Rencontre au quai numéro 3
123 pages
Français

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Rencontre au quai numéro 3 , livre ebook

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Description

Laurent, jeune infirmier dans la trentaine, ne soigne pas les plaies physiques. Il se consacre plutôt à aider les jeunes adultes aux prises avec des maladies mentales. Par la douceur, la conversation, les débats, il réussit la plupart du temps à faire réagir les patients lors de leur court séjour au centre hospitalier. Il se sent utile dans un monde en mal d’amour, de tendresse et de bons soins.
Il adore son travail et s’y consacre corps et âme, peut-être même trop. Alors qu’une amie de longue date réapparaît dans sa vie juste au moment où il essaie de retrouver une autre personne qui lui est très chère, il se fatigue, finit par se sentir dépassé, se rend jusqu’à la limite de ses forces et s’embourbe dans une espèce de manège infernal qui pèse lourd sur ses épaules.
Dans ce tourbillon de sentiments, tout se termine sur le bord d’une voie ferrée alors que tout aurait pu y commencer…

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 juillet 2022
Nombre de lectures 0
EAN13 9782925250197
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0450€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Rencontre
au quai numéro 3
 
 
 
 
 
 
Martine Coffre-Miron
 
 
 
Conception de la page couverture : © Essor-Livres Édition
Image originale de la couverture : Shutterstock 638244826
 
 
 
Sauf à des fins de citation, toute reproduction, par quelque procédé que ce soit, est interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur ou de l’éditeur .
 
 
 
Distributeur : Distribulivre   www.distribulivre.com   Tél. : 1-450-887-2182 Télécopieur : 1-450-915-2224
 
© Les Éditions Essor-Livres Lanoraie ( Québec) J 0K 1E0 Canada apotheose@bell.net www.leseditionsdelapotheose.com
 
Dépôt légal — Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2020 Dépôt légal — Bibliothèque et Archives Canada, 2020
 
ISBN : 978-2-925014-62-1
 
ISBN EPUB : 978-2-925250-19-7
 
 
 
Imprimé au Canada

 
 
 
Réjean, Christine, Alexandre et Cédric
 
 
Ce récit est pour vous que j’aime tant.
Les mots se sont posés docilement
sur le papier,
page après page,
me permettant ainsi de vous le raconter.
En silence, afin de ne pas l’ébruiter…
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Dans ce roman, toute ressemblance avec des personnes ou des faits réels ne peut être que fortuite. Mes personnages sont fictifs et ne sont en aucun cas reliés à des gens connus. 
 
 
 
 
 
PARTIE I
 
 
 
La vie instable de l’être humain
est parfois comme feu de paille…
 
 
Journal de Laurent
 
 
 
