Na-ni ou les potins de Moursal
334 pages
Français

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Na-ni ou les potins de Moursal , livre ebook

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Description

NA-NI, GAWALA, CONGOSSA.



Na-ni, c’est un cliché sur la vie des Tchadiens durant cette brève ère du boom pétrolier, où l’illusion de jours meilleurs a commencé à s’ancrer dans l’esprit d’une certaine jeunesse. Une jeunesse mal préparée à l’épargne, bercée par de très mauvais exemples d’une classe d’arrivistes irresponsables qui confondent gabegie et réussite et ont conduit toute une génération de jeunes à la faillite sociale et le pays tout entier à une faillite économique, à jamais préjudiciable aux générations futures .



Quand règne la censure, les rumeurs s'imposent. Na-ni, gawala congossa, c'est ça. Des rumeurs, révélées à travers l'histoire de Mass, Hamid, Gong et Abdoul, le cliché d'une époque de rêves et d'illusions.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 22 mars 2021
Nombre de lectures 1
EAN13 9782414479931
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
Immeuble Le Cargo, 157 boulevard Mac Donald – 75019 Paris
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-47992-4

© Edilivre, 2021
Avant-propos Pourquoi Nani ?
Habitué, pendant une vingtaine d’années, à traiter des informations d’actualité sur le quotidien des Tchadiens et à les restituer à la consommation des lecteurs, semaine après semaine, je me suis retrouvé pris dans l’engrainage d’un exil improvisé. Loin du théâtre des faits et événements qui nourrissaient ma plume, j’en restais habité et hanté sans possibilité de recours à cet exutoire que m’offrait le canard. Na-ni est en sorte une réponse à cette envie de rester dans l’arène, de continuer à me sentir témoin et interprète des événements du quotidien qui animent la vie de la communauté nationale tchadienne, à travers le regard de ses habitants de la capitale, ceux du quartier Moursal, en particulier. Nani, pour reprendre l’expression de ma chère Delphine, est une « fresque sociale ludique ». Réaliste, puisque s’inspirant d’anecdotes et de faits d’une grande vraisemblance, l’ouvrage reste entièrement du domaine de la fiction. Et ses personnages tout autant. Mais cette oeuvre n’a pu prendre corps que grâce à l’encouragement de tous ceux qui, en ayant lu des extraits, m’ont poussé à en faire un livre. Une aventure que je n’envisageais pas pour Mass et ses amis.
Je remercie donc tout ce beau monde, mes parents et mes amis. Une note affective spéciale à ma famille, notamment à mon épouse Delphine Mortha, à ma fille Rita Nelly dont la ténacité a eu raison de mes réticences, à mon fils Madjirébaye et à mes filles Novellis et Mantar. Leur enthousiasme solidaire m’a donné cette envie d’aller jusqu’au bout. Enfin, je dédie ce livre à ces êtres aujourd’hui disparus, chers à mon cœur et toujours présents à mon esprit. Kladoum, Jeannette, Béyam, Éric, Néhémie, Tchamane, Obed, Mataye, vous me manquez tant.
À ma mère Banta, un océan d’amour et d’humour et à mon père Benoudjita, un homme de grande fierté.
À tous ceux qui ont aimé Na-ni, au premier rang, mon cher Patrick Kanika.
Na-ni : Les potins de Moursal
Introduction : Moursal, la plus grande concentration démographique de la zone urbaine de N’Djaména où résident majoritairement des populations issues des régions méridionales du Tchad. Chrétiens, Animistes et Musulmans s’y côtoient, dans une relative bonne entente. Ce vaste quartier, aux limites anciennement bien circonscrites, entre le grand Buta d’Ardepdjoumbal, l’Hippodrome, au Nord-Ouest, Sabangali à l’Ouest et Chagoua au Sud, intègre désormais de plus vastes périmètres englobant les 6 ème , 7 ème , 8 ème et 9 ème arrondissements. Paris Congo, Moursal, Chagoua, Abena, Atrone, Gassi, Mandjafa, Bakara et, au-delà du pont qui enjambe le Chari vers le Sud, Walia, ces quartiers aux noms évocateurs, définissent par leur mode du vivre ensemble ‘Les Moursals’.
