98
pages
Français
Ebooks
2014
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement
98
pages
Français
Ebook
2014
Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus
Publié par
Date de parution
04 septembre 2014
Nombre de lectures
15
EAN13
9782954985015
Langue
Français
Publié par
Date de parution
04 septembre 2014
Nombre de lectures
15
EAN13
9782954985015
Langue
Français
Mademoiselle Tout Le Monde
Axelle Lemagny
2015
This book was produced using IGGY FACTORY, a simple book production tool that creates EPUB For more information, visit: www.iggybook.com
Table of Content
Prologue -En Terre de Lorraine
I - SachaTranche de Vie et Confiture
II - LorraineLes Contours de mon Ombre
III - SachaLe Cœur de la Réalité sur la Vérité
IV - LorraineL’Âme de mon Ombre
V - SachaL’Avenir de son Passé pour Aimer
VI - LorraineLa Lumière de mon Ombre
VII - SachaUne Boule de Coton dans une Bulle de Savon
Épilogue -Un Arc-en-Ciel dans la Tête
Remerciements
Prologue - En Terre de Lorraine
Aujourd’hui est le jour de ma naissance. Et la vie bat son plein.
Je me tiens assise, là, sur ce transat pointant au levant, un thé sur la table ma pipe à la main, doigts de pieds en éventail yeux mi-clos, laissant le Soleil déjà chaud, encore bloqué de ce côté-ci par la toiture, poursuivre son œuvre apaisante sur mes paupières trop lourdes et finir d’évaporer la rosée de la matinée. Le vent encore frais chatouille mes poils et fait carillonner les longues feuilles tombantes du saule pleureur de mes humeurs, berçant mon âme dans la quiétude des heures matinales. Les oiseaux louent la venue du Soleil en chantant et s’ébrouant. Et j’entends le houhou qui me fait penser à un hibou, mais dont on m’a dit que ce n’est pas un hibou et que j’appelle tout de même houhou ! Cette atmosphère paisible où tout encore est possible ; où les questions sur le dénouement de la journée sont encore permises. Plus tard, il y aura de l’effervescence, même ici ; du bruit, des cris, des rires peut-être ; et de l’action sans réflexion.
Je peux les entendre, chacun affairé à sa tâche. Les enfants courant en tous sens, criant, bousculant, renversant un plateau et ses verres provoquant la fureur d’une mère. Des tables se dressent dans le jardin, couvertes de belles nappes blanches à dentelles brodées de fleurs rose pâle. Un peu baroque, un peu classique pour un banquet champêtre. Des bouquets sont posés en leur centre, attendant une main délicate, ou pas, pour les harmoniser. Les assiettes ne sont pas encore dressées, empilées en bout de table, et l’argenterie elle aussi attend patiemment d’être disposée. Il y en a pour 100, peut-être 120 couverts. Du monde est attendu.
De là où je suis, je n’entends pas les conversations mais je devine le tumulte et le stress des grands préparatifs. D’aussi loin que je peux l’être, je suis étrangère à toute cette agitation. Rien qu’à les entendre s’activer, cela me fatigue. Qu’ont-ils donc tous à courir, c’est insensé.
Que suis-je donc en train de penser ?! Qui suis-je devenue ?
Plus jeune, je me suis pourtant jurée de continuer à jouer, courir, crier et non pas à rester là, au calme, sur une chaise longue à l’ombre d’un arbre, même si c’est mon saule, loin de la frénésie telle une vieille femme aigrie. Je m’en veux. J’ai honte pour la petite fille que je discerne à peine depuis les souvenirs de mon enfance. Le sentiment de la trahir est fort. Vraiment je le pensais. Je la voulais, l’effervescence. Et aujourd’hui, je ne supporte plus les vieux qui cultivent les espoirs de la jeunesse insouciante devenus illusoires à leurs âges, à nos âges ; les jeunes dits matures aussi résignés que de vieux grincheux. Je n’aime pas les Peter Pan qui refusent de grandir et préfèrent vivre dans l’ignorance en croyant en la victoire des batailles non combattues. Tous ceux qui prônent le « c’était mieux avant » sans même l’avoir connu, en oubliant qu’aujourd’hui c’est bien aussi. Alors, sans dramatiser et eu égard, mesuré, à cette petite fille, à chaque âge son sage. Alors c’est vrai, j’ai vécu et je me suis fait avoir par le temps. J’ai oublié de le surveiller. Bon signe ceci dit. J’ai vieilli et mes habitudes aussi. À y réfléchir à deux fois, cela ne me déplaît pas tant que cela. J’ai vécu et bien vécu. Et lorsque je repense à ces moments, mon cœur se serre de nostalgie et de crainte, fébrile, me demandant si c’est bien moi qui les ai vécus. Posant un regard étranger sur le bout de vie de cette petite blonde un peu maladroite ou sur cette adolescente exaltée, je tressaute me demandant si j’invente. Si proche et si loin. C’est moi avant ou une autre moi d’avant. Avant les larmes, avant les miracles, avant la peur, avant l’envie, avant les déceptions, avant les drames, avant l’angoisse. Ou, moins loin mais non moins étrangère, cette jeune adulte dans la force de l’âge, dit-on, que j’ai été mais que je ne suis plus tout à fait, qui croyait pouvoir se servir de son expérience pour se construire une vie meilleure, croyant toujours en l’avenir mais, à qui elle se le jure, on ne l’y reprendrait plus. Étrangère à ma propre vie, elle suit son cours, plongée dans l’illusion du pouvoir de ma volonté. Ne m’arrêtant qu’un temps, de temps en temps, le temps de voir le beau moment ou l’émouvant, mesurant le mauvais que je vivais. Mais rien que les moments frappés par la peine. Rien dans leur ensemble. Et aujourd’hui, c’est « cette petite fille a aimé » « cette adolescente a aimé et pleuré » « cette femme a espéré ». J’ai l’impression de les trahir. Je suis le millefeuille trop sec de toutes ces existences dont j’ai gardé les essentiels mais perdu les subtilités.
Bilan ? Je ne saurais dire si je suis heureuse ou malheureuse. Longtemps j’ai cru ma vie malheureuse.
Je n’en suis plus à comparer cette année passée avec la précédente. C’est réservé aux jeunes ; j’ai honte. Mon temps est plus distendu.
Bonheur d’un instant ou bonheur de tout temps. Il y a ces purs bonheurs qui viennent s’inscrire jusque dans nos souvenirs les plus enfouis. Ceux que l’on sait et que l’on cultive jalousement pour en préserver l’exclusivité. Ceux qui traversent les âges sans se ternir et vieillissent avec nous pour tenir compagnie à nos vieux jours. Tous n’y parviennent pas. Des instants s’évanouissent dans la masse pour toujours, faux vrais bonheurs ou vrais faux malheurs, pour réapparaître inopinément mais bienheureusement, au hasard d’une pensée égarée. Des bonheurs retrouvés, revécus à travers le prisme du temps qui les colore de tons ignorés hier encore. Le bonheur est bien vivant.
Autant le malheur se fait sentir dès l’instant présent, la survenance du moment, et n’est supportable que par la seule certitude qu’avec le temps il se fane ; autant le bonheur ne prend toutes ses teintes qu’en résistant au temps. C’est celui qui reste qui importe. Étrange et tellement frustrante la distance nécessaire pour apprécier le bonheur. Il faut qu’il soit passé pour être plus vivant que jamais. Il faut qu’il soit trop tard pour pouvoir dire « c’était bien ». Résignation. Voilà pourquoi beaucoup se laissent aller à la religion du « c’était mieux avant ». Trop tard pour le vivre, toujours la nostalgie du souvenir, jamais en phase. C’est ballot. Mais heureusement que ce n’est pas Lui qui s’évanouit en premier ; le temps serait difficile à porter. Il persiste, s’invite à votre table et dans vos lits, vous rappelle combien vous êtes aveugle et vous laisse ce goût amer de la frustration de n’avoir pas su le voir avant, tout en vous délectant de la certitude que vous l’avez connu. Et si la quête du bonheur est une constante, comment savoir ce qui restera ? J’ai essayé d’être heureuse, vraiment, sans compromission, juste du quotidien des rêves de cette petite fille que je fus, espérant que pour le moins, ses rêves à elle ne sont pas corrompus. Mes rêves.
Il est aisé de rêver de tout et n’importe quoi mais le rendre réalité, quelle calamité ! Sans parler des faux rêves. Ceux que je croyais être miens, ceux qui devaient me rendre heureuse. Erreur de rêve. Tromperie de rêverie. L’évidence me frappe. Le bonheur est bien la finalité et non pas toujours le rêve rêvé quand bien même il serait réalisé. Banalité?
Et puis, il faut que je me rende à l’évidence. Je n’ai jamais su vouloir ; alors, comment espérer être heureuse si je ne veux pas ? Je n’ai jamais su ce que je voudrais être plus tard. Je n’ai jamais su ce que je voudrais ce soir. Je ne connaissais p