans ce cas il tournait le dos à l’évidence pour exprimer des idées qui choquaient le premier venu. Pour le voyage il avait emporté des livres de Walter Pater, et il restait assis toute la journée sous la tente avec un roman et son carnet de croquis à côté de lui sur un tabouret. Sa dignité personnelle lui interdisait de faire des avances aux autres, mais si ses compagnons décidaient de venir lui parler, il se révélait aussi courtois qu’aimable.
Les Américains avaient constitué un groupe à part. Originaire de la Nouvelle-Angleterre et diplômé de Harvard, John H. Headingly complétait son éducation par le tour du monde. Il symbolisait parfaitement le jeune Américain, vif, observateur, sérieux, assoiffé de savoir, et à peu près libre de préjugés ; animé d’un beau sentiment religieux, nullement sectaire, il gardait la tête froide au sein des orages soudains de la jeunesse. Il semblait moins cultivé que le diplomate d’Oxford ; en réalité il l’était davantage, car ses émotions plus profondes contrebalançaient des connaissances moins précises. Mademoiselle Adams était la tante de Mademoiselle Sadie Adams : vieille fille de Boston, petite, énergique, ingrate de visage, elle comprimait difficilement une grande tendresse inemployée ; c’était la première fois qu’elle quittait l’Amérique, et une tâche entre toutes la passionnait : hisser l’Orient a

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