La valse des crabes
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La valse des crabes , livre ebook

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Description

Peut-on tout prévoir à travers une boule de cristal ?

Informations

Publié par
Date de parution 17 mars 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312034027
Langue Français

Extrait

La valse des crabes
R. V. Slayd
La valse des crabes









LES ÉDITIONS DU NET 22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes
© Les Éditions du Net, 2015 ISBN : 978-2-312-03402-7
La petite maison dans la prairie
Par un beau mois d’octobre resplendissant dû à un exceptionnel été indien, dans un petit vallon au ton ocre parsemé de quelques taches rouges faites par les feuilles d’érables, se dessinait une grange isolée de tout. Nulle construction, ni route ou poteau télégraphique, ne gâchait ce tableau. Une peinture que des grands maîtres du fauvisme auraient pu décrire de leurs pinceaux trempant dans leurs gouaches bigarrées, ce genre de toile que les grands musées exposeraient à l’écart, seule, pour ne pas altérer son éclat. Une journée ensoleillée dont seule cette saison tardive pouvait nous ravir. Pourtant, en se rapprochant, on pouvait percevoir comme une conversation quelquefois couverte par le bruit lointain d’animaux de ferme. Mais en tendant bien l’oreille et de plus près, la discussion prenait plus de sens, et son postulat philosophique apparaissait :
« Alors, Karpov ! Toujours convaincu de faire de gros profits avec les prédictions de Madame Olga ?
– Ah ! suffit Alexis, profite des derniers instants de répit et d’oxygène qu’il te reste.
– Comment peux-tu parler de répit, on est enterrés jusqu’au cou dans cette grange en attendant que les grands patrons fassent entrer les cochons qui vont nous dévorer la tête vivants. Je souhaite que les porcs te chient dessus avant de te bouffer, Grand Chef. Écouter une ancienne prostituée bulgare reconvertie en voyante ! Tu as vraiment cru à ton histoire : récupérer des affaires apportées par cette femme ? "Tu comprends Alexis, parmi les déprimés qu’elle a comme clients, certains ont de l’argent, d’autres sont en attente d’un héritage, sans parler des bonnes femmes qui veulent savoir si leur amant fortuné va laisser leur bobonne pour vivre avec elle. Olga a toujours su tirer des renseignements aux gens. Sans compter ces femmes esseulées qui attendent le prince charmant…"
– Grâce à leur déprime, on a pu en amener certaines dans des bordels en Turquie. Tu vois Alexis, il faut savoir ratisser large. C’est pour ça que je suis chef ! Eh oui ! ratisser large, et c’est pour ça que toi tu nettoies la merde.
– Ratisser large ! Ratisser large ! Eh bien, la merde c’est toi qui va l’avoir sur la tête Karpov !
– Toi aussi mon petit Alexis, toi aussi !
– Si je n’étais pas enterré jusqu’au cou, je viendrais te pisser dessus.
– Ah ! Ah ! des promesses, moujik », sourit Karpov.
Un mois plus tôt
« Madame Olga ? Bonjour, c’est moi qui ai pris rendez-vous hier.
– Bonjour, asseyez-vous dans ce fauteuil et mettez-vous à l’aise, dit-elle d’une voix douceâtre, que puis-je pour vous ? »
L’homme s’assit dans un vieux fauteuil, découvrit le cabinet de voyance un peu comme il l’avait imaginé, rococo avec une forte imprégnation slave. Une lampe de bureau à l’abat-jour en pâte de verre colorée, peut-être un Lalique, éclairait la pièce dont les fenêtres étaient occultées par d’épaisses tentures chamarrées.
« Voilà, je pense que tout le monde vous demande de lui prédire l’avenir.
– Je ne prédis pas, je vois des choses. » Elle sortit sa tirade avec un regard hautain qui n’impressionna guère son visiteur.
« Certes ! Ma démarche est un peu différente.
– Ah ?
– Oui, je connais une part de mon avenir, enfin mon devenir plutôt. »
La voyante fronça les sourcils.
D’un rapide coup d’œil, elle détailla son visiteur. Un homme ayant la quarantaine ou la cinquantaine, assez difficile à dire. Il était assez grand, peut-être 1,80-1,85 mètre. Une paire de jeans sombre de bonne facture sur des boots de biker, une chemise grise à pressions, par-dessus un blouson en croûte de cuir façon pilote de chasse. Des yeux sombres et profonds enchâssés dans un visage au teint hâlé.