Une manière de vivre, c’est bien de cela qu’il s’agit. Celle où la convivialité prime sur l’individualisme et où les gens expriment librement leurs différences, leurs choix d’être, d’exister, de vivre au quotidien. Une liberté qui dénote par rapport à cette « régimentation » de la vie dans les quartiers septentrionaux où, l’Horloge Hégire harmonise le rythme, le mode et la manière d’être de la grande majorité des habitants.
Moursal, ville renégate, ville insoumise et mécréante ? Non. Les termes cosmopolite et tolérante conviendraient mieux pour qualifier l’aptitude de cette cité, dans la cité N’Djamenoise, à accueillir toutes les diversités culturelles et, à façonner ses habitants dans une ouverture d’esprit rarement égalée au Tchad. Une cité qui baigne dans les cantiques des églises éveillées mais où, autant que dans les autres quartiers de la ville, la vie est aussi rythmée par l’appel à la prière des muezzins dont la tonitruance des hauts parleurs rivalise avec celle des bars dancing et ne semblent en rien, perturber la quiétude des habitants.
Moursal, cité interstitielle, perdue, oubliée par le développement ? Oui, vu le contraste qu’offre ce quartier, le plus peuplé de la capitale, avec ceux des quartiers cossus, surtout la nuit où, le grand Moursal, habillé du manteau noir de la pénombre, dénote des périmètres au-delà de l’avenue Gafar El Nimeiri qui scintillent des mille feux de leurs lampadaires.
Mais Moursal, cité agonisante ? Paradoxalement non ! Ici, la vie refuse de mourir malgré la très grande précarité matérielle qui marque le quotidien des habitants. Au contraire, en côtoyant voire, en célébrant au quotidien la mort, les habitants de Moursal semblent donner à la vie un autre sens, un piment de provocation qui la rend encore plus vivante et qui nargue le spectre de la faucheuse. Vivre et laisser vivre et tant pis si la mort guette. Tel semble être la devise des Moursalois, si l’on peut les nommer ainsi. Et, c’est à cette image qu’évoluent les personnages de Na-ni , dont les principaux : Hamid, Mass, Abdoul et Gong, quatre amis inséparables et solidairement résilients qui savent se donner la main dans les moments difficiles et se jouer des difficultés avec philosophie. Ce tempérament enjoué, cette fausse insouciance caractéristique de tous les habitants de N’Djaména, les quatre amis, mieux que quiconque, l’incarnent profondément, dans toutes les dimensions de leur quotidien.
Na-ni , c’est ce cliché sur la vie des Tchadiens, de cette brève ère du boom pétrolier où l’illusion de jours meilleurs a commencé à s’ancrer dans l’esprit d’une certaine jeunesse. Une jeunesse mal préparée à l’épargne, bercée par de très mauvais exemples d’une classe d’arrivistes irresponsables qui confondent gaspillage et réussite et ont conduit toute une génération de jeunes à la faillite sociale et, le pays tout entier à une faillite économique qui restera à jamais préjudiciable aux générations futures.
Tant bien que mal, plutôt philosophes et altruistes que pessimistes, Mass, Hamid, Abdoul et Gong Daoud, à travers les péripéties de leur quotidien, nous font partager leurs heurs et malheurs des années mirage de la décennie 2005- 2015.
01 Les années vaches grasses
Avenue Kondol, Mass, assis dès 11h00, ce jeudi, 5 janvier au bar Ihinan, est au téléphone…
