Vincent et Gabrielle , livre ebook

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À 90 ans, Gabrielle Berlatier se rappelle comment, le 20 février 1888, de sa fenêtre de l’Hôtel Carrel d’Arles, elle a vu un homme habillé à la bohémienne se pointer à la porte. Gabrielle, qui a alors quinze ans, fait le ménage dans cet établissement où Vincent Van Gogh vient de débarquer. Elle se lie vite d’amitié avec le peintre, fascinée qu’elle est par ses toiles, ses couleurs, ses tournesols et ses portraits.
Bientôt, Vincent connaîtra toutes sortes de déboires financiers et personnels. Objet de moquerie des gens du quartier, il lutte tant que bien que mal contre sa propre déchéance, sous l’œil inquiet mais affectueux de sa jeune amie. Dans un moment de boisson et de folie, il se tranche l’oreille et la remet à Gabrielle. Aujourd’hui, elle lui rend ce témoignage à travers ses mémoires.
Après La bonne de Chagall, Karen Olsen réitère sa fascination pour la vie des grands artistes en relatant la dernière année de vie de Vincent Van Gogh à Arles. La jeune fille à qui elle donne la parole pourrait être le sujet de la célèbre peinture, La Mousmé.
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Date de parution

17 août 2021

Nombre de lectures

0

EAN13

9782895978190

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

2 Mo

VINCENT ET GABRIELLE
DE LA MÊME AUTEURE
La rançon d’Atahualpa , Ottawa, Éditions David, coll. « 14/18 », 2018.
La bonne de Chagall , Ottawa, Éditions David, coll. « Voix narratives », 2017.
Élise et Beethoven , Ottawa, Éditions David, coll. « 14/18 », 2014.
Karen Olsen
Vincent et Gabrielle
ROMAN
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada
Titre : Vincent et Gabrielle / Karen Olsen.
Noms : Olsen, Karen, 1962- auteur.
Collections : Voix narratives.
Description : Mention de collection : Voix narratives
Identifiants : Canadiana (livre imprimé) 20210224398 | Canadiana (livre numérique) 20210224444 | ISBN 9782895978220 (couverture souple) | ISBN 9782895978183 (PDF) | ISBN 9782895978190 (EPUB)
Classification : LCC PS8629.L744 V56 2021 | CDD C843/.6— dc23
Nous remercions le Gouvernement du Canada, le Conseil des arts du Canada, le Conseil des arts de l’Ontario et la Ville d’Ottawa pour leur appui à nos activités d’édition.