« Disons que je sais quand mon train va arriver. Non ! Laissez-moi continuer, je n’ai jamais eu de chance dans la vie, et ce, dans tous les domaines. Ce que j’ai eu, je me suis battu pour l’avoir. Mais j’aimerais savoir si quelques petites opportunités me seraient accordées avant.
– Avant ?
– Oui, avant la tombée finale du rideau. Ne vous échinez pas à me dire l’échéance, je ne suis pas là pour ça et je la connais.
– Ah ! Je vous remercie, dit-elle en respirant mieux, mais que souhaitez-vous exactement ? D’abord, est-ce que vous, vous croyez à la voyance ?
– Ah ! Vaste sujet. En fait pas vraiment, mais je suis pris par le temps, et prenant la vie du bon côté je souhaite profiter de mes derniers instants pour découvrir de nouveaux plaisirs, et si je pouvais, éviter de gâcher chaque moment.
– Oui, en somme vous voulez découvrir la voyance !
– Non, non je veux juste que vous me conseilliez sur les choix de sorties, de voyages, de rencontres, voire de placements.
– De placements ? »
La voyante se redressa et rectifia sa voix d’un ton plus suave :
« De placements vous dites. Oh ! excusez-moi, j’en ai oublié mes devoirs de maîtresse de maison. Vous désirez un thé, un café ?
– Un café, vous êtes bien aimable. Oui, je disais choix de rencontres, mais pourquoi pas, comme vous le suggériez, découvrir la voyance, cela pourrait être intéressant, mais je n’ai aucun don. »
Il remarqua, quand elle sortit de la pièce, ses longues jambes fuselées au bout d’une taille étroite enserrée dans une jupe fendue noire qui lui faisait ressortir un fessier ressemblant à une pomme ferme surmontée d’une cambrure de reins qui aurait pu laisser croire que son âge était plutôt situé aux prémices de la trentaine qu’à la fin de la quarantaine.
En s’éloignant, elle ressemblait plus à un mannequin de vingt-huit ans qu’à une voyante mature telle que l’on pourrait se l’imaginer. Sa chevelure rousse ondulée et fournie faisait penser à ces actrices américaines des années cinquante qui ont fait fantasmer plus d’un homme.
Il eut tout le temps de l’observer quand elle revint de l’office de sa démarche qui mettait en valeur son buste – buste qui aurait pu prétendre à certains concours.
S’il n’avait point été là pour d’autres raisons, il aurait été tenté de la séduire, car une certaine émotion s’emparait de lui.
« Ne dites pas ça, tout le monde est un peu médium. Ce don en soi est très faible certes, mais personne ne cherche à le faire évoluer, dit-elle en le jaugeant, je pressens en vous une fibre plus perceptible.
– Ah, vous croyez ? Je peux fumer ?
– Certainement ! »
Il ouvrit sa besace en cuir patiné pour prendre un paquet de cigarettes blondes américaines.
Il laissa négligemment le sac entrouvert, laissant dépasser un papier à en-tête certainement à son nom « Herman Melvil, marchand de biens ».
Il tendit le paquet à la voyante.
« Vous fumez ? »
Madame Olga se pencha par-dessus le maroquin de son bureau, les doigts glissant le long de la main et du paquet de cigarettes, et l’œil sur la besace.
Il aperçut à ce moment sur son cou quelques petites rides autour d’une vague cicatrice qui devait dater de deux, trois décennies. Son visage était d’une beauté radieuse, elle avait des yeux clairs cernés de fines ridules, marques du temps, mais qui devaient souligner son regard lorsqu’elle souriait.
Décidément, il y a pire comme diseuse de bonne aventure. Au moins si ses prédictions se révélaient être du domaine de l’escroquerie, il en aurait eu pour son argent, rien que pour la plastique.
« Merci ! Ah, il y a longtemps que je n’ai pas croisé d’homme de votre standing !
– Diantre ! sourit-il, je me sens flatté.
– Mon ami, permettez-moi de vous prendre les mains », dit-elle en posant sa cigarette dans un énorme cendrier en cristal provenant d’un quelconque bazar. Elle ferma les yeux, sembla très pénétrée, pressa fortement les mains et dit d’une voix rauque et suave :
« Je sens que vous avez beaucoup voyagé, surtout pour affaires, vous aimez l’art, le raffinement, mais en même temps vous êtes un aventurier prêt à affronter n’importe quel danger.
– Fichtre ! Vous m’épatez ! Vous déballez l’essentiel de mon panégyrique, mais j’ai oublié de me pr&

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