La colère en héritage
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La colère en héritage , livre ebook

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Description

Paris, le 21 septembre 1792, Célestin Brieux, jeune avocat normand fraîchement élu à la Convention nationale, débarque dans la capitale et découvre, ébahi, le manège des Tuileries et ses illustres hôtes. À moins de 150 kilomètres de Paris et pourtant à mille lieues des préoccupations politiques du moment, en Normandie, Eugène Lesueur pense déjà aux semis à venir. Après tant d’années de dur labeur, il envisage désormais de céder à deux de ses fils, Allain et Arsène, les quelques arpents de terre arable qu’il possède dans la vallée du Cailly au détriment de l’aîné, Tancrède, qui a claqué la porte de la chaumière voilà déjà dix ans. Mais au terme d’un hiver rigoureux, Eugène tremble pour ses garçons alors qu'une levée en masse est décrétée.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 28 novembre 2022
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414592357
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
Immeuble Le Cargo, 157 boulevard Mac Donald – 75019 Paris
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-59235-7

© Edilivre, 2022
Du même auteur
Du même auteur
— Quand la guerre cessa d’être drôle – Édilivre – 2020
— Mañana – Édilivre – 2021
— London Calling – Édilivre – 2021
Couverture réalisée par Marie Quelvennec
Exergue
La colère est comme une avalanche qui se brise sur ce qu’elle écrase
Sénèque
I
La diligence marqua un court arrêt au passage de la barrière d’octroi de l’étoile. Célestin Brieux, parti la veille de Rouen, héla le cocher qui consentit contre quelques sous à le déposer au plus près de l’entrée du jardin des Tuileries. Quand l’attelage s’immobilisa enfin place de la Révolution, le Rouennais, impatient de se dégourdir les jambes, salua ses trois compagnons de voyage et s’empressa de sortir de la berline. Ébahi, il embrassa du regard la gigantesque esplanade. Ému de fouler pour la toute première fois le sol de la capitale, il ne prêta pas attention au postillon qui, déjà perché sur le toit de la Turgotine, le siffla au moment de lui balancer sans ménagement son imposant bagage. Il parvint toutefois à le rattraper au vol juste avant qu’il n’atterrisse dans une flaque d’eau boueuse. Furieux, il lança un regard noir au jeune et agile garçon qui avait déjà lestement repris sa place à la droite du cocher. D’un claquement de fouet, la diligence s’ébranla tirée par ses six puissants chevaux en direction de la place Louis-le-Grand.
Célestin prit le temps d’admirer les ornements du portail avant de s’engager dans le vaste et paisible jardin que baignaient les pâles rayons d’un soleil matinal déjà haut perché du côté du palais. Il envisagea d’abord de flâner hors des grilles qui ceinturaient le parc, mais se ravisa craignant de s’égarer dans le dédale des rues de la capitale. Pour rien au monde, le Normand, fraîchement élu aux élections législatives de septembre, ne voulait manquer l’ouverture de la première session de la convention nationale.
Peu à peu, Parisiennes et Parisiens investirent les allées. Ce vendredi 21 septembre 1792 s’annonçait clément. Célestin croisa deux jouvencelles, apparemment de bonne famille, qui se tenaient bras dessus, bras dessous. L’une d’elles, une jolie rousse au teint pâle et au visage parsemé de taches de rousseur se retourna. Leurs regards se croisèrent.
Les joues de l’ingénue rosirent, elle éclata d’un rire gêné avant de poursuivre son chemin. Il s’en trouva flatté. Du haut de ses vingt-cinq printemps, Célestin, la taille élancée, les hanches étroites et les yeux couleur émeraude, rencontrait déjà d’ordinaire un succès honorable auprès de la gent féminine, mais le costume qu’il s’était choisi aujourd’hui, composé d’une redingote grise impeccablement coupée, fermée par de jolis boutons d’ébène, le cou enserré dans un jabot immaculé et chaussé de reluisantes bottes de cuir à revers lui donnait cette allure qu’ont les gens importants. Il consulta la montre à gousset offerte par son père pour célébrer son élection. Encore deux bonnes heures à patienter avant que s’ouvrent les portes du manège. Son imposante valise l’encombrait. Il balaya le parc du regard à la recherche d’un endroit où se poser et repéra un muret à l’ombre des ormes. Il s’assura qu’il fut dépourvu de fiente des pigeons qui pullulaient autour du grand bassin octogonal et s’y assit, songeur. Il se remémora ce moment de joie intense qu’il ressentit à l’annonce de son élection et ce regard empreint de fierté, mais aussi d’inquiétude qu’il lut dans les yeux de son père. D’un coup, il sentit l’anxiété l’envahir à son tour. Assailli par le doute, il s’interrogea sur sa légitimité, lui, le petit avocat de province à siéger parmi les héros de la révolution, des figures de la constituante et de l’Assemblée nationale tels que Pétion, Brissot, Danton ou encore Robespierre.
***
Né à Elbeuf, commune située sur les rives de la Seine, à quelques encablures de Rouen le 7 janvier 1767, le jeune Célestin grandit au sein d’une famille aisée de la bourgeoisie Normande. Bon élève, il se destinait à la prêtrise et fit ses humanités classiques avant un court passage d’une année chez les oratoriens, mais à 16 ans, l’âge où s’éveillent les sens, il se sentit moins enclin à l’abstinence et la contemplation et opta finalement pour le droit.
