Au-delà de la Tyrrhénienne
284 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Au-delà de la Tyrrhénienne , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
284 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

« Au détour d’un chemin, à proximité d’un petit carrefour, Sylvette, m’attendait, la main posée sur le tronc d’un gros pin parasol. C’était bien là, le départ de notre lieu de rendez-vous. Quand elle m’aperçut au loin. Elle se mit à courir à toutes jambes pour me rejoindre. Au même moment j’accélérais mon allure. La rencontre fut des plus explosives. Ses bras autour de mon cou, elle me couvrit de baisers. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 février 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342001440
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Au-delà de la Tyrrhénienne
Paul Tomei
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Au-delà de la Tyrrhénienne
 
 
 
À la mémoire de mes parents
 
 
 
I
 
 
 
Le banc du jardin de la Fontaine
Assis sur un vieux banc de pierre du jardin de la Fontaine à Nîmes, un très vieux bonhomme m’intriguait. J’avais alors pris l’habitude d’effectuer une promenade matinale dans ce lieu féerique, peuplé de personnages hauts en couleur, avec lequel cet individu et sa lamentable tristesse semblaient trancher. Son regard vide scrutait un horizon invisible, que seule sa pensée semblait percevoir. Je le surpris un matin, dessinant avec le bout de sa canne à pommeau de bronze, les contours hachés de l’île de Beauté. Intrigué par son manège, je m’approchai de lui et contre toute attente, je liai assez vite conversation. Au fil des jours, une sympathie mutuelle s’instaura entre nous, voire une amitié. Il était affable, généreux et assez volubile. Il paraissait à mes yeux d’un âge canonique. De petite taille, le corps sec et voûté, le cheveu rare, les mains noueuses ; il ressemblait à s’y méprendre à une vieille branche d’olivier tombée par hasard après un coup de vent, sur ce banc de pierre qui paraissait triste et désolé d’avoir reçu sur son dos ce corps décharné.
Ainsi, au fil des semaines, il me raconta sa vie sans omettre aucun détail.
— Je suis désormais seul au monde et il est temps pour moi de relater l’histoire de mon existence car la vie me fuit un peu plus chaque jour, me disait-il avec une certaine mélancolie.
Puis d’un ton pressé et caverneux :
— Mon jeune gars, pour ne pas interrompre mon récit, sois bien attentif car il me sera impossible de revenir en arrière. Écoute le vent qui se lève. Il me rappelle bien des souvenirs. J’y perçois presque le mugissement de la mer Tyrrhénienne, pourtant si lointaine. Tu l’entends ? Dis-moi que tu l’entends !
Le regard perdu au loin, je hochai la tête en signe d’approbation. À ce moment-là, il fut heureux de me faire partager son rêve.
Voici son singulier récit :
 
« La pluie d’automne tombait sans discontinuer depuis quelques jours déjà, balayant tout sur son passage. Les dalles des ruelles luisaient comme des miroirs. Un vent froid, sec et par trop souvent humide provenant de l’Est, soufflait avec force en faisant tomber de-ci de-là quelques conduits de cheminées trop vieux pour supporter les coups de boutoir de ce souffle infernal. Mais surtout les lauzes qui recouvraient les toits, glissaient et venaient s’écraser sur les ruelles dans un bruit sec, en s’émiettant en mille morceaux et rendant la circulation à pied très dangereuse. À ce moment-là, il était judicieux, voire prudent, de ne pas raser les murs.
 
Les rues étaient maintenant désertes et tristes. Les enfants n’égaillaient plus le quartier.
Ils s’étaient enfermés chez eux attendant avec une certaine impatiente et une mine renfrognée l’arrivée du soleil pour continuer leurs jeux le long des ruelles et placettes de Terra Nova. L’horizon était complètement bouché. La mer était démontée, des vagues énormes balayaient avec fureur la jetée du Dragon. Les eaux déchaînées venaient se fracasser avec rage sur les rochers en contrebas du rempart du chemin des Turquines . Les embruns de cette mer en furie enveloppaient notre quartier comme un brouillard blanchâtre au goût iodé. Un bruit effrayant nous parvenait comme un lugubre et assourdissant roulement de tambour. La ville basse de Terra Vecchia subissait depuis la veille les assauts incessants de cette masse d’eau terrifiante. Les frêles barques des pêcheurs avaient rompu leurs amarres et venaient se briser contre la jetée du vieux port dans un fracas sinistre. L’église Saint-Jean n’était presque plus visible. Une épaisse brume l’avait recouverte de son manteau grisâtre. Au large, un bateau à peine identifiable attendait en louvoyant sans cesse une hypothétique accalmie pour rejoindre enfin le port à Bastia. Les passagers se trouvant à bord de ce rafiot devaient être dans un piteux état. La houle s’apparentait à une série de montagnettes verticales. Au seuil critique de la tempête, la tête des mâts du navire disparaissait derrière la crête des vagues.
Ce matin-là, loin de rêvasser sur mon lit, je divaguais dans les ruelles balayées par le vent. Je recherchais l’endroit stratégique pour observer la fureur de la mer. Ce matin-là les ruelles étaient désertes.
Depuis un long moment déjà, du haut de mon promontoire, près du donjon du Palais des gouverneurs, je songeais.
Mes yeux se posèrent sur ce paysage en lutte contre les éléments déchaînés. J’avais de ce lieu une vue plongeante sur le vieux port. Les yeux rivés sur le môle génois qui gémissait à fendre l’âme, j’apercevais avec effroi les lames déferlantes qui enveloppaient par instants la digue.
À ce moment-là, je pensais que les rochers qui étaient destinés à briser la puissance des vagues afin de protéger la jetée, avaient fort à faire pour enrayer la menace de ce flot ininterrompu.
Mon quartier de Terra Nova fut bouleversé de m’offrir ce spectacle. La mer était secouée malgré elle par cette tempête automnale. L’atmosphère était lourde et morose. Je me dirigeai par la suite vers l’oratoire baroque de Sainte-Croix. L’imposante porte d’accès était recouverte par un gros tas de feuilles mortes qui tournoyaient sans cesse sous l’effet des rafales.
Choisir cette morne saison pour quitter l’île, afin d’atteindre un eldorado chimérique sur les côtes de Provence, n’était pas tellement judicieux.
J’avais à l’époque à peine dix-neuf ans. Je ne connaissais pas du tout la région qui allait bientôt nous accueillir : le Languedoc. J’avais lu étant plus jeune un beau recueil d’Alphonse Daudet qui avait écrit avec beaucoup de talent plusieurs nouvelles sur la Corse et sur sa Provence natale : Les Lettres de mon moulin . Il était considéré à son époque comme un auteur charmant. J’aimais bien m’imprégner de son atmosphère provençale.
 
