Le goût de l autre
168 pages
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Le goût de l'autre , livre ebook

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Description

Un roman aux frontières des mondes, des genres, de l’être. À les traverser ou à rester sur sa rive.
Le destin croisé de deux femmes, entre Paris et Tokyo, où chacune explore les limites, les forces de l’amour. De la passion au deuil. Du désir à l’amnésie, en passant par l’attente, l’absence, un trop plein de présence, jusqu’à atteindre ce seuil où pas même l’imaginaire aurait pu leur murmurer.
La douceur ou la douleur du réel. Avoir aimé à perdre, à retrouver, sans en savoir plus.

Informations

Publié par
Date de parution 03 octobre 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312055312
Langue Français

Extrait

Le goût de l’autre
Michèle Gautard
Le goût de l’autre
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2017
ISBN : 978-2-312-05531-2
À Joachim,
« Dans quelques années, quand je t’aurai oubliée,
et que d’autres histoires comme celle-là,
par la force encore de l’habitude, arriveront encore,
je me souviendrai de toi comme de l’oubli de l’amour même.
Je penserai à cette histoire comme à l’horreur de l’oubli. »
Marguerite Duras
De la fenêtre de sa chambre d’hôtel Jochen Böhme regardait tomber la pluie
Les gouttes glissaient le long de la paroi de verre
Il pensait à la scène qu’il allait tourner
À quelle distance du personnage poser sa caméra
Arrêt sur image
Cette fois il la tenait
Gros plan
Les traits de l’homme s’y prêtaient
Ses films s’ancraient dans la réalité du monde
Véracité
Il s’y efforçait
Ligne de conduite aux contours sinueux
Altérée par endroits
Il savait subtilement gommer les frontières
Hors champ
Tout pouvait se passer
Chaque film prenait sa source dans la même émulsion
Intarissable matière
Les mystères de l’univers
L’icône qu’il était devenu arpentait le globe
Sans relâche
Ce qu’il en ramenait n’avait rien de nouveau
Mais sa lecture suffisait pour satisfaire son public
Sa voix se faisait l’écho des gouffres les plus profonds
Son imaginaire donnait du relief aux plaines
Son souffle révélait les hauteurs vertigineuses de l’Himalaya
Être à la page de la vie terrestre
Il fallait suivre le courant de la fonte des glaces
Le cycle infernal des ouragans
Des tremblements de terre
Et autres tsunamis
Montrer avec la même force
La transhumance humaine
Sur les hauts plateaux
Les anciens devaient toujours aller plus haut
L’homme moderne
Mercantile
Repoussait sans cesse leurs limites
Nostalgie des temps passés
Les coutumes s’ancraient dans les cœurs
Même les plus altérés
De bouche en bouche l’histoire humaine se tissait
L’image tentait de la fossiliser
La vie résistait
Les observatoires poussaient sur les montagnes les plus sacrées
Il filmait
Évolution technologique sur fond de décor ethnique
Il engrangeait
La flûte de pan criait du haut des montagnes sa souffrance
Il enregistrait
En Europe
On aimait bien cette musique surannée
L’âme des anciens crevait les écrans du prime time
Auguste nature
Il fallait la préserver
On venait tout juste de le comprendre
Il leur offrait une tribune
Difficile de raconter leur histoire en si peu de temps
Le sien était compté
L’antenne n’attendait pas
Il fallait mettre en boîte
45’ de matière
Pas plus
Qui pourrait entendre leurs cris derrière ce verre opaque
Ils n’avaient pas fait tout ce chemin
Mené toutes ces luttes
Pour pareille mascarade
Lui aussi avait fait un long voyage pour parvenir jusqu’à eux
Les premiers se mettaient à parler
Les autres suivaient
Il était satisfait
Flux incessant
Les images dégoulinaient des téléviseurs
Les siennes s’y mêlaient
À cette heure de grande écoute
On ne reculait devant rien
Lui aussi avait ses guerres tribales
Ses libres échanges faisaient bonne audience
On était à l’autre bout du monde
En plein repas
Par moment
Les bouches s’arrêtaient de mastiquer
Les verres restaient en apesanteur
Foyers percale
Satin
Ou polyamide
Tous écoutaient la parole du chef de clan
Champ contre champ
La science reprenait la place de son temps
Les assiettes et les verres se vidaient
L’indien des hauts plateaux
Il s’en servirait plus tard
Avant le dessert
Tenir en haleine
Il y avait tant d’autres images devant lesquelles ils pourraient finir leur repas
Le temps lui avait donné gain de cause
Il avait peu à peu trouvé son public
Chaque semaine il s’invitait à leur table
À présent qu’il les tenait
Ne jamais décevoir
La flamme de son regard était devenue un label
Battements de cils
Sourire
À peine esquissé
La fossette marchait à tous les coups
Ne pas en abuser
Elle lui servait dans les moments difficiles
Filmer
Sans jamais s’arrêter
Les pauses étaient des failles
Le public s’y engouffrait
Une image passait
D’instinct il la suivait
S’entichait de nouveaux visages
La réponse à leurs rêves
À leur imaginaire
Leur somnifère
Pour sortir de l’ordinaire
L’autel du prime time n’épargnait personne
Depuis la nuit des temps les temples s’érigeaient
Les icônes se succédaient
Les rituels se substituaient
Les gloires se diluaient
Ceux qui perduraient gagnaient quelques siècles
Parfois un ou deux millénaires
Les foules aimaient les corps qui s’exposaient pour elles
Vies brisées au sommet d’une gloire illusoire
Tous rêvaient d’éternité
*****
La pluie continuait de tomber
Jochen s’accrochait à l’image de celui qu’il allait filmer
L’homme devait parler
Son témoignage
Capital
Le convaincre lui avait demandé grande énergie
Tout ce temps
Ne pas l’anéantir pour un effet de style
Être à l’écoute
Une fraction de seconde et l’instant de vérité échappait
S’évaporait
Laissant une infime trace de buée sur la pellicule
Brise d’une parole zéphire
Murmurée
Peut-être même jamais prononcée
La buée devenait larme
Non
Ce n’était pas de la fiction
Gouttes de pluie déferlaient sur la vitre
L’une d’elles
Un peu plus grosse
S’arrêta à hauteur de regard
Elle glissa lentement le long de la paroi de verre
S’étira
Se dédoubla
Il hésita
Il choisit de suivre la plus petite
Dans cette infime matière il cherchait à entrevoir le reflet d’un nouveau plan
Une fraction de seconde
Il détourna le regard
Une autre goutte arriva à vive allure
Absorbant celles qu’il venait de suivre
Une odeur de parfum envahit soudainement la pièce
Non
Elle n’allait pas revenir
Troubler une nouvelle fois son œuvre
Violaine
Ma Violaine
Sa longue chevelure brune
Ses yeux d’un vert céleste
Iridescents
Inhabituelle lueur
Vertigineuses profondeurs
Un court instant
Ils s’étaient posés sur lui
Ce temps avait suffi
Ses lèvres terre de Sienne se dessinaient sur la vitre
Violaine
Une folle envie de t’embrasser
De poser ma main sur tes joues poudrées
Cet artifice me rassurait
Tu étais comme les autres
Que s’est-il passé ?
Tes couleurs artificielles se sont peu à peu diluées dans les battements d’un cœur
À finir par l’entendre
Je ne suis pas fait pour ce genre de partition
J’ai traversé volcans et autres ouragans
Neiges polaires et déserts brûlants
Toi
Tu n’es rien en comparaison
De toutes ces luttes
Infime plaisir
Dans ma vie d’homme
Non
Ne t’en va pas
J’ai besoin de toi
Ma Violaine
Ma chimère
Comme une encre blanche
Tu effaces tout
Un baume
Une déchirure
Singulière tissure
Un état intérieur
Où jamais je ne m’aventure
Un reflet de ce que je ne suis pas
Et que ta simple réalité me pousse à vouloir devenir lorsque je suis à tes côtés
Fragment salvateur
Dévastateur
Il me faut t’oublier
Mes contours n’ont pas d’au-delà
Tu m’absorbes
Tu me reconstitues
Une entité qui me pulvérise
Brise mes fondamentaux
Moi qui croyais si bien me connaître
Intérieur
Grand trou noir
Prêt à engloutir tout ce que j’ai bâti
Emouvantes retrouvailles que furent pourtant ces instants de grâce passés auprès de cet inconnu qui portait mes traits
À tes côtés
Il s’épanouissait
La peur de ne plus me retrouver
Fuir
Nos veines sont si friables
Lorsque les sentiments
Un besoin de sentir la terre ferme
Avec toi
Si aérienne
À parfois me donner

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