Au terme de brillantes études et grâce aux bonnes relations entretenues par son notaire de père avec quelques magistrats rouennais, il décrocha en mars 1787 un poste de clerc au bureau du procureur du roi qu’il occupa durant deux années. Confronté à la violence, à la misère, au vice et au cynisme, le fils à papa un tantinet naïf et innocent découvrit avec stupéfaction la propension de l’homme à prendre plaisir à faire souffrir son prochain. Atterré, il s’en émut auprès de son père et lui fit part de ses doutes. Gontran lui proposa alors de l’associer à son cabinet, lui suggérant même qu’il pourrait lui succéder d’ici quelques années. Tout d’abord séduit par la perspective de travailler au côté de son père qu’il vénérait, le jeune homme déclina finalement l’offre, craignant de s’installer trop vite dans une routine qui le rebutait. Il rêvait d’un destin plus grand, d’un avenir plus prestigieux. C’est alors que survinrent les évènements de l’été 1789. Bien que moins impactée que Paris, la cité normande connut au début de l’été son lot d’émeutes dont on imputa la responsabilité à huit pauvres types sommairement jugés et qu’on s’empressa de pendre pour l’exemple sur le pont flottant qui joignait alors les deux rives de la Seine. Indigné par le déroulement du procès et choqué par la sentence, Célestin sut à compter de ce jour quelle serait sa voie. Il sera avocat.
***
Un courant d’air frais venu de l’est le fit frissonner. Son regard se porta en direction du palais des Tuileries, théâtre du drame survenu quelques semaines plus tôt et qui acheva de le convaincre de se lancer en politique. Il se remémora ces quelques jours qui devaient à tout jamais changer le cours de sa vie.
Il rentrait d’une partie de pêche le long des berges de la Seine en compagnie de son père. La journée avait été chaude et ensoleillée. Il venait de perdre un procès et il avait éprouvé le besoin de se ressourcer auprès des siens. Son père, Gontran, était toujours de bon conseil et ne manquait jamais de le réconforter. Ils s’apprêtaient à griller perches et gardons quand Gontran aperçut par la fenêtre Lantier, son tabellion, approchant à grands pas l’air préoccupé. Surpris, il l’accueillit gravement et l’invita à s’asseoir. Le notaire qui s’était accordé quelques jours de repos redoutait la survenue de quelque complication dans le traitement de l’un des dossiers dont il lui avait confié la charge, mais ce que Lantier lui apprit, bien que n’ayant aucun rapport avec le fonctionnement de l’officine, l’affecta pourtant profondément.
[Ivres de colère après les menaces proférées par Brunswick, général en chef des armées ennemies à l’endroit du peuple français s’il devait arriver malheur au roi, des centaines de sans-culottes parisiens ainsi que des fédérés bretons et marseillais se précipitèrent sous les fenêtres du palais des Tuileries au matin du 10 août, vociférant contre Louis XVI, l’accusant de trahison et de collusion avec l’ennemi. Contrainte de fuir le palais, la famille royale se réfugia alors au manège ou les députés de l’Assemblée nationale l’assurèrent de leur protection à la condition que le monarque renonçât à ses attributions. N’ayant pas d’autre choix et craignant pour sa sécurité et celle de sa famille, Louis XVI acquiesça et ordonna aux Suisses chargés de sa garde que cessât la fusillade déclenchée après que les insurgés, rejoints par des éléments de la garde nationale, eurent tenté d’investir le palais, les livrant à la fureur des assaillants.]
Inquiet, exécrant le désordre, Gontran Brieux redoutait que les évènements de 1789 ne se répètent et que, cette fois, le pays ne sombre pour de bon dans l’anarchie. Le notaire se satisfaisait plutôt bien de la constitution de 1791 et de l’instauration d’une monarchie constitutionnelle. Il gardait foi en ce régime qu’il trouvait finalement plutôt équilibré. Les révélations de Lantier le plongeaient à nouveau dans le désarroi. Il redoutait désormais que le conseil exécutif provisoire, avec à sa tête Danton, élu par l’assemblée le jour même pour pallier la suspension du roi, n’ait de provisoire que le nom. Inquiet, il prit la route le soir même pour Caudebec, bourgade distante d’une quarantaine de kilomètres pour s’en émouvoir auprès de son ami d’enfance et maire de la commune depuis 1789, Charles Hecquet, qu’il savait bien au fait des arcanes du pouvoir parisien.
L’édile le rassura et lui confirma la tenue prochaine d’un nouveau scrutin qui, pour la première fois, permettrait d’élire les députés au suffrage universel masculin et que, lui-même, comptait bien, cette fois, faire valoir sa candidature. Célestin, qui avait accompagné son père, se tenait dans un coin de la pièce, silencieux, quand soudain Hecquet l’interpella :
— Et toi, Célestin ! Tu es jeune et pas bête. Je sais ton père récalcitrant à l’idée de s’engager en Politique, mais toi qu’en dis-tu ? Fort du nom que tu portes et de la bonne réputation des Brieux à Rouen, pourquoi ne te présenterais-tu pas à mes côtés dans les rangs des modérés ?
Célestin ouvrit de grands yeux.
— Moi ?
— Oui toi ! Tu es avocat, tu présentes bien et je suis certain que tu es quelqu’un de raisonnable ; et Dieu sait qu’une dose de raison serait la bienvenue à Paris.
D’abord rétif, Célestin prit toutefois le temps de la réflexion et finit par entrevoir dans cette proposition, une occasion unique de réaliser ses ambitions. Une quinzaine de jours plus t

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