Rendez-vous à Oyonnax
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Rendez-vous à Oyonnax , livre ebook

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Description

Dans quelle galère Martin Grévin s’est-il fourré ? À peine parti de chez lui en stop pour aller voir son amie à Oyonnax que les ennuis commencent et que les galères s’enchaînent. Qui est ce curieux personnage se faisant passer pour un curé qui l’entraîne contre son gré dans une histoire infernale ? S’il semble finalement s’en sortir après bien des épreuves, ce sera au prix d’un dénouement tragique.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 21 février 2023
Nombre de lectures 2
EAN13 9782379799716
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Rendez-vous à Oyonnax

















Du même auteur :

Le Carnet à tiroirs - Editions d’Orbestier
MoraMada - Editions Gilles Armange
Le Livre de Moasibe - Iggy Book (e-book)
Quelque Part peut-être - Iggy Book (e-book)
Les Espications - Iggy Book (e-book)



Gilles ARMANGE



Rendez-vous à Oyonnax
Roman



















































Merci à Annick, mon épouse, sans qui ce livre n’aurait pu exister.







Prologue – Automne 2022







Voilà. Ici commence la fin.
Il s’agit bien là des derniers moments de cette beaucoup trop longue histoire. Le point culminant de mes galères, l’acmé d’une vie ratée…

Je me connais. Je sais pertinemment qu'en m’amenant de force ici, dans cet endroit jugé détestable pour tout être normalement constitué, quelque chose va se passer, quelque chose de pas terrible mais qui m’appartient et cette chose je me dois de la mener jusqu’à son terme. Une délivrance est sans doute possible, en tout cas nécessaire, de préférence totale bien que les modalités de cette libération n’en soient encore qu’au stade de la réflexion, au moment où je pénètre, bien encadré dans l’IML.
Dans certaines situations particulièrement délicates, et c'en est une, je me sais maintenant capable de tout ou presque.
Je sais aussi où l'on m'a emmené et pour quelle raison, pour cause.
Je n'ai pas eu le choix : on m'a traîné de force à travers la ville dans une fourgonnette grillagée malodorante depuis ma cellule crasseuse jusqu'à cette grande pièce aseptisée, glaciale et sans âme.
Ils auraient pourtant dû savoir qu’une réaction épidermique incontrôlée de ma part était à craindre, d’autant que je ne suis pas, c'est le moins que l'on puisse dire, au mieux de ma condition physique et encore moins psychique... à ma place qui le serait ?
Curieusement durant tout le trajet j’ai été partagé entre le plaisir malsain d’avoir à contempler mon œuvre et la crainte d’être obligé de me confronter une ultime fois à ce sale bonhomme, comme s’il pouvait avoir encore le pouvoir d’exercer sa néfaste emprise sur moi. S’ils ne m’avaient pas entravé les mains dans le dos, j’aurais sans doute insisté pour pouvoir le toucher, simplement pour m’assurer qu’il est bien mort. Tout ce bazar juste pour l'identifier, comme si un doute pouvait subsister sur les identités de l'individu qu'il fut !