Les Éditions David 269, rue Montfort, Ottawa (Ontario) K1L 5P1 Téléphone : 613-695-3339 | Télécopieur : 613-695-3334 info@editionsdavid.com | www.editionsdavid.com
Tous droits réservés. Imprimé au Canada. Dépôt légal (Québec et Ottawa), 3 e trimestre 2021
AVERTISSEMENT L’intrigue qui sert de trame à ce roman est une histoire vraie. Mais l’auteure a pris la liberté d’interpréter cette histoire pour en faire une œuvre de fiction.
Pour Marie Galophe, une bâtisseuse de cathédrales qui a mis tous ses talents pour donner à ce texte sa structure Et Julie Renaud, ma toute première lectrice À la mémoire de Ferdinand Renaud
Pas plus que les girouettes ne modifient en quoi que ce soit la direction du vent, les opinions humaines ne changent rien à certaines vérités fondamentales.
Vincent V AN G OGH
Prologue
Quand le cœur n’est pas à la fête
L’hiver en Provence est une saison morte. Toutes les couleurs du paysage sont lessivées et, quand le jour s’éteint, le soleil s’entête à se prolonger à l’horizon, prenant un ton purpurin obscur. Puis la lumière disparaît, telle une bougie soufflée. C’est sans doute pour briser la monotonie de l’hiver dans nos maisons que les préparatifs de Noël commençaient dès les premiers jours de décembre.
En prélude aux rituels ancrés dans nos traditions provençales, maman nous racontait la légende de sainte Barbe 1 . Mon frère et moi étions suspendus à chacune de ses paroles, tant le récit de la jeune martyre de seize ans nous captivait.
— L’adolescente était d’une beauté inouïe, commençait ainsi l’histoire, racontée seulement une fois l’an. Il y a de cela très longtemps, en Turquie, Dioscore, un homme riche et cruel, était jaloux de la beauté de sa fille. Pour la soustraire aux incessantes demandes de ses prétendants, il l’enferma dans la tour de son château. L’adolescente, pour meubler ses longues heures de solitude, lisait des livres pieux et bientôt se convertit au christianisme.
Sachant que les chrétiens jadis avaient été cruellement persécutés et envoyés dans la fosse aux lions, mon petit frère et moi aurions voulu l’avertir du danger qui la guettait.
— Pendant l’absence de ce père méchant, la prisonnière afficha sa foi en perçant une troisième fenêtre à son cachot pour former une croix. De la route, Dioscore, à l’approche de son château, aperçut la nouvelle ouverture et comprit que sa fille était maintenant plus croyante que jamais. Furieux, il mit le feu à la tour. Par une intervention divine, Barbe put s’échapper et se sauva dans les montagnes.
Une lueur d’espoir commençait à nous habiter. Pourtant, le pire était à venir…
— Un berger, surveillant ses moutons dans les hauts pâturages, découvrit la cachette de l’adolescente et la dénonça. Le père, averti, captura sa fille et l’enferma de nouveau dans le donjon, mais la ferveur de Barbe redoubla. Dioscore, à bout de solutions, la livra donc au gouverneur romain de la province. Ce dernier essaya sans succès de lui faire renoncer à ses croyances et la tortura pour la punir.
À ces mots, on imaginait d’horribles supplices et on récitait une prière pour elle.
— Par miracle, toutes ses blessures disparurent, nous rassurait maman. Mais, voyant qu’elle refusait toujours de renier sa foi, son père tira son sabre et lui trancha la tête. Le bourreau fut aussitôt frappé par la foudre et réduit à un petit tas de cendres.
— Et le berger, qui l’a dénoncé ? demandait toujours mon petit frère, Alexandre.
— Les gens cruels sont toujours punis, répondait-elle. À son tour, le dénonciateur fut réduit à un tas de pierres noires et ses moutons, changés en sauterelles.
La mort de sainte Barbe nous attristait, mais le châtiment du père et du berger cafardeur nous réjouissait à tel point que nous nous mettions à applaudir. À la mémoire de la petite sainte, maman nous invitait ensuite à parsemer quelques grains de blé et de lentilles sur de la mousse fraîche, placée dans des soucoupes sur la table de la cuisine. Le jour de Noël, si les grains avaient germé, c’était signe que la récolte au cours de la nouvelle année serait bonne.
La préparation de la crèche suivait la Sainte-Barbe. Maman sortait les santons 2 de la grande armoire. Ces petites figurines moulées dans du plâtre étaient déballées une à une et disposées délicatement, selon un ordre précis, autour de Jésus, Marie, Joseph, sur une table sous la fenêtre du salon. Inspirés de personnages du folklore traditionnel, il y avait Bartomiou, l’incorrigible ivrogne présentant une morue à l’enfant Jésus, ou encore Pistachié, un grand dadais conduisant un âne chargé de sacs de blé. Celui que je préférais était un simple berger avec une brebis dans ses bras. J’avais baptisé celui-là Patience Escalier.
