L Aigle de Tipasa
398 pages
Français

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L'Aigle de Tipasa , livre ebook

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Description

Fils d’agriculteurs modestes des Hautes-Alpes, Pierre est appelé sous les drapeaux en 1958. Rêvant naïvement de voler, il choisit l’arme parachutiste. Lui qui n’a jamais quitté sa région natale, sa découverte de l’Algérie le stupéfait : un superbe pays sous d’autres latitudes, d’autres cultures, une autre économie et en proie à des « événements » qui lui sont d’abord totalement étrangers.


Puis, il est saisi par ces gens, si attachants, courageux bâtisseurs, hospitaliers et chaleureux. Sa rencontre avec Alice, fille de colons le fait pénétrer dans un monde social nouveau et basculer définitivement dans l’amour pour ce pays.


Au sein des parachutistes, élite et fer de lance de l’Armée française en Algérie, il va bientôt vivre comme son combat personnel les engagements qu’on lui demande de livrer.


Comme beaucoup, il va croire à la réussite des projets permettant à l’Algérie de rester française en ayant conduit les réformes politiques, sociales et économiques nécessaires, avant d’être de ceux qui sont stupéfaits et déstabilisés par les annonces et décisions inverses successives égrenées au fil du temps par de Gaulle.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 28 avril 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414047284
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0097€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-04726-0

© Edilivre, 2017
Dédicace

À Martine, pour son soutien indéfectible.
Et aussi, à Jacques, Sabine et Robert.
Exergue

