Crématorium de mon cœur
366 pages
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Crématorium de mon cœur , livre ebook

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Description

Agate se hait. Elle a trois amies intimes : une maladie incurable, une dépression et la culpabilité.
Un jour, un événement angoissant la contraint à quitter sa mélancolie. Poussée par la vie, par la colère et le besoin de vérité, Agate part à la découverte d'elle-même, vacillant parmi les mensonges et les trahisons du passé. Mais comment peut-elle parvenir à aimer et s'accepter quand son corps réagit encore comme au temps des violences ? Le corps peut-il pardonner simplement parce que le mental et le cœur tendent à se libérer d'un poison ?
D'une épreuve à l'autre, Agate apprend à guérir et à se construire...

Réalisé avec humour et gravité, ce roman contrasté évoque la remise en cause de croyances délétères dans lesquelles certains ont pu mijoter, enfants.
Il est un message de compassion et d'encouragement à l'égard de ceux qui ont perdu tout espoir de bonheur et de liberté personnelle, et de ceux qui aimeraient comprendre un proche englué dans la dépression.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 mars 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332816146
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0090€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-81612-2

© Edilivre, 2015
Dédicaces

Aux petites marques dont l’ignorance fait passer les sas pour des geôles.
-15
Dans le quartier, les voisins s’entendent plus, mais moins bien. Ils vivent l’époque de l’économie des mots et de l’empathie.
Les chiens, aussi, participent au fond musical du lieu, en contant aux passants leur vie de cloître.
Le généreux couvercle du ciel réchauffe les jardins, les cabanes, les fils à linge et les volets clos. Il avait été décidé que ce coin de tranquillité jouirait des plus fréquents ensoleillements du pays, et c’était une des raisons avouées pour lesquelles son treizième déménagement en dix ans ne s’ensuivrait pas d’un quatorzième avant des lustres. Qu’importent les chiffres, le prochain se fera vers le nid d’amour, espéré depuis son plus jeune âge.
L’amour, le vrai, tout le monde finit par le trouver, un jour dit-on où l’on s’y attend le moins. Alors, il faut tout faire pour ne pas s’y attendre ; s’efforcer de penser à autre chose. Dès que l’obsession se cale entre deux bouts de cervelle, saisir une fourche et désherber dans la gelée rose.
Sur ce petit bout de jardin stérile, deux ailes nervurées frétillent un peu ivres, et bloquent net sur un double vitrage. De l’autre côté, les griffes fixées sur une verticale, deux yeux à facettes observent un corps replié, inerte. Une aubaine pour sa cousine qui aurait aimé pondre sa progéniture dessus. Bien malheureusement, ce corps vit.
L’une des deux a sans doute détecté le gaz carbonique s’échappant par l’entrebâillement de la fenêtre. La pièce est sombre, et les couvertures pèsent sur le corps. Les paupières laissent apercevoir un peu de vert, du marron, du noir, du blanc. Elles s’abaissent et se relèvent, et il n’y a rien derrière. La peau est terne, creuse, jeune par endroits, condamnée ailleurs. Seul un cheveu châtain joue avec ses reflets roux dans des expirations négligeables. Et un soupir. Interminable. Comme ses pensées.
Elle est insensible et capricieuse cette mort. Jamais de vie ou quasiment pas pendant ces longues années. Qu’est-ce qu’une attente moribonde signifie ? Pourquoi souffrir dans la chair et dans l’esprit pendant plus d’un quart de siècle si cette souffrance doit la trouer encore ? Pourquoi ne pas se tuer tout de suite ? Il y a quelque chose à comprendre, évidemment. Une torture gratuite l’étonnerait. Elle est convaincue qu’on l’a oubliée, peut-être, l’a mise en attente. Certaines souffrances urgent, mais elle, n’est un risque pour personne ; pas de chantage, ne rougira pas ses poignets avec son alléchant couteau de boucher pour ameuter l’assistance. Le couteau, la baignoire, hop. Les voisins toqueraient à la porte. N’a plus, bye Agate.
Près de trente ans de blues, avec ou sans cocktail rhum-médicaments, avec ou sans couteau nippon que même les semelles de rangers y passent. Mais comment font les mamies pour se laisser mourir au décès de leur moitié ? Comment font-elles ?
« Je veux être déjà vieille et mourante. Je veux des rides qui sillonnent jusqu’au cœur des organes ; je veux un bon cancer, un jeune, vigoureux, véloce et conquérant. Un truc qui ne demande rien à personne, un anophèle redoutable qui répand l’ombre.
En même temps, ma mort ne serait qu’un calque de mes échecs. L’échec roi sur tous les autres. Le mien, forcément ! Comment tant de gens ont-ils l’égoïsme de rejeter la responsabilité sur autrui, alors qu’on est tous acteurs de nos films ? »
Tels ces humanoïdes sans doute maîtres sur le quartier, et sur leurs chiens. « Viens ici Scorn ! Scorn dehors ! Bouge pas. Au pied ! T’en veux une ? Pas dans la maison ! Qu’il est con ce chien ! » Du coup, un chien de trente kilos qui ne connaît dans toute sa vie que l’enclos du jardin aboie sa rage contre tout ce qui s’éloigne librement du grillage. Et davantage pour soixante kilos répartis en deux chiens.
Les voisins d’en face ont à charge l’animation du quartier, sans compter l’autre tondeur de derrière. La maison Descons, nourrissant un adolescent et un vieux célibataire en jogging qui a la gentillesse de tailler annuellement la haie et d’offrir un bouquet à l’occasion de la fête des manmans, fait parfois plus de bruit qu’un bar pendant la coupe du monde de rugby, mais perd dans le match qui l’oppose au Philarmonique Husqvarna thermique moteur essence sprint 4 temps, cent décibels l’unité, soit environ deux discothèques pour trois voisins. Madame, d’ailleurs, commence sa journée par un vacarme radiophonique dans son automobile, quelques minutes avant l’officiel réveil du voisinage.
De l’autre côté de la rue, de l’autre côté du double vitrage, on reconnaît la chanson, on ignore son interprète quand un an s’est écoulé, et on évalue le haut degré de culture congénitale. Forcé qu’avec tout ça, les soixante kilos de chien entonnent de doucereuses mélopées.
Aucun de ces êtres ne semble heureux.
Agate s’est épandue des heures sur sa chaise longue, coulante comme un munster dans un bol de café, à se sécréter de la vitamine D et de la mélanine. Derrière ses lunettes de soleil, quand les vociférations de Madame couvrent le requiem de ses pensées, elle plisse un œil et abaisse le sourcil. La colère de l’une plus tonitruante que celle de l’autre ! De ces productions théâtrales, on peut déduire qu’être con et irrespectueux n’implique pas obligatoirement être heureux.
-14
– Salut Agate ! Comment va ? Prête pour une semaine de festivités ?
– Salut Jean. Ça va.
– Tu connais la nouvelle ?
– Oui.
– Et ben, oh ! Eh, c’est tout ce que ça te fait ?
– Quoi ?
– Tu n’es pas drôle. Apollon invite tout l’étage pour célébrer son départ à la retraite, chez lui ; la piscine, Agate !
– Je suis folle de joie.
– Bon. C’est dans la bonbonnière du sous-chef que se cache la cagnotte.
– Une idée de cadeau ?
– Non, rien de défini pour l’instant. Des histoires de voyage en France, de week-ends en châteaux. Pourquoi, tu as une idée ?
– C’est une bonne idée, ça, quelques jours en relais château. Non, je pensais à du savon, une cravate, que sais-je, des trucs qui devraient lui servir une bonne dizaine d’années. S’il perd la mémoire, son séjour royal ne lui laissera aucune trace.
– Il peut avoir les deux, le séjour, et les accessoires dans la poche !
– Si encore il s’en servait du savon ! Non mais tu as vu la couleur des postillons ? Tu réalises que ça part au client par la poste ? Ils prêtent du dentifrice dans les salles de bains ?
– Certainement, tu penses ! Il y a même des capotes dans la table de chevet.
– Comment tu sais ça, toi ?
– Tu me prends pour qui ? Je sais énormément de choses figure-toi ! Ah et puis, Solange nous retrouve au restaurant à midi. Je crois qu’il va y avoir du changement.
– C’est-à-dire ?
– Je n’en sais rien, mais ça risque d’être torride.
– Qu’est-ce que tu inventes encore ?
– Fais-moi confiance. Je sens que sa vie va changer de température.
– J’espère, car elle en a bien bavé ces derniers mois.
– Mais ça va s’arranger, je te dis. D’ailleurs, il y en a un qui croit en profiter.
– Le tout petit ?
– Non, Lechat, le grand poilu avec les longues moustaches. Il n’arrête pas de lui ronronner autour ! Quel imbécile quelconque…
– Il a l’air sympathique.
– Il est creux. Ce n’est pas lui qu’elle choisira.
– De quoi tu me parles, Jean ?
– Je pense que Solange va nous annoncer un divorce. Faut toujours faire confiance à son intuition. Surtout la mienne.
– Je ne vois rien de torride là-dedans !… A moins que tu y voies une occasion de t’y faire une place… Eh bien, ton silence en dit long…
– Il lui faut un homme qui l’aime et qui l’admire.
– Tu me surprends. Je ne te savais pas si…
– Romantique ?
– Si vaillant. J’ai peine à croire qu’un homme ait la volonté d’une telle dévotion envers une femme. Il ne manque plus que la neige de pétales, les papillons et le cheval blanc.
– Ta sévérité t’étouffera, Agate. Les hommes sont plus nobles que tu n’imagines.
– Sévère ? Un mariage sur deux est un futur divorce. Ça en fait des cœurs nobles !!
– C’est souvent spectaculaire la façon dont une personne célibataire décrit l’amour…
* * *
Il est de ces orages lumineux, un véritable enchantement. Une sorte de phrase flamboyante qui se coince entre deux volumineux cumulonimbus anthracite. Un rayon de là-haut, une torche mille watts qui nous éblouit la rétine jusqu’au fond du cerveau, portant un message indéchiffrable.
Peut-être aimerait-on croire qu’il y a quelque chose dans les nuages qui veut nous communiquer l’émerveillement de la vie, par la vie-même ou par sa privation. Mais c’est un leurre. Certes, l’amour existe, certains le vivent, ou tout le monde, mais pour combien de temps ?
Aux alentours des trente ans, il est finalement devenu ordinaire de n’avoir pas construit, donc n’avoir pas suffisamment aimé – l’autre, ou soi – pour créer d’autres vies. Mais l’amour est un carburant, le glucose du cœur. C’est un transporteur, un transformateur, la chlorophylle de nos paumes si nous étions des végétaux verts. Nous les cachons dans nos poches, les plaquons contre le nombril, « maman aide-moi » que nous n’avouons jamais. Nous crispons les poings en défense contre tout engagement. Dans la tour de granit, les mains ! Les laisser observer et espérer, mais, de grâce, les protéger du douloureux amour, ce coup de dague planté au plus profond des entrailles, et dont la douleur remonte le long de l’œsophage offrant la gorge sanglante aux charognards. Non, mieux vaut rencontrer l’amour tard, après s’être assuré d’avoir souffert toutes les épreuves et qu’il ne reste plus que celle-là à affronter.
Lechat enfouit son regard dans le cul-de-sac d’une orchidée. Curieux et méfiant, il tourne la fleu

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