Pris dans l’élan des préparatifs familiers et chéris, personne n’aurait pu prévoir cette année-là que j’allais manquer le gros souper célébré en famille avec oncle Jules, tante Mathilde, mes cousines et quelques voisins ; nous aurions été treize 3 à dîner. Depuis l’avant-veille de Noël, j’étais souffrante. Inquiète de mon état, maman m’avait prise par le bras et m’avait reconduite au lit.
Si mon quotidien n’avait pas été ainsi bouleversé, j’aurais eu la tâche de mettre les couverts, sans oublier la place du pauvre. L’assiette vide rappelait la place qu’aurait occupée mon petit frère disparu. Depuis sa mort, mon père était un homme en colère, il semblait ne faire que les choses à moitié, comme s’il portait une chape de plomb sur les épaules. La mort de mon frère semblait aller dans le sens inverse de la vie pour moi, mais maman refusait de s’apitoyer sur son sort et redoublait de vigilance, si j’avais le moindre malaise. Sa détresse s’atténuait par le respect de quelques traditions plus simples. Elle y tenait pour ne jamais oublier son fils adoré.
L’assiette vide pouvait aussi servir au passant venu frapper à la porte pour demander l’hospitalité. Personne, même les plus démunis, ne devrait passer ce temps des Fêtes seul. Papa aurait placé la table près du foyer et je l’aurais recouverte de trois nappes blanches de taille décroissante, en la décorant d’une branche de houx pour apporter du bonheur aux occupants de la maison, sans oublier de placer, au centre, les herbes de la Sainte-Barbe. Trois chandelles seraient allumées. La première symboliserait le passé, à la mémoire des défunts. La deuxième signifierait le présent, témoin de la fidélité aux proches, et la troisième évoquerait le futur, l’espérance des enfants à venir.
Le réveillon ne pouvait commencer avant le cacho fio 4 . Papa ferait trois fois le tour de la table portant une grosse bûche d’un arbre fruitier qu’il placerait ensuite dans le foyer. Alexandre, le plus jeune de la famille, aurait fait une triple libation avec du vin chaud béni, en prononçant les paroles suivantes en provençal au moment d’allumer le feu :
Alegre, Diou nous alegre, Cachofue ven, tout ben ven, Diou nous fague la graci di veïre l’an que ven Se sian pas mai que siguen pas men.
Cette prière faisait toujours pleurer maman.
Soyons joyeux, Dieu nous garde joyeux, Cacho feu vient, tout bien vient.
Cette invocation s’adressait au feu et demandait :
Que Dieu nous fasse la grâce De voir l’an qui vient, Si nous ne sommes pas plus, Que nous ne soyons pas moins.
Le bois crépitant dans l’âtre aurait embaumé la maison et ça sentirait si bon la cuisine que ça mettrait tout le monde en appétit. Avant le repas, papa découperait le pain en trois parties : une pour les convives, une pour les pauvres et une partie fétiche remisée dans l’armoire. Avec le fourneau allumé, le feu dans l’âtre et les chandelles éclairant et réchauffant la pièce, maman en tablier viendrait remplir les assiettes du souper avec le contenu des sept plats maigres, mais copieux, qu’elle avait cuisinés pendant des heures. Avec des exclamations de plaisir, l’ aigo boulido serait servi en premier, une soupe à l’ail préparant une bonne digestion, suivie de cardes, de cardons en salade, d’artichauts, de céleri en branches accompagné d’une anchoïade et des épinards en tian 5 , une sorte de gratin de légumes et finalement le plat de morue aux poireaux. Une fois la table débarrassée, treize desserts seraient posés devant les convives pour couronner le repas. Pour faire honneur à la cuisinière, il fallait goûter à tout, de la pompe à l’huile d’olive dégustée avec du vin cuit, aux quatre mendiants, ces fruits secs représentant les divers ordres religieux ayant fait vœu de pauvreté. Sur un plateau, il y avait des noisettes pour les Carmes, des figues sèches pour les Franciscains, des amandes pour les Dominicains et des raisins secs pour les Augustins. En plus, il y avait des dattes, du nougat noir et du nougat blanc, des oranges, des poires et des fruits confits.
À l’église, j’allais aussi manquer les cierges allumés et les nuages parfumés d’encens de la messe de minuit. Pas de chants ni de cantiques et encore moins le rituel du pastrage 6 , le point culminant de nos traditions que j’aimais plus que tout. Je serais absente à la sortie de la messe, à la distribution des fou

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