LES PETITES FILLES ET L OUED
160 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

LES PETITES FILLES ET L'OUED , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
160 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Un Maroc tout en poésie, comme une aquarelle, avecles montagnes en toile de fond et l’oued qui tientpresque lieu de personnage !Dans ce roman, sous la forme d’une histoire policière vue à travers des yeux d’enfants, l’auteure nousentraîne à la poursuite des « petites filles », sur lessentes caillouteuses des environs de Ouarzazate…La vie y est rude mais pleine de tendresse. Il estquestion de rapports hommes femmes qui se mettenten place dès l’enfance. L’amour et la haine se tiennentpar la main. Presque naturellement, le désir, la jalousieet la peur, dans l’omniprésence de la hachouma, vont engendrer souffrance et drame.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2012
Nombre de lectures 1
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les petites fiLLes et L'ouedEditions
© Marsam - 2012
Collection dirigée par Rachid Chraïbi
6, rue Mohamed Rifaï (Place Moulay Hassan ex. Pietri) Rabat
Tél. : (+212) 537 67 40 28 / 67 10 29 / Fax : (+212) 537 67 40 22
E-mail : marsamquadrichromie@yahoo.fr
Site web : www.marsam-editions.com
Compogravure flashage
Quadrichromie
Impression
Bouregreg - Salé
Dépôt légal : 0465 / 2012
I.S.B.N. : 9954-21-277-6dounia Charaf
Les petites fiLLes et L'ouedDu même auteure
• L'Esclave d'Amrus, l’Harmattan 1992.
• Fatoum, la prostituée et le saint, l’Harmattan1998.
• Mbark et Juliette, le mystère des colons allemands, l’Harmattan 2006.
• La première enquête de Mbark, nouvelle, parue aux Editions
Marsam, 2009 dans Côté Maroc tome 6.
• La maison de Mama Ghoula, roman, Editions Marsam, 2010.
• Les petites filles et l'oued, Editions Marsam, 2012.Ce livre est particulièrement dédié
à ma très chère amie et belle-sœur Gisela,
à l’occasion de son cinquantième anniversaire,
et à l’occasion de nos retrouvailles niçoises. Couverture
Meriem Mezian
Village au bord de l'oued (détail)
huile sur toile, 85 x 100 cmSommaire
Chapitre 1 9
Chapitre 2 17
Chapitre 3 23
Chapitre 4 33
Chapitre 5 39
Chapitre 6 47
Chapitre 7 53
Chapitre 8 59
Chapitre 9 65
Chapitre 10 69
Chapitre 11 73
Chapitre 12 79
Chapitre 13 87
Chapitre 14 93
Chapitre 15 101
Chapitre 16 107
Chapitre 17 113
Chapitre 18 125
Chapitre 19 131
Chapitre 20 137
Chapitre 21 145
Chapitre 22 151
Chapitre 23 155
Glossaire 159 9
Chapitre 1
Lundi matin : la semaine recommence.
Kébira se tient à l’entrée de la maison, hésite à
refermer la porte. L’hiver lui semble si long avec ses
nuits interminables.
La fin de la nuit se serre contre elle, lui souffle de
l’air froid sur la nuque et le dos. Des ombres épaisses
obscurcissent les recoins de la ruelle. Elle se tourne
à nouveau vers la cour intérieure : Kébira n’aime
pas cette vieille maison de terre délabrée, mais à cet
instant elle lui paraît plus familière et plus protectrice
que le trajet qui l’attend à travers le village et les
jardins encore emplis de nuit.
Sa grand-mère est retournée se coucher après la
prière de l’aube et ne se soucie plus d’elle. La vieille
femme a accepté que sa petite fille continue à aller
en classe, mais ne songe pas au trajet par ces matins
d’hiver sur les sentes caillouteuses du bourg. Aller en
classe...
Kébira se redresse et tire enfin la porte, écoutant
son claquement avec angoisse. Elle fait face au village
et n’en voit qu’une succession de masses sombres, 10 Les petites filles et l'oued
des maisons silencieuses et pour beaucoup, vides et
abandonnées, tombant en ruines. Kébira ajuste son
sac à dos sur ses épaules et s’élance avec précaution
dans la rue qui mène vers l’école.