« Je comprends ici ce qu’on appelle gloire :
le droit d’aimer sans mesure. »
Albert Camus. (Noces à Tipasa)
« Ce ne sont pas les pays les plus beaux, ni ceux où la vie est la plus douce, qui prennent le cœur davantage, mais ceux où la terre est le plus simple, le plus humble, près de l’homme, et lui parle une langue intime et familière. »
Romain Rolland (Jean-Christophe, Livre VI, Antoinette)
I
Hautes-Alpes
Avril 1958
Il est là. Fidèle au rendez-vous du printemps. Il « cercle » sans autre mouvement apparent que celui d’orienter sa tête de temps à autre pour mieux discerner de possibles proies. Ses ailes larges sont terminées par des plumes qui les font apparaître finement dentelées à leurs extrémités. Il a sans doute quitté en fin de matinée son nid aménagé dans un creux de rocher au flanc de la falaise austère, la crête de Pécé, qui se dresse de l’autre côté de la vallée de la Clarée. Sa femelle y couve peut-être déjà l’œuf ou les deux œufs de l’année. Il a profité de la portance augmentée offerte par l’air réchauffé par le soleil d’avril pour rejoindre ce vallon herbeux. Celui-ci s’étend depuis la limite de pousse des mélèzes jusqu’au col de Granon, plus haut. Le vallon est en effet le lieu d’habitat ou de passage de nombreuses espèces de petits animaux rongeurs, notamment de mulots, marmottes et écureuils, qui tous courent en ce printemps au plus pressé : manger, reconstituer la couche de graisse avec laquelle ils ont entamé l’hiver dernier pour un sommeil de quelques mois, manger les jeunes pousses tendres qui ont entamé leur croissance sitôt la neige enfin défaite, battue, réduite puis disparue tout à fait et faisant place à une nappe d’humidité couvrant la terre noire, l’humus, suintant de partout, se rassemblant en minces filets d’eau qui se frayent une minuscule voie dans la pente. En prêtant l’oreille, on perçoit le crépitement léger mais continu de l’évaporation sous le soleil de cette eau se séparant des mousses et des surfaces où elle n’est pas assez forte pour constituer des ruisseaux. Plus loin, au fond du vallon, c’est le début d’un petit torrent que l’on entend à sa pleine capacité bouillonner des eaux de fonte des neiges descendues des sommets. Plusieurs espèces de petits oiseaux pépient aux alentours proches, ainsi un couple de rouge queue noir volète de rocher en rocher sur les hauteurs ; à chaque arrêt, chacun lance une tirade bien sentie destinée à la terre entière et se terminant par ce drôle de bruit de papier que l’on froisserait. En venant planer au-dessus du val, l’aigle royal sait qu’il peut étancher sa faim après les privations qu’il a aussi endurées à la mauvaise saison. C’est un habitué du val. Il sait également que l’homme ici n’est pas un danger pour lui, car trop affairé à préparer la « belle » saison, qui n’est belle que pour les gens des villes, alors que pour ceux d’ici, elle représente un enfer de travail acharné sur cette terre maigre qui ne rend que peu et de toute manière pas à proportion des efforts déployés pour lui arracher une récolte. Justement, les deux hommes, deux frères, sont étendus sur le seul endroit à peu près au sec du val : à environ vingt mètres du chalet d’alpage familial, un large rocher dont le dessus plat permet de s’allonger ou de casser la croute au soleil. Montés à l’aube de la vallée, ayant traversé les névés qui ponctuent encore ça et là le chemin de la montée, ils se reposent après avoir préparé le chalet d’alpage pour la saison d’été : réparer ce qui a été endommagé par l’hiver, préparer les enclos pour recevoir les bêtes, fourbir les outils agraires qui seront utilisés sur place. Ils ont partagé une miche de pain, du fromage et du saucisson, bu l’eau de la gourde. Le cadet, fasciné, guette sans bouger le moment où le rapace va fondre sur une proie, repliant en partie ses ailes pour ne les rouvrir qu’en arrivant sur sa victime au sol, sans s’arrêter pour reprendre l’air, lesté de celle-ci. En attendant, il hume l’odeur de l’herbe et de la terre mouillée : une odeur forte un peu acide. Il perçoit également l’odeur de la bergerie du chalet dont les portes sont ouvertes : l’ammoniaque puissant a survécu à l’hiver alors que les bêtes ont déserté l’endroit à l’automne dernier pour se réfugier au bas de la vallée, dans la maison-ferme familiale. Il contemple maintenant les massifs nains de rhododendrons dont les feuilles vernies brillent au soleil, et les plants de myrtilliers, qui ça et là parsèment les flancs du vallon. Puis, il poursuit son observation du rapace. Il envie sa capacité à planer si longtemps, à décrire de belles courbes dans les airs, à s’élever sans effort apparent, en tout cas sans battement d’aile, à accélérer brusquement en descente, quitte à reprendre de l’altitude tout aussi aisément. Le jeune homme s’imagine doté de pouvoirs surnaturels qui lui permettraient d’agir de même. Au moins planer au dessus du paysage familier. Rêves de gosse. Ils sont revenus souvent ces rêves, ces derniers temps, sans doute en raison de l’approche du moment où il va devoir partir.
Il est tiré de sa rêverie par des sifflets dont la tonalité et la durée ressemblent un peu à ceux qu’émettent les marmottes pour sonner l’alerte. Il se redresse sur ses coudes, comme son frère, pour découvrir un homme d’une cinquantaine d’années qui monte de la vallée et vient à leur rencontre. Il reconnait sans peine son père dont les sifflets sont un peu un signe de reconnaissance familial. Celui-ci n’avait pas prévu de les rejoindre. Il s’interroge, intrigué, sur la raison de sa venue, une raison certainement d’importance, sachant que son père toujours très occupé à l’exploitation de leurs terres et aux soins à donner à leurs bêtes.
Arrivé près du rocher où les deux jeunes hommes sont maintenant assis, le père dit simplement au cadet en tendant une enveloppe froissée :
« Le facteur a apporté cette lettre ce matin. Elle est pour toi. Y a le tampon des armées sur l’enveloppe. J’ai pensé que c’était important que tu l’aies tout de suite, puisque vous êtes là pour plusieurs jours. Je n’ai pas osé l’ouvrir. Tiens. »
Le garçon s’en saisit et l’ouvre pour la parcourir rapidement. Il est convoqué le 2 mai 1958, dans une quinzaine de jours, à une caserne de Pau en vue de son incorporation dans un régiment de parachutistes pour y effectuer son service militaire. Il apprend qu’il appartient à la Classe 58-1/C, mais cette indication ne lui parle pas trop. Il pousse un soupir de soulagement car ses vœux sont exaucés : lui aussi va pouvoir planer, un peu comme cet aigle au-dessus d’eux. Découverte de nouvelles sensations en perspective ! Dans son esprit à cet instant, le reste n’a pas d’importance, dans la mesure où le service militaire est de toute façon obligatoire.
Agé de 20 ans, Pierre Charprat est le second fils de paysans modestes, quoique assez aisés pour cette vallée de Névache dans les Hautes Alpes où l’on vit chichement de cette terre médiocre. Les habitants ont essayé de tous temps de diversifier leurs sources de subsistance en élevant quelques bêtes, conduites à la belle saison dans les alpages. Auparavant, quand ils étaient retenus dans leurs maisons par la rigueur de l’hiver, ils exerçaient des petits métiers en travaillant par exemple le bois pour réaliser des meubles de facture brute, la laine ou même les peaux pour s’assurer un petit revenu complémentaire. Mais ces dernières activités sont de moins en moins pratiquées. Dans cette vallée, le tourisme d’hiver n’a pas encore de prise sur l’économie locale ; il connaît seulement un début d’essor dans une ou deux vallées voisines. La vie des habitants des villages de la vallée reste marquée par cette économie de subsistance tout au plus et, par voie de conséquence, encore par un certain esprit communautaire d’aide mutuelle à la survie, mais aussi par son pendant : une méfiance nette à l’égard des étrangers à la commune, et davantage, des étrangers à la vallée. Méfiance également envers ce qui déroge à ce qui a été éprouvé et a fonctionné de longue date.
Le père de Pierre possède quelques champs au fond de la vallée, proches de leur village de Val-des-Prés. Il y cultive principalement l’orge, le seigle, l’avoine, le blé et la pomme de terre. Un potager lui permet de disposer en complément de quelques légumes du printemps à l’automne. Il possède et élève aussi 75 moutons, 8 vaches et une bête de bat, un mulet, pouvant éventuellement servir aux labours. De plus en plus rarement, un porc est acheté à l’automne pour être tué avant la Noël.
Comme un certain nombre d’exploitations de la vallée, celle du père a connu sa première mue conséquente vers la moitié des années 50 avec l’introduction d’un premier engin à moteur, le motoculteur-faucheur sur deux roues motrices dont la barre de coupe située à l’avant, d’environ 1,50 mètre de large, peut opérer sur pratiquement toutes les pentes et est capable de tracter des carrioles de taille moyenne. Le motoculteur retourne la terre également ; cette modernisation révolutionne l’exploitation de la terre en région alpine en permettant infiniment plus facilement et plus rapidement de labourer, de tirer plus droit, et donc de réaliser un meilleur travail plus vite avec même moins de personnes et bien sûr en faisant l’économie d’une bête de trait. En revanche, le tracteur n’est pas encore arrivé dans la région, car trop cher à l’achat, pas assez rentable en raison de la taille réduite des parcelles et parce qu’il risque de se retourner sur les pentes conséquentes. Le mulet est utilis

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