La lecture à portée de main
278
pages
Français
Ebooks
2011
Écrit par
Num_Onevision
Publié par
L'Harmattan
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Ebook
2011
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Publié par
Date de parution
01 septembre 2011
Nombre de lectures
91
EAN13
9782296281394
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
2 Mo
Publié par
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01 septembre 2011
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91
EAN13
9782296281394
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
2 Mo
LES FAUXSAULNIERSÉditions duSandre
57, rue duDocteurBlanche
75016ParisGÉRARDDENERVAL
LES FAUXSAULNIERS.
HISTOIREDEL’ABBÉDE BUCQUOY
Édition deMichelBrix
Éditions duSandreINTRODUCTION
parMichelBrix
Les FauxSaulniers deNerval sont un texte à la fois bien et mal
connu.Bien connu,parcequel’auteura distribuélaplusgrandepartie de ce
récit dans ses œuvres les plus lues (LesFilles duFeu etLesIlluminés,
principalement, maisaussi, pour de plus courts passages, Lorely et La
Bohême galant e).Mal connu, car ledit récit, dont on croit tout savoir
— et dont on ignore souvent qu’il renferme des passages qui n’ont jamais
été repris parNerval —, s’est trouvé délaissé par les éditeurs,au point
qu’en un siècle et demi il n’a pas faitl’objet de la moindre réédition isolée ;
de surcroît, on ne le trouveau sommaire que d’un seul recueil d’Œuvres
1ou d’Œuvres complètes .Situation dommageable : ce texte constitue
tout ensemble le creuset des chefs-d’œuvre nervaliens et un modèle de récit
excentrique en français; il propose en outre d’amples considérations sur
l’autobiographie moderne et développe une réfexion complexe sur le rôle
de l’écrivain dans la société.Pour toutes ces raisons,LesFauxSaulniers
méritent d’être connus etanalysés dans l’immédiateté et la totalité de leur
jaillissement, et non seulement à travers leurs membra disjecta.
Nerval rhapsode
Les Faux Saulniers ont paru dans le feuilleton du quotidien Le
National, entre le 24 octobre et le 22 décembre 1850.Le récit s’articule
autour de la recherche d’un livre consacré à l’abbé de Bucquoy, — qui
vécut sous le règne deLouisXIV et dont la vie consista en une succession
d’incarcérations et d’évasions. Nerval avait promis depuis un certain
temps, semble-t-il, au directeur du National de lui fournir un essai
biographique sur ce personnage.Dès le premier feuilleton, le 24 octobre,
l’auteur prend la parole, cependant, pour expliquer qu’ila vu récemment
7àFrancfort le livre surBucquoy dont ila besoin pour composer son récit,
mais qu’il a négligé alors de l’acheter, pensant le retrouver facilement à
Paris.Or, àParis, précisément, et contre touteattente, le fameux ouvrage
se dérobe à toutes les tentatives de l’auteur pour mettre la main dessus.
Il faudrait pourtant le retrouver, et impérativement — continueGérard
—, puisque un amendement à des lois toutes récentes, de juillet 1850,
sur la presse (l’amendementRiancey) prévoit d’imposeraux journaux qui
publient des romans une redevance supplémentaire, de nature à mettre en
péril l’existence de ces périodiques.L’amendementRianceya évidemment
un caractère prohibitifet place les écrivains, observe encoreNerval, dans
l’obligation de ne plus rien inventer et de limiter leurs collaborationsaux
journaux à des analyses historiques. D’où la nécessité pour Gérard de
retrouver le livre, quiattestera que le récit donnéauNational, et qui ne
manquera pas d’être examiné de près par les censeurs, ne s’éloigne pas du
compte rendu de faits matériellement vrais.
Ainsi, les deuxtiers desFauxSaulnierssont occupés parles préparatifs,
oulespréliminaires,durécitannoncé,cetteHistoiredel’abbédeBucquo y
à laquelle seront consacrésseulement les derniers feuilletons, au mois de
décembre, lorsque le précieux ouvrage aura enfn été acquis. L’auteur fait
patienter ses lecteurs et« meuble» les feuilletons en narrant les recherches qui
lemènent dansles bibliothèquesparisienneset chezleslibraires,etlefontmême
sortir deParis.Il s’aviseaussi de retranscrire, parmorceaux, lesaventures
d’unejeunefemme,Angélique deLongueval, qu’ilprésente comme
unegrandtante de l’abbé: le manuscritretraçant cesaventuresest conservéauxArchives
et cettehistoireest donc « vraie incontestablement» (p. 87),commeNerval
invite les censeursà le vérifer.