Elle baisse les yeux, moins pour regarder où elle
met les pieds puisque que dans cette campagne il n’y
a pas d’éclairage, que par crainte d’une apparition
maléfique. Une porte claque à quelques pas, un rire
retentit. Kébira s’arrête, terrifiée, puis se met à courir.
Le rire retentit encore, un rire de femme peut-être,
plus sûrement de djinn. Vaguement familier, elle l’a
déjà entendu à plusieurs reprises.
En trébuchant, avec de vifs élancements aux
chevilles, Kébira émerge de l’ombre alors que la rue
s’évase, débouchant sur une petite place. Elle aperçoit la
silhouette de son amie Hassiba qui attend. Kébira s’arrête
en face d’elle, le souffle court, les pieds endoloris, mais
soulagée de n’être plus seule dans la nuit.
Sans un mot, Hassiba lui prend la main et l’entraîne
vers le bas du village, le pied sûr, habituée à marcher
dans les rues défoncées et caillouteuses de cette
campagne désertique.
Bientôt leur apparaissent les montagnes qui à l’est,
pâlissent peu à peu alors qu’elles-mêmes cheminent
dans l’obscurité. Kébira sait qu’elles ont le temps
d’arriver avant le début de la classe. Si, elle, se
dépêche pour fuir le noir, son amie fuit autre chose.
Kébira se retourne vers l’arrière mais personne
n’est là. Elles ne rencontreront pas d’autres enfants
avant le fleuve, il n’y a plus d’enfants qui vivent dans Chapitre I 11
les maisons du vieux village. Ils n’y montent presque
jamais.
« Il n’est pas là, souffle Kébira à Hassiba, il ne
nous suit pas. »
Hassiba ralentit un peu, ce qui permet à Kébira
de tâtonner avec ses pieds pour essayer de ne plus
trébucher dans les trous de la rue.
Kébira a peur de rencontrer des êtres surnaturels,
Hassiba a peur de rencontrer son oncle Brahim.
— Il vient si tôt chez vous ?
— Tu vois !
— Alors que vous êtes encore entrain de dormir ?
Ce n’est pas poli !
— Il vient pour ses vaches. On partage la cour et
l’étable. C’était la maison de mon grand-père. Nous,
on a pris les chèvres, lui les vaches.
— Il se lève tôt, je trouve.
— Oui, (et tout bas de peur d’être entendue en train
de proférer des mots pareils sur sa propre famille…)
Dieu l’envoie en Enfer ! Tu as apporté quelque chose
à manger ? demande-t-elle enfin.
Kébira se contente de fouiller dans sa poche et en
sort une barre de biscuits chocolatés, de ceux qu’on
achète à l’épicerie pour un dirham. Elle sait que si
Hassiba est sortie si vite pour ne pas rencontrer son
oncle, elle n’a pas eu le temps de manger. Pendant
que son amie grignote la friandise, Kébira observe les
alentours qu’elle commence à reconnaître, maintenant
qu’elles émergent des maisons et que la lune les
éclaire. 12 Les petites filles et l'oued
Elles vont aller jusqu’à l’oued en empruntant un
chemin escarpé au milieu des jardins, puis traverser
une longue plantation de roseaux qui forme un épais
tunnel, avant d’arriver au gué et de le traverser. Puis
elles remonteront l’autre berge vers l’école en passant
par le terrain aux chiens, cet endroit dont son amie
dit, avec une simple moue désapprobatrice : « C’est
des gens qui élèvent ces chiens ici, ils les laissent là,
et ils attaquent les gens. »
Peut être ce matin seront-ils allés chasser ailleurs?
Depuis son arrivée à Tiyout, Kébira se demande si sa
maman sait que la route pour aller à l’école fait peur.
Elle a renoncé à lui en parler. Elle comprend qu’il ne
faut pas l’inquiéter.
— On a contrôle de grammaire ce matin, tu restes
pour les exercices de mathématiques après la classe ?
demande-t-elle à Hassiba.