— Allo ! Han, allo ! Allooh ! Vraiment le réseau là ! Dire que je paie chaque matin 11,5 F !! Hamid ! Hamid ! Tu es où ?
— Allo, Mass ! Mais on a été coupés là, je suis au bureau, au travail !
— Quel travail ? Yakaye , viens !
— Attends, le SG est au bureau du Coordo. Ils sont entrain de chuchoter là, peut-être que, chokol chouiaa, hein, mon cher, l’argent va tomber !
— L’argent ? Tu as raison, reste au bureau, travaille. Mais n’oublie pas mon cher. Je t’attends. Au même endroit, simite séyi . Tu sais qu’ici, les bières sont tapées !
Une heure plus tard, Hamid arrive, chevauchant une grosse moto chinoise. Sur le porte-bagage, son attaché-case, surmonté d’une grosse enveloppe kaki, suintante de graisse. Il décroche l’enveloppe, essuie de la paume de sa main gauche, le dessus de l’attaché-case, aperçoit Mass et trois autres compagnons autour d’une table et lance sa commande avant de s’asseoir.
— Mariam , Yalah ! Une Castel bien tapée et remets la tournée sur la table de Mass !
— Je remets encore la même chose sur la table de Mass ?
— Hamid, s’asseyant, déchire délicatement l’enveloppe. Du colis déballé, s’échappent, fumants, des morceaux d’abats de bœuf : langue, rognon, tripe verte, intestin. Hamid, reniflant, invite d’un geste circulaire la tablée à manger, tout en conversant avec Mariam :
— Vite ! Apporte le sakhane, on a faim ! Et les bières, n’oublie pas. Tu as bien entendu ? Pour tout le monde, enchaîna-t-il en faisant observer à la dame du bar : « Tu demandes si tu remets encore la même chose là, c’est ton argent ? Yallah , apporte ! Je ne travaille pas les cailloux, y’a l’argent ! Driss a parlé ! ». Puis, revenant à Mass :
— Tu n’as pas travaillé quoi ?
— Quel travail, lui répondit ce dernier. Quelqu’un t’a dit qu’on travaille dans ce pays-là ? Depuis que tu es décrété et que tu fais semblant là, tu penses que c’est ça travailler, hein ? Tu travailles, à faire quoi ?
— Mais je travaille non, je suis un citoyen ! Et puis quoi, mouschkila fodjir, le matin comme çà là, répliqua Hamid entre deux reniflements.
Mass décidé à enquiquiner son ami, ne le lâcha pas.
— Tu travailles ? Avec qui et comment ?
Hamid arrêta de renifler, réfléchit un moment, puis ne voyant pas où son ami voulait en venir, sourit, se servit d’un cure dent pour extirper une fibre de viande fichée dans le trou d’une dent et grogna en guise de réponse, encourageant Mass à poursuivre.
— Dis-moi, Hamid, depuis 23 ans que tu travailles là, tu as eu combien de premiers ministres ? Tu as travaillé dans combien de départements ministériels ? Avec combien de secrétaires généraux et de directeurs généraux ? Te rappelles-tu du nombre de fois que tu as changé de quartier, de lieu de travail ?
Hamid, surpris par la pertinence des questions que lui posait son ami, se rendit compte qu’il n’avait jamais songé à retenir les noms des patrons de cette hiérarchie administrative aux têtes multiples et interchangeables à merci. Quel nom, en effet, retenir de ces administrateurs éphémères, relevés de leur fonction à peine nommés et qui, du temps de leur bref mandat, brillaient par leur absence au bureau ? Comme tout le monde a coutume de le faire, lui aussi avait choisi de n’appeler ses supérieurs hiérarchiques que par les initiales de leur titre : excellence servi à qui le veut, DG, SG ou COORDO pour ses supérieurs immédiats, voilà ce que sa mémoire retient.
Hamid en cherchant des noms à mettre sur les têtes, vit défiler des visages, plusieurs visages dont les expressions s’entremêlaient et sur lesquels il hésitait à mettre

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