Cette fois j’y suis. Encadré de mes deux garde-chiourmes, nous entrons dans une grande salle, aucune erreur possible, à sentir la forte odeur de désinfectant, la salle des autopsies.
Au centre de la pièce voici donc l’homme dont il sera bientôt question.
Il est étendu face à moi, allongé sur son inconfortable couche inoxydable, anormalement calme. Jamais je n'ai eu l'occasion auparavant de le voir ainsi, dans une attitude si paisible. Incroyable ! Quelqu'un lui a joint les mains et glissé un chapelet aux grains sombres particulièrement brillants sous la lumière crue des néons. Connaissant le bonhomme, c’est presque hilarant : qui a bien pu l’accoutrer ainsi ?
Habillé d'un pantalon noir impeccablement repassé, d'un veston légèrement lustré, de la même couleur, par-dessus un pull gris foncé faisant ressortir son col romain d'un blanc éclatant, en bref, déguisé en ce qu'il prétendait être, il semble encore me défier.
Sachant ce que je sais de lui, je le trouve tout simplement ridicule.
C’est une blague, j’hallucine, une caricaturale parodie de mort !
Malgré tout le mal qu'il m'a fait, il se dégage de sa dépouille une impression trompeuse, celle d'une certaine sérénité qui me choque autant qu’elle me gêne. Est-ce sa tenue vestimentaire particulièrement soignée ou son paisible masque mortuaire ? Qu’on ne s’y trompe pas, c’est bien le corps mort d’un monstre retors qui repose devant moi. Oui, une enveloppe sans vie vraiment ridicule, dont l’âme sombre, si toutefois il en eut bien une, frappe maintenant aux portes des enfers... Sûr qu’on l’y accueillera à bras ouverts…
Bien que préparé à la chose, je reste un moment scotché par la scène macabre qu'il m'offre gratuitement, scène d’un sale bonhomme qui vécut une méchante vie stoppée nette grâce à mes seuls bons soins.
Personnellement, je n’ai et n’aurai jamais le moindre remords.
Curieusement, le spectacle de sa dépouille me perturbe plus que je n'aurais pu l'imaginer. Une étrange sensation m'envahit. En l'espace de quelques secondes, sans doute pour la première fois de ma vie, je deviens voyeur, observateur mateur, jouissant d'un coupable plaisir malsain devant ce corps vide. C’est troublant.
Sous l'effet du violent éclairage je prends aussi conscience, non sans un certain étonnement et malgré l'abus de fond de teint dont il a été copieusement enduit, du grain chaotique de la peau de son visage sans doute dû aux ravages d'un ancien excès d'acné à l'adolescence, ou d'une méchante petite vérole. Plus encore, ce sont les touffes de poils qui lui sortent des narines et des conduits auditifs ainsi que l'énormité de son nez, qui détournent un court temps, mon attention. En y regardant de plus près je découvre tout de même, non sans émotion, une légère trace du passage de la balle qui lui traversa le crâne.
Si je devais émettre un regret, ce serait qu'il puisse ressentir la honte d’être ainsi minutieusement observé par moi, oui, surtout par moi, vu physiquement aussi minable...
Malgré une tentative de thanatopraxie désespérée et méritante pour lui offrir un semblant de sourire, comme il est généralement coutume de le faire dans pareil cas, le résultat final s'avère finalement plutôt mitigé. Ce sourire est beaucoup trop ressemblant à son fameux petit rictus de contrariété, celui-là même qu'il pratiquait volontiers de son vivant, annonciateur de reproches cinglants, qu'il contrôlait avec difficulté surtout quand il s’agissait de m’humilier...
Trop bien effacé, l’impact à peine visible laissé par la balle, finalement me déçoit. J’aurais aimé y voir encore quelques traces sanglantes de mon action salutaire sur ce sale type… dommage.
Point d'orgue de sa vie terrestre, l'infernale éternité dans laquelle désormais il devra apprendre à se débattre, donne à sa dépouille, avec la complicité de l'agent de service mortuaire, un aspect globalement peu ragoûtant et franchement cireux. Faut-il voir là un dernier clin d'œil d’un Ciel revanchard envers les restes, en bonne voie d'une inéluctable décomposition, d'une de ses brebis depuis longtemps égarée ?
Ces constatations anatomiques faites, je sens monter brusquement en moi une sourde, violente et dévastatrice colère. Je respire un grand coup de cet air trop chloré et tente de reprendre temporairement le contrôle.
On ne m'avait pas traîné jusqu'ici pour faire l'inventaire critique de sa dépouille.
Pour qui ne connaîtrait pas la haine, la vraie, ou s'en ferait une idée approximative, proche d'une espèce de grosse rancune, la mienne, ma haine à moi envers cet individu est si profonde qu'elle peut à tout moment exploser et partir en vrille. Une haine d'une puissance sans commune mesure, sans limite, incontrôlable. En l'espace d’une poignée de secondes je sens cette pression haineuse extrême monter, annonciatrice du dénouement.
Bien qu'entravé par une solide paire de menottes qui me scie les poignets et limite passablement mes possibilités d'intervention, je sais que je ne pourrai m’empêcher de réagir. Une réaction épidermique prend alors naissance quelque part dans mon cerveau en ébullition et s’élabore graduellement, comme une évidence, malgré le peu de moyens qu’ils ont laissés à ma disposition.

Ma décision est prise.
Je ne réfléchis plus, impossible de me raisonner, c'est plus fort que moi. Ce qui suit est instinctif, animal, organique et sans doute nécessaire bien que, somme toute, sans véritable commune mesure au regard de tout le mal que cet enfoiré m'a infligé.
Mais bon. Au vu de ma situation précaire, il est exclu pour moi de faire plus. Seule certitude, je me dois de marquer le coup, à ma manière, si grotesque que soit le résultat.
Je cherche loin, loin, dans mon arrière gorge un bon gros et gras crachat en devenir, en évitant le bruit caractéristique à ce genre de récolte, histoire de conserver l'effet de surprise, j’évalue la chose, la soupèse mentalement, certain d'avoir bien évalué l'efficacité potentielle de sa consistance sur la cible. Je prépare soigneusement la munition et la projette violemment avec une expertise quasi chirurgicale, sur son visage.
Bien évidemment, il fallait s’en douter, à la réception, lui ne bronche pas...
Bien qu'efficace, mon tir manque cependant un peu de précision.
J'ai visé la glabelle, cet endroit situé juste au-dessus du nez, entre les deux yeux, mais la glaire finalement atterrit légèrement au sud de son objectif, pile-poil sur le bout de son proéminent appendice nasal d'où elle migre avec lenteur sur sa lèvre supérieure pour venir stopper sa course sur l'inférieure, définitivement retenue par sa mâchoire légèrement prognathe. J'ai, un court moment, l'impression dérangeante, bien évidemment infondée, qu'il va la gober.
Je me sens instantanément soulagé, presque fier de mon attaque, si minime fut-elle. J’ai fait ce qu’il fallait avec les moyens du bord : par ce simple geste, je lui offre tout mon mépris et toute ma haine, qu’ils l’accompagnent à jamais dans sa déchéance.
Désormais les dés sont jetés…

Les deux gendarmes qui m'encadrent n'ont pas eu le temps nécessaire ni l'imagination suffisante pour anticiper mon acte, sûrement surpris par la rapidité de mon forfait. Peu habitués à ce genre de situation, je sens que je les ai méchamment déstabilisés. Ils ne savent pas quelle attitude adopter à mon égard. L'endroit ne se prête guère aux invectives pas plus qu'aux démonstrations de force. Visiblement jamais durant leur courte formation il n'avait été

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