Mardi 15 mai 1962
Je n’avais que douze ans et les souvenirs que j’avais gardé de ma traversée en mer, huit ans auparavant, étaient encore très frais dans mon esprit. Ce matin-là, alors que j’étais assis sur le bord du trottoir, face à l’école Ferrier, je me complaisais à vouloir revivre ce grand voyage à bord du transatlantique.
On était au mois d’octobre, l’automne avait fait son apparition tardivement dans le nord de la France. En revanche, l’air beaucoup plus frais avait surpris les jeunes familles présentes sur le quai du Havre en cette fin d’après-midi. Ma mère, comme tant d’autres, s’était assise sur un banc et m’avait conseillé de ne pas m’éloigner. Vers dix-sept heures, les passagers, passeports en main, avaient embarqué à bord du paquebot   ; les femmes et les enfants en premier   ; puis l’horloge du quai avait sonné vingt heures. Un coup de sifflet annonçait l’appareillage du grand navire qui s’était fait tout en douceur, épousant une fois de plus les flots et semblant glisser sur la surface de l’eau à peine luisante, sous un ciel noirci par les nuages. Un seul regret demeurait dans le cœur de ma mère, un regret plus mouvant que la vague marine en cette fin de journée. Elle et moi avions contemplé les maisons normandes et les quelques monuments qui disparaissaient de notre vue au fur et à mesure que les minutes s’écoulaient. Ma mère s’était enfermée dans son mutisme habituel et, comme elle, j’essuyais les quelques larmes qui coulaient sur mes joues bien malgré moi. Je sentais que c’était le point de non-retour : quitter sa patrie, c’était abandonner une partie de son enfance.
Je me souviens d’avoir envoyé la main en direction du quai, comme tous les autres passagers présents sur le pont, alors que le bateau faisait sonner sa corne de brume. L’immense navire se dirigeait vers une mer légèrement plus agitée sous un crépuscule naissant dont l’horizon à peine éclairé me semblait infranchissable. Je m’étais senti très petit, tout à coup, et de surcroît très vulnérable.
Le fameux périple, qui allait durer sept jours, laisserait en moi un vague sentiment de nostalgie que je ne pouvais définir encore. Quand on est un enfant, les journées, les semaines, les mois se succèdent sans souci du temps, mais à bord, il en avait été autrement. J’anticipais sans même le vouloir ce qui allait arriver d’une minute à l’autre. Moi qui étais habitué au plancher des vaches, j’éprouvais soudain une crainte inexplicable sur cette nappe d’eau qui changeait d’apparence à tout instant.
Bien installé sous un chêne, à l’abri des rayons du soleil d’été, je pensais à tous ces moments et je me revoyais avec les autres passagers sur le pont-promenade, la capuche sur la tête, tenant la main de Marie-Cécile, une jeune femme que maman avait rencontrée sur les quais quelques heures avant l’embarquement. Une traversée houleuse, un navire caracolant sur une mer parfois déchaînée. Des vagues de plusieurs mètres de hauteur   ; un roulis, des oscillations répétées certains jours et certaines nuits, alors que des vents contraires étaient souvent accompagnés d’un bruit insolite ressemblant au roulement du tonnerre, ce qui empêchait les passagers de dormir, quelle que soit l’heure de la nuit.
Maman et d’autres passagers avaient été malades tout le long du voyage et n’avaient pu se rendre à la salle à manger une seule fois. Je revoyais les tables et les chaises attachées les unes aux autres et fixées aux panneaux muraux de la pièce. Le mal de cœur chez certains ainsi qu’une peur irrépressible chez d’autres, les privaient de bonnes choses de la table. Chez moi, la curiosité l’emportait. Je demandais parfois à Marie-Cécile de m’emmener sur l’un des deux ponts dès que le soleil resplendissait et je la priais de me laisser regarder cet océan, dont les vagues brillaient sous l’éclat des rayons quand il faisait beau. L’étendue de cette eau sans fond apportait son odeur saline et les flots, percutant inlassablement la coque, progressaient selon la force des bourrasques. Souvent, je m’amusais à passer ma langue sur mes lèvres au point que celles-ci, gercées à l’extrême, étaient demeurées endolories jusqu’à la fin du voyage.
Le soir particulièrement, personne n’osait s’approcher du bastingage. La mer turbulente à souhait déferlait sans cesse sur les côtés du navire et effrayait les plus téméraires. Une seule fois, je vis un passager aguerri qui avait osé se pencher outre mesure. Son audace l’avait rattrapé. Une vague cinglante l’avait surpris et trempé jusqu’aux os. Il m’avait souri, puis avait disparu rapidement. Il faut dire qu’en octobre l’air était frais en journée, mais très froid en soirée. L’eau de la mer l’avait sûrement pétrifié, car je ne le revis plus sur le pont-promenade, là où trônaient les cafés, restaurants, salles de cinéma et plus encore.
Quand la température le permettait, Marie-Cécile partageait avec moi une gaufre très chaude et croustillante et nous nous allongions sur un transat, le béret enfoncé jusqu’aux oreilles. Le dernier jour avait été le plus beau pour les passagers. Le soleil était réapparu dès l’aube et la mer, plus calme, avait attiré un lot d’oiseaux. Des goélands avaient surgi de toutes parts et, pour les gens réunis sur le pont, ils représentaient le signe incontestable de leur arrivée prochaine sur les côtes de Terre-Neuve. On pouvait déjà distinguer au loin quelques bateaux de pêche. J’étais content et maman, qui me regardait, avait souri, satisfaite elle aussi. Son malaise avait disparu en même temps que ses angoisses et ses frayeurs. Elle n’avait jamais aimé l’eau et encore moins la mer et son agitation, qui avaient gâché son premier voyage en bateau.
— Un baptême de l’eau peu réussi, dira-t-elle plus tard.
Le débarquement n’allait pas tarder et chacun savourait ces derniers moments à bord. Mon père avait précisé dans sa dernière correspondance que son poste à Toronto le retenait jusqu’en décembre, mais qu’il serait de retour pour Noël. Si cette nouvelle avait ennuyé ma mère, elle n’en montra aucun signe. L’arrivée au port de Québec avait enthousiasmé les passagers installés sur le pont et désireux d’admirer la Haute-Ville, qui était sans conteste splendide. Juché sur sa falaise, le château Frontenac, surplombant le fleuve Saint-Laurent, trônait dans toute sa magnificence. Le soleil faisait reluire ses cuivres et moi, je le comparais au château de Beaumesnil, situé près de Bernay en Normandie   ; le seul que je connaissais, d’ailleurs. Sur les quais, dès l’accostage, des malles, de grosses caisses, de vieilles valises de cuir usées se retrouvèrent pêle-mêle au grand dam de leurs propriétaires. Certains avaient commencé à s’agiter et à parler haut et fort   ; l’atmosphère se gâtait. Une pléthore d’enfants pleurait et trépignait   ; les mères épuisées les tiraillaient dans tous les sens, sans qu’aucun daigne se calmer. Seuls les pères soupiraient et fumaient leur cigarette pour se donner bonne conscience.
Des autobus arrivaient et se garaient non loin du quai. L’un des chauffeurs, une feuille de papier à la main, s’approchait de la foule sans se hâter. Habitué à ce tintamarre, il appelait les passagers par leur nom de famille et leur faisait signe de monter à bord du véhicule. Les valises, les sacs en toile, placés tant bien que mal dans le coffre à bagages, étaient nombreux et celui-ci fut vite rempli, mais les plus grosses malles furent arrimées sur le toit.
L’heure du départ ne tarderait pas. Or un dernier passager manquait à l’appel. Un quart d’heure passa, puis un officier de l’immigration surgissant de nulle part fit irruption dans le bus. Un certain monsieur Chambray avait été pris de douleurs violentes à l’estomac et avait été envoyé à l’hôpital pour examen. Le chauffeur semblait fâché. La valise du voyageur était dans le coffre. Il fallait donc tout vider et la remettre à l’officier qui attendait avec impatience. Pendant ce temps, maman et Marie-Cécile, confortablement assises dans le bus, sortaient quelques photos de famille pour passer le temps alors que moi, trop fatigué, je m’étais assoupi sur la banquette arrière, coincé entre deux dames âgées vêtues trop chaudement et qui ressemblaient étrangement à des Bibendum . Des voitures de police s’étaient garées le long du quai. Les plus curieux se demandaient pourquoi, mais personne n’osait poser la question. Le départ était imminent. Des soupirs se firent entendre à l’arrière du véhicule. Ma mère et son amie retirèrent leur manteau, puis le calèrent comme elles le purent sous leur tête, en gui

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