— Non, mon oncle ne veut plus qu’on paie le
maître pour ça.
— Mais ça aide !
— Mon oncle est allé dire à l’école que je ne suis
pas assez bien pour qu’il paye pour moi.
— Mais c’est lui qui paye ?
— Non c’est ma mère, d’abord il a dit au maître
qu’il ne me connaissait pas quand il lui a demandé si
j’étais de sa famille, le maître voulait le complimenter
parce que j’ai de bonnes notes. Puis Brahim a dit qu’on
gâchait l’argent de son frère qui se tue au travail à
l’étranger. Exprès pour nous embêter.
— Pourquoi il ne t’aime pas ? Chapitre I 13
Kébira sait ce que va répondre son amie, mais
chaque fois qu’elles en parlent, c’est plus fort qu’elle,
elle repose la même question, et à chaque fois Hassiba
lui parle de la colère jalouse que son oncle exprime
pour la famille de son frère. Kébira secoue la tête
pour chasser cette haine qu’elle comprend mal mais
qui leur fait si peur à toutes les deux.
— Ma mère a si peur, alors moi aussi !
— C’est parce que son frère a une fille plus sage et
plus sérieuse ! C’est ce que dit ma grand-mère.
— C’est vrai, elle a dit ça de moi ?
— Elle trouve que tu es plus intelligente que tes
cousins. Les enfants de ton autre oncle, Ahmed.
Kébira voit le sourire de sa camarade. La lune est
encore haute, croissant encore presque éblouissant.
Elles arrivent au chemin qui longe d’un côté une
corniche de terre, de l’autre côté, le fleuve, avant de
glisser en pente raide et de se transformer en piste
de galets, bordée d’un mur bruissant de roseaux si
hauts qu’on ne peut voir par dessus, et qui rendent
l’obscurité encore plus noire, plus dense, masquant
la lune, projetant des ombres épaisses sur les fillettes.
La brise froide secoue les feuillages, et elles tendent
l’oreille à tous les bruits qui sifflent autour d’elles
sans qu’elles puissent discerner s’ils sont réels ou
imaginaires.
« Je n’aime pas cet endroit » chuchote Kébira.
Hassiba ne répond rien, elle prend la main de son
amie et la tire. A ce signal, elles s’élancent toutes deux
en courant, et c’est alors qu’une tempête de bruits se 14 Les petites filles et l'oued
déchaîne à leur passage, tempête de roulements de
galets sous leurs pieds, de vent dans leurs
oreilles.
Enfin un peu moins de noir, une odeur d’eau et
de verdure : elles ont atteint l’oued, là où on peut le
traverser par un passage aménagé avec de grosses
pierres et des sacs de sable. Elles s’arrêtent en haletant,
le temps de deviner l’emplacement de chaque pierre,
puis de l’apercevoir, masse sombre dans l’eau plus
claire où se reflète la nuit finissante. Hassiba est déjà
perchée sur la plus proche, et en la regardant bondir
de pierre en pierre, comme en plein jour, Kébira pense
à ses chevilles endolories, à ses belles chaussures
rouges écaillées par les chemins pierreux, et à la
glissade qu’elle a faite hier et qui lui a valu d’arriver
trempée et grelottante en classe.
Elle retire ses chaussures, les fourre dans ses
poches de tablier, puis retrousse son pantalon avant de
s’enfoncer dans l’eau glacée avec un cri de douleur.
Elle se souvient alors que sa grand-mère lui a expliqué
que la neige qui fond dans les montagnes atteint la
vallée dans la nuit et gonfle l’oued de son eau encore
froide. Elle entend un autre cri plus loin, se rend compte
qu’elle ne voit plus Hassiba, masquée par les lauriers
roses au bord de la piste qui reprend sur l’autre rive.
Elle n’ose pas appeler, de peur d’alerter les chiens
errants. Mais déjà Hassiba revient, lui fait signe de se
dépêcher. Brassant l’eau à grandes enjambées, Kébira
sort de l’oued et se rechausse hâtivement, les pieds et
les jambes transis.Chapitre I 15
— C’est toi qui as crié ?
— Mon oncle était là quand je su

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents