MARYSE UNE VEUVE ENGAGÉE
120 pages
Français

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MARYSE UNE VEUVE ENGAGÉE , livre ebook

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Description

... Maryse se consola en soliloquant : « Maryse, tu dois tenir bon pour tes enfants. » Effectivement, Maryse tenait bon la prise pour ses jumeaux. Maintenant qu’ils n’avaient plus de père, il leur fallait surtout une mère qui pourrait préparer leur avenir. Ainsi, pendant une semaine, elle s’attela à cet indigne manège : pleurer nue sur la colline, de midi à dix- huit heures. Or, cette colline était connue de tous les villageois pour être le repaire des serpents venimeux...

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Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2022
Nombre de lectures 26
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Maryse, une veuve engagée
Couverture & illustrations : ARE / SILUÉ Ismaël Kassem Maquette : ARE / KOUASSI Kouassi Marc Mise en page : ARE / Ouattara Awa / KOUASSI Kouassi Marc Suivi éditorial : OZÉ G. Roger
e © Africa Reets Éditions, 4 trimestre 2017 ISBN : 978-2-36997-033-0
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous les pays.
Jean-Pierre MUKENDI
Maryse, une veuve engagée
Africa Reets Éditions 01 BP 3648 Abidjan 01 E-mail : contact@are-ci.com
À Eugénie Allo Tano
Les eurs se fanent,
Le soleil se couche,
Les larmes sèchent
Mais l ’amour demeure éternel.
Ce roman est l’expression de mon amour que rien ne peut oblitérer.
ChapitreI
wadi Maryse voyageait en janvier. Durant ce mois, M  les pluies se succédaient chaque jour, avec leurs lots d’inondations et d’éboulements dans les quartiers précaires de Jadoville dont les habitants portaient la gueuserie sur le visage. Il pleuvait nuit et jour. À certains endroits, l’eau débordait tel un euve en crue et se déversait dans les rues. Pendant que l’orage s’abattait sur la ville, les véhicules s’agglutinaient sur les artères principales comme des termites dans une termitière. Au volant, les conducteurs s’impatientaient et devenaient parfois hystériques. Ils klaxonnaient rageusement et invectivaient le pouvoir public. Les passagers, tous aussi pressés que les conducteurs, tempêtaient et fustigeaient l’État et tous ceux qui étaient censés résoudre l’épineux problème de la circulation à Jadoville. Maryse devait prendre le train de dix heures pour Mwena-Ditou, une préfecture située dans la région du Sud-Kasaï. Or, jusqu’à neuf heures trente minutes, elle était toujours bloquée dans un embouteillage monstre. Le taxi à bord duquel elle avait pris place n’avait pas parcouru cent mètres depuis une demi-heure. Furieuse, Maryse descendit du véhicule, en jetant une pièce 1 de dix francs au conducteur. Elle héla untoukou-toukou, sauta dessus avant de demander au motocycliste de la conduire àla gare ferroviaire. Dix minutes plus tard, l’engin stationna le long du trottoir de la gare ferroviaire. 1- Motocyclette servant de taxi dans certains pays de l’Afrique de l’ouest.
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Maryse remit vingt francs au motocycliste et marcha à grandes enjambées, sa valise à la main, vers la billetterie. Elle prit un billet pour Mwena-Ditou. Il s’en est fallu de très peu pour qu’elle manque son train.. Le machiniste avait déjà donné le signal du départ, la sirène avait retenti et Maryse l’avait bien entendue. Elle dévala l’escalier et sauta dans la dernière voiture. Elle haletait, se frotta le visage comme si elle ne réalisait pas jusque-là qu’elle se trouvait à bord du train en direction du Sud-Kasaï. Le train roulait à sa vitesse maximale. On entendait les crissements des roues de fer sur les rails, semblables aux cris déchirants d’un chacal aux abois. Des étincelles s’échappaient des roues et allaient mourir sur les coupons. La fumée qui émanait de la locomotive s’élevait dans le ciel noir d’Afrique et se perdait dans les nuages gros et compacts. Maryse ne trouva pas de place assise. La voiture était remplie comme un œuf. Ceux qui étaient assis étaient les plus chanceux. Les veinards ! Ils manifestaient leur bonheur par des chants qu’ils fredonnaient en Luba ou en Swahili. Ils étaient certains de passer au moins trois jours et trois nuits assis confortablement dans un siège en bois. Les autres devraient effectuer ce long voyage debout ou allongés dans les couloirs. Maryse se tenait debout, au milieu des passagers et de leurs bagages. Après deux heures de trajet, ses jambes ne tenaient plus ; elle avait déjà des yeux battus. Elle poussa les jambes d’une jeune lle assise à ses pieds et s’assit. La plupart des personnes allongées dans le couloir étaient des femmes dont certaines avaient des enfants sur les jambes. Il sentait mauvais dans cette voiture. Sans doute, il en était de même pour toutes les autres. Des gens entassés comme des sardines dans des wagons crasseux et puants. Tandis que les Blancs, eux, étaient dans la première voiture-lit de luxe, dans laquelle ils avaient droit à des couchettes moelleuses et un restau-rant d’où s’élevaient les efuves de pommes de terre sautées et