Au furet à mesure de l’avancée des FauxSaulniers, pourtant, il
devient manifeste que l’auteur tend à oublier le motif desa quête, ou à
fairepasser celle-ciau second plan.On le voit notamment entrecouper son
récit par des réponses à des confrères qui l’ontattaqué pour desarticles
qui n’ont même pas paru dans LeNational. De même, lorsque, à la
bibliothèque deCompiègne, un recueil de chansons composé parRousseau
lui tombe sous les yeux, il décide de se rendre à Ermenonville : il n’y
a pourtant aucune apparence qu’un exemplaire du livre sur Bucquoy
l’attende là-bas ! À l’évidence, Gérard éprouve un certain plaisir à
8parler de lui-même et le soupçon naît rapidement que notre auteur fait
en sorte de ne pas retrouver le livre trop vite. Du reste, il semble se
contenterassez rapidement de la perspective de voir et d’acheter l’ouvrage
à la fn de novembre, lors d’une vente publique (la vente «Motteley »,
en faitMaréchal) où celui-ci doit être présenté et où l’auteur l’acquerra
effectivement. Et on note aussi qu’il choisit de négliger l’existence d’un
ouvrage présentant un texte identiqueau «Bucquoy » mais portant un
titre différent (dans le recueil desLettres historiques et galantes de
MmeDunoyer) ; de même, pour des raisons peu claires, il s’abstient de
chercher le livre à la bibliothèque de l’Arsenal.
L’intérêt se trouveainsi déplacé, du livre, qu’on ne se soucie plus trop
de trouver, vers la recherche du livre.Et celle-ci est l’occasion de causeries
personnelles, de digressions et d’incidentes, de commentaires divers et
volontiers métanarratifs, de conversations à bâtons rompus, d’allusions
littéraires, d’impressions de lectures, de récits de souvenirs et de fctions
cocasses, enfn de comptes rendus de fâneries dans leValois, qui relèvent
presque du vagabondage et dont le rapportavec l’objet initial des Faux
Saulniers semble des plus ténus.De là un récit où le narrateur se soumet
avec délicesaux caprices du hasard et qui paraîtavoir été composéau jour
le jour,avec des interruptions, desassociations libres, des sautsabrupts
du coq à l’âne.Narration et promenades valoisiennes suivent un même
parcours faitde méandres, de coudes, de zigzags et de retours enarrière.
Nerval tenait manifestement à cette impression de rédaction décousue,
spontanée, discontinue, improvisée, et faiten sorte de laisser croire aux
lecteurs qu’il rédige son feuilletonau furet à mesure de ses déambulations
2— ce qui, pour une partau moins du texte, est tout à faitexact — et
qu’il ignore lui-même ce qu’il pourra bien écrire le lendemain.De même
l’auteur fait mine, dans le feuilleton du 17 novembre, de ne pas savoir
3ce que LeNational a imprimé du texte qu’il lui a envoyé la veille ;
et on note aussi qu’il est question des lenteurs de l’acheminement du
courrier, entre le Valois et Paris, qui retarderaient l’arrivée au journal
4du texte des feuilletons nervaliens . Par surcroît, des lettres de lecteurs,
qui essaient d’aider l’auteur dans sa quête ou rectifent une erreur, sont
accueillies et commentées parGérard dans le corps même du feuilleton.La
direction duNational sembleaussiavoir joué le jeu.Ainsi, les feuilletons
9s’interrompent plusieurs jours avant la date de la vente publique, et le
journal publie le 24 novembre l’avis suivant : «Désireux de donner
enfn à nos lecteurs l’Histoire de l’abbé deBucquoy,M.Gérard de
Nerval désire consacrer tous ses instans à la poursuite de son insaisissable
héros.Nous nous rendons aux vœux de l’historien, et nous suspendons
le cours de son récit jusqu’au jour où il aura retrouvé ce livre, qui ne
saurait longtemps encore échapper à ses persévérantes recherches. »On se
surprend d’ailleurs à se demander comment l’auteuraurait terminé son
récit s’il n’avait pu acquérir le livre — ce qui était après tout possible
— lors de la vente «Motteley ».
Les Faux Saulniers constituent ainsi un bel exemple
d’«anti5roman » et ont confrmé l’image de Sterne français, d’humoriste, d