Un autre auteur, Marcel Pagnol, m’avait captivé à tel point que j’avais appris par cœur certaines répliques de sa fameuse trilogie. Les œuvres de ces deux écrivains furent pendant longtemps mes livres de chevet. Ma petite chambre située dans un vieil immeuble de la Citadelle, résonna longtemps de mes éclats de rire à la lecture de ces écrits.
 
Il m’arrivait assez souvent pendant la belle saison de courir sur une bonne partie de cette enceinte avec d’autres camarades plus intrépides, voire plus inconscients : de vrais casse-cou. Le risque de faire une chute mortelle sur les rochers situés en contrebas de la marine était alors plus qu’évident. C’était, il est vrai, un jeu tellement stupide. Mais à cet âge-là, je ne mesurais pas encore tous les risques encourus. C’était en quelque sorte un défi que l’on se lançait, visant à mesurer notre bravoure et notre habileté, mais aussi pour épater les quelques filles qui nous observaient avec une certaine admiration quand l’obstacle était franchi. Nos parents n’appréciaient pas du tout ces jeux débiles. Le soir à la maison, les coups de pied au derrière remplaçaient souvent les caresses !
Mais, malgré nos fesses endolories, ces courses folles perduraient. Au printemps, avec l’arrivée des hirondelles et des martinets, certains de mes camarades grimpaient sur ces remparts pour une partie de pêche improvisée aux volatiles.
Ils se munissaient alors d’une assez longue ligne, accrochaient en guise d’appât un petit morceau de pain ou bien alors un insecte quelconque et balançaient le tout à proximité du vol des hirondelles ou des martinets qui ne manquaient pas de les happer au passage. C’était un jeu d’adresse sans danger pour les oiseaux qui étaient aussitôt relâchés. Ils reprenaient assez vite leur vol, en évitant toutefois les lignes qui cinglaient et s’entremêlaient autour d’eux. Il n’y avait jamais d’hameçon au bout de ces lignes ; c’était la règle. Mais pour ma part, je ne trouvais aucun plaisir dans ce jeu : il demeurait dangereux pour ces magnifiques oiseaux qui, dans les premiers jours de printemps, venaient s’égayer autour d’un immense nuage d’insectes au bord de la falaise. En bas, la mer miroitait leur évolution dans l’air avec une pointe d’envie.
J’observais leur vol en piquet majestueux, ponctué de virages presque en angle droit pour gober un insecte au passage. Je préférais les voir évoluer dans leur milieu naturel de prédilection, tels des pilotes de chasse. En l’air, ils sont de par leur nature de purs virtuoses de la navigation grâce à leurs ailes très longues et effilées comme la lame d’un couteau. Au sol, ils se révèlent gauches ; leurs pattes très griffues les empêchant de sautiller comme les moineaux. Leurs griffes sont tout juste bonnes à s’accrocher sur le mur d’un immeuble, pour confectionner leur nid. Le plancher des vaches n’est pas leur élément. Ils ne trouvent leur nourriture que dans le ciel. L’apparition des hirondelles annonçait un printemps doux et agréable et même un été chaud, flamboyant avec une mer azur.
 
Pendant la saison des abricots, les noyaux nous permettaient de nous lancer dans un jeu d’adresse peu commun sur les vastes et pentues marches de notre quartier, recouvertes de grandes lauzes.
 
Ce jeu consistait, dans un premier temps, à disposer un nombre conséquent de noyaux d’abricots à l’intérieur d’un petit cercle tracé à la craie : c’était la mise. Ensuite, de l’arête de la marche située à environ trois mètres, il fallait projeter un noyau uniquement à l’aide la paume. Ce geste adroit devait perc

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents