La Mère de Marguerite
29 pages
Français

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Description

C’était un des plus sombres dimanches du plus sombre mois de l’année. Un brouillard épais enveloppait Londres nuit et jour, s’éclaircissant à peine pendant quelques heures, aux environs de midi. Les cloches rendaient un son si mat et si lointain, qu’elles semblaient suspendues au-dessus des nuages. L’œil ne parvenait pas à distinguer les clochers. L’atmosphère humide pesait lourdement sur chacun ; les passants se mouvaient comme des fantômes, oppressés par cette obscurité anormale ; le soir seulement on reprenait quelque élasticité ; on se sentait moins écrasé par les ténèbres que dans la journée.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

Informations

Publié par
Nombre de lectures 1
EAN13 9782346102723
Langue Français

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Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
L’église de M. Stéphen.
Hesba Stretton
La Mère de Marguerite
I
C’était un des plus sombres dimanches du plus sombre mois de l’année. Un brouillard épais enveloppait Londres nuit et jour, s’éclaircissant à peine pendant quelques heures, aux environs de midi. Les cloches rendaient un son si mat et si lointain, qu’elles semblaient suspendues au-dessus des nuages. L’œil ne parvenait pas à distinguer les clochers. L’atmosphère humide pesait lourdement sur chacun ; les passants se mouvaient comme des fantômes, oppressés par cette obscurité anormale ; le soir seulement on reprenait quelque élasticité ; on se sentait moins écrasé par les ténèbres que dans la journée. Çà et là, quelques églises ou chapelles brillamment illuminées ouvraient leurs portes pour souhaiter la bienvenue aux auditeurs, mais on était frappé de voir que ces lieux de culte n’étaient guère fréquentés que par des gens riches, et que les pauvres s’abstenaient d’y paraître.
La chapelle à la mode, dont Daniel Durer était sacristain, ne faisait pas exception à la règle. Tout y était disposé pour satisfaire le goût d’élégance et de bien-être des fidèles opulents. Les dossiers des bancs de chêne étaient assez élevés pour permettre à un dormeur d’y faire confortablement une petite sieste ; ils étaient rembourrés et garnis de coussins. Des tapis étaient placés sous les pieds, les lampes ne projetaient qu’une lumière douce, et le calorifère répandait partout une chaleur égale.
Les foules qui se pressaient chaque semaine autour de la chaire ne faisaient qu’augmenter ; aussi ce fut avec une véritable répugnance que Daniel consentit à partager ses fonctions avec un aide. Quoique celui-ci restât toujours dans une position inférieure, et ne possédât ni l’expérience, ni le maintien plein de dignité de Durer, ce n’en était pas moins pour ce dernier un crève-cœur de ne pouvoir plus suffire seul à l’entretien de la chapelle.
La congrégation se préoccupait beaucoup, depuis quelque temps, de deux choses : On trouvait d’abord que le ministre avait besoin d’un collègue, et il paraissait ensuite nécessaire d’agrandir la salle de culte. Quant au second pasteur, ce n’était pas chose facile à découvrir. Il fallait un homme de talent, qui continuât à attirer les masses, car on pouvait constater une grande diminution dans le nombre des auditeurs, quand M. Stephen prenait ses vacances annuelles, ou qu’on savait d’avance qu’il se ferait remplacer. Néanmoins, on voulait un suffragant, parce qu’il était évident pour tous les membres du troupeau que leur cher conducteur était surchargé de travail et que sa santé en souffrait. Pour l’agrandissement ou même la reconstruction de la chapelle, la difficulté était bien moindre, car l’argent seul était nécessaire, et la liste de souscription ouverte à la sacristie était déjà couverte de bon nombre de signatures. Les plans même d’un éminent architecte étaient approuvés.
Les portes de la chapelle étaient donc ouvertes le dimanche soir dont nous parlions en commençant. Daniel avait allumé le gaz. Marguerite avait épousseté soigneusement la sacristie et préparait la Bible et le livre de cantiques que Durer devait déposer dans la chaire, lorsque l’organiste ferait entendre ses premiers accords. Daniel se tenait sous le porche, comme un serviteur fidèle prêt à recevoir les hôtes de son maître, et son austère visage s’éclairait à mesure que les équipages se succédaient. Les filles du pasteur lui sourirent en passant et, tout en fermant sur elles la porte de leur banc, il mit un redoublement de zèle à faire placer les auditeurs qui se pressaient dans le sanctuaire.
M. Stephen était entré dans la sacristie, juste au moment où Marguerite enlevait les derniers grains d’une poussière imaginaire sur la Bible. Il prit une chaise et s’installa devant le feu. Il paraissait triste et abattu ; sa tête se penchait mélancoliquement sur sa poitrine. Pendant un instant, Marguerite resta immobile en le regardant ; puis, avançant La main, une petite main encore maigre et fluette, elle la posa sur le bras du pasteur.  — Marguerite, dit celui-ci, je suis triste ce soir, et je me sens le cœur oppressé.

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