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de saumon fumé. Trois copieux repas leur étaient servis chaque jour. Pour eux, le voyage en train était une villégiature. Il leur permettait de découvrir les merveilles de ce pays équatorial qui était le leur, leur unique colonie. En revanche, pour les Noirs, le voyage en train était un calvaire qui leur imposait une grande mortication. Ils arrivaient toujours à destination avec des jambes engourdies, des pieds enés et de fortes migraines. Le train serpentait sur les rails. Il y avait déjà trois heures qu’il avait quitté la ville. Maintenant il s’enfonçait dans la forêt équatoriale, source de vie et avenir de l’humanité. Cette forêt était jadis vierge, mais le colonisateur l’avait profanée depuis e son arrivée à la n du XIX siècle avec ses engins et ses scies. Les colons exploitants forestiers la laissèrent en 1960, totale-ment ridée et chauve. Tout était programmé pour que la forêt équatoriale laisse place au désert. Toutefois, la Providence en protégea une bonne partie. C’est pourquoi à certains endroits, la forêt s’était obstinée, elle refusait de céder un pouce de son territoire aux dévastateurs. Elle était encore là, bien à sa place. On pouvait ainsi l’admirer du matin au soir sans en être rassasié. Les arbres s’élançaient gaillardement et fièrement au risque de menacer le ciel. Sur leurs faîtes, les oiseaux voltigeaient joyeusement, chantant des mélodies dont eux seuls connaissaient le secret. La pluie continuait à tomber, mais cette fois, elle était devenue ne et sporadique. Aux pieds de gros arbres gisaient des feuilles mortes envahies par toutes sortes de fourmis. Ces feuilles mortes sustentaient les racines des arbres et exhalaient le parfum d’un moût de vin dans une cuve. Après quatre heures de trajet, le train entra dans la petite gare de Kalula-sud. Les vendeurs et vendeuses à la criée l’assaillirent de tous côtés. Il y en avait qui se plaçaient devant les portes et d’autres le long des fenêtres. Les plus téméraires entraient avec leurs marchandises dans les voitures. Les petites
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lles, torses nus, pagne noué à la hanche, paniers de poissons grillés sur la tête, criaient à tue-tête : «Ya léo, ya léo» qui signie : « C’est pour aujourd’hui, c’est pour aujourd’hui. » Maryse descendit du train, sa valise à la main. Elle se dirigea vers un petit restaurant et s’installa derrière une table. Une dame, grosse comme une courge, s’approcha péniblement d’elle et lui demanda : « Que veux-tu, madame ? ». Maryse la regarda tristement et lui demanda à son tour : « Es-tu malade ? » Non, répondit-elle, un peu gênée. Je suis seulement fatiguée. C’est la goutte qui me dérange. Mais, justement la goutte est une maladie, rétorqua Maryse. Tu dois chercher à te faire soigner. D’accord. Merci madame. Je le ferai prochainement. Bien. Qu’est-ce que je peux manger dans ton restaurant ? 1 Il ne reste que ledongo-dongoavec la viande de vipère. Ah, c’est bien ! s’exclama Maryse. Cette viande m’a vraiment manqué pendant plusieurs années. En ville, à Jadoville, le Blanc a interdit catégoriquement sa vente, tout comme la fabrication 2 et la vente deKoutoukou. En revanche, il nous conseille de boire les liqueurs de chez lui, qui sont plus alcoolisées et plus nocives que notreKoutoukou. En plus, il nous recommandela consommation des pattes de grenouilles à la place des parties charnues de vipère ou de crocodile. Si on entre dans ce débat, on n’en sortira pas, lui ditla grosse femme, avant de s’engouffrer dans la cuisine. Deux minutes plus tard, elle en ressortit avec deux assiettes placées sur un plateau vert. Dans la première, il y avait un gros morceau de vipère qui baignait dans ledongo-dongo. Dans3 la seconde, se trouvaient lesmiondos. Maryse avala rapide-4 ment son plat. Elle commanda ensuite un gobelet deTshikoko. Elle but son vin d’un trait. Elle rota, tapota son ventre et paya1- Sauce gluante en Lingala. 2- Le koutoukou ou gbêlê, est un gin produit localement dans certains pays de l’Afrique de l’ouest. 3- Repas à base de manioc cuit en forme de batonnets dans des feuilles. 4- Boisson non alcoolisé à base